Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Date: 20000225

Dossier: 98-9328-IT-I

ENTRE :

STANLEY P. KLIMOWICZ,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Bowman, C.C.I.

[1] Il s'agit d'un appel interjeté à l'encontre d'une cotisation établie pour l'année d'imposition 1996. J'ai pris le jugement en délibéré parce qu'il soulève un point passablement nouveau en ce qui a trait à l'interaction des alinéas 118(1)a) et b) de la Loi de l'impôt sur le revenu.

[2] L'alinéa 118(1)a) prévoit un crédit pour une personne mariée qui subvenait aux besoins de son conjoint. L'alinéa 118(1)b) prévoit ce qui est appelé le crédit “ équivalent du montant pour conjoint ” pour les personnes qui ne sont pas mariées ou qui sont séparées et qui subviennent aux besoins de personnes à charge.

[3] Les alinéas 118(1)a) et b) sont ainsi formulés :

118(1) Crédits d'impôt personnels - Le produit de la multiplication du total des montants visés aux alinéas a) à d) par le taux de base pour l'année est déductible dans le calcul de l'impôt payable par un particulier en vertu de la présente partie pour une année d'imposition :

a) Crédit de personne mariée – si, à un moment de l'année, le particulier est marié et subvient aux besoins de son conjoint, le total de 6 000 $ et du montant calculé selon la formule suivante :

5 000 $ - (C - 500 $)

où :

C représente le plus élevée de 500 $ et de soit le revenu du conjoint pour l'année soit, si le particulier et son conjoint vivent séparés à la fin de l'année pour cause d'échec du mariage, le revenu du conjoint pour l'année pendant le mariage et alors qu'ils ne vivaient pas séparés;

b) crédit équivalent pour personne entièrement à charge [“ équivalent du montant pour conjoint ”] – le total de 6 000 $ et du montant calculé selon la formule suivante :

5 000 $ - (D - 500 $)

où :

D représente le plus élevé de 500 $ et du revenu d'une personne à charge pour l'année,

si le particulier n'a pas droit à la déduction prévue à l'alinéa a) et si, à un moment de l'année :

(i) d'une part il n'est pas marié ou, s'il l'est, ne vit pas avec son conjoint ni ne subvient aux besoins de celui-ci, pas plus que son conjoint ne subvient à ses besoins,

(ii) d'autre part, il tient, seul ou avec une ou plusieurs autres personnes, et habite un établissement domestique autonome où il subvient réellement aux besoins d'une personne qui, à ce moment, remplit les conditions suivantes :

(A) elle réside au Canada, sauf s'il s'agit d'un enfant du particulier,

(B) elle est entièrement à la charge soit du particulier, soit du particulier et d'une ou plusieurs de ces autres personnes,

(C) elle est liée au particulier,

(D) sauf s'il s'agit du père, de la mère, du grand-père ou de la grand-mère du particulier, elle est soit âgée de moins de 18 ans, soit à charge en raison d'une infirmité mentale ou physique;

[4] Les faits sont les suivants. L'appelant et sa conjointe ne s'entendent plus depuis des années et, en fait, l'appelant a adopté au départ la position selon laquelle ils s'étaient séparés le 3 août 1993. Ils ont entamé une procédure de divorce qui est actuellement en cours. Néanmoins, ils ont continué à vivre sous le même toit. Lui vivait au sous-sol et elle, à l'étage. Ils partageaient la cuisine, et il semble qu'ils prenaient leurs repas au même endroit, bien qu'il ne soit pas clair si c'était en même temps. Les conjoints utilisaient la même entrée et le même téléphone.

[5] L'appelant n'a pas insisté sur le fait qu'ils s'étaient séparés en 1993. Il est difficile, mais pas impossible, pour des conjoints de vivre séparés sous le même toit. La jurisprudence a été examinée longuement dans l'affaire Kelner c. R., C.C.I., no 94-868(IT)I, 29 septembre 1995 ([1996] 1 C.T.C. 2687). Je ne crois pas que la preuve soutienne la conclusion selon laquelle les conjoints ne vivaient pas ensemble depuis 1993.

[6] L'appelant soutient qu'il ne vivait pas avec sa conjointe le 31 décembre 1996 parce que ce soir-là, il a été emmené en prison par la police et accusé de voies de fait contre un membre de la famille. Il est demeuré en prison jusqu'au 2 janvier 1997, date à laquelle un juge de paix a accordé une mise en liberté sous caution assortie de certaines conditions, comme celle de résider à un autre endroit (13, Salina, à Stoney Creek), de demeurer loin du foyer conjugal du 25, Ashford Drive, à Hamilton, et de ne pas communiquer avec sa conjointe et ses enfants.

[7] L'appelant soutient qu'à “ un moment de l'année ” (c.-à-d. les dernières heures du 31 décembre 1996, après que la police l'eut arrêté et emmené) il ne vivait pas avec sa conjointe et a, par conséquent, droit au crédit prévu à l'alinéa 118(1)b) relativement à son fils qui vivait au 25, Ashford Drive. Je remarque en passant qu'il satisfait clairement au critère établi à l'alinéa 118(1)a), à l'exception du fait que sa conjointe a fait plus que la limite établie à l'alinéa 118(1)a).

[8] Plusieurs raisons m'empêchent d'admettre l'argument de l'appelant :

(a) Il est faux de dire qu'il “ [n'avait] pas droit à la déduction prévue à l'alinéa a) ” au sens de l'alinéa 118(1)b). Il avait droit à une déduction en vertu de l'alinéa a) parce qu'il était marié et qu'il subvenait aux besoins de sa conjointe en 1996. Par conséquent, il avait droit à une déduction égale au total de 6 000 $ et du montant calculé selon la formule prévue à l'alinéa a). Le fait que le dernier calcul en vertu de l'alinéa a) équivaille finalement à zéro ne signifie pas que son droit à une déduction en vertu de l'alinéa a) est éteint. J'ai soumis cet argument à l'avocat de l'intimée qui l'a rejeté, peut-être sans se rendre compte qu'il appuyait sa position. Il s'agissait néanmoins de son argument le plus solide.

(b) Si l'appelant ne vivait pas avec sa conjointe le 31 décembre 1996 parce qu'il se trouvait en prison, il ne peut être considéré qu'il tenait et habitait un établissement domestique autonome et subvenait réellement aux besoins de son fils dans cet établissement.

Soit il vivait avec sa conjointe le 31 décembre 1996, auquel cas il avait droit au crédit en vertu de l'alinéa a) et non de l'alinéa b), soit il a passé la veille du Jour de l'an et le Jour de l'an dans la prison locale, laquelle, bien qu'autonome, pourrait difficilement être qualifiée d'établissement domestique et ce n'était certainement pas l'endroit où l'appelant subvenait réellement aux besoins de son fils.

(c) Les deux arguments susmentionnés semblent relativement évidents. Une question plus difficile se présenterait si, le 31 décembre 1996, l'appelant et son fils étaient partis et avaient emménagé dans un appartement. Bien qu'il eût probablement satisfait au critère du sous-alinéa 118(1)b)(ii), je ne crois pas qu'il “ n'a pas droit à la déduction prévue à l'alinéa a) ”. Il n'aurait toujours pas droit par conséquent au crédit en vertu de l'alinéa 118(1)b).

[9] En 1997, la Loi de l'impôt sur le revenu a été modifiée afin de remplacer les mots “ le particulier n'a pas droit à la déduction prévue à l'alinéa a) ” par “ le particulier ne demande pas de déduction [...] par l'effet de l'alinéa a) ”. Cela clarifie quelque peu le fait que les alinéas a) et b) s'excluent mutuellement, mais je crois qu'en tant que question d'interprétation législative avant la modification, ils l'étaient en tout état de cause.

[10] L'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 25e jour de février 2000.

“ D.G.H. Bowman ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 16e jour d'août 2000.

Benoît Charron, réviseur

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