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Date: 20000425

Dossiers: 1999-4542-EI; 1999-4543-CPP

ENTRE :

LE CANTON DE SCUGOG,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

Motifs du jugement

Le juge suppléant Weisman, C.C.I.

[1] Le canton de Scugog interjette appel d’une décision de l’intimé selon laquelle trois membres du service d’incendie étaient embauchés en vertu d’un contrat de louage de services du 1er janvier 1998 au 12 mars 1999, que leur emploi était assurable et qu’il ouvrait droit à pension au sens de l’alinéa 5(1)a) de la Loi sur l’assurance-emploi (la “ Loi ”)[1] et de l’alinéa 6(1)a) du Régime de pensions du Canada (le “ Régime ”)[2].

[2] Les trois hommes en question, en l’occurrence David Ballingall, Robert Gonnermann et Kevin Balser, sont des pompiers volontaires. Ils touchent 19,28 $ l’heure pour répondre aux appels de secours et 12,00 $ l’heure pour suivre des séances de formation. Ils ont aussi droit à 4 p. 100 de leur salaire à la place de vacances et à une assurance-vie et sont admissibles à un régime de prestations d’invalidité de courte durée. Ils doivent assister à au moins 60 p. 100 des séances de formation hebdomadaires mais ils ne sont pas tenus de répondre aux appels de secours. La raison est que les pompiers volontaires reçoivent une modeste rémunération du canton et qu’ils doivent, par conséquent, compenser avec d’autres sources de revenu. Il est donc entendu qu’ils peuvent être embauchés ailleurs et être dans l’impossibilité de répondre aux appels de secours.

[3] Il semble assez bien établi en droit que l’emploi des pompiers volontaires, tels les trois hommes en cause, n’est pas assurable et n’ouvre pas droit à pension pour les raisons suivantes :

1. Ils n’étaient pas embauchés en vertu d’un contrat de louage de services. Le critère nécessaire du contrôle était absent puisque ces pompiers n’étaient pas tenus de répondre à un appel de secours en particulier[3].

2. Leur emploi est exclu aux termes du paragraphe 7e) du Règlement sur l’assurance-emploi[4] :

7. Sont exclus des emplois assurables les emplois suivants :

e) l'emploi exercé par une personne chargée d'opérer un sauvetage, si celle-ci n'exerce pas régulièrement un emploi au service de l'employeur qui l'a embauchée à cette fin[5];

[4] Puisque les tâches d’un pompier consistent principalement en des opérations de sauvetage et que les pompiers volontaires “ n’exerce[nt] pas régulièrement un emploi ”[6] au service du canton à cette fin, il a été jugé que leur emploi était exclu[7].

[5] Ces appels se compliquent par le fait que les trois hommes en cause ont également été nommés à des postes de direction au service d’incendie de l’appelante en reconnaissance de leurs nombreuses années de service et d’expérience dans le domaine. David Ballingall, fort de 26 années de service, a été nommé au poste de chef de district; Robert Gonnermann, avec 22 ans à son actif, a mérité le poste de chef adjoint; enfin, Kevin Balser, qui compte 12 ans de service, a obtenu le poste de capitaine et de chef de la prévention des incendies. Les trois hommes s’acquittent de tâches administratives, entre autres la rédaction de rapports, la consignation des heures de travail des pompiers, l'établissement des horaires, la gestion des deux casernes de l’appelante et l’entretien du matériel d’incendie. Pour l’accomplissement de ces tâches administratives, MM. Ballingall et Gonnermann touchent annuellement 5 150,00 $ tandis que M. Balser reçoit 3 850,00 $ chaque année.

[6] L’appelante a reconnu sans ambages que l’emploi des trois hommes, pour les tâches de direction, était assurable et qu’il ouvrait droit à pension. Cependant, l’intimé a soutenu qu’aucune preuve n’étayait la présence de deux contrats distincts entre chaque homme et le canton. Leur emploi serait donc assurable et ouvrirait droit à pension tant pour les tâches de direction que pour les fonctions de pompier volontaire.

[7] Je suis d’avis que l’argument de l’intimé ne reconnaît pas l’absence de contrat de louage de services entre l’appelante et ses pompiers volontaires et le fait que les opérations bénévoles de sauvetage ne sont pas considérées comme un emploi assurable de toute façon. La nature de l’emploi d’un pompier volontaire ne change pas simplement parce que s’y superpose un contrat de louage de services régissant les fonctions de direction que celui-ci remplit au sein du service d’incendie de l’appelante.

[8] J’estime que l’emploi des trois hommes en cause était assurable et qu’il ouvrait droit à pension en vertu d’un contrat de louage de services conclu avec l’appelante dans le cas seulement des fonctions de direction au sein du service d’incendie et non pas en tant que pompiers volontaires de l’appelante.

[9] Les appels sont accueillis et la décision du ministre est modifiée en conséquence aux termes de l’alinéa 103(3)a) de la Loi et du paragraphe 28(2) du Régime.

Signé à Toronto (Ontario) ce 25e jour d'avril 2000.

“ N. Weisman ”

J.S.C.C.I

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 24e jour de novembre 2000.

Mario Lagacé, réviseur



[1] L.C. 1996, ch. 23.

[2] L.R.C. (1985), ch. C-8.

[3] Merritt (Ville) c. M.R.N., [1999] A.C.I. no 319.

[4] DORS/96-332.

[5] Le paragraphe 28(2) du Régime de pensions du Canada est sensiblement le même.

[6] La Reine c. Abrahams, [1983] 1 R.C.S. 2.

[7] Whitchurch-Stouffville (Ville) c. M.R.N., [1993] A.C.I. no 152.

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