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Date: 20001128

Dossier: 1999-750-IT-G

ENTRE :

DARSHEN NARANG,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Beaubier, C.C.I.

[1]            Le présent appel, interjeté en vertu de la procédure générale, a été entendu à Vancouver, en Colombie-Britannique, le 20 novembre 2000. L'appelant a témoigné et a appelé William Andow, un employé à la retraite de Développement des ressources humaines Canada, et David Cooper, qui, à l'époque pertinente, était vérificateur auprès de Revenu Canada, Impôt et qui a procédé à une vérification de l'avoir net de l'appelant. L'intimée n'a pas appelé de témoin.

[2]            L'appelant a interjeté appel à l'encontre des cotisations pour les années 1992, 1993 et 1994. À l'audience, les parties ont reconnu qu'en date du 20 novembre 2000, l'appel de l'année 1992 devrait être rejeté, puisqu'il est fondé sur une cotisation prescrivant qu'aucun impôt n'est payable et ont reconnu que le montant en litige concernant l'appel de 1993 était de 98 816 $ et que le montant en litige concernant l'appel de 1994 était de 31 470 $.

[3]            L'appel de l'appelant interjeté à l'encontre de la cotisation de 1992 est annulé pour les motifs qui précèdent.

[4]            Les paragraphes 5 à 12 inclusivement de la réponse à l'avis d'appel sont ainsi rédigés :

                                [TRADUCTION]

5.              L'appelant a déclaré un revenu total selon les montants suivants :

Année d'imposition

Revenu total déclaré

1992

(3 962 $)

1993

17 896 $

1994

20 696 $

6.              En établissant une nouvelle cotisation à l'égard de l'appelant pour les années d'imposition 1992, 1993 et 1994, le ministre a augmenté, des montants suivants, le revenu total de l'appelant :

Année d'imposition

Augmentation du revenu total

    1992

zéro       

    Revenu non déclaré de 1993

108 352 $                                    

    Revenu non déclaré de 1994

334 747 $ (sic)

    Retrait du REER

20 000 $

    Total

354 749 $

7.              En établissant ainsi une nouvelle cotisation à l'égard de l'appelant, le ministre s'est notamment fondé sur les hypothèses suivantes :

                Cotisation de 1992 prescrivant qu'aucun impôt n'est payable

a)              l'intimée, par avis de nouvelle cotisation daté du 9 octobre 1998, n'a pas fixé d'impôt fédéral en ce qui concerne l'année d'imposition 1992 de l'appelant;

b)             aucun avis de nouvelle cotisation concernant l'année d'imposition 1992 de l'appelant n'a été établi après le 9 octobre 1998;

                Avoir net

c)              en déclarant son revenu pour les années d'imposition 1993 et 1994, l'appelant n'a pas inclus tout le revenu reçu au cours de ces années;

d)             le revenu total de l'appelant pour les années d'imposition 1993 et 1994 a été déclaré en moins de 108 352 $ et de « 354 749 $ » (sic) respectivement;

e)              les montants déclarés en moins ont été déterminés grâce à la méthode de l'avoir net (Une copie de la Déclaration de la valeur nette personnelle est jointe à titre d'annexe A.);

f)              l'appelant est le propriétaire et l'exploitant de « Narang Farms » et de « S & D Narang Farms » , deux entreprises non constituées en personne morale;

g)             au cours de l'année d'imposition 1993, l'appelant n'a pas reçu plus de 2 725 $ de la Insurance Corporation of British Columbia en ce qui concerne le règlement d'une demande d'indemnité pour une blessure subie lors d'un accident d'automobile;

h)             les livres et les registres de l'appelant ne permettaient pas de déterminer correctement l'impôt payable pour les années d'imposition 1993 et 1994;

                Retraits du REER inclus dans le revenu

i)               pendant la période allant du 1er janvier 1994 au 3 juin 1994, l'appelant possédait la maison située au 31442 du chemin King, Abbotsford, en Colombie-Britannique, et y résidait;

j)               le 31 octobre 1994, l'appelant a fait une demande en vertu du Régime d'accession à la propriété (le « Régime » ) et a retiré 20 000 $ ( « les fonds » ) de son REER en vertu du Régime;

k)              l'appelant a avancé les fonds à 458349 B.C. Ltd.;

l)               les fonds n'ont pas servi à l'achat d'une habitation admissible ainsi qu'elle est définie par le Régime;

m)             les fonds n'ont pas été remis dans le REER de l'appelant dans le délai prévu par le Régime;

                Pénalités du paragraphe 163(2)

n)             l'appelant, sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde dans l'exercice d'une obligation prévue à la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, ch. 1 (5e suppl.), avec ses modifications (la « Loi » ), a fait un faux énoncé ou une omission dans ses déclarations de revenus produites pour les années d'imposition 1993 et 1994 ou y a participé, consenti ou acquiescé, ce qui a fait en sorte que l'impôt qui était payable selon les renseignements fournis par l'appelant dans ses déclarations de revenus produites pour ces années était inférieur à l'impôt qu'il devait réellement;

o)             en conséquence de la déclaration en moins du revenu, le ministre a imposé les pénalités suivantes à l'appelant en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi pour les années d'imposition 1993 et 1994 :

Année d'imposition

Pénalité imposée

1993

14 870 $

1994

5 042 $

B.             QUESTIONS EN LITIGE

8.              Il s'agit de déterminer si :

a)              la Cour canadienne de l'impôt a compétence pour entendre l'appel portant sur l'année d'imposition 1992;

b)             le revenu de l'appelant pour les années d'imposition 1993 et 1994, ainsi qu'il a été déclaré, a été déclaré en moins;

c)              le ministre a correctement imposé les pénalités en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi pour ces années.

C.             DISPOSITIONS LÉGISLATIVES INVOQUÉES

9.              Il invoque les articles 3, 9, 146.01 et 152, les paragraphes 146(8), 146(12) et 163(2) ainsi que l'alinéa 56(l)h.1) de la Loi.

D.             MOYENS INVOQUÉS ET REDRESSEMENT DEMANDÉ

10.            Le ministre soutient que la Cour canadienne de l'impôt n'a pas compétence pour entendre l'appel portant sur l'année d'imposition 1992, puisque l'avis de cotisation pour cette année n'était pas une cotisation d'impôt, mais bien une notification selon laquelle aucun impôt n'était payable.

11.            Il soutient de plus que l'appelant a déclaré en moins son revenu total des années d'imposition 1993 et 1994 de 108 352 $ et de « 354 747 $ » (sic) respectivement.

12.            Il soutient de plus que les pénalités imposées à l'appelant pour les années d'imposition 1993 et 1994 l'ont correctement été, conformément au paragraphe 163(2) de la Loi, parce que l'appelant, sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde dans l'exercice d'une obligation prévue à la Loi, avait produit un faux énoncé ou commis une omission dans ses déclarations de revenus produites pour les années d'imposition 1993 et 1994 ou y avait participé, consenti ou acquiescé, ce qui avait fait en sorte que l'impôt qui était payable, selon les renseignements fournis par l'appelant dans ses déclarations de revenus produites pour ces années, était inférieur à l'impôt qu'il devait réellement pour ces années au sens du paragraphe 163(2) de la Loi.

[5]            Les hypothèses figurant aux sous-paragraphes 7a), b), c), e), f), g), h), i), j), k), l) et m) n'ont pas été réfutées par la preuve. En ce qui a trait au sous-paragraphe f), l'appelant était un associé au sein de S & D Narang Farms. Les montants totaux décrits au paragraphe 11 de la réponse ont été réduits au cours de négociations ultérieures tenues avant que l'audience devant cette cour n'ait lieu. L'appelant a contesté un certain nombre d'éléments, qui seront examinés. Toutefois, il n'a pas appelé de témoin au soutien des éléments pour lesquels ces témoins étaient disponibles et il n'a pas indiqué dans son témoignage que ces témoins n'étaient pas disponibles. Par conséquent, cette cour tire une inférence défavorable quant au manque de corroboration à la fois en ce qui concerne les documents et les témoins. Les éléments précis contestés par l'appelant sont examinés aux paragraphes qui suivent.

[6]            L'appelant a reconnu que le retrait de la somme de 20 000 $ de son REER en 1994, visé par les sous-paragraphes 7i) à m) inclusivement, n'avait pas été correctement effectué. Il a indiqué dans son témoignage que son institution financière aurait dû mieux le conseiller, et cela peut ou non être le cas. Néanmoins, ce retrait est imposable.

[7]            Une cotisation a été établie à l'égard de l'appelant relativement à un montant de 10 100 $, en 1993, lequel avait trait, a-t-il déclaré tout au long du processus d'établissement de la cotisation et à l'appel, à un prêt consenti à son beau-frère. Toutefois, il n'y a aucun document portant sur la transaction prétendue, et le beau-frère n'a pas témoigné, en dépit du fait que cette question et la nécessité d'une corroboration aient été claires pour l'appelant dès 1995. Par conséquent, les allégations de l'appelant portant sur ce montant ne sont pas acceptées.

[8]            L'appelant a payé 26 100 $ à la Banque de Nouvelle-Écosse en 1993, prétendument pour rembourser un prêt à une tierce partie. Il a déclaré ne pas se rappeler qui était la tierce partie, et c'est ce qu'il a indiqué dans son témoignage à cette cour. Quant à cette allégation il n'a pas assigné de témoins provenant de la Banque de Nouvelle-Écosse et n'a pas non plus assigné quiconque à produire des documents de cette banque. La Cour ne croit pas cette allégation. L'appelant n'est pas aisé au point de ne pas connaître tous les détails concernant un montant s'élevant à 26 100 $. Toutes les allégations de l'appelant à ce sujet sont incroyables.

[9]            L'appelant soutient également s'être occupé de la manière suivante d'un héritage de 60 000 $CAN en Inde reçu par sa conjointe : un voyageur s'en allant en Inde lui payait 5 000 $CAN à Abbotsford. L'appelant indiquait à son beau-frère en Inde (qui détenait personnellement 60 000 $ en roupies) de donner 5 000 $CAN en roupies au voyageur en Inde. De cette manière, les deux parties économisaient le taux de change. Cette histoire n'est pas acceptée pour un certain nombre de raisons : d'abord, l'héritage revenait à sa conjointe, et non pas à lui. Ensuite, sa conjointe (maintenant, son ex-conjointe) n'a pas témoigné. Troisièmement, aucun des prétendus voyageurs n'a témoigné. Quatrièmement, aucune homologation ou autre document attestant l'héritage prétendu n'a été déposé devant la Cour. L'appelant a indiqué dans son témoignage qu'il n'avait pas appelé son ex-conjointe parce qu'il croyait qu'elle ne témoignerait pas en sa faveur. Il y a une réponse à cela : la vérité n'aurait pas nuit à sa cause si ce qu'il a prétendu avait été vrai.

[10]          Le dernier montant en litige est de 3 620,11 $ et, selon l'appelant, il a été reçu en 1993 de la Insurance Corporation of British Columbia ( « ICBC » ). L'appelant a présenté à la Cour différents documents provenant de la ICBC, dont la pièce A-2. Toutefois, l'année civile exacte où les paiements ont eu lieu n'est pas précisée dans cette pièce ou ailleurs, et ce, en dépit du fait que les documents avaient été obtenus de la ICBC en vue d'établir l'année des paiements. En conséquence, il n'y a aucune corroboration quant à ce montant, et la demande de l'appelant n'est pas acceptée.

[11]          En conséquence, aucune des allégations de l'appelant n'est acceptée par la Cour. Il n'a pas fourni de corroboration acceptable, bien qu'il savait que c'était nécessaire. Par conséquent, les appels interjetés à l'encontre des cotisations d'impôt des années 1993 et 1994 sont rejetés.

[12]          En statuant sur l'imposition de pénalités, le juge Strayer a déclaré, dans l'affaire Lucien Venne c. La Reine, C.F. 1re inst., no T-815-82, 9 avril 1984, à la page 19 (84 DTC 6247, à la page 6256), que :

Quant à la possibilité d'une faute lourde, j'ai conclu, après hésitation, qu'elle n'a pas non plus été établie ici. La « faute lourde » doit être interprétée comme un cas de négligence plus grave qu'un simple défaut de prudence raisonnable. Il doit y avoir un degré important de négligence qui corresponde à une action délibérée, une indifférence au respect de la loi. [...]

C'est le cas en l'espèce. Pour 1993, l'appelant a signé sa déclaration de revenus en octobre 1994. Il a déclaré un revenu d'environ 17 000 $. Le montant en litige représente environ cinq fois ce montant. En 1994, le représentant autorisé de l'appelant a signé sa déclaration de revenus, et le montant en litige en cour est d'environ 50 p. 100 supérieur à ce qu'il a déclaré. Toutefois, il a également omis de déclarer la vente d'un bien agricole, en 1994, pour 549 292,37 $. Les divergences sont très importantes; il y a plusieurs omissions de déclarer des montants. En outre, même si une partie de son témoignage avait été acceptée comme avérée, les conclusions ne lui auraient pas été favorables en raison de son défaut de déclarer les sommes qu'il a retirées de son REER en 1994 et les montants reçus en 1993 quant à l'héritage prétendu de sa conjointe. Pour ces motifs, le fait pour l'appelant de ne pas déclarer son revenu équivalait à un geste intentionnel et traduisait une indifférence complète de sa part quant à la question de savoir s'il se conformait à la loi ou non. Par conséquent, son appel interjeté à l'encontre de l'imposition des pénalités est rejeté.

[13]          Les appels sont rejetés. Des dépens entre parties sont accordés à l'intimée.

Signé à Ottawa, Canada, ce 28e jour de novembre 2000.

« D. W. Beaubier »

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 27e jour d'avril 2001.

Mario Lagacé, réviseur

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