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Date: 20000613

Dossiers : 1999-194-IT-I; 1999-245-IT-I

ENTRE :

DANIEL DUMAS,

LES ENTREPRISES DANIEL DUMAS INC.,

appelants,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

Intimée.

Motifs du jugement

Le juge P.R. Dussault, C.C.I.

[1]            Ces appels ont été entendus ensemble selon la procédure informelle de cette Cour en vertu du choix produit tant par la société appelante que par l'appelant Daniel Dumas dans leur avis d'appel. La requête de l'appelant Daniel Dumas, en date du 13 avril 1999, demandant que la procédure générale régisse ses appels a été rejetée par une ordonnance rendue le 14 juillet 1999.

[2]            L'appelante, Les Entreprises Daniel Dumas Inc. ( « EDD Inc. » ) interjette appel des cotisations établies pour les années d'imposition 1994, 1995 et 1996, lesquelles se terminent le 31 mai de chaque année. Les questions en litige portent sur des revenus additionnels de 14 084 $, 95 636 $ et 83 073 $ pour chacune de ces années respectivement ainsi que sur les pénalités s'y rapportant cotisées en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ). Les revenus ajoutés et non déclarés proviendraient de la société Les Tourbes Nirom Peat Moss Inc. ( « Nirom Inc. » ).

[3]            Les appels de Daniel Dumas concernent des cotisations pour les années d'imposition 1993, 1994 et 1995. Selon des amendements apportés à la Réponse amendée à l'avis d'appel par l'avocate de l'intimée lors de l'audition, le litige porte sur des montants de 4 512 $, de 24 108 $ et de 90 227 $ ajoutés au revenu de l'appelant pour chacune des années 1993, 1994 et 1995 respectivement ainsi que sur les pénalités s'y rapportant cotisées en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi. Les montants ajoutés au revenu de l'appelant l'ont été à titre d'avantages imposables reçus de EDD Inc.

[4]            Daniel Dumas est actionnaire et administrateur unique de EDD Inc. Cette société s'occupe de la vente et de la mise en marché de la tourbe produite par quatre sociétés, lesquelles sont actionnaires de Nirom Inc. Comme actionnaire de l'une de quatre sociétés, Daniel Dumas possède un intérêt indirect de 20 % dans Nirom Inc. Les revenus de EDD Inc. proviennent de Nirom Inc. et lui sont versés par cette dernière soit à titre de commissions, soit à titre de frais de transport ou encore pour prêt de service. Tout comme pour EDD Inc., l'année d'imposition de Nirom Inc. se termine le 31 mai de chaque année.

[5]            Aux alinéas 7. c) et d) de la Réponse amendée à l'avis d'appel dans le dossier de EDD Inc. (1999-245(IT)I), on retrouve les allégations suivantes :

7.              Pour établir ces nouvelles cotisations en litige, le ministre a tenu notamment pour acquis les faits suivants :

c)              le bilan de l'appelante de chacune des années était balancé avec le compte « Dû à un administrateur » [1];

d)             le compte « Dû à l'administrateur » aux livres de l'appelante étant fictif;

i)               les dépenses de l'appelante étaient surévaluées par des dépenses personnelles de l'actionnaire;

                                                ii)              et les revenus de l'appelante étaient sous-évalués;

[6]            Monsieur Daniel Dumas et monsieur Richard Brillant, c.a. ont témoigné pour les appelants. Madame Marie-Claude Marcoux, conseillère technique ayant effectué la vérification et madame Jeannine Claveau, agent des appels ont témoigné pour l'intimée.

[7]            Suite à des calculs effectués par monsieur Richard Brillant, c.a., comptable des appelants à partir des états financiers de EDD Inc. et de Nirom Inc. (pièce A-1), monsieur Dumas reconnaît que certains montants de revenus reçus par EDD Inc. n'ont pas été déclarés alors qu'ils ont fait l'objet de déductions par Nirom Inc. Pour l'année d'imposition 1994 de EDD Inc. il s'agit d'un montant additionnel de 1 487 $ qui aurait été reçu comme revenu de transport. Pour l'année d'imposition 1995, il s'agit d'un montant additionnel de 83 593 $ qui aurait été reçu par EDD Inc. à titre de commissions. Pour l'année d'imposition 1996 de EDD Inc. il s'agit d'un montant additionnel de 3 470 $ qui avait également été reçu à ce titre.

[8]            Monsieur Dumas reconnaît aussi que les mêmes montants doivent être inclus dans son revenu personnel pour chacune des années 1993, 1994 et 1995 respectivement.

[9]            Monsieur Dumas souligne le fait qu'en tout temps la société EDD Inc. et lui-même ont agi de bonne foi et qu'il y a eu admission que les montants précédemment mentionnés ont été reçus mais n'ont pas été déclarés de sorte que les pénalités cotisées devraient être annulées dans les deux cas.

[10]          Lors de son témoignage, monsieur Daniel Dumas s'est d'abord plaint de l'absence de communication véritable avec madame Marcoux lors de la vérification effectuée au cours de l'automne 1996 et de l'hiver 1997. Selon lui, lors de la vérification, on aurait considéré toutes les sommes déposées à la banque comme des revenus alors qu'il aurait reçu des montants non imposables notamment à titre de dommages en rapport avec un accident subi par son épouse en Virginie. Toutefois, aucune preuve précise de la réception de telles sommes n'a été apportée par monsieur Dumas. La relation entre ces sommes et les montants cotisés n'a pas, non plus, été établie. Monsieur Dumas s'est référé également aux dépenses initialement refusées et qui auraient fait l'objet d'une entente suite aux oppositions aux cotisations en 1998.

[11]          En ce qui concerne les revenus non déclarés, monsieur Dumas a affirmé qu'on lui aurait dit « que tout ce qui ne balançait pas serait plogué dans les revenus » et que « ça se réglerait ailleurs » . Il a affirmé également avoir fait parvenir des documents volumineux sur l'ensemble des transactions et qu'on aurait refusé de rencontrer son représentant au prétexte que le dossier était déjà fermé.

[12]          À l'aide de la pièce A-1 et plus particulièrement des trois premières pages de ce document, monsieur Dumas a ensuite retracé les seules sommes qui, selon lui, n'avaient pas été incluses dans le revenu de EDD Inc. mais qui auraient fait l'objet d'une déduction par Nirom Inc., soit à titre de commissions ou de frais de transport. Il s'agit des montants de 1 487 $, de 83 593 $ et de 3 470 $ déjà mentionnés pour chacune des années d'imposition 1994, 1995 et 1996 de EDD Inc. Les explications fournies sur la non inclusion de ces sommes dans le revenu de EDD Inc. sont demeurées assez vagues. En ce qui concerne 1994 et 1995, ma compréhension du témoignage de monsieur Dumas est que les revenus non inclus représenteraient des ajustements de fin d'année imputés aux commissions en 1994 et au transport en 1995 et dont les montants auraient été payés plus tard. Pour 1996, le montant de 3 470 $ représenterait un paiement additionnel d'un acompte sur commissions. Il y en aurait eu 27 au lieu de 26 et on aurait simplement omis de l'ajouter au revenu de l'année.

[13]          En contre-interrogatoire, monsieur Dumas a dit être le seul administrateur de EDD Inc. et avoir été responsable de la tenue des livres bien qu'il n'ait pas procédé à faire toutes les inscriptions lui-même au cours des années en litige. Une autre personne s'en serait occupé en 1995 et 1996. Toutefois, il était le seul signataire des chèques. Quant à Nirom Inc., monsieur Dumas était l'un des quatre administrateurs. Il ne s'occupait pas de l'inscription des données mais était le signataire des chèques.

[14]          L'avocate de l'intimée a fait déposer en preuve par monsieur Dumas plusieurs documents dont les états financiers annuels de EDD Inc. pour les années en cause (pièces I-2, I-3 et I-4), un relevé des transferts effectués par EDD Inc. à monsieur Dumas pour la période du 1er janvier au 31 décembre 1993 (pièce I-1), un relevé des recettes et déboursés concernant le transport de tourbe par EDD Inc. pour Nirom Inc. de juin 1994 à mai 1995 (pièce I-5), ainsi qu'un chèque au montant de 6 518,68 $ daté du 31 mai 1995 fait par Nirom Inc. à l'ordre de EDD Inc. (pièce I-6). L'avocate de l'intimée a ainsi tenté de démontrer que seul le montant de 6 518,68 $ a été inclus au revenu de EDD Inc. comme représentant les recettes de transport pour le mois de mai 1995 alors qu'un montant de 95 568,68 $ aurait dû être inclus à ce titre, soit une différence de 89 050 $.

[15]          Monsieur Richard Brillant est le comptable des appelants. Il est associé au Groupe Malette Maheu. Il est intervenu dans les dossiers des appelants vers la fin de la vérification par madame Marcoux de Revenu Canada en 1998. Toutefois, c'est monsieur Raymond Malenfant du même groupe qui procédait à une mission d'examen des états financiers de EDD Inc. à partir des données fournies par monsieur Dumas aux cours des années en litige. C'est principalement avec lui que madame Marcoux a eu des communications dans le cadre de sa vérification.

[16]          Selon monsieur Dumas, monsieur Malenfant aurait eu des troubles cardiaques sérieux à deux reprises et ne travaillerait plus qu'à temps partiel. C'est pour cette raison que les dossiers des appelants auraient été transférés à monsieur Brillant au début de 1998. Selon monsieur Dumas, c'est aussi la raison pour laquelle c'est monsieur Brillant et non monsieur Malenfant qui a été appelé à témoigner.

[17]          Lors de son témoignage, monsieur Brillant a tenté d'expliquer à l'aide de la pièce A-1 préparée par lui-même que seuls les montants admis de 1 487 $, de 83 593 $ et de 3 470 $ n'avaient pas été déclarés par EDD Inc. pour chacune des années 1994, 1995 et 1996 respectivement. Ainsi, en ce qui concerne l'année d'imposition 1995 dans les états financiers comparatifs 1995-1994 de Nirom Inc. (pièce A-1 page 13), on constate que les frais de transport se seraient élevés à 1 207 102 $ alors que les commissions payées auraient été de 186 615 $[2]. Aux états financiers comparatifs 1996-1995 de Nirom Inc. (pièce A-1 page 23), on indique plutôt des frais de transport de 1 293 102 $ et des commissions de 100 615 $ pour 1995. Selon monsieur Brillant, la différence de 86 000 $ ajoutée aux frais de transport de Nirom Inc.n'a pas, sous réserve d'un rajustement, été incluse dans le revenu de EDD Inc. Pourtant, dans cet exercice de conciliation qui est la pièce A-1, les revenus de commissions inclus dans le revenu de EDD Inc. pour l'année d'imposition 1995 auraient été de 75 435 $ alors que les revenus de transport n'auraient été que de 1 207 102 $ (pièce A-1 page 2). À la même page, il est indiqué que Nirom Inc. aurait réclamé une dépense de 161 745 $ au titre des commissions payées[3]. Si on soustrait un montant de 2 717 $ qui représenterait des commissions payées à des tiers, le solde de 159 028 $ aurait dû être inclus dans le revenu de EDD Inc. Or, comme seul un montant de 75 435 $ a été inclus, monsieur Brillant a établi le revenu de commissions non déclaré à 83 593 $. Par ailleurs, il a établi la dépense de transport de Nirom Inc. à 1 207 102 $ soit au même montant que celui qu'il indique comme étant le revenu de transport de EDD Inc. (pièce A-1, pages 2 et 10). Pourtant, tel que mentionné plus haut, si le montant de 1 207 102 $ est celui indiqué comme frais de transport de Nirom Inc. pour 1995 dans ses états comparatifs 1995-1994 (pièce A-1, page 13) c'est le montant de 1 293 102 $ que l'on retrouve aux états comparatifs 1996-1995 (pièce A-1, page 23).

[18]          Toutefois, la pièce I-5 indique pour EDD Inc. des recettes totales de transport de 1 123 018,68 $ pour l'exercice terminé le 31 mai 1995. Ce montant comprend des recettes de 6 518,68 $ inscrites pour le transport de mai 1995. Or, la pièce I-6 fait état d'un total de 95 568,68 $ pour le transport de mai 1995. Selon ces deux derniers documents, les recettes totales pour l'année 1995 au titre du transport devraient donc se chiffrer à 1 212 068,68 $ et non à 1 123 018,68 $ comme le laisse voir la pièce I-5 ou encore à 1 207 102 $ chiffre que l'on retrouve aux états financiers comparatifs 1995-1994 (voir pièce A-1 pages 2, 10, 12 et 13). Ainsi, selon ces deux seuls documents, les recettes de transport pour l'exercice terminé le 31 mai 1995 seraient donc de 4 966,68 $ supérieures à ce qui est indiqué aux états financiers. Ce montant devrait normalement s'ajouter au montant non déclaré de 83 593 $ de revenu de commissions.

[19]          Par ailleurs, le rapport T-20 soumis en preuve par madame Marcoux fait état de deux rajustements additionnels concernant le revenu de transport de EDD Inc. pour l'année 1995, soit une ristourne payée le 31 mai 1995 au montant de 76 000 $ et un ajustement aux taux de change d'un montant de 8 091 $ pour un total de 84 091 $. Si ce montant qui correspond aux feuilles de travail soumises par le contribuable est ajouté au revenu de transport de 1 212 069 $ mentionné plus haut, on obtient un total de 1 296 160 $ pour le revenu qui aurait été reçu à ce titre par EDD Inc. en 1995 (pièce I-8, page 5). Ce dernier montant est légèrement supérieur à celui de 1 293 102 $ indiqué comme frais de transport de Nirom Inc. aux états comparatifs 1996-1995 (pièce A-1, page 23).

[20]          Lors de son témoignage, monsieur Dumas a expliqué que les frais de transport pour une année étaient d'abord facturés selon le taux convenu l'année précédente et que ce taux était ensuite révisé périodiquement. Selon lui, certains rajustements de fin d'année étaient donc requis pour refléter les frais réellement payés par Nirom Inc. et reçus à EDD Inc. à ce titre.

[21]          Si, pour l'année d'imposition 1995, on additionne les frais de transport de 1 293 102 $ et de commissions de 100 615 $ selon l'état comparatif de Nirom Inc. pour 1996-1995, on obtient un total de 1 393 717 $ (pièce A-1, page 23). Ce total diminué d'un montant de 2 717 $ au titre de commissions payées à un tiers (pièce A-1, page 2), soit un montant de 1 391 000 $ devrait normalement être indiqué comme revenu de EDD Inc. pour 1995 dans ses états des résultats 1996-1995. Or, c'est un montant de 1 282 537 $ qui est indiqué, soit 75 435 $ comme revenu de commissions et 1 207 102 $ comme revenu de transport (pièce A-1, page 16). La différence est de 108 463 $. On obtient la même différence toujours en tenant compte des frais de commissions payés à un tiers, lorsqu'on compare les chiffres dans les états comparatifs de EDD Inc. et de Nirom Inc. pour 1995-1994 (pièce A-1, pages 12 et 13). La difficulté tient d'une part au fait que dans les états financiers de Nirom Inc. on a subséquemment transformé des commissions payées en frais de transport et d'autre part au fait qu'une partie des commissions totales payées au montant de 186 615 $ un montant de 24 870 $ représente des « commissions us » . Si les « commissions us » ne constituent pas un revenu de EDD Inc. comme le laisse entendre la pièce A-1, la différence retracée de 108 463 $ diminuée de ce montant de 24 870 $ donne le résultat auquel monsieur Brillant en est arrivé, soit la somme de 83 593 $. Toutefois, la transformation d'une partie des commissions dont une portion seulement reviendrait à EDD Inc. en frais de transport normalement payables par Nirom Inc. à EDD Inc. exclusivement aurait dû entraîner une augmentation du revenu de cette dernière.

[22]          Ainsi, comme on peut le constater, les modifications ou corrections apportées aux chiffres indiqués dans les différents documents et dans les états des résultats créent énormément de confusion et permettent difficilement de faire une conciliation précise et exacte.

[23]          Pour ce qui est des années 1994 et 1996, les explications données ont été brèves. Les chiffres utilisés à la pièce A-1 correspondent à ceux que l'on retrouve aux états des résultats de Nirom Inc. et de EDD Inc. Selon ces documents, le revenu non déclaré ne serait que de 1 487 $ pour l'année d'imposition 1994 et de 3 470 $ pour l'année d'imposition 1996. Toutefois, il est difficile d'aller plus loin dans l'exercice puisque les explications fournies par monsieur Dumas et par monsieur Brillant ont essentiellement portés sur une conciliation que l'on a tenté d'établir entre les dépenses réclamées par Nirom Inc. selon ses états des résultats au titre de frais de transport et de commissions et les revenus déclarés par EDD Inc. également selon ses états des résultats. D'abord, puisqu'il s'agit de revenus non déclarés, la simple comparaison des états des résultats ne donne pas nécessairement un portrait global de la situation puisque des montants non déclarés par EDD Inc. n'ont pas nécessairement fait l'objet d'une déduction par Nirom Inc. et ne sont donc pas nécessairement représentés dans ses états des résultats.

[24]          Mais, il y a plus. L'exercice de conciliation auquel se sont livrés monsieur Dumas et monsieur Brillant ne s'adresse aucunement à démolir les allégations de fait que l'on retrouve aux alinéas 7.c) et 7.d) de la Réponse à l'avis d'appel et qui ont été reproduits au paragraphe [5] des présents motifs. Ces allégations sont que le bilan de l'appelante était balancé avec le compte « Dû à un administrateur » et que ce compte étant fictif, les dépenses étaient surévaluées et, plus important pour nous ici, ses revenus étaient sous-évalués. La pièce A-1 sur laquelle se sont appuyés messieurs Dumas et Brillant et qui compte quelques 28 pages, ne présente aucun élément d'explication à cet égard.

[25]          En réalité, c'est effectivement par l'analyse du compte « Dû à l'administrateur » de EDD Inc. et des transferts faits à monsieur Dumas que la vérificatrice, madame Marcoux en est venue aux conclusions suivantes : 1) que EDD Inc. avait sous évalué ses revenus; 2) que EDD Inc. avait surévalué ses dépenses en payant certaines dépenses personnelles de son actionnaire unique, monsieur Dumas, et; 3) que EDD Inc. avait fait des transferts importants à monsieur Dumas pour des montants qui ne lui étaient pas dus. Comme les chiffres indiqués aux feuilles de travail préparées par monsieur Dumas lui-même et remises à madame Marcoux comportaient des écarts importants avec ceux inscrits aux états financiers, celle-ci a procédé à une analyse approfondie des revenus et des dépenses puisque le comptable de l'époque, monsieur Malenfant lui aurait dit que le solde du compte « Dû à l'actionnaire[4] » « était établi par différence afin de balancer le bilan » (pièce I-8, page 4). (Voir également les pièces I-1 à I-4 et I-12 à I-14). Outre le paiement de certaines dépenses personnelles, madame Marcoux a établi l'existence de revenus additionnels de EDD Inc. aux montants de 21 744 $, 95 636 $ et 100 435 $ pour chacune des années d'imposition 1994, 1995 et 1996 respectivement. La question des dépenses personnelles a été réglée au niveau des oppositions. Quant aux écarts du compte « Dû à l'actionnaire[5] » attribuable à des revenus additionnels, madame Marcoux a déterminé que pour l'année 1995, il s'agissait notamment, d'un revenu de transport non déclaré, d'un montant de 89 058 $ déjà mentionné[6]. Pour l'année 1996, elle a établi qu'un montant de 2 621 $ n'avait pas été déclaré comme revenu de commissions et que des montants inscrits comme étant des mises de fonds additionnelles de l'actionnaire pour une somme totale de 85 793 $ et présentés comme telles par le comptable ne correspondaient pas à des mises de fonds réelles de monsieur Dumas, mais simplement à des transferts de fonds par EDD Inc. dans ses propres placements.

[26]          Deux rajustements ont par la suite été apportés aux revenus additionnels initialement déterminés pour les années d'imposition 1994 et 1996 de EDD Inc. et qui correspondent effectivement à des mises de fonds de monsieur Dumas. Il s'agit d'un montant de 7 660 $ pour l'année d'imposition 1994 et de 17 362 $ pour l'année d'imposition 1996. Les montants de revenus additionnels ont donc été diminués d'autant pour ces deux années et s'établissent maintenant à 14 084 $ et à 83 073 $ pour chacune de ces années respectivement. Le montant de 95 636 $ est demeuré inchangé pour l'année d'imposition 1995.

[27]          Les calculs indiqués à la pièce I-8 n'ont pas comme tels faits l'objet d'observation de la part de monsieur Dumas ou de monsieur Brillant. Lors de son témoignage, madame Marcoux a également expliqué le travail d'analyse au terme duquel elle a établi que des transferts de fonds de EDD Inc. constituaient des avantages imposables reçus par monsieur Dumas au cours des années d'imposition 1993, 1994 et 1995. Encore une fois, l'analyse a porté sur l'évolution du compte « Dû à un administrateur » compte tenu des états financiers de EDD Inc. et des feuilles de travail remises par le comptable et préparées par monsieur Dumas lui-même (pièces I-1, I-11, I-12 et I-13). Tel que mentionné plus haut, des écarts importants entre les chiffres indiqués aux feuilles de travail par rapport à ceux que l'on retrouve aux états financiers ont été relevés. Madame Marcoux en a conclu que le solde du compte « Dû à un administrateur » indiqué aux états financiers était fictif, qu'il avait servi à balancer le bilan et qu'il représentait en réalité des revenus non déclarés et des dépenses personnelles de monsieur Dumas payées par EDD Inc.

[28]          Madame Marcoux a également noté des transferts importants de EDD Inc. dans le compte personnel de l'actionnaire après la fin de chaque année pour annuler le solde du compte. Elle a ainsi relevé un transfert de 60 000 $ en juillet 1994, un transfert de 130 000 $ en juillet 1995 et un transfert de 105 191 $ en juillet 1996.

[29]          Analysant ensuite l'ensemble des transferts faits à monsieur Dumas à chaque mois pour les périodes de juin à décembre 1993, de janvier à décembre 1994 et de janvier à décembre 1995, (voir pièce I-16), madame Marcoux a déterminé qu'il y avait eu appropriation de fonds par monsieur Dumas pour un total de 12 172 $, 24 108 $ et 90 227 $ pour chacune des années 1993, 1994 et 1995 respectivement. La somme de 12 172 $ initialement cotisée pour l'année 1993 a subséquemment été réduite à 4 512 $ pour tenir compte de deux mises de fonds de monsieur Dumas dans EDD Inc. en date du 23 novembre 1993, l'une d'un montant de 2 660 $, et l'autre pour un montant de 5 000 $ pour un total de 7 660 $ (voir pièce I-17, page 6). Le rajustement pour ce même montant de 7 660 $ aux revenus non déclarés par EDD Inc. pour son année d'imposition 1994 a été mentionné plus haut.

[30]          Quant à l'autre rajustement au montant de 17 362 $ apporté aux revenus non déclarés de EDD Inc. pour son année d'imposition 1996, il n'en a pas été tenu compte dans la cotisation concernant l'année d'imposition 1995 de monsieur Dumas puisque le transfert ou la mise de fonds de monsieur Dumas a eu lieu en avril 1996 (pièce I-17, page 6).

[31]          Le témoignage de madame Jeannine Claveau, l'agent des appels, rejoint pour l'essentiel celui de madame Marcoux. Elle relève le fait qu'il ne lui est pas apparu normal que EDD Inc. ait subi des pertes d'opérations pour ses années d'imposition 1995 et 1996 et que, étant une société offrant essentiellement des services, elle ne se soit pas fait rembourser toutes ses dépenses par Nirom Inc.

[32]          Madame Claveau a également expliqué que toutes les dépenses et tous les postes du bilan avaient été vérifiés et que le bilan ne balançait pas sinon avec le compte « Dû à un administrateur » . Selon elle, tous les autres postes « balancent » . Madame Claveau a aussi fait état que la question des dépenses avait été réglée et que les rajustements aux revenus non déclarés avaient été faits sur preuve que des mises de fonds véritables avaient été faites par monsieur Dumas. Il s'agit des rajustements dont il a été fait mention plus haut. Selon elle, aucune autre preuve n'a été apportée qu'il y aurait eu des mises de fonds additionnelles dans EDD Inc. par monsieur Dumas.

[33]          Les explications fournies tant par madame Marcoux que par madame Claveau quant à leur analyse des états financiers et plus particulièrement du compte « Dû à un administrateur » n'ont pas été contredites directement par monsieur Dumas et monsieur Brillant. Monsieur Dumas s'est en réalité contenté de faire admettre à madame Claveau que des dépenses de représentation étaient nécessaires pour faire de la mise en marché et vendre de la tourbe dans le monde entier.

[34]          Tel que mentionné plus haut, la conciliation effectuée par monsieur Brillant (pièce A-1) n'a portée que sur l'état des résultats de EDD Inc. par comparaison avec ceux de Nirom Inc. et le document soumis en preuve ne contient absolument aucune donnée utile concernant le poste « Dû à un administrateur » et dont l'analyse a constitué l'élément déclencheur des cotisations.

[35]          L'analyse de la preuve tant testimoniale que documentaire soumise par les appelants ne me permet certainement pas de conclure que ceux-ci ont démontré, par prépondérance des probabilités, que les cotisations établies étaient erronées tant à l'égard de EDD Inc. que de monsieur Dumas personnellement.

[36]          Quant aux pénalités cotisées en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi, les raisons invoquées sont que monsieur Dumas étant la seule personne à faire la tenue des livres de EDD Inc., il ne pouvait ignorer l'existence des faux énoncés dans les résultats inscrits aux états financiers et plus particulièrement que le solde du compte « Dû à l'actionnaire » présenté aux états financiers ne correspondait pas à ce qui était indiqué à ses propres feuilles de travail. L'importance des sommes non déclarées par rapport au revenu imposable déclaré a également été pris en compte. Enfin, l'appropriation de fonds par monsieur Dumas alors qu'il savait, compte tenu des documents préparés par lui-même, que EDD Inc. ne lui devait pas réellement les sommes qui lui avaient été transférées a été prise en considération par madame Marcoux dans son rapport sur ce point (voir pièce I-8).

[37]          Au regard de la preuve présentée et compte tenu des raisons invoquées, j'estime que ce ne peut être que sciemment que les faux énoncés ont été faits et que ce motif, à lui seul, est suffisant pour maintenir les pénalités.

[38]          J'ajouterai en terminant, que, tel que souligné par l'avocate de l'intimée, on peut très certainement, dans les circonstances des présentes affaires, tirer une inférence négative du fait que le comptable des appelants ayant préparé les états financiers, monsieur Malenfant, n'ait pas été appelé à témoigner. On peut, à cet égard, se référer entre autres à l'affaire Enns v. M.N.R. 87 DTC 209 et aux autorités citées. Les motifs invoqués par monsieur Dumas pour ne pas avoir demandé à monsieur Malenfant de témoigner ne me paraissent pas suffisants.

[39]          En conséquence de ce qui précède, les appels de la société Les Entreprises Daniel Dumas Inc. (EDD Inc.) pour les années d'imposition 1994, 1995 et 1996 sont rejetés et les appels de Daniel Dumas pour les années d'imposition 1993, 1994 et 1995 sont également rejetés.

Signé à Ottawa, Canada, ce 13e jour de juin 2000.

« P.R. Dussault »

J.C.C.I.



[1]    Dans les documents de Revenu Canada, il est indifféremment fait référence au compte « Dû à un administrateur » ou au compte « Dû à l'actionnaire » .

[2]    Selon la page 10 du même document, ce montant est le total de « commissions us » de 24 870,04 $ et de « commissions cnd » de 161 745,12 $. Seul le montant de « commissions cnd » a été inclus dans le revenu de EDD Inc. Personne n'a mentionné à qui les « commissions us » avaient été payées.

[3]    Voir note 2.

[4]    Voir note 1.

[5]    Voir note 1.

[6]    La différence concernant les frais de transport a été établie à 89 050 $. Voir le paragraphe [14] des présents motifs.

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