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Date: 19980213

Dossier: 96-1699-IT-I

ENTRE :

AYAD S. KAMIL,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Mogan, C.C.I.

[1] L'appelant, qui est ingénieur électricien, habite près de la ville de Windsor (Ontario), mais il exerce un emploi dans l'État du Michigan. En 1992, il avait commencé à travailler pour la Fabricating Engineers Inc. (l' « employeur » ), une société exploitant une entreprise au Michigan. En 1992, l'employeur n'avait pas de régime de pension, mais, en février 1994, il avait offert une forme de régime de pension qu'on appelle aux États-Unis un régime « 401K » . Apparemment, le régime 401K est souple en ce sens que, dans certaines situations, l'employeur et l'employé cotisent tous les deux au régime, mais, dans d'autres situations, seul l'employé y cotise.

[2] L'appelant a témoigné que, dans les circonstances particulières de son emploi, seuls les employés cotisaient au régime 401K. Il avait décidé de verser une cotisation de 200 $ par mois. Ainsi, pour les 11 mois qu'il restait en 1994, l'appelant avait cotisé 2 200 $ (américains) au régime 401K administré par son employeur. D'après le témoignage de l'appelant, témoignage qui n'a pas été contesté, la cotisation de 2 200 $ au régime est déductible aux fins de l'impôt sur le revenu des États-Unis.

[3] Comme il habite au Canada, l'appelant est imposable au Canada sur son revenu de toutes provenances. En faisant sa déclaration de revenus pour 1994 aux fins de l'impôt sur le revenu du Canada, il avait indiqué son revenu d'emploi brut, puis avait déduit la somme de 2 200 $, présumant qu'elle était déductible au Canada. Il y a une légère incohérence dans les circonstances du présent appel, car, bien que l'appelant ait déclaré son revenu aux fins de l'impôt sur le revenu du Canada en dollars canadiens, il appert qu'il a déduit la somme de 2 200 $ au titre de la cotisation à son régime de pension 401K comme s'il s'agissait d'une somme en dollars canadiens.

[4] Dans la nouvelle cotisation établie à l'égard de l'appelant pour 1994, le ministre du Revenu national a ajouté la somme de 2 200 $ au revenu déclaré par l'appelant, présumant lui aussi qu'il s'agissait d'une somme en dollars canadiens. L'appelant a porté cette cotisation en appel. La seule question est de savoir si l'appelant est tenu d'inclure la somme de 2 200 $ dans le calcul de son revenu pour 1994. L'appelant a opté pour la procédure informelle.

[5] Aucun élément de preuve n'indique que le régime 401K adopté par l'employeur du Michigan est un régime que le ministre du Revenu national avait agréé. Je conclus donc que le régime 401K n'est pas un « régime de pension agréé » au sens de l'article 248 de la Loi de l'impôt sur le revenu. Le revenu d'emploi est assujetti aux dispositions de l'article 6 de la Loi de l'impôt sur le revenu, qui se lit en partie comme suit :

6(1) Sont à inclure dans le calcul du revenu d'un contribuable tiré, pour une année d'imposition, d'une charge ou d'un emploi, ceux des éléments suivants qui sont applicables :

a) la valeur de la pension, du logement et autres avantages quelconques qu'il a reçus ou dont il a joui au cours de l'année au titre, dans l'occupation ou en vertu d'une charge ou d'un emploi, à l'exception des avantages suivants :

(i) ceux qui résultent des cotisations de son employeur à un régime de pension agréé, un régime d'assurance collective contre la maladie ou les accidents, un régime privé d'assurance-maladie, un régime de prestations supplémentaires de chômage, un régime de participation différée aux bénéfices ou une police collective d'assurance temporaire sur la vie,

(ii) ceux qui découlent d'une convention de retraite, d'un régime de prestations aux employés ou d'une fiducie d'employés,

[...]

Les termes de l'alinéa a) « la valeur de [...] et autres avantages quelconques qu'il a reçus ou dont il a joui au cours de l'année au titre, dans l'occupation ou en vertu d'une charge ou d'un emploi [...] » ont été interprétés par les tribunaux d'une façon très large au cours des 40 dernières années. Malgré cette large interprétation, il y avait une exemption expresse dans le cas d'une cotisation à un « régime de pension agréé » au sens du sous-alinéa 6(1)a)(i). Toutefois, un régime de pension agréé est, selon la définition qui en est donnée à l'article 248, un régime agréé par le ministre :

248(1) Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente loi.

[...]

« régime de pension agréé » S'entend d'un régime de pension que le ministre a agréé pour l'application de la présente loi et dont l'agrément n'a pas été retiré.

En l'absence d'une preuve indiquant que le régime 401K auquel cotisait l'appelant avait été agréé par le ministre, je dois conclure que ce régime n'avait pas été agréé et qu'il ne s'agirait donc pas d'un « régime de pension agréé » au sens de la Loi de l'impôt sur le revenu du Canada. Dans ce cas, une cotisation à ce régime ne serait pas visée par les exceptions prévues au sous-alinéa 6(1)a)(i).

[6] Dans le calcul du revenu tiré d'un emploi, des déductions sont permises en vertu de l'article 8, mais il y a des restrictions importantes. L'alinéa 8(1)m) renferme la disposition suivante, qui permettrait la déduction d'une cotisation à un régime de pension agréé :

8(1) Sont déductibles dans le calcul du revenu d'un contribuable tiré, pour une année d'imposition, d'une charge ou d'un emploi ceux des éléments suivants qui se rapportent entièrement à cette source de revenus, ou la partie des éléments suivants qu'il est raisonnable de considérer comme s'y rapportant :

[...]

m) le montant que le contribuable peut déduire en application du paragraphe 147.2(4) dans le calcul de son revenu pour l'année au titre des cotisations versées à des régimes de pension agréés;

Comme je l'ai déjà mentionné, si le régime 401K n'est pas un régime de pension agréé, l'alinéa 8(1)m) ne permet pas d'accorder une mesure de redressement à l'appelant. Enfin, le paragraphe 8(2) prévoit la véritable restriction quant au droit de l'appelant à une déduction :

8(2) Seuls les montants prévus au présent article sont déductibles dans le calcul du revenu d'un contribuable tiré, pour une année d'imposition, d'une charge ou d'un emploi.

[7] L'appelant a soutenu qu'il serait assujetti à une double imposition s'il n'était pas autorisé à déduire sa cotisation au régime 401K. Il a fait remarquer que, pour 1994, sa cotisation au régime 401K aurait été déductible aux fins de l'impôt sur le revenu des États-Unis mais que, si elle n'était pas considérée comme déductible au Canada, il se trouverait à payer de l'impôt sur cette somme de 2 200 $ au Canada. À sa retraite, les paiements qui lui seraient faits sur le régime 401K seraient assujettis à l'impôt aux États-Unis, mais il y a une chance que ces paiements ne soient pas assujettis à l'impôt au Canada, car les cotisations auraient été imposées sur une base annuelle, à mesure qu'elles étaient versées. Je ne puis déterminer dans quelle position sera le contribuable à sa retraite; il pourrait effectivement y avoir un élément de double imposition à cette époque. En soi, ce fait ne me permettrait pas de déroger à l'application de ce que je considère comme le sens ordinaire de la Loi de l'impôt sur le revenu. Il peut y avoir une disposition dans la Convention Canada-États-Unis en matière d’impôts qui permettrait d'accorder une mesure de redressement à l'appelant, car un des principaux buts de cette convention est d'éviter la double imposition.

[8] Eu égard aux circonstances de l'espèce, je suis obligé de rejeter l'appel, car la déduction particulière de 2 200 $ relative au régime 401K n'est pas permise en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu du Canada.

[9] Dans la réponse à l'avis d'appel, l'intimée déclare au paragraphe 7 que l'équivalent en dollars canadiens des 2 200 $ américains versés par l'appelant au régime 401K était de 3 004,98 $. L'intimée poursuit en indiquant que le montant de 3 004,98 $ est le montant qui aurait dû être ajouté au revenu déclaré par l'appelant pour 1994 et non le montant de 2 200 $ que le ministre avait par erreur présumé être une somme en argent canadien. Malgré cette erreur, l'intimée ne demande pas que le revenu de l'appelant soit augmenté d'un montant qui représente la différence entre l'équivalent en dollars canadiens des 2 200 $ américains et le montant de 2 200 $ qui a effectivement été ajouté au revenu déclaré par l'appelant. Seule la somme de 2 200 $ est en litige. S'il en est ainsi, l'appelant bénéficie d'un avantage représentant environ 1 000 $. Par ailleurs, l'appelant ne peut retirer quelque avantage que ce soit de l'appel en instance, car, en vertu de la disposition pertinente de la Loi de l'impôt sur le revenu, il n'est pas autorisé à déduire la somme de 2 200 $. L'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 13e jour de février 1998.

« M. A. Mogan »

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 19e jour de juin 1998.

Isabelle Chénard, réviseure

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