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Date: 20020205

Dossiers: 1999-3556-IT-G,

1999-3558-IT-G,

1999-3561-IT-G,

ENTRE :

FRANCIS DECK,

THERESA DECK WOOD,

ELLEN JANE ROSE,

appelants,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifsdu jugement

Le juge Hershfield, C.C.I.

[1]            Il s'agit d'appels de cotisations établies pour l'année d'imposition 1997 qui ont été entendus sur preuve commune sous le régime des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale).

[2]            La seule question à trancher consiste à savoir si les appelants avaient le droit de déduire une perte au titre d'un placement d'entreprise au cours de l'année à l'égard de sommes d'argent qui devaient leur être versées par Fran Restaurants Limited (la « Société » ). La question fondamentale est de savoir si les appelants ont correctement déterminé que ces sommes qui leur étaient dues se sont révélées irrécouvrables ou de mauvaises créances au cours de l'année visée. Les parties ont partiellement convenu des faits selon les énoncés suivants soumis par elles, énoncés auxquels j'ai apporté quelques éclaircissements mineurs fondés sur les observations faites par les avocats lors de l'audience.

[TRADUCTION]

Exposé conjoint des faits partiel :

Les appelants et l'intimée conviennent des faits suivants :

1.           Les appelants sont des particuliers qui résident dans la ville de Toronto, province de l'Ontario.

2.           Les appelants sont un frère et deux soeurs.

3.           La Société a été constituée en personne morale en 1940.

4.           Les parents des appelants étaient à l'origine propriétaires de toutes les actions de la Société.

5.           Les parents, par le biais de la Société, ont ouvert un petit restaurant de dix places en 1940.

6.           En mai 1959, la Société comptait quatre restaurants.

7.           L'appelant Francis Deck s'est joint à l'entreprise de restauration familiale en 1959.

8.           Après le décès des parents, les appelants ont hérité, chacun à part égale, des actions de la Société.

9.           Jusque-là, les restaurants étaient financés par la famille.

10.         Le père fournissait le capital nécessaire pour exploiter le restaurant et effectuait, au besoin, des avances en faveur de la Société pour les dépenses en immobilisations; ensuite, il retirait le capital ou récupérait l'argent par le biais de remboursements de prêts.

11.         Ce n'était pas la Société mais les parents qui étaient propriétaires des immeubles occupés par les restaurants. Les améliorations locatives, tables, chaises, équipements de cuisine et autres articles du même genre appartenaient à la Société.

12.         Après le décès des parents, les appelants sont devenus propriétaires des immeubles occupés par les restaurants, tout d'abord par le biais d'une fiducie établie par leurs parents, puis directement après avoir transité par la fiducie. Les appelants ont continué de louer ces immeubles à la Société.

13.         Conformément au paragraphe 85(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ), en 1994 ces immeubles ont fait l'objet d'un transfert libre d'impôt en faveur de la Société pour la valeur des immeubles, les appelants recevant des actions ordinaires et un billet à vue à long terme au montant de 1 926 532 $. Les appelants, à la suite du transfert des immeubles, n'ont pas versé d'impôt sur les gains en capital (ni à la suite du transfert des immeubles de la fiducie aux appelants, ni à la suite du transfert des immeubles à la Société). Après cela, la Société a vendu ces immeubles, réalisé des gains en capital et utilisé ces gains pour compenser ses pertes des autres années.

14          En 1994, la Société devait de l'argent à ses créanciers. Les appelants ont disposé des immeubles en faveur de la Société de la façon décrite au paragraphe 13 (en plus de faire des avances de fonds supplémentaires) afin que la Société puisse disposer de liquidités et pour l'empêcher de faire faillite, ce qui revenait à avancer 1 934 525 $ sous forme de prêt à long terme sans intérêt à rembourser selon des mensualités de 15 000 $.

15          Pendant la période concernée, la Société était une société privée sous contrôle canadien qui était une société exploitant une petite entreprise admissible, selon les définitions figurant dans la Loi de l'impôt sur le revenu.

16.         Pendant la période concernée, la Société exploitait une entreprise de restauration dans la province de l'Ontario.

17.         En 1997, la Société était endettée et incapable de rembourser ses créanciers. Elle devait de l'argent surtout à Revenu Canada et au gouvernement de l'Ontario en raison du défaut de paiement de diverses charges fiscales.

18.         Après l'échec des négociations avec ses créanciers, la Société a déposé un « Avis d'intention de présenter une proposition » auprès du séquestre officiel le 9 octobre 1997. Le ou vers le 31 décembre 1997, la Société a présenté une proposition à ses créanciers par l'intermédiaire de Mintz & Partners Limited, Trustees and Bankruptcy, en vertu du paragraphe 50.4(1) de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité (la « Proposition » ).

19.         Cette proposition forme l'annexe A aux présentes.

20.         La Société ne remboursait pas ses dettes et les appelants ne voulaient pas qu'elle fasse faillite. Ils voulaient qu'elle poursuive ses activités. Ils voulaient régler les problèmes financiers en présentant la Proposition. Dans cette proposition, ils convenaient de ne pas demander le remboursement de leur prêt à long terme pour le moment, acceptant que leurs créances soient subordonnées et reportées, et qu'elles ne soient pas remboursées tant que les autres créanciers n'aient pas été payés conformément à la Proposition, et ce, au plus tard en mars 2002. Les gouvernements du Canada et de l'Ontario et d'autres créanciers de moindre envergure ont voté en faveur de l'acceptation de la Proposition prévoyant des réductions de remboursements afin d'assurer la survie de la Société. Outre Revenu Canada et le ministre des Finances de l'Ontario, on comptait quelques petits fournisseurs.

21.         Cette proposition a été acceptée par les créanciers, puis approuvée par la Cour en vertu du paragraphe 62(2) de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité.

22.         À la Section L de la page 14 du résumé de la Proposition à l'annexe A, on prévoit une distribution estimative aux créanciers non garantis s'élevant à 15,5 ¢ par dollar de créance prouvée.

23.         Le paragraphe 23 de la page 6 de la Proposition à l'annexe A prévoit ce qui suit :

Si cette proposition est acceptée par les créanciers du débiteur et approuvée par la cour, les créances de Francis Deck, Ellen Jane Rose, Theresa Wood et 747081 Ontario Limited (les « créanciers apparentés » ) à la date du dépôt de l'avis d'intention seront subordonnées et reportées tant que les modalités de la Proposition n'auront pas été respectées par le débiteur. Dès que les modalités de la Proposition auront été observées par le débiteur, ou si le débiteur omet de se conformer à l'une ou l'autre de ces modalités et que la Proposition est déclarée nulle et non avenue conformément aux dispositions de la Loi, les créanciers apparentés pourront se prévaloir du montant intégral de leurs créances à l'égard du débiteur et exiger le paiement correspondant à celles-ci.

24.         La Société a versé à ses créanciers un montant de 630 000 $ conformément aux dispositions de la Proposition (montant correspondant à toutes les créances garanties et privilégiées).

25.         Au 31 décembre 1997, la Société devait à l'appelant Francis Deck le montant de 618 760,56 $, à l'appelante Theresa Deck le montant de 643 673,61 $ et à l'appelante Ellen Jane Rose le montant de 1 103 406,16 $ à l'égard des avances à long terme effectuées par les appelants. Ces prêts n'étaient pas garantis. D'après les états financiers de 1997 de la Société, aucun montant de prêt n'était remboursable avant l'expiration d'un délai d'un an [1].

26.         Dans le calcul de leur revenu pour l'année d'imposition 1997, l'appelant Francis Deck a déduit une perte au titre d'un placement d'entreprise de 16 500 $, l'appelante Ellen Jane Rose a déduit une perte au titre d'un placement d'entreprise de 275 000 $, et l'appelante Theresa Deck n'a déduit aucune perte au titre d'un placement d'entreprise. Ces prêts ont été déduits en vertu des alinéas 50(1)a) et 39(1)c) de la Loi.

27.         À la suite de cela, les appelants [sic] ont été informés par leurs comptables du fait que les déductions mentionnées au paragraphe 26 seraient inadmissibles car le montant tout entier doit être irrécouvrable pour être admissible en vertu de l'article 50 de la Loi. Par conséquent, les trois appelants ont présenté des avis d'opposition pour se prévaloir d'une perte au titre d'un placement d'entreprise correspondant au montant intégral de leurs créances. L'Agence des douanes et du revenu du Canada a refusé leur demande de déduction en faisant valoir que les créances ne s'étaient pas révélées irrécouvrables pendant l'année conformément à l'alinéa 50(1)a) de la Loi et qu'ils n'avaient donc pas subi de perte au titre d'un placement d'entreprise au sens de l'alinéa 39(1)c) de la Loi.

28.         Le 24 juillet 2001, la Société a présenté une cession de faillite en vertu de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité.

29.         À ce jour, la Société n'a fait aucun remboursement aux appelants au titre des avances d'actionnaires.

LES PARTIES NE S'ENTENDENT PAS SUR LES FAITS SUIVANTS :

30.         Que les appelants, au moment de produire cette déclaration de revenus, avaient déterminé que la totalité de leurs créances s'étaient révélées irrécouvrables pour l'année d'imposition 1997 [2].

[3]            Conformément à ce qui est établi au paragraphe 19 de l'exposé conjoint des faits partiel, une copie de la Proposition y était annexée. La Proposition annexée comprenait un rapport aux créanciers de la Société, préparé par Mintz & Partners Limited en janvier 1998. Ce rapport a été préparé après le dépôt de l'avis d'intention de présenter une proposition auprès du séquestre officiel en vertu de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité en octobre 1997. Le rapport et les pièces qui y sont jointes présentent des renseignements financiers à certains moments entre le 9 octobre et le 31 décembre 1997. À titre d'exemple, la valeur comptable des biens de la Société au 1er décembre 1997 s'élevait à 1 199 900,00 $. Au 9 octobre 1997, les créances totalisaient 4 655 278,00 $, et d'après Mintz & Partners Limited, le refus de la Proposition entraînerait la faillite de la Société dès janvier 1998, avec des actifs ayant une valeur réalisable estimative se situant entre 179 700,00 $ et 240 200,00 $. Les créances ont été classées comme suit :

                               

Classement des créanciers                                                   Montant

                                Garantis                                                                  649 599,00 $

                                Privilégiés                                                                               55 586,00 $

                                Ordinaires                                                                               3 950 093,00 $

                                Employés                                                                                     Inconnu

                                                                                                                                4 655 278,00 $

Les créances garanties comprennent une créance de 361 500,00 $ d'un établissement apparenté et de 288 099,00 $ de Revenu Canada. La créance de l'établissement apparenté devait être reportée tant que les conditions de la Proposition ne seraient pas observées. La créance de Revenu Canada correspondait au moins partiellement à des retenues salariales et/ou des versements de TPS non payés, et, à ce titre, il s'agissait d'obligations fiduciaires [3].

[4]            La Proposition a fini par être acceptée par les créanciers, et elle prévoyait que la Société fasse au fiduciaire des versements de 1998 à 2001 inclusivement, pour un total de 630 000,00 $ majoré de 10 % des bénéfices exceptionnels (définis dans la Proposition). D'après les estimations des gains de la Société, les créanciers garantis (et privilégiés) recevraient 100 cents par dollar et les créanciers non garantis recevraient entre 15,2 et 17,9 cents par dollar, ce qui représente la fourchette des estimations. Le montant de 630 000,00 $ était calculé en fonction du niveau plancher des estimations. D'autres versements à Revenu Canada, correspondant à 70 % des bénéfices exceptionnels éventuels, ont également été prévus afin d'assurer sa coopération. Les administrateurs et dirigeants de la Société ont été exonérés de toute revendication, y compris des créances et obligations statutaires censées relever de leur responsabilité en droit à titre d'administrateurs.

[5]            Selon ce qui a été signalé dans l'exposé conjoint des faits, la Société a fait faillite en 2001, après avoir versé 630 000,00 $ aux créanciers conformément à la Proposition.

Preuve additionnelle

[6]            Deux témoins ont fait des dépositions, soit l'appelant Francis Deck et le comptable qui avait représenté la Société et les appelants pendant les périodes concernées. Quant à la question cruciale de la détermination effective du moment où la déduction partielle initiale à l'égard de la perte au titre d'un placement d'entreprise a été déposée, la déposition des deux témoins était concordante et crédible. Francis Deck et le comptable avaient discuté des comptes débiteurs des actionnaires avant de produire des déclarations de revenus personnels des actionnaires pour 1997, et, à la lumière de la Proposition qui avait alors été acceptée par les créanciers et par la cour, et vu les circonstances de la Société, il a été reconnu que le remboursement des prêts des actionnaires était peu probable. M. Deck a déclaré qu'au moment de rencontrer le comptable, il estimait que tout recouvrement serait « miraculeux » . Le comptable a déclaré qu'il convenait qu'à cette époque la dette tout entière constituait une créance irrécouvrable. Dans cette perspective, il est clair qu'un nouveau plan d'affaires réorientant les efforts sur des activités plus viables et des frais généraux réduits a été avancé dans la Proposition. Elle donnait la possibilité de rembourser d'autres créanciers, ce que n'aurait pas permis une faillite immédiate (au moins au niveau de la Société à l'égard de certains montants à payer aux gouvernements), et elle correspondait aux efforts déployés par les appelants en vue de sauver leur entreprise. En fin de compte, toutefois, la survie de la créance des actionnaires en vertu de la Proposition et les projections financières sur lesquelles elle se basait n'ont pas suffi, d'après les dépositions des témoins, pour changer la détermination selon laquelle les prêts étaient irrécouvrables. C'était l'opinion expresse du comptable et de Francis Deck au moment de considérer la position des appelants relativement à leur déclaration de revenus pour 1997. Par conséquent, ils ont décidé qu'il n'y avait guère de chances de recouvrer ces prêts d'actionnaires malgré le fait qu'ils avaient été reportés et subordonnés en vertu de la Proposition selon des termes qui les rendaient potentiellement recouvrables (voir le paragraphe 23 de l'exposé conjoint des faits partiel).

[7]            Malgré cette détermination, le comptable a avisé les appelants que la perte d'investissement admissible était disponible dans la mesure nécessaire pour l'année par chacun d'entre eux respectivement, et c'est ainsi que les déductions initiales ont été établies. Le comptable n'a découvert son erreur qu'au moment où les pertes déduites ont été contestées. D'après le témoignage, il était clair qu'il n'existait aucune intention dans les premières déclarations de suggérer que la détermination soit à l'effet que seules de petites portions des comptes de prêt étaient irrécouvrables ou que les appelants avaient adopté des positions divergentes quant à la recouvrabilité des créances. Chaque appelant était d'accord avec la détermination que les créances étaient irrécouvrables et les différences dans les revendications provenaient d'une erreur relative à la façon dont on pourrait se prévaloir de ces pertes. J'accepte le témoignage du comptable en la matière.

[8]            Il a également été déclaré que, jusqu'en juillet 1997, les actionnaires continuaient à avancer des fonds à la Société comme ils le faisaient en 1994 et en 1996. Je n'en tire aucune déduction que les appelants devaient donc croire, pendant toute l'année 1997, que leurs créances de prêts étaient recouvrables ou que ces avances jetteraient un doute quelconque sur la détermination faite au début de 1998 que les prêts étaient irrécouvrables à partir de la fin 1997. J'accepte le témoignage de M. Deck à l'effet que la décision de demander la protection de la loi sur les faillites n'avait été prise qu'en août 1997 et que la détermination faite en avril 1998 ou vers avril 1998 à l'effet que les prêts étaient irrécouvrables en 1997 était de bonne foi.

[9]            Nous avons entendu qu'aucune demande de paiement n'avait été émise à l'égard du billet à vue à long terme ni d'aucune autre partie des prêts des actionnaires. On est donc en droit de se demander si la dette était remboursable et quel effet cela aurait sur l'admissibilité de la perte au titre d'un placement d'entreprise.

Analyse

[10]          Les appelants affirment qu'il faut tenir compte de quatre éléments pour se prévaloir d'une perte au titre d'un placement d'entreprise dans le cas d'un prêt d'actionnaires [4], soit :

1.                la société est endettée envers les appelants (sous-alinéa (39(1)c)(iv));

2.              la créance s'est révélée être une créance irrécouvrable pendant l'année (paragraphe 50a));

3.              la société était une société exploitant une petite entreprise (division 39(1)c)(iv)(A));

4.              la créance a été acquise par les appelants en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien (sous-alinéa 40(2)g)(ii)).

Les appelants citent le paragraphe 10 de Gamus c. La Reine, C.C.I., no 2000-2732(IT)I, 11 mai 2001 ([2001] 3 C.T.C. 2342) à titre de jugement faisant autorité pour ces critères. Même si ces éléments ne semblent pas exclure les éléments potentiels pouvant être mis en jeu dans d'autres cas, ils sont suffisants dans le contexte de l'affaire qui nous occupe. En effet, comme il a été dit, les parties ont convenu que le seul critère ou élément pertinent en la matière était de savoir si la créance était devenue irrécouvrable au cours de l'année en question. Mon analyse sera donc limitée en conséquence.

[11]          La position de l'intimée dans ces appels est fondée sur l'argument qu'il n'était pas raisonnable de déterminer que la créance était devenue irrécouvrable à la fin de 1997. Étant donné que la créance n'a jamais été remboursée et que le débiteur est failli, la position de l'intimée est nécessairement que la créance était devenue irrécouvrable avant ou après 1997. L'avocat de l'intimée souligne les points suivants en faveur de sa position :

(a)                  La détermination requise que la créance tout entière était irrécouvrable n'a pas été faite, ou elle n'a pas été faite au moment opportun. L'intimée invoque notamment les facteurs suivants pour soutenir cette position : (i) les actionnaires n'avaient pas agi, pour l'année (1997), d'une manière compatible avec la position qu'ils ont fini par adopter. En 1997, comme lors d'années précédentes, ils avançaient des fonds en croyant que ces avances seraient recouvrables; (ii) la première détermination de recouvrabilité des prêts tendait à leur recouvrabilité partielle. La tentative de modifier la détermination déposée initialement n'était pas raisonnable ou opportune quant à l'année 1997; et (iii) l'intimée affirme que la Proposition qui subordonnait les avances était une raison insuffisante de changer leur classification, de probablement recouvrables en juillet 1997, lorsque d'autres avances ont été faites, à irrécouvrables, surtout compte tenu du fait que les projections utilisées dans la Proposition suggéraient que l'échéancier prévu des remboursements pourrait être à jour dans les quatre ans;

(b)                  la créance n'était pas remboursable dans l'année;

(c)                  la décision de la Cour d'appel fédérale dans Flexi-Coil Ltd. c. La Reine, C.A.F., no A-707-95, 7 juin 1996 (96 DTC 6350).

[12]          En ce qui concerne le point (a) ci-dessus, les appelants affirment avoir déterminé de manière opportune que la créance était irrécouvrable et que leurs actions n'étaient pas incompatibles avec cette détermination. J'ai accepté que la détermination que la créance était entièrement irrécouvrable était la première et seule détermination faite par les actionnaires et qu'elle avait été faite avant la production des déclarations de revenus pour l'année 1997. Par conséquent, j'ai accepté que la détermination que la créance était irrécouvrable avait été faite de manière opportune. Il ne s'agit pas ici d'un créancier qui change une détermination précédente quant à la recouvrabilité d'une créance, comme c'était le cas dans Anjalie Enterprises Ltd. c. La Reine, C.C.I., no 93-945(IT)G, 4 octobre 1994 (95 DTC 216)[5]. Toutefois, cette conclusion n'est valide que si l'on suppose que l'année 1997 était le moment approprié pour déclarer que la créance était irrécouvrable.

[13]          L'avocat de l'intimée suggère que cette détermination aurait pu tout aussi bien être faite pour une année antérieure (1996 par exemple), ou que la détermination, reportée à juste de titre jusqu'à ce que les créanciers aient approuvé la Proposition, aurait pu tout aussi bien être reportée encore plus tard, jusqu'à l'apparition d'une preuve que le plan d'affaires préconisé dans la Proposition ne fonctionnerait pas. Pour répondre à ces suggestions, il faut confirmer que la détermination du moment où une créance devient irrécouvrable est une décision subjective relevant du débiteur. Cette confirmation se trouve dans Hogan v. M.N.R., 56 DTC 183 (C.A.I.), où une créance irrécouvrable a été définie comme suit à la page 193 :

                                [TRADUCTION]

Par conséquent, aux fins de la Loi de l'impôt sur le revenu, une créance irrécouvrable peut comprendre l'ensemble ou une partie d'une créance au sujet de laquelle le créancier, après avoir personnellement examiné les facteurs pertinents exposés plus haut, dans la mesure où chacun d'entre eux peut être retenu à l'égard de chacune des créances, peut honnêtement et raisonnablement décider qu'elle est irrécouvrable à la fin de l'exercice financier lorsque cette décision doit être prise, bien que par la suite il puisse y avoir des événements qui fassent que la dette ou une partie de celle-ci puisse en fait être recouvrée. Cette décision doit être prise par le créancier (ou un de ses employés), car il a une connaissance personnelle et complète des faits et des circonstances entourant non seulement chacune des créances, mais également, autant que possible, chacun des débiteurs...

Même si ce passage souvent cité n'identifie pas expressément l'année où il faut déterminer qu'une créance est irrécouvrable, j'estime que la déduction est claire : c'est l'année particulière au cours de laquelle le créancier a honnêtement et raisonnablement établi que la créance est devenue irrécouvrable. C'est compatible avec l'exigence de l'alinéa 50(1)a), où il est précisé qu'un contribuable est réputé avoir disposé d'une créance irrécouvrable à la fin de l'année où le contribuable établit que la créance (encore exigible à la fin de l'année) s'est révélée être au cours de l'année une créance irrécouvrable. L'expression « s'est révélée » (en anglais « to have become » ) pourrait certes donner à penser qu'il incombe au contribuable de prouver que la créance n'était pas devenue irrécouvrable au cours d'une année précédente, mais je ne crois pas que ce soit une conclusion appropriée à tirer de la loi, en l'occurrence, ou de la jurisprudence. Une créance n'est « mauvaise » que si elle a été prouvée irrécouvrable [6]. Si elle n'a pas été prouvée irrécouvrable pour une année précédente (probablement par l'intimée si l'appelant a une preuve prima facie qu'une détermination a été faite à l'égard d'une année subséquente), il est possible que la créance soit « prouvée » (par l'appelant) comme étant devenue irrécouvrable pendant une année subséquente même si les circonstances, considérées d'une façon objective, peuvent suggérer que la créance s'était révélée irrécouvrable au cours d'une année précédente. Un créancier, agissant de façon honnête et raisonnable, doit se voir accorder un certain degré de latitude pour déterminer l'année au cours de laquelle une créance doit être considérée comme étant devenue irrécouvrable. Par conséquent, la reconnaissance d'une créance irrécouvrable ne devrait pas être trop vite refusée sous prétexte qu'elle aurait été déclarée trop tard, alors qu'un créancier était tout simplement trop optimiste ou trop modéré dans sa recherche de la déduction de la créance en question.

[14]          J'estime donc que l'appel ne peut être rejeté sous prétexte que la créance en question aurait pu se révéler irrécouvrable au cours d'une année antérieure. Les créanciers n'ont pas fait preuve de mauvaise foi en n'envisageant pas la déduction plus tôt. Rien n'autorise à penser que les appelants auraient retardé à mauvais escient la preuve que la créance s'était révélée irrécouvrable [7].

[15]          La question de l'accélération de la demande de déduction d'une créance irrécouvrable est abordée de manière plus directe si l'on envisage les facteurs considérés dans Hogan et dans certaines causes subséquentes, car dans ces affaires-là il s'agissait de savoir si la créance était irrécouvrable, et non si elle était irrécouvrable au cours d'une année précédente. Dans ces cas-là, le fardeau d'établir qu'il n'est pas trop tôt pour considérer qu'une créance est irrécouvrable, c'est-à-dire pas trop tôt pour déclarer une perte à des fins fiscales, repose sans conteste sur le créancier qui fait la détermination. Néanmoins, même dans ce cas, il s'agit d'un critère subjectif, à savoir si le créancier a agi de manière raisonnable et honnête. Le recours à la prudence du créancier à titre d'homme d'affaires raisonnable au moment de faire la détermination pourrait être considéré comme une façon d'objectiver une détermination qui, sans cela, pourrait indûment accélérer une déclaration de perte. Dans le contexte d'une tentative de changement d'une détermination précédente par un créancier aux fins d'utilisation de perte (par ex. si la bonne foi de la personne qui a émis la détermination est en doute), Mme la juge Lamarre a abordé la question comme suit dans Anjalie, page 218 :

En général, la question de savoir quand une créance devient mauvaise est une question de fait qu'il convient de trancher selon les circonstances de chaque espèce. Essentiellement, une dette est reconnue comme mauvaise lorsqu'il est prouvé qu'elle est irrécouvrable dans l'année. La question de savoir quand une perte est considérée comme irrécouvrable est un point qui relève du propre jugement du contribuable, en tant qu'homme d'affaires avisé. (Les italiques sont de moi.)

De même, dans Flexi-Coil le juge de première instance a déclaré que la Cour devait être convaincue que le contribuable avait agi raisonnablement et d'une manière pragmatique et sérieuse propre au milieu des affaires au moment d'appliquer les facteurs permettant de déterminer si une créance était irrécouvrable[8].

[16]          Dans le cas qui nous occupe, il n'est pas difficile d'admettre que les appelants ont agi de manière raisonnable et honnête et qu'ils ont pris une décision prudente et pragmatique propre au milieu des affaires lorsqu'ils ont déterminé que les avances étaient devenues irrécouvrables en 1997, puisque la même année ils ont fait une proposition en vertu de la Loi sur la faillite.

[17]          Dans Houle c. M.R.N., 90 DTC 1240 (C.C.I.), M. le juge Tremblay a fait remarquer à la page 1246 que, dans la vie d'un compte, diverses circonstances et différents facteurs peuvent survenir pour révéler le compte comme irrécouvrable « ...mais la faillite du débiteur est sans doute le cas le plus simple » . Sur l'échelle des possibilités, l'avocat de l'appelant affirme qu'une proposition en vertu de la Loi sur la faillite vient en deuxième position en termes de simplicité. À mon avis, aucune circonstance dans cette affaire ne vient contredire cette affirmation. Le fait qu'il y ait eu quelque chance de recouvrement de la créance (ou au moins un retour à l'échéancier de remboursement planifié de 180 000,00 $ par année) après la période de remboursement total de quatre ans prévue par la Proposition n'invalide pas la détermination que les créances se sont révélées irrécouvrables. Comme l'établit M. le juge Sarchuk dans l'affaire Berretti c. M.R.N., C.C.I., no 84-1711(IT), 2 octobre 1986 (86 DTC 1719) à la page 1722 :

...L'on peut citer certains des principes retenus dans ces décisions. Il n'est pas, par exemple, nécessaire que la dette en question soit absolument irrécouvrable... et la possibilité d'un recouvrement à l'avenir n'empêche pas en soi de conclure au caractère irrécouvrable de la dette... Ces décisions confirment également le principe en vertu duquel c'est à l'appelant de décider si la dette est irrécouvrable et non pas à un fonctionnaire de l'intimé ou à quelque autre personne.

[18]          D'autre part, je fais remarquer que l'ampleur de l'insolvabilité de la Société en 1997 vient soutenir le témoignage de M. Deck selon lequel il n'y avait que très peu de chances d'une reprise des affaires permettant le remboursement de la dette. La Société était en pleine restructuration conformément à la Proposition, mais il ne semblait plus y avoir de moyens de poursuivre les activités à une échelle donnant à la Société une chance réaliste de rembourser les actionnaires. L'objectif de la Proposition était de permettre le remboursement des créanciers privilégiés, les créanciers non garantis ne jouissant que de possibilités minimes de remboursement. À la fin de 1997, le ratio d'endettement de la Société semblait définitivement soutenir une détermination que la créance était irrécouvrable et cette détermination a été effectivement établie avant la production de la déclaration de revenus de l'année.

[19]          Par conséquent, ayant considéré tous les facteurs soulevés par l'intimée relativement à sa position (décrite au paragraphe 11(a) de ces motifs), je constate qu'ils ne me dissuadent pas d'accepter que la détermination d'irrécouvrabilité de la créance en 1997 est conforme aux exigences de la Loi quant à l'établissement d'une perte au titre d'un placement d'entreprise.

[20]          En ce qui concerne le fait invoqué par l'intimée (au paragraphe 11(b) des présents motifs) que les avances d'actionnaires n'étaient pas un élément de passif à court terme dans l'année, j'estime avec elle que ces avances, bien qu'elles aient été à vue, n'étaient pas un élément de passif à court terme en 1997. Aucune demande n'avait été faite et les états financiers n'indiquaient aucune de ces avances comme étant à court terme. Toutefois, ce n'est pas un argument décisif contre la détermination que la créance était irrécouvrable dans l'année. Je renvoie de nouveau à Houle, en page 1252. On y trouvera la reconnaissance que, dans certaines circonstances à tout moment pendant la vie du compte, « même s'il n'est pas encore payable » , celui-ci peut devenir irrécouvrable. Dans l'affaire qui nous occupe, le montant annuel des remboursements n'avait pas été versé. Normalement, cela constituerait un défaut de paiement et entraînerait l'accélération de l'endettement total. Même si l'on accepte que ce n'était pas le résultat dans ce cas, et même s'il n'est pas approprié d'induire qu'une demande théorique avait été faite, l'intégralité de la créance peut encore, d'après les principes établis dans la décision Houle, être considérée comme révélée irrécouvrable au cours d'une année en particulier, si les circonstances le permettent ou l'exigent, même si elle n'est pas échue cette année-là. Par conséquent, même si seulement 180 000,00 $ était à payer d'après l'échéancier accepté par les actionnaires et que cet échéancier aurait pu être repris quatre ans plus tard, cela n'interdit pas de constater que l'intégralité de la dette s'était révélée irrécouvrable. Dans le présent cas, il n'y avait pratiquement aucune possibilité de récupérer les 180 000,00 $ par année avant au moins quatre ans, et même alors, seulement une mince chance (décrite comme miraculeuse) de recevoir quoi que ce soit sur les avances. Les exigences de la Proposition portaient atteinte aux modalités de remboursement du prêt. La Proposition était le résultat de l'insolvabilité de la Société débitrice qui dépendait des avances d'actionnaires dont le versement avait été interrompu. Ces circonstances justifient la détermination selon laquelle les avances étaient, à ce point-là, devenues irrécouvrables, qu'elles aient ou non été payables à ce moment.

[21]          Enfin, je me pencherai sur la question de savoir si, comme l'affirme l'intimée (voir le paragraphe 11(c) des présents motifs), la décision de la Cour d'appel fédérale dans Flexi-Coil est compatible avec la position de l'intimée selon laquelle les avances d'actionnaires dans le cas qui nous occupe devraient ne pas être considérées comme irrécouvrables dès 1997. Il existe des similitudes entre les faits de cette cause-là et ceux de la présente affaire. Dans Flexi-Coil, une société mère actionnaire a avancé de l'argent à deux filiales. Comme dans le cas qui nous occupe, le créancier actionnaire n'était pas indépendant du débiteur, et le débiteur dépendait des avances de son actionnaire pour être au moins solvable, faute d'être viable. Dans Flex-Coil, les états financiers d'une filiale créancière n'indiquaient pas la créance sous forme d'obligation à court terme. Les filiales n'étaient pas sur le point de faire faillite. Dans Flexi-Coil, la Cour d'appel a décidé que la déduction partielle des avances n'était pas appropriée. Il existait un objectif à long terme de continuer l'exploitation. Les similitudes entre cette cause et celle qui nous occupe s'arrêtent là. Dans Flexi-Coil, il a été constaté que la société mère s'était engagée à financer les filiales. Les états financiers de l'une des filiales contenaient une déclaration selon laquelle la société mère avait promis de fournir un surplus de fonds de roulement pendant une année supplémentaire. En l'espèce, l'engagement des actionnaires d'offrir des fonds supplémentaires s'est terminé en août 1997. Dans Flexi-Coil, la filiale ayant une dette à court terme envers la société mère avait suffisamment d'actifs à court terme pour payer la totalité de ses comptes courants. Ce n'est pas le cas ici. Au contraire, dans le cas présent, la société débitrice était en tout état de cause insolvable, comme l'indiquait la Proposition, sans laquelle elle aurait fait faillite dès janvier 1998. En insufflant une bouffée d'air frais à la Société, la Proposition ne lui a toutefois pas donné accès à d'autres fonds ou engagements du genre de ceux dont a bénéficié Flexi-Coil. Le soutien historique des actionnaires et le fait que les prêts étaient en souffrance ne suffisent pas, à mon avis, à établir de lien entre la présente affaire et Flexi-Coil. Ce qui distingue la présente cause, c'est la décision des appelants, en août 1997, de demander pour la Société la protection de la loi sur les faillites, et, en octobre 1997, de déposer un avis d'intention de faire une proposition auprès du séquestre officiel. L'engagement des appelants (qui se distingue de celui de la Société) de poursuivre leurs activités en vertu de la Proposition en cas de reprise des affaires de la Société ne suffit pas à me dissuader de décider que les appelants ont agi de manière raisonnable du point de vue des affaires lorsqu'ils ont déterminé que leurs créances s'étaient révélées irrécouvrables dès 1997. D'ailleurs, il ne m'appartient pas de mettre en doute leur décision, qui s'est avérée la bonne, même si ce n'est que quatre ans plus tard.

[22]          Par conséquent, les appels sont admis avec dépens. La cotisation à l'égard de chaque appelant est déférée au ministre pour nouvel examen et nouvelles cotisations en tenant compte du fait que leurs avances respectives établies au paragraphe 25 de l'exposé conjoint des faits partiel étaient, dans leur intégralité, des pertes au titre d'un placement d'entreprise en 1997.

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de février 2002.

« J. E. Hershfield »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme ce 28e jour de juin 2002.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Mario Lagacé, réviseur

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

1999-3556(IT)G

ENTRE :

FRANCIS DECK,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu sur preuve commune avec les appels de

Theresa Deck Wood (1999-3558(IT)G) et d'Ellen Jane Rose (1999-3561(IT)G) le 27 novembre 2001 à Toronto (Ontario) par

l'honorable juge J. E. Hershfield

Comparutions

Avocat de l'appelant :                                                Me David J. Rotfleisch

Avocat de l'intimée :                                                 Me Shatru Ghan

JUGEMENT

L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1997 est admis, avec dépens, et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de février 2002.

« J. E. Hershfield »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de juin 2002.

Mario Lagacé, réviseur


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

1999-3558(IT)G

ENTRE :

THERESA DECK WOOD,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu sur preuve commune avec les appels de

Francis Deck (1999-3556(IT)G) et d'Ellen Jane Rose (1999-3561(IT)G) le 27 novembre 2001 à Toronto (Ontario) par

l'honorable juge J. E. Hershfield

Comparutions

Avocat de l'appelante :                                                     Me David J. Rotfleisch

Avocat de l'intimée :                                                         Me Shatru Ghan

JUGEMENT

L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1997 est admis, avec dépens, et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de février 2002.

« J. E. Hershfield »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de juin 2002.

Mario Lagacé, réviseur


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

1999-3561(IT)G

ENTRE :

ELLEN JANE ROSE,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu sur preuve commune avec les appels de

Francis Deck (1999-3556(IT)G) et de Theresa Deck Wood (1999-3558(IT)G) le 27 novembre 2001 à Toronto (Ontario) par

l'honorable juge J. E. Hershfield

Comparutions

Avocat de l'appelante :                                                     Me David J. Rotfleisch

Avocat de l'intimée :                                                         Me Shatru Ghan

JUGEMENT

L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1997 est admis, avec dépens, et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour de février 2002.

« J. E. Hershfield »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de juin 2002.

Mario Lagacé, réviseur



[1]            Les 180 000 $ enregistrés en 1996 comme étant l'en-cours de la créance ont été rajoutés en 1997 au montant du principal de la créance à long terme en faveur des appelants. Aucun montant n'était indiqué comme étant couru (ou réglé) à l'égard de la créance des appelants en 1997. L'en-cours du prêt était fondé sur un échéancier de remboursement de 15 000 $ par mois, mais les retraits nets en 1995 ont dépassé 180 000 $ (216 000 $). En 1996, il n'y a pas eu de retraits « nets » , puisque les avances supplémentaires ont dépassé le montant des retraits. En 1997, Mme Rose a contribué, compte tenu des retraits, le montant de 460 193 $ sous forme d'avances additionnelles. En 1997 également, M. Deck a avancé une petite somme, et Mme Wood a fait un retrait net de quelque 23 000 $.

[2]         L'intimée avait commencé par faire porter le litige sur la question de savoir comment les soldes des comptes de prêts des actionnaires étaient devenus tels qu'ils apparaissent au paragraphe 25 de l'exposé conjoint des faits. Cela signifiait qu'elle mettait en doute le comportement des parties relativement aux changements des soldes de prêts depuis le transfert des actifs en 1994 ainsi que les conclusions à tirer de ce comportement. Il s'agissait de savoir si certaines avances d'actionnaires après 1994 avaient pour objectif d'en tirer un revenu. Au cours du procès, toutefois, l'avocat de l'intimée a convenu que la seule question à considérer était celle de savoir si les soldes de prêts établis au paragraphe 25 de l'exposé conjoint des faits s'étaient révélés des créances irrécouvrables de la manière et à un moment compatibles avec la déduction de pertes au titre d'un placement d'entreprise en 1997. Par conséquent, il a été convenu que l'objectif de certaines des avances d'actionnaires n'était pas en cause.

[3]         Bien que cela ne ressorte pas clairement de la Proposition, la preuve présentée au procès donne à penser que la créance privilégiée de l'entreprise apparentée pourrait avoir été ajoutée au compte de prêt d'actionnaire d'une appelante qui avait hypothéqué son domicile pour satisfaire à une créance bancaire garantie de la Société. L'intimée n'a pas contesté cette preuve et, quoi qu'il en soit, les soldes de prêt sont établis dans l'exposé conjoint des faits. De même, la Proposition ne permet pas de savoir exactement quelles étaient les créances garanties totales du « gouvernement » . Sans figurer dans la liste des créanciers garantis, le gouvernement de l'Ontario était traité comme un créancier garanti ou privilégié à l'égard de certaines obligations fiscales de l'Ontario afin d'assurer que la Société conserve son permis d'alcool. En tous cas, les paiements préférentiels aux deux paliers de gouvernement étaient inclus dans la Proposition et l'intimée n'a pas mis en doute les montants exacts de ces créances ou versements.

[4]           Ce qui est revendiqué ici, c'est une réduction du revenu en vertu de l'article 3 de la Loi, correspondant au montant de la « perte admissible au titre d'un placement d'entreprise » du contribuable, soit une partie de la « perte au titre d'un placement d'entreprise » selon l'article 38. Au départ, il s'agit donc de déterminer l'existence d'une « perte au titre d'un placement d'entreprise » pour une année donnée. L'alinéa 39(1)c) contient les critères qui permettent d'établir une « perte au titre d'un placement d'entreprise » .

[5]           Dans Anjalie, une détermination a été faite qu'une créance était irrécouvrable avant la production de la déclaration de revenus pour l'année. Quelques années plus tard, le contribuable a demandé à modifier cette première détermination. Il a été toutefois décidé que la première détermination avait été faite de façon raisonnable et honnête et ne pouvait être modifiée.

[6]           Voir Roy v. M.N.R., 58 DTC 676, à la page 680.

[7]                L'avocat de l'intimée n'a pas avancé la position selon laquelle la créance était irrécouvrable au cours d'une année précédente en vue de la rejeter forcément sous prétexte que la demande de déduction était tardive. Il semble plutôt que sa position était que, si les affaires n'allaient pas assez mal pour envisager la déduction les années précédentes, elles n'allaient pas assez mal non plus en 1997 pour justifier la déduction des avances de cette année-là. Cette position ne tient pas du tout compte de la proposition de protection de la loi sur les faillites et, mis à part le fait qu'elle semble compléter l'argument présenté à l'égard de la décision de la Cour d'appel fédérale dans Flexi-Coil, elle n'a pas grand mérite à mon avis. La décision de la Cour d'appel fédérale dans Flexi-Coilest examinée séparément dans les présents motifs.

[8]           Voir le renvoi de la Cour d'appel fédérale aux commentaires du juge de première instance à la page 5.

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