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Date: 20010316

Dossier: 1999-3894-EI

ENTRE :

MARJORIE DESCHAMBAULT,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

BOARD OF EDUCATION OF THE POTASHVILLE

SCHOOL DIVISION NO. 80 OF SASKATCHEWAN,

intervenant,

ET

Dossier: 1999-3895(EI)

LORI SUTHERLAND,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

ET

Dossier: 1999-3896(EI)

VERONICA M. ULMER,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

Motifs du Jugement

Le juge suppléant Porter, C.C.I

Introduction

[1]      Les appels en instance ont été entendus sur preuve commune du consentement des parties à Regina (Saskatchewan), le 5 juillet 2000.

[2]      La question en litige, qui est la même dans chaque affaire, consiste à déterminer si les appelantes, des employées de soutien travaillant dans des écoles de la commission scolaire no 80 de Potashville en Saskatchewan (la « commission scolaire » ), étaient admissibles à des prestations en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi pendant les mois de juillet et d'août 1998, quand les écoles étaient fermées et qu'elles-mêmes ne rendaient aucun service.

[3]      Chacune des appelantes travaillait comme employée de soutien à la commission scolaire au cours des années 1997 et 1998; Mme Deschambault était secrétaire et aide-enseignante; Mme Sutherland, commis de bibliothèque et aide-enseignante, et Mme Ulmer, secrétaire.

[4]      Le 25 juin 1999, le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a déterminé que l'emploi exercé par chaque appelante du 18 août 1997 au 24 août 1998, soit du début de l'année scolaire 1997-1998 jusqu'au début de l'année scolaire 1998-1999 et, surtout, pendant les mois de juillet et août 1998, était un emploi assurable en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi. Pour ce faire, il s'est appuyé sur l'article 2, le paragraphe 7(2) et l'alinéa 5(1)a) de la Loi sur l'assurance-emploi, ainsi que sur le paragraphe 14(1) du Règlement sur l'assurance-emploi.

[5]      Les appelantes ont interjeté appel de cette décision devant la Cour pour le motif qu'elles avaient été « licenciées [es] ou [avaient] cess[é] d'être au service de [leur] employeur » [ « laid off or separated from that employment » ] le 30 juin 1998 et qu'elles avaient donc subi un « arrêt de rémunération » , ce qui leur donnait droit au bénéfice des prestations d'assurance-emploi pendant la période en cause, soit du 1er juillet au 24 août 1998, date de la réouverture de l'école.

[6]      Les parties s'entendent pour dire que les appelantes n'ont rendu aucun service au cours de la période de fermeture des écoles qui correspond, selon les termes utilisés dans la convention collective et la Saskatchewan Education Act, à la « période des vacances d'été » . La question à trancher est simple, il s'agit de savoir si les appelantes étaient employées et rémunérées pour une période de douze mois « annuellement » , ou si elles étaient employées et rémunérées pour une période de dix mois, c'est-à-dire pour « l'année scolaire » , et « licenciées » ou « cess[aient] » d'être au service de leur employeur pendant la période des vacances d'été.

[7]      La commission scolaire est intervenue dans le cadre des appels pour appuyer les appelantes.

[8]      Quoiqu'il n'ait pas officiellement le statut de partie intervenante dans l'appel en l'instance, le Syndicat canadien de la fonction publique (le « syndicat » ) a représenté les appelantes à l'audience et a généralement défendu leur thèse.

Le droit

[9]      Les dispositions législatives et réglementaires pertinentes sont libellées comme suit :

[10]     L'article 2 de la Loi sur l'assurance-emploi définit les termes « arrêt de rémunération » de la manière suivante :

« arrêt de rémunération » L'arrêt de la rémunération d'un assuré qui se produit dans les cas et aux moments déterminés par règlement.

[11]     Le paragraphe 5(1) de la Loi sur l'assurance-emploi est ainsi formulé :

Sous réserve du paragraphe (2), est un emploi assurable :

a)          l'emploi exercé au Canada pour un ou plusieurs employeurs, aux termes d'un contrat de louage de services ou d'apprentissage exprès ou tacite, écrit ou verbal, que l'employé reçoive sa rémunération de l'employeur ou d'une autre personne et que la rémunération soit calculée soit au temps ou aux pièces, soit en partie au temps et en partie aux pièces, soit de toute autre manière;

[12]     Le paragraphe 7(2) dit ceci :

L'assuré autre qu'une personne qui devient ou redevient membre de la population active remplit les conditions requises si, à la fois :

a)          il y a eu arrêt de la rémunération provenant de son emploi;

[13]     Le paragraphe 14(1) du Règlement sur l'assurance-emploi est ainsi libellé :

Sous réserve des paragraphes (2) à (7), un arrêt de rémunération se produit lorsque, après une période d'emploi, l'assuré est licencié ou cesse d'être au service de son employeur et se trouve à ne pas travailler pour cet employeur durant une période d'au moins sept jours consécutifs à l'égard de laquelle aucune rémunération provenant de cet emploi, autre que celle visée au paragraphe 36(13), ne lui est payable ni attribuée. (Je souligne)

[14]     La Education Act of Saskatchewan définit les termes « année scolaire » de la manière suivante :

[TRADUCTION]

la période qui commence le 1er juillet d'une année civile et se termine le 30 juin de l'année civile suivante;


[15]     Les paragraphes 163(2) et 163(3) de la Education Act disent ceci :

[TRADUCTION]

(2) Une année scolaire comprend 200 jours d'école, mais le ministre peut, une année donnée, ordonner que, pour cette année-là, l'année scolaire compte un nombre de jours d'école inférieur, qu'il juge recommandé.

(3) Sous réserve des paragraphes (1) et (2), la commission scolaire [ ...] détermine :

a)          les dates d'ouverture et de fermeture des écoles;

b)          le calendrier général des activités pour l'année scolaire et pour tout autre semestre, session ou période de l'année scolaire, selon le cas.

[16]     La Labour Standards Act définit le terme « licenciement » [ « lay-off » ] de la manière suivante :

[TRADUCTION]

[...] l'interruption provisoire, par un employeur, des services d'un travailleur pour une période d'au moins six jours consécutifs.

[17]     L'article 43 de la Labour Standards Act est libellé comme suit :

[TRADUCTION]

43.        Sauf pour un motif valable autre qu'un arrêt de travail, aucun employeur ne peut congédier ou licencier un travailleur qui est à son emploi depuis au moins trois mois consécutifs sans lui donner au moins :

a)          un préavis écrit d'une semaine, s'il compte moins d'une année de service;

b)          un préavis écrit de deux semaines, s'il compte une année de service ou plus, mais moins de trois;

c)          un préavis de quatre semaines, s'il compte trois années de service ou plus, mais moins de cinq;

d)          un préavis de six semaines, s'il compte cinq années de service ou plus, mais moins de dix;

e)          un préavis écrit de huit semaines, s'il compte dix années de service ou plus.

[18]     On peut voir que les termes « arrêt de rémunération » sont définis au paragraphe 2(1) de la Loi sur l'assurance-emploi comme l'arrêt de rémunération qui se produit « dans les cas et aux moments déterminés par règlement » . Ces deux propositions sont reliées par une conjonction de coordination, ce qui signifie qu'un arrêt de la rémunération se produit « dans les cas et aux moments » déterminés par règlement. Les cas et les moments doivent être déterminés par renvoi au Règlement. C'est une obligation car, si les deux propositions étaient reliées par une conjonction disjonctive, les facteurs à prendre en considération ne seraient peut-être pas les mêmes.

[19]     La disposition réglementaire en cause est le paragraphe 14(1) du Règlement général. La question en litige en l'espèce doit être réglée dans le contexte des termes suivants du Règlement :

•            est licencié ou cesse d'être au service de son employeur

•               à l'égard de laquelle aucune rémunération provenant de cet emploi [...] ne lui est payable ni attribuée.

[20]     En conséquence, il faut d'abord déterminer si les appelantes ont été « licenciées » ou ont « cess[é] d'être au service » de leur employeur et si leur rémunération est « payable » ou « attribuée » à l'égard de ce licenciement ou de cette cessation d'emploi. D'entrée de jeu, je serais porté à dire que les termes « licencié » ou « cesse d'être au service » revêtent, selon moi, des sens différents.

[21]     Je me hâterais également d'ajouter que la situation dont je suis saisi en l'espèce diffère de celle des enseignants, qui sont dorénavant assujettis à des dispositions spéciales pour la période de non-enseignement de l'été. Je songe à l'affaire Petts et l'Alberta Teachers' Association, [1974] 2 C.F. 225 ((1975), 6 N.R. 356), qui a été citée avec approbation par le juge McIntyre dans l'affaire Dick c. C.A.C. [1980] 2 R.C.S. 243 ((1980), 32 N.R. 552). Je reviendrai à cette affaire plus tard.

[22]     Je songe plus particulièrement à la décision rendue récemment par mon confrère le juge O'Connor, de la Cour canadienne de l'impôt, dans l'affaire Donnawell c. M.R.N., [1999] A.C.I. 851, dossier de la Cour no 98-724(UI), qui portait sur une situation semblable. Je lui suis redevable des motifs étoffés qu'il a prononcés dans cette affaire et je me suis penché sur l'affaire dont je suis saisi en l'espèce en tenant compte du fait qu'il est souhaitable pour un tribunal de rendre des décisions uniformes. Quoi qu'il en soit, il existe certaines différences factuelles sur lesquelles je dois me pencher, surtout le libellé de la convention collective applicable en l'espèce, qui diffère à maints égards de celui de la convention collective en cause dans l'affaire sur laquelle le juge O'Connor s'est prononcé.

Les faits

[23]     Dans les réponses aux avis d'appel, il est dit que le ministre s'est fondé sur les hypothèses de fait suivantes pour rendre sa décision :

          [TRADUCTION]

a)          le payeur est responsable de toutes les écoles comprises dans le territoire qui lui est attribué, et en dirige les activités;

b)          l'appelante (Marjorie Deschambault) a été embauchée par le payeur à titre de secrétaire et d'aide enseignante;

b)                   l'appelante (Lori Sutherland) a été embauchée par le payeur à titre de commis de bibliothèque et d'aide enseignante;

b)          l'appelante (Veronica M. Ulmer) a été embauchée par le payeur à titre de secrétaire;

c)          les années scolaires (ci-après appelées « l'année scolaire » ) des écoles que dirige le payeur sont généralement les suivantes :

            (i)          25 août 1997 au 29 juin 1998, ou

            (ii)         24 août 1998 au 30 juin 1999;

d)          l'année scolaire comprend généralement 200 jours d'école;

e)          ni le payeur ni l'appelante ne contestent le fait que cette dernière était employée par le payeur en vertu d'un contrat de louage de services;

f)           l'appelante était membre du Syndicat canadien de la fonction publique;

g)          les conditions d'emploi de l'appelante chez le payeur étaient régies par une convention collective;

h)          l'appelante travaillait 37,5 heures par semaine;

i)           l'appelante touchait un salaire annuel qui lui était versé sur une période de dix mois, à l'exclusion des mois de juillet et août;

j)           l'appelante a reçu une indemnité de congés annuels qui était incluse dans la rémunération versée chaque période de paie;

k)          l'appelante jouissait pendant la période en cause de la protection de régimes d'indemnité offerts par le payeur, dont une assurance-vie, une assurance en cas de décès ou de mutilation par accident et une assurance invalidité de longue durée;

l)           l'appelante a conservé ses crédits de congés de maladie accumulés, son ancienneté et les autres avantages auxquels elle avait droit au cours de la période en cause;

m)         l'appelante a participé au régime de pension des employés municipaux au cours de la période en cause;

n)          le régime de pension des employés municipaux prévoit le versement d'indemnités de cessation d'emploi lorsqu'il y a cessation d'emploi;

o)          l'appelante n'a pas avisé le régime de pension des employés municipaux qu'elle avait subi une cessation d'emploi au cours de la période ni n'a par ailleurs prétendu avoir droit à une indemnité de cessation d'emploi à l'égard de cette période;

p)          le payeur n'a pas avisé l'appelante qu'il mettait fin à son emploi au cours de la période;

q)          l'appelante n'a pas avisé le payeur qu'elle quittait son emploi pour la période;

r)           on n'a pas mis fin au contrat de louage de services entre l'appelante et le payeur pour la période;

s)          l'appelante n'a pas été licenciée ni n'a par ailleurs cessé d'être au service du payeur durant la période;

t)           l'appelante a touché sa rémunération habituelle provenant de l'emploi exercé pour le payeur au cours de la période;

u)          il n'y a pas eu d'arrêt de la rémunération provenant de l'emploi au cours de la période;

v)          le payeur a informé l'appelante que l'année scolaire commençait le 24 août 1998;

w)         l'appelante n'a pas été obligée de soumettre une nouvelle demande d'emploi à l'employeur au cours de la période.

[24]     Les appelantes ne contestent pas les faits, à l'exception des questions essentielles. En conséquence, elles ont confirmé les alinéas a) à h), j) à m), o), v) et w).

[25]     Elles ont rejeté les alinéas i), n) et p) à u).

[26]     Veronica Ulmer, une aide enseignante employée par la commission scolaire, a témoigné. On a dit de son témoignage qu'il s'appliquait aux trois appelantes. Leurs situations étaient identiques sauf sur le plan des fonctions exécutées. En principe, elles ont travaillé du 25 août 1997, quand l'école a ouvert ses portes, jusqu'au 29 juin 1998, quand l'école a fermé ses portes. Elles n'ont repris le travail que le 24 août 1998. Elles prétendent avoir subi un arrêt de rémunération du 29 juin au 24 août 1998, car elles n'ont pas travaillé durant cette période, et n'ont pas été rémunérées à l'égard de celle-ci. En effet, elles prétendent avoir été licenciées ou avoir cessé d'être au service de leur employeur durant la période en cause.

[27]     Veronica Ulmer a produit en preuve la convention collective (pièce A-1) conclue entre le syndicat et la commission scolaire et qui définit les conditions d'emploi des appelantes. Elle a aussi produit en preuve une liste d'ancienneté indiquant le niveau d'ancienneté des trois appelantes à la commission scolaire (pièce A-2), ainsi qu'une lettre de Revenu Canada datée du 29 juillet 1999 signée au nom de K. Wolchuk, chef des appels, pour le ministre du Revenu national (pièce A-4). Y sont exposés les motifs des décisions rendues par le ministre. Cette lettre est libellée comme suit :

[TRADUCTION]

1.          En vertu de la convention collective conclue avec le syndicat, les travailleuses reçoivent un salaire annuel, qui leur est versé sur une période de dix mois. Cela indique que les travailleuses gagnent un revenu pendant toute l'année (annuellement), mais qu'elles sont rémunérées dix fois seulement.

2.          Aux termes de la convention collective conclue avec le syndicat, un employé doit être licencié par écrit. Les travailleuses n'ont pas reçu d'avis de licenciement écrit; seul un relevé d'emploi leur a été délivré.

3.          Aux termes de la convention collective conclue avec le syndicat, les travailleuses participent à de nombreux régimes d'avantages. Certains de ces régimes sont à la seule charge du payeur. Ils demeurent en vigueur pendant les mois d'été.

4.          Aux termes de la convention collective conclue avec le syndicat, une indemnité de congés annuels est comprise dans la rémunération versée à chaque période de paie. Le dernier jour de travail des travailleuses est le 27 juin.

5.          Aux termes de la convention collective conclue avec le syndicat, les rappels au travail se font d'office à la fin des périodes de vacances scolaires, à moins que la commission n'ait signifié un avis de cessation d'emploi ou de licenciement d'une durée indéterminée en vertu de l'article 43 de la Labour Standards Act.

6.          Les employés continuent de jouir des avantages auxquels ils ont droit pendant les mois d'été même s'ils ne travaillent pas.

7.          Les travailleuses étaient assurées d'avoir un emploi à l'automne.

[28]     Cette lettre constitue incontestablement un exposé détaillé des motifs invoqués dans la décision initiale. Je relève en particulier qu'il y est dit qu'aux termes de la convention collective conclue avec le syndicat le travailleur reçoit un salaire annuel, qui est versé sur une période de dix mois. Je ne trouve aucune mention du genre dans la convention collective. Celle-ci contient tout au plus une annexe « A » libellée en termes généraux, et une annexe « B » , qui, à mon avis, ne veulent rien dire si elles sont prises hors contexte, et au sujet desquelles aucune explication n'est fournie dans la convention collective même. Y sont indiqués les taux de salaire applicables à certaines catégories d'emplois. Les titulaires des trois postes en cause étaient tenues de travailler 7,5 heures par jour pendant toute l'année, appelée « l'année scolaire » . Les éléments de preuve indiquent clairement que le salaire, quel qu'en soit le montant, a été payé en dix versements mensuels. Il n'y a eu aucun paiement à la fin de juillet ou à la fin d'août. Il s'agit donc de déterminer si le salaire se rapportait à une période de douze mois mais était payable sur dix mois, ou s'il se rapportait à une période de dix mois et était payable sur dix mois à l'égard de ces dix mois.

[29]     Il convient de reproduire les diverses clauses de la convention collective qui sont pertinentes en l'espèce.

[TRADUCTION]

PRÉAMBULE

La présente convention collective a pour objet :

a)          de favoriser des relations de travail harmonieuses et la négociation des conditions de travail entre la commission scolaire et le syndicat;

b)          de reconnaître l'importance pour les deux parties de discussions et de négociations conjointes;

c)          d'accroître l'efficacité des opérations;

d)          d'instaurer une méthode de règlement à l'amiable des éventuels différends ou griefs se rapportant à l'application de la présente convention collective;

e)          d'énoncer les conditions d'emploi négociées par les deux parties.

ARTICLE 4 - ANCIENNETÉ

4.1        Définition

a)          L'ancienneté est fondée sur le nombre d'années de service continues qu'un travailleur a accumulées, compte tenu de la période réellement travaillée depuis le premier jour de la période de service ininterrompu à la commission scolaire.

b)          Les interruptions normales qui surviennent durant la période prévue des vacances scolaires ne constituent pas une interruption de service.

ARTICLE 5 - LICENCIEMENT, RAPPEL, VACANCES ET PROBATION

5.1        Licenciement d'office

            Les travailleurs qui sont employés pour la durée de l'année scolaire seront réputés être licenciés pour la période des vacances d'été. Ils sont rappelés d'office après la période des vacances scolaires, à moins que la commission leur ait signifié un avis de cessation d'emploi ou de licenciement d'une durée indéterminée en conformité avec l'article 43 de laLabour Standards Act. La présente clause tiendra lieu d'avis de licenciement et de rappel pour la période des vacances scolaires durant la durée d'application de la présente convention collective.

5.3        Rappel

[...]

b)          En vertu de l'article 4.2 intitulé « Perte d'ancienneté » , le travailleur licencié conserve son taux de rémunération et tous les avantages déjà acquis, mais n'en accumule aucun, durant la période de licenciement. (Les caractères gras sont de moi)

ARTICLE 6 - VACANCES ANNUELLES ET JOURS FÉRIÉS

6.1        Admissibilité

a)          Paiement

            Il est entendu que le salaire des travailleurs qui sont employés pour la durée de l'année scolaire comprend tous les montants qui leur sont dus au titre des indemnités de congés annuels et de jours fériés en conformité avec la Labour Standards Act.

[...]

ARTICLE 7 - CONGÉS

7.1        Congés - Généralités

            Sous réserve des nécessités du service, et dans la mesure où le travailleur a invoqué des motifs valables et suffisants, la commission scolaire accorde un congé sans salaire et sans perte ou accumulation d'ancienneté pendant une période maximale d'une (1) année scolaire, ou pendant toute autre période déterminée par le travailleur et la commission scolaire. La demande doit être soumise par écrit au moins quinze (15) jours ouvrables avant la date prévue du congé.

ARTICLE 9 - DURÉE DE LA CONVENTION

9.1        Durée

            La présente convention collective entre en vigueur le 1er janvier 1995 et prend fin le 31 décembre 1997 et est ensuite renouvelée chaque année, à moins que l'une ou l'autre des parties ne donne un avis écrit aux termes de l'article 9.2 intitulé « Avis écrit » .

ANNEXE « A »

ÉQUIVALENT À TEMPS PLEIN

HEURES DE TRAVAIL PAR CATÉGORIE D'EMPLOIS

Catégorie d'emplois                   Heures de travail quotidiennes                Année*

Commis de bibliothèque                         7,5                                            Scolaire

Aide-enseignant                                     7,5                                            Scolaire

Secrétaire                                              7.5                                            Scolaire

* englobe les congés payés durant les quatre (4) journées pédagogiques

[30]     Les dispositions des alinéas 4.1a) et b) font en sorte que les cessations de fonctions qui surviennent chaque année durant les vacances scolaires au cours de la période en cause (30 juin au 24 août) ne constituent pas une interruption de service aux fins du calcul de l'ancienneté. Sans cette clause, qui s'applique au calcul de l'ancienneté, on peut supposer que ces situations prendraient valeur d'interruption de service. Cependant, les éléments de preuve indiquent aussi clairement qu'aucune des heures comprises dans ces périodes de cessation des fonctions n'était prise en compte aux fins du calcul de l'ancienneté. En d'autres termes, elles n'avaient aucune incidence sur la continuité de service pour le calcul de l'ancienneté, mais elles ne comptaient pas non plus aux fins de ce calcul. Cette interprétation se trouve confirmée à l'alinéa 5.3b).

[31]     À l'article 7.1, il est dit que, même si le travailleur prend un congé non rémunéré d'une durée maximale d'un an, ce qui constituerait manifestement un arrêt de rémunération, il n'y a ni perte ni accumulation d'ancienneté. Par conséquent, le fait qu'il n'y ait aucune perte d'ancienneté au cours de la période d'été ne permet aucunement de conclure qu'il n'y a pas eu d'arrêt de rémunération.

[32]     Mme Ulmer a déclaré qu'elle considérait qu'elle avait été licenciée durant la période d'été. La commission scolaire lui a remis un relevé d'emploi en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi. Elle s'est mise à la recherche d'un autre emploi et a présenté une demande de prestations d'assurance-emploi. En contre-interrogatoire, elle a déclaré que le relevé d'emploi était annexé au dernier chèque de paye qui lui a été remis à la fin de juin. Ce document lui a été fourni sans qu'elle en fasse la demande. Il a manifestement été délivré en application de l'article 5.1 de la convention collective. Mme Ulmer a également précisé que la rémunération qui lui était versée chaque mois englobait un montant au titre de l'indemnité de congés annuels. Les cotisations au régime d'avantages des employés municipaux étaient prises en charge par l'employeur et les avantages déjà acquis étaient maintenus durant les périodes de vacances scolaires, y compris la période en cause en l'espèce.

[33]     Michael Keith, un représentant national du Syndicat canadien de la fonction publique a aussi témoigné. Il a déclaré qu'il savait que les employés de la commission scolaire demandaient des prestations d'assurance-emploi durant les vacances d'été. Il a précisé qu'il était le négociateur en chef du syndicat lorsque la convention collective applicable a été négociée. Selon lui, les employés travaillaient seulement pendant l'année scolaire. En ce qui concerne le régime de pension des employés municipaux, les travailleurs n'accumulaient que vingt mois d'ancienneté sur une période de vingt-quatre mois, mais le régime s'appliquait sans interruption durant l'été. À son tour, il a affirmé qu'il n'y avait ni accumulation ni perte d'avantages durant la période. Une copie du régime a été produite en preuve sous la cote A-5. Je dirai très franchement que les éléments de preuve se rapportant au régime municipal ne sont pas particulièrement utiles car ils portent sur une question bien définie. Cependant, le témoin a affirmé qu'avant la signature de la convention collective ces catégories de travailleurs étaient rémunérées sur une période de dix mois. Ce témoignage indique qu'en négociant la convention collective le syndicat et la commission scolaire n'ont pas essayé de modifier l'entente antérieure; ils se sont plutôt employés à la confirmer et à la reconduire.

[34]     Voilà en réalité la totalité des éléments de preuve qui ont été produits devant moi.

Observations des appelantes

[35]     La thèse des appelantes s'appuie principalement sur l'article 5.1 de la convention collective, qui prévoit le licenciement d'office des appelantes (le 29 juin 1998) et leur rappel d'office le 24 août de la même année. La question à trancher est celle de savoir si c'était un véritable licenciement et un véritable rappel aux termes de la Labour Standards Act de la Saskatchewan ou si c'était juste une construction de l'esprit. Soit dit en passant, les autres avantages comme l'ancienneté, les régimes d'assurance, de congés de maladie et de pension sont demeurés en vigueur durant les vacances d'été, mais il est évident qu'ils n'ont pas augmenté dans les faits. Ainsi, les travailleuses ont conservé leurs avantages mais n'en ont pas accumulé. Il n'y a eu ni interruption ni annulation de ces avantages, qui n'ont toutefois pas augmenté. En outre, il semble qu'il y avait un régime d'assurance-vie en place et qu'il a été maintenu durant la période.

[36]     Le syndicat, s'exprimant pour le compte des appelantes, a soutenu qu'il n'y avait pas de travail pour ces travailleuses durant la période en cause et que leur situation se trouve donc à être identique à celle de tout autre employé qui est licencié de façon saisonnière pour cause de pénurie de travail, de mauvais temps ou pour tout autre motif valable. Le syndicat assimile cette situation à un ralentissement de travail chez General Motors. Je ferais plutôt un rapprochement avec une fermeture d'usine chaque année aux fins de l'entretien ou du réoutillage. Le syndicat soutient que ce sont là des exemples d'employés permanents qui subissent un arrêt de rémunération et que la situation n'est guère différente en l'espèce.

[37]     Le syndicat a également fait valoir que le libellé de l'article 5.1 de la convention collective constituait un avis officiel de licenciement et de rappel ayant fait l'objet d'une entente entre l'unité de négociation et l'employeur. Le syndicat s'est dit d'accord pour adopter cette façon de faire afin d'éviter à l'employeur d'envoyer chaque fois un avis à tous les travailleurs pour se conformer à la Labour Standards Act. L'effet et l'esprit demeurent toutefois les mêmes.

[38]     En dernier lieu, les appelantes ont soutenu qu'elles étaient libres de travailler ailleurs durant la période en question, avant d'être rappelées au travail, ce qui montre bien, selon elles, qu'elles n'étaient pas employées par la commission scolaire durant cette période. Elles ne pouvaient pas, soutiennent-elles, avoir deux employeurs en même temps. Précisons qu'elles n'ont pas exercé d'autre emploi durant la période, mais elles soutiennent qu'elles avaient le droit de le faire si l'occasion s'en présentait.

[39]     Elles mentionnent également le fait que la commission scolaire leur a remis à chacune un relevé d'emploi avant le 29 juin.

Observations de la commission scolaire

[40]     Je suis redevable à l'avocat de la commission scolaire qui a déposé un mémoire complet et utile pour le compte de l'intervenant en faveur des appelantes.

[41]     Le mémoire explique les attributions des commissions scolaires de la province de la Saskatchewan aux fins de l'application de la Education Act; y est également annexée une copie de la convention collective des enseignants applicable à l'année civile 1997. Fait intéressant à noter, dans les clauses salariales que renferme cette convention, il est question d'un « taux de salaire annuel de base » . Précisons également que les dispositions de la Education Act se rapportant aux enseignants ne s'appliquent pas aux autres travailleurs comme les appelantes. Pour sa part, la Labour Standards Act s'applique à ces travailleurs, mais exclut les enseignants. En conséquence, il faut obligatoirement faire une distinction entre les enseignants et les autres travailleurs mentionnés dans les lois provinciales régissant les conditions de travail.

[42]     La commission scolaire insiste sur le fait que, dans la convention collective à laquelle les appelantes sont assujetties, il est question de « l'année scolaire » ; on n'y retrouve pas les termes « annuellement » et « toute l'année » .

[43]     La commission scolaire attire l'attention sur l'article 6.1, qui porte sur les congés annuels et les jours fériés. Il y est dit que les indemnités de congés annuels et de jours fériés sont comprises dans le salaire indiqué à l'annexe « A » , en conformité avec la Labour Standards Act. La commission scolaire affirme que les indemnités de congés annuels des appelantes étaient comprises dans leurs salaires mensuels parce qu'elles ne travaillaient pas pendant une année civile complète. Si elles avaient travaillé pendant toute l'année, elles auraient eu droit à des vacances annuelles. En conséquence, elles ont reçu une indemnité de congés annuels à la place de congés rémunérés.

[44]     La commission scolaire renvoie également à l'article précisant que l'employé conserve son ancienneté, mais que la période en cause n'est pas prise en compte aux fins du calcul de l'ancienneté.

[45]     La commission scolaire a soutenu que les préavis de licenciement ou de cessation d'emploi qu'elle doit donner aux travailleurs sont indiqués à l'article 43 de la Labour Standards Act et que les articles de la convention collective se rapportant à ces préavis ont été négociés en conformité avec cette disposition de la loi provinciale.

[46]     La commission scolaire a affirmé que l'employeur et le syndicat avaient tous deux reconnu que, durant la période des vacances scolaires d'été où l'école était fermée, il n'y avait pas de travail pour certains employés qui se trouvaient ainsi en véritable situation de licenciement. Elle s'appuie sur la définition de « licenciement » à l'article 2 de la Labour Standards Act, soit « l'interruption provisoire, par un employeur, des services d'un travailleur pour une période d'au moins six jours consécutifs » . Elle insiste pour dire qu'une cessation provisoire des fonctions correspond à un arrêt provisoire de rémunération; ce n'est toutefois pas toujours le cas, comme le révèle la jurisprudence.

[47]     La commission scolaire a soutenu qu'il existe une différence entre l'attribution du travail et la fermeture de l'école. Parfois, durant l'année scolaire, les appelantes peuvent être sans travail une ou deux journées pendant la semaine et elles ne sont alors pas tenues de se présenter au travail. Je suppose que les journées pédagogiques des enseignants sont un bon exemple. Il faut faire une distinction entre ce genre de situation et la fermeture de l'école entre le dernier jour des classes une année scolaire donnée et le premier jour des classes l'année scolaire suivante.

[48]     La commission scolaire a fait observer que la Loi sur l'assurance-emploi fait une distinction entre une cessation d'emploi et un licenciement. Elle a affirmé ce qui suit :

[TRADUCTION]

L'existence d'un contrat permanent ou d'un contrat continu d'emploi n'exclut pas le fait qu'il puisse y avoir des périodes de licenciement.

[49]     La commission scolaire a une nouvelle fois mentionné que la situation des appelantes n'était pas comparable à celle des enseignants, qui sont employés à l'année. Les enseignants négocient avec la commission scolaire pour déterminer si leur salaire annuel leur sera payé en douze ou en dix versements, mais, quoi qu'il en soit, ils reçoivent un salaire annuel. On peut donc conclure que la commission scolaire rémunère les appelantes pour une période de dix mois seulement et qu'elle ne leur verse pas un salaire annuel en dix versements mensuels.

[50]     La commission scolaire a fait valoir que l'incidence d'un « licenciement » dans le cadre de la relation de travail est généralement différente de celle d'une « cessation d'emploi » . Le seul point commun entre les deux est que le travailleur ne rend aucun service et qu'il ne reçoit aucune rémunération. Tout aspect de la relation de travail qui continue d'exister durant la période de licenciement doit être expressément prévu dans la convention collective ou le contrat de travail. Les clauses du genre — , dont la commission scolaire a donné des exemples — qui garantissent la continuité d'emploi à des fins expresses se rapportant uniquement à l'incidence du licenciement dans ce contexte particulier.

[51]     La commission scolaire a insisté à plusieurs reprises sur le fait que le ministre applique à un « licenciement » les critères qu'il appliquerait à une « cessation définitive d'emploi » , alors que les deux situations sont différentes.

[52]     La commission scolaire a cité la décision rendue dans l'affaire Baldassi et al. v. Commission, CUB 22437, une décision du juge Cullen siégeant en qualité de juge-arbitre, qui a déclaré ce qui suit :

[TRADUCTION]

[...] mais dans le contexte de la Loi sur l'assurance-chômage, un employé est réputé avoir subi une perte d'emploi lorsqu'il a subi un arrêt de rémunération, que cet arrêt coïncide ou non avec une interruption complète et définitive de la relation employé-employeur dans d'autres contextes.

[53]     En terminant, la commission scolaire a fait une distinction entre la situation qui existe en l'espèce et l'affaire Donnawell (précitée). Elle a fait observer que les facteurs sont très différents et que l'affaire devrait être considérée comme un cas d'espèce.

Observations du ministre

[54]     Je suis également redevable à l'avocate du ministre de m'avoir soumis des observations écrites complètes pour le compte du ministre. Elle expose avec justesse la question fondamentale que la Cour doit trancher, à savoir :

[TRADUCTION]

Si les appelantes ont subi un arrêt de rémunération au sens du paragraphe 14(1) du Règlement sur l'assurance-emploi.

[55]     Elle énonce les trois exigences à remplir aux termes du paragraphe 14(1) du Règlement sur l'assurance-emploi :

(i)          un LICENCIEMENT ou une CESSATION d'emploi;

(ii)         ne pas travailler durant une période d'au moins sept jours consécutifs [...];

(iii)        à l'égard de laquelle aucune rémunération provenant de cet emploi [...] n'est attribuée.

[56]     Elle a soutenu que les appelantes n'avaient pas rempli la première et la troisième exigences, ce qui laisse entendre qu'elle admet que la deuxième a été remplie. Manifestement, les appelantes ont été sans travail durant une période de plus de sept jours consécutifs.

[57]     L'avocate a affirmé qu'il n'y avait pas eu d'interruption de la relation employeur-employé. En conséquence, les appelantes n'ont pas été « licenciées » au sens du paragraphe 14(1) du Règlement sur l'assurance-emploi. À ses dires, il y a licenciement « lorsque la relation employé-employeur est rompue de façon définitive » (les caractères gras sont de moi) et l'article 5.1 de la convention collective ne constitue pas un véritable avis de licenciement au sens du paragraphe 14(1) du Règlement sur l'assurance-emploi. Elle n'a invoqué aucun texte officiel au soutien de la proposition selon laquelle la relation d'emploi doit être « rompue de façon définitive » . En fait, cette proposition n'est pas étayée par la jurisprudence et j'y reviendrai un peu plus loin dans les présents motifs.

[58]     L'avocate a invoqué la décision rendue par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Canada (Procureur général) c. Enns, no 559-89, 19 septembre 1990, ((1991)126 N.R. 393) à l'appui de la proposition selon laquelle, pour faire la preuve qu'il y a eu un « licenciement » , une personne doit démontrer non seulement qu'elle a subi un arrêt de rémunération, mais aussi qu'elle a été licenciée. Ce n'est pas tout à fait ce que dit cette décision; selon moi, elle signifie plutôt qu'il doit y avoir cessation du versement de la rétribution et cessation de la prestation des services pour qu'il y ait licenciement. Si le premier élément peut constituer la preuve d'un licenciement, il ne permet toutefois pas de tirer une conclusion définitive. Dans l'affaire en question, un membre du clergé avait continué de rendre les mêmes services bénévolement. La Cour d'appel fédérale a conclu que son contrat était demeuré en vigueur. Elle a déclaré ce qui suit :

[...] La congrégation s'attendait à ce qu'il continue d'accomplir le même travail que lorsqu'il était rémunéré et, dans les faits, c'est précisément ce qu'il a fait.

Je ferai remarquer que les faits de l'affaire Enns (précitée) étaient assez particuliers et qu'ils diffèrent totalement de ceux de l'affaire en cause en l'espèce.

[59]     L'avocate du ministre a également soutenu que « l'absence de rémunération n'est pas à elle seule un élément concluant » . J'accepte sans difficulté l'argument selon lequel le non-paiement de la rémunération n'est que l'un des deux aspects dont il faut tenir compte selon l'affaire Enns (précitée).

[60]     L'avocate a soutenu que le fait que les travailleurs ne rendent pas les services n'est pas un facteur concluant à lui seul. Elle a renvoyé à l'affaire Le procureur général du Canada c. Verrault, C.A.F., no A-186-86, 20 octobre 1986 ((1988), 86 N.R. 389), qui est en réalité l'envers de la médaille de l'affaire Enns. Dans l'affaire Verrault, les employés ont perdu leur emploi lorsqu'il y a eu fermeture de l'usine le 1er juillet 1994. Chaque employé a reçu un chèque dont le montant englobait le salaire et l'indemnité de congés annuels des deux mois suivants et a été informé qu'il allait être mis à pied à la fin de cette période. Tous les employés ont présenté une demande de prestations d'assurance-chômage pour la période de deux mois. Le juge Pratte, qui s'est penché sur la décision du juge-arbitre selon laquelle l'emploi avait pris fin au moment de la fermeture de l'usine plutôt qu'à la fin de la période de congé de deux mois, a déclaré ce qui suit :

[...] le juge-arbitre aurait lui-même commis une erreur de droit. Car il nous semble certain que des parties à un contrat de travail peuvent licitement convenir d'en prolonger la durée pendant une période où l'employé sera dispensé de fournir son travail.

En conséquence, la Cour d'appel fédérale a conclu que l'emploi n'avait pris fin que deux mois après la fermeture de l'usine. Manifestement, il y avait eu paiement du montant total de la rétribution à l'égard de la période de deux mois dans cette affaire, mais les employés avaient été dispensés de fournir leurs services; en d'autres termes, les deux éléments n'étaient pas en place. Suivant le raisonnement adopté dans cette affaire, si des parties à un contrat de travail peuvent licitement convenir d'en prolonger la durée, elles devraient également pouvoir s'entendre pour l'interrompre ou y mettre fin pour une période provisoire.

[61]     L'avocate a comparé la situation en l'espèce à celles des personnes qui demandent des congés de maternité et d'adoption. Je conviens avec elle que ces situations présentent un caractère particulier. Cependant, elles appuient la thèse voulant qu'il soit possible, dans certaines circonstances, prévues dans la loi ou dans le contrat, d'interrompre ou de mettre fin à un contrat de travail de manière provisoire.

[62]     L'avocate a soutenu que la convention collective envisageait deux types de licenciements, soit une « présomption de licenciement » et un « licenciement d'une durée indéterminée » . Sans s'appuyer sur des textes officiels et des éléments de preuve, elle a soutenu qu'avant de mettre fin à la relation de travail l'employeur aurait dû remettre aux appelantes un avis de licenciement pour une période d'une durée indéterminée. Je partage cet avis s'il s'agit d'une cessation d'emploi définitive, mais je ne vois pas la nécessité de procéder de la sorte lorsqu'il y a interruption provisoire d'un contrat, comme c'est le cas en l'espèce. On a dit que les dispositions de la convention collective satisfont aux exigences énoncées dans la Labour Standards Act et qu'elles ont été incluses à cette fin particulière.

[63]     L'avocate a contesté les observations écrites soumises au nom de la commission scolaire, dans lesquelles sont exposées les différences factuelles qui existent entre l'affaire en cause en l'espèce et l'affaire Donnawell (précitée). Elle a soutenu que l'affaire devait être tranchée au fond, sans tenir compte de la forme, et que la relation de travail est la même que celle décrite dans l'affaire Donnawell. Avec égards, je ne partage pas cet avis et je me pencherai sur les différences que j'ai relevées un peu plus loin dans les présents motifs. L'avocate en a contre le fait que les parties ont inclus la présomption de licenciement dans la convention collective. À mon avis, rien n'empêche un employeur et un syndicat d'inclure une telle clause pour régir leur relation de travail. Je conviens avec l'avocate qu'il s'agit d'une question de fait, mais j'estime que c'est aussi une question de droit, qu'une « présomption de licenciement » équivaut à un « licenciement » au sens où ce terme est utilisé au paragraphe 14(1) du Règlement sur l'assurance-emploi.

[64]     L'avocate a soutenu qu'il n'y avait pas lieu d'établir de parallèles avec d'autres employeurs — General Motors étant l'un de ceux que la commission scolaire a mentionnés — et qu'aucun élément de preuve n'avait été produit en l'espèce pour étayer les arguments de la commission scolaire à cet égard. Rien n'empêche la Cour d'admettre d'office les nombreux emplois saisonniers mentionnés dans un grand nombre d'arrêts publiés, et plus particulièrement les affaires mettant en cause des pêcheurs dans les provinces des Maritimes, qui sont les plus représentatives.

[65]     L'avocate a également soutenu que, dans le cas d'un ralentissement des activités, l'employeur serait obligé de remettre des avis de licenciement aux travailleurs, qui n'auraient aucun droit de rappel d'office. Je ne sais pas sur quoi l'avocate s'appuie pour tenir ces propos vu qu'elle n'a invoqué aucun texte officiel. Elle a parlé de l'industrie pétrolière et du fait qu'un travailleur qui a été licencié n'est nullement assuré d'être réembauché. Il doit soumettre à nouveau sa candidature pour obtenir un poste vacant et il perd les avantages acquis. Je considère cela simplement comme un exemple de situation où il serait nécessaire d'examiner les faits particuliers pour déterminer si le travailleur a été licencié ou s'il a subi un arrêt de rémunération. Ce sont des facteurs qu'un tribunal devrait obligatoirement prendre en considération avant de se prononcer sur une situation particulière.

[66]     L'avocate a fait valoir que le but du régime d'assurance-emploi est d'assurer les particuliers contre les risques « imprévus » et « inconnus » de perte d'emploi, ce qui ne correspond pas à la situation en cause en l'espèce. En tenant ces propos, l'avocate se trouve ainsi à faire fi de l'existence d'un grand nombre d'emplois saisonniers au Canada et du fait que les parties savent à l'avance qu'il y aura une période de licenciement chaque année.

[67]     L'avocate s'est penchée sur la différence qui existe entre les termes « cessation » et « licenciement » en rapport avec l'affirmation de la commission scolaire selon laquelle le ministre ne fait pas de distinction entre une « cessation d'emploi » et un « licenciement » . L'avocate a cité la définition suivante du terme « licenciement » tirée du Black's Law Dictionary :

          [TRADUCTION]

Une cessation d'emploi décrétée par l'employeur. La cessation d'emploi peut être provisoire (p. ex., à cause de conditions économiques saisonnières ou défavorables) ou définitive.

Elle a affirmé qu'une cessation d'emploi s'entend de l'interruption de la relation employeur-employé; à ses dires, il n'y a pas eu d'interruption de la relation dans l'affaire en cause car il n'y a pas eu de licenciement. Avec égards, je crois qu'elle oublie de tenir compte des autres définitions du terme « licenciement » , ainsi que du fait qu'une cessation d'emploi peut être provisoire, d'une durée indéterminée ou définitive, comme l'a indiqué le juge Heald dans l'affaire Le procureur général du Canada c. C. Gray, [1978] 1 C.F. 808, à laquelle je reviendrai plus tard.

[68]     L'avocate a en outre fait valoir que la période d'été est en réalité une période de vacances, non pas une période de licenciement. À cette fin, elle s'appuie sur le paragraphe 161(1) de la Education Act. S'il lui est difficile de soutenir que la période en cause est une période de vacances pour toutes les personnes assujetties à la Education Act, c'est parce qu'on a dit que les vacances auxquelles les appelantes ont droit sont régies par la convention collective et la Labour Standards Act, non par la Education Act.

[69]     L'avocate invoque également la décision rendue par le juge O'Connor dans l'affaire Donnawell (précitée) pour affirmer que la période de relâche d'été est une période de vacances, non pas une période de licenciement. Je reviendrai sur cette prétention un peu plus loin dans les présents motifs. Quand l'avocate a fait référence à l'alinéa 4.1b) de la convention collective, il était clair à mes yeux que cette clause voulait dire qu'une cessation d'emploi durant la « période prévue des vacances scolaires » n'est pas une cessation des fonctions aux fins de l'ancienneté, alors que c'en serait une autrement. En d'autres termes, si cette clause n'avait pas existé, une cessation des fonctions durant la période des vacances d'été, par exemple, aurait pu résulter en une perte d'ancienneté car il y aurait eu interruption du service continu.

[70]     L'avocate a prétendu que les appelantes avaient toutes trois été rémunérées pour l'année. C'était certainement vrai dans l'affaire Donnawell (précitée) et c'était aussi le cas de l'enseignant en cause dans l'affaire Petts (précitée). Cependant, l'affaire dont je suis saisi porte principalement sur la question du salaire. À mon avis, la convention collective ne renferme aucune clause permettant d'étayer cette prétention. Aux dires de l'avocate, la convention collective est muette sur ce point et il n'y a rien dans le témoignage de Veronica Ulmer qui permet de réfuter l'hypothèse de faits sur laquelle le ministre s'est appuyé. Avec égards, je ne partage pas cet avis. Le libellé de la convention collective, qui dit que les travailleurs sont réputés être licenciés et être rappelés au travail à la fin de la période des vacances scolaires, est un élément de preuve dont la Cour doit tenir compte. En outre, le relevé d'emploi que la commission scolaire a remis aux appelantes montre qu'elle ne considère pas avoir versé quelque rémunération que ce soit à l'égard des semaines en cause. La convention collective ne contient aucune clause indiquant que la rémunération versée était un « salaire annuel » payable sur une période de dix mois, comme c'était le cas dans l'affaire Donnawell (précitée).

[71]     L'avocate a également soutenu que le maintien, pendant les mois d'été, de l'ancienneté, des crédits de congé de maladie ou des régimes d'avantages, qui sont donc des avantages annuels, mène à la conclusion que le terme « salaire » s'entend aussi d'un salaire annuel. Cet argument ne tient pas la route parce que les avantages n'ont pas continué de s'accumuler durant les mois d'été. Il n'y a eu ni perte, ni accumulation d'avantages. Il y avait en quelque sorte suspension des avantages jusqu'à ce que les appelantes soient rappelées au travail comme prévu. On aurait tort d'affirmer que la suspension des avantages pendant la période où il n'y avait pas de possibilité d'accumulation signifie d'une manière ou d'une autre que la rétribution était payable sur une base annuelle à titre de salaire annuel.

[72]     En ce qui concerne la question de l'indemnité de congés annuels, l'avocate a admis qu'elle était comprise dans la rémunération mensuelle versée aux appelantes le reste de l'année, mais, a-t-elle indiqué, la convention collective est muette sur cette question. En fait, la convention collective n'est pas muette sur cette question puisqu'il y est dit que l'indemnité est versée en conformité avec la Labour Standards Act.

[73]     Enfin, l'avocate du ministre a fait valoir qu'en raison du fait que les appelantes demeuraient admissibles aux avantages en vertu de l'article 8.2 de la convention collective durant les mois d'été, ces avantages devraient prendre valeur de rémunération. À nouveau, je fais observer que la majorité des avantages ont simplement été suspendus pendant la période en cause. Ce fut le cas de l'ancienneté et des droits à pension, qui ont cessé de s'accumuler. Le régime d'assurance-vie serait pour sa part demeuré en vigueur pendant la période en cause, et la Cour est certainement justifiée de déterminer si cette assurance prend valeur de rémunération au sens de l'article 14.1 du Règlement sur l'assurance-emploi. Le maintien des avantages durant une période de non-accumulation ne pourrait pas, à mon avis, prendre valeur de rémunération. La situation serait probablement différente si tous ces avantages avaient continué de s'accumuler.

[74]     Ainsi se termine mon résumé des arguments de l'avocate du ministre.

Jurisprudence

[75]     Je crois que pour en arriver à trancher convenablement la question de savoir s'il y a eu « arrêt de rémunération » au cours des mois d'été en l'espèce, il est nécessaire d'examiner les sens à attribuer à un certain nombre de termes.

[76]     Tout d'abord, l'expression « arrêt de rémunération » doit être interprétée dans le contexte de l'article 14.1 du Règlement sur l'assurance-emploi (général). On trouve dans la définition de cette expression les termes « dans les cas et aux moments » déterminés par règlement. Les mots « cas » et « moments » sont reliés par une conjonction de coordination; par conséquent, pour qu'un arrêt de rémunération dans le contexte de la Loi sur l'assurance-emploi ouvre droit au versement de prestations, il faut qu'il satisfasse aux exigences de cette disposition réglementaire. L'article 14.1 est la disposition réglementaire qui s'applique en l'espèce pour déterminer le cas et le moment.

[77]     À l'article 14.1, il est dit qu'un arrêt de rémunération se produit lorsque, après une période d'emploi pour un employeur, ce qui correspond certainement à la situation en l'espèce, l'assuré est :

(i)          a)          licencié; ou

            b)          cesse d'être au service

de son employeur; et

(ii)         se trouve à ne pas travailler pour cet employeur durant une période d'au moins sept jours consécutifs;

(ii)         à l'égard de laquelle (sept jours consécutifs ou plus) aucune rémunération provenant de cet emploi ne lui est payable ou attribuée.

[78]     Par conséquent, je dois d'abord me pencher sur le sens des termes « licencié » et « cesse d'être au service » de l'employeur pour déterminer s'ils ont le même sens et, si tel n'est pas le cas, en quoi ils diffèrent.

[79]     L'examen du terme « licencié » conduit inévitablement à l'examen des mots « cessation d'emploi » , qui sont utilisés dans la jurisprudence.

[80]     Je dois ensuite me pencher sur le sens du terme « rémunération » et déterminer si elle est attribuée ou payable à l'égard de la période d'au moins sept jours consécutifs qui suit le licenciement ou la cessation d'emploi.

[81]     Les avocats ont cité un grand nombre d'affaires pour m'aider à définir le sens de ces termes. On pourrait se pencher d'abord sur les propos tenus par le juge en chef Jacket dans l'affaire Petts (précitée) quand, après avoir statué qu'une disposition réglementaire portant sur le non-paiement des prestations d'assurance-chômage à des enseignants au cours des périodes de relâche scolaire n'était pas applicable, il a déclaré ce qui suit :

Les regrets que par ailleurs j'aurais pu avoir en adoptant cette conclusion disparaissent du fait que j'ai été incapable de concevoir une seule difficulté portant sur la période de congé des enseignants qui ne soit pas adéquatement étudiée par les articles 2(1)n) et 21(2). Qu'un enseignant reçoive 1/12 de son salaire annuel à la fin de chaque mois de l'année, 1/10 à la fin de chacun des dix mois d'une année, ou, comme en Alberta, 1/12 à la fin de chacun des neuf premiers mois et 3/12 à la fin d'un dixième mois, si son contrat de louage de services se poursuit tout au long de l'année, il n'y a pas eu « mise à pied » ou « cessation d'. . . emploi » donnant lieu à « . . . un arrêt . . . rémunération » et il a reçu sa « rémunération habituelle » ; et, par conséquent, je ne vois pas d'exemples où l'article 158 du Règlement ou quelque disposition semblable, soit nécessaire pour éviter le paiement de prestations aux enseignants qui ne sont pas en chômage au sens ordinaire de cette expression.

J'ai souligné les mots « salaire annuel » sur lesquels cette décision est manifestement fondée. Nul doute que, si le salaire versé aux appelantes dans l'affaire en cause en l'espèce est un « salaire annuel » payable sur une période de dix mois, comme c'était le cas dans l'affaire Donnawell (précitée), il n'y a alors pas eu d'arrêt de rémunération. Cependant, si ce n'est pas un « salaire annuel » , la situation peut être différente.

[82]     Dans l'affaire Canada (procureur général) c. Hartmann, no A-516-88, 2 octobre 1989 (C.A.F.) ((1989) 102 N.R. 386), le juge Stone s'est penché sur sens de l'expression « arrêt de rémunération » . Dans cette affaire, le juge-arbitre avait conclu qu'une diminution des heures de travail équivalait à un licenciement implicite. Le juge Stone a déclaré ce qui suit :

La seconde question est de savoir si, dans le cas de l'intimée, il y a eu "mise à pied" ou "cessation d'emploi" au sens de la Loi. J'estime que non.

et

L'alinéa 2(1)n) prévoit trois différents cas où peut survenir un "arrêt de rémunération" dont j'ai déjà fait mention. A mon avis, pour que la situation actuelle tombe sous cette définition, il aurait fallu que la Commission considère une réduction des heures de travail du genre de celle qui s'est produite en l'espèce comme une "réduction de rémunération telle que prescrite", ce qu'elle n'a pas fait.

Les définitions contenues dans les dictionnaires et les interprétations des tribunaux, des arbitres et des auteurs peuvent certes être très utiles lorsqu'il s'agit d'interpréter le mot "lay-off" (mise à pied) en général ou dans des circonstances plus limitées, mais je ne pense pas qu'elles puissent l'être dans les circonstances de l'espèce où nous devons interpréter ce terme dans un contexte législatif particulier. Lorsque ce contexte est parfaitement compris, on peut constater qu'en utilisant le terme "mise à pied" et l'expression "pour toute autre raison" dans la définition de "arrêt de rémunération", le législateur n'entendait pas désigner par l'une ou l'autre de ces expressions une réduction des heures de travail comme celle qui s'est produite en l'espèce. Une telle éventualité a été clairement prévue lorsque, dans le cadre de cette définition, le législateur a expressément conféré à la Commission le pouvoir de prescrire l'étendue d'une réduction de rémunération, résultant d'une réduction des heures de travail, suffisante pour constituer un "arrêt de rémunération". En prévoyant dans cette même définition un "arrêt de rémunération" occasionné par une "mise à pied" ou "pour toute autre raison", il est manifeste que le législateur n'a pas voulu qu'une réduction des heures de travail et qu'une réduction conséquente de la rémunération constituent également une "mise à pied" ou "toute autre raison", qu'elle soit réelle ou implicite.

Je prends également acte de la note complémentaire à cette décision, dans laquelle le juge reproduit une partie de la définition du terme « layoff » ( « licenciement » ) tirée du Concise Oxford Dictionary :


                   [TRADUCTION]

mise à pied (provisoire) attribuable à une pénurie de travail [...] (période de) mise à pied provisoire, période d'activité réduite.

[83]     La Cour suprême du Canada s'est penchée sur une situation semblable dans l'arrêt Dick c. La Commission d'assurance-chômage, [1980] 2 R.C.S. 243 ((1980), 32 N.R. 552). La question à trancher était celle de savoir si une enseignante qui avait pris un congé de maternité en mars 1976 pouvait toucher des prestations de maternité en vertu de la Loi sur l'assurance-chômage pendant les mois de juillet et août après sa cessation d'emploi. Le juge McIntyre a cité l'affaire Petts (précitée) avec approbation. La question en litige était celle de savoir si le contrat de travail de l'enseignante avait pris fin en mars 1976. Dans cette affaire, le ministre a soutenu que l'emploi avait continué d'exister après le mois de mars et que le montant forfaitaire que l'appelante avait reçu était attribuable aux mois de juillet et août. La Cour suprême a convenu avec la Cour d'appel que, si le contrat de travail avait « pris fin » lorsque l'appelante avait cessé de travailler en mars 1976, le paiement de rajustement de son salaire n'aurait pas pu s'appliquer aux mois de juillet et août suivants. La Cour d'appel avait toutefois conclu que le contrat de travail n'avait pas « pris fin » , même s'il y avait manifestement eu cessation d'emploi. C'est cette proposition que la Cour suprême a entrepris d'examiner. Le juge McIntyre a déclaré ce qui suit :

Comme l'a dit la Cour d'appel, si le contrat de travail avait pris fin lorsqu'elle a quitté son poste en mars 1976, le paiement de rajustement de son salaire n'aurait pas pu s'appliquer aux mois de juillet et août. Conformément au contrat de travail, il se serait appliqué à la partie de l'année au cours de laquelle elle a enseigné. Cependant, la cour a également déclaré que puisque le contrat de travail n'avait pas pris fin—même s'il est clair qu'il y a eu cessation d'emploi—le paiement de rajustement était à bon droit attribuable aux mois de juillet et août. C'est cette dernière proposition qu'il faut examiner.

L'article 2 du contrat de travail traite de cette question. Il prévoit que le salaire d'un enseignant sera payé en douze versements mensuels égaux. Il prévoit également qu'il y a au total 200 jours d'enseignement et c'est un fait notoire, dont les tribunaux peuvent prendre connaissance, que ces jours sont compris entre les mois de septembre et juin de sorte que les enseignants n'ont aucune obligation d'enseignement pendant les mois de juillet et août. Bien que le contrat de travail n'ait pas pris fin lorsque l'appelante a quitté son poste le 26 mars 1976 puisqu'elle n'avait demandé qu'un congé autorisé, il y a eu cessation d'emploi et, à mon avis, elle a quitté son emploi au cours de son année de service et avant la fin de celle-ci, au sens de l'article 2 du contrat de travail. Ainsi, le mécanisme de rajustement prévu à l'art. 2 a joué et l'appelante a reçu un montant d'argent qui a eu pour effet de la payer entièrement pour les services rendus jusqu'à la date où elle a quitté son poste. En ajoutant le montant de $1,878.07 à ce qu'elle avait déjà reçu, on lui a seulement remis la partie de son salaire annuel qui correspondait à la partie de l'année scolaire pendant laquelle elle avait enseigné. Cela est tout à fait conforme au contrat qui prévoit que l'enseignant recevra ces montants d'argent au titre de la partie de l'année au cours de laquelle il a enseigné et cette disposition est également conforme au par. 173(3) du Règlement dont voici le texte:

La rémunération payable à un prestataire en échange de ses services doit être répartie sur la période pendant laquelle ces services ont été fournis.

Je ne puis conclure qu'en recevant ce montant, elle ait reçu quoi que ce soit pour les mois de juillet et août.

L'appelante prétend que le salaire d'un enseignant est un salaire annuel payé en douze versements égaux. Toutefois, le salaire se gagne en enseignant pendant 200 jours durant les mois de septembre à juin. On a dit que le paiement du salaire en douze versements mensuels, avec des paiements en juillet et en août, n'est qu'un moyen qui permet aux enseignants, qui gagnent leur salaire annuel en travaillant pendant les dix autres mois de l'année, de recevoir des versements mensuels en juillet et en août pour faciliter la tenue de leur budget personnel. Quel que soit le motif de la répartition en douze versements, dans le cas d'un enseignant qui quitte son poste avant la fin de l'année, les dispositions de rajustement prévues au contrat de travail n'ont pas d'autre effet que de la payer entièrement pour la période pendant laquelle il a enseigné; il importe peu que le salaire pour une année entière de service soit versé en dix ou en douze versements et que le contrat de travail soit résilié ou maintenu pour l'avenir. (Les caractères gras et le soulignement sont de moi)

[84]     Je constate en premier lieu à la lecture de ce passage que la Cour peut admettre d'office que les 200 jours d'enseignement prévus dans le contrat de travail sont compris entre les mois de septembre et juin de sorte qu'aucune tâche n'est confiée aux enseignants pendant les mois de juillet et août.

[85]     En deuxième lieu, je relève que le juge McIntyre insiste particulièrement sur le fait que, bien que le contrat de travail n'ait pas pris fin en mars, il y a quand même eu « cessation d'emploi » . À mon avis, cela indique que la barre est placée beaucoup plus bas dans le cas d'une « cessation d'emploi » que dans celui d'un « licenciement » et qu'il peut y avoir cessation d'emploi même si le contrat de travail continue d'exister. Le juge McIntyre a poursuivi en disant :

Même si l'on n'avait pas mis fin au contrat, l'appelante avait nettement quitté son poste, ce que son employeur a reconnu lorsqu'il a effectué le paiement de rajustement. (Je souligne)

À nouveau, le juge McIntyre indique qu'il faut faire une distinction entre le « contrat d'emploi continu » , la « cessation des fonctions » et la « cessation d'emploi » .

[86]     La Cour d'appel fédérale s'est penchée sur la question de « l'arrêt de rémunération » dans l'affaire Enns, précitée. Comme on l'a déjà vu, cette affaire met en cause un membre du clergé qui, bien qu'ayant cessé d'être rémunéré, a continué de rendre les mêmes services à la congrégation. La Cour fédérale s'est dite d'avis que, pour qu'il y ait « licenciement » , il était nécessaire que le requérant ait cessé d'être rémunéré et d'être au service de la congrégation. Par conséquent, il va clairement de soi, dans l'affaire dont je suis saisi, que si (et j'insiste sur le mot « si » ), en dépit du fait qu'aucun service n'est rendu durant les mois d'été, le salaire versé est un salaire annuel payable sur une période de dix mois seulement, il ne peut y avoir de licenciement et, en conséquence, d'arrêt de rémunération.

[87]     L'affaire Verrault (précitée) confirme sans contredit que les parties peuvent prolonger leur contrat de travail même si aucun service n'est rendu. Le versement d'une rétribution attribuable à la période de prolongation mènerait sans nul doute à la conclusion que le « licenciement » et, par conséquent, « l'arrêt de rémunération » n'ont eu lieu qu'à la fin de cette période. Cela signifie donc que les parties sont libres de convenir qu'aucune rémunération n'est attribuable à une période durant laquelle aucun service n'est rendu.

[88]     Dans l'affaire P.G. c. Gray (précitée), la Cour d'appel fédérale s'est penchée sur le sens du terme « licenciement » dans le contexte du versement d'une indemnité de départ en vertu de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, non pas de la Loi sur l'assurance-emploi. L'affaire était assez particulière et a finalement été tranchée en s'appuyant sur les faits qui lui étaient propres. Le fonctionnaire en cause dans cette affaire travaillait pour le ministère des Postes, qui l'a informé, après le déclenchement d'une grève par d'autres employés, qu'il n'y avait pas de travail pour lui et qu'il n'allait pas être rémunéré. Il a touché des prestations d'assurance-chômage pendant une période de cinq semaines environ, et il a aussi demandé que lui soit versée une indemnité de départ. La Cour s'est penchée sur le sens du terme « mise en disponibilité » [ « lay-off » ] dans le contexte de la convention collective qui en donnait la définition sous la rubrique « Indemnité de cessation d'emploi » . En s'appuyant sur les faits de cette affaire particulière, la Cour a conclu que les termes étaient clairement utilisés dans le contexte d'une cessation définitive d'emploi. La Cour a cependant admis que le terme mise en disponibilité avait plusieurs sens et qu'il pouvait signifier une séparation provisoire, prolongée ou définitive de l'emploi. Le juge Pratte a déclaré ce qui suit :

Dans le langage commun, l'expression « mise en disponibilité » n'implique pas nécessairement une suppression d'emploi. Mais le litige, en l'espèce, n'est pas relié au sens de celle-ci dans les dictionnaires, mais à celui qu'elle a dans la convention collective. (Je souligne)

et

Par conséquent, à mon avis, lorsque l'expression « mise en disponibilité » est utilisée dans la convention collective, il faut présumer, en l'absence d'indication en sens contraire, qu'il s'agit d'une suppression d'emploi.

[89]     Dans la même affaire, le juge Heald a affirmé ce qui suit :

Lorsqu'elle est utilisée dans le vocabulaire des relations de travail, l'expression « mise en disponibilité » est généralement définie ainsi qu'il suit: [TRADUCTION] « Séparation provisoire, prolongée ou définitive de l'emploi par suite du manque de travail »

et

Telle qu'elle est utilisée dans l'article 30, la « mise en disponibilité » doit être examinée dans le contexte de la convention collective dans son ensemble, et plus particulièrement en tenant compte de la position de l'article dans la convention dont il fait partie.

[90]     La Cour d'appel fédérale a statué, en s'appuyant sur les faits propres à cette affaire particulière, que les termes « mise en disponibilité » [ « lay-off » ] utilisés à l'article 30 de la convention collective s'entendaient d'une cessation définitive d'emploi. Elle a toutefois clairement précisé que ce n'était pas nécessairement le sens ordinaire qu'il convenait d'attribuer à ces termes.

[91]     En dernier lieu, j'en viens à l'affaire Donnawell (précitée). Je tiens compte de la nécessité pour un tribunal de rendre des décisions uniformes. Cependant, il m'apparaît que, si la question soulevée dans cette affaire est identique à celle de l'affaire en cause en l'espèce, les faits, eux, sont totalement différents. Dans l'affaire Donnawell, la question à trancher était aussi celle de savoir si une travailleuse, membre du personnel de soutien de la commission scolaire de Regina, exerçait un emploi durant les vacances d'été. La convention collective conclue entre la commission scolaire et le syndicat était toutefois différente. Dans cette affaire, la convention collective précisait (à plusieurs endroits) que le « salaire annuel » et la « rémunération brute » étaient versés à l'égard de la période commençant le 1er juillet de chaque année et se terminant à la fin de juin l'année suivante. La situation est tout autre dans l'affaire dont je suis saisi en l'espèce. Aux termes de la Labour Standards Act, les vacances annuelles devaient être prises durant les périodes de fermeture de l'école et l'indemnité de congés annuels a été versée le 30 juin dans l'affaire Donnawell (précitée). Tous ces éléments ont été traités de manière totalement différente dans l'affaire dont je suis saisi. Dans l'affaire Donnawell, il était aussi très clair, et je cite les propos du juge O'Connor :

[...] En outre, il ressort clairement de la convention collective que l'appelante était payée à l'année (12 mois) même si le salaire était versé durant les 10 mois de l'année scolaire normale.

[92]     Selon la preuve produite dans l'affaire Donnawell, il était évident que la convention collective prévoyait le versement d'un salaire annuel étalé sur une période de douze mois. Dans l'affaire dont je suis saisi, la situation est totalement différente. On a dit que les appelantes travaillent pendant l'année scolaire seulement. On a dit qu'elles sont réputées avoir été licenciées et rappelées d'office en vertu de l'article 5.1 de la convention collective. Il ne fait à près peu aucun doute que cette convention collective est très mal rédigée. Cependant, il est clair que les appelantes ont travaillé pendant l'année scolaire seulement et qu'elles ont été rémunérées pour la même période, non pas pour l'année. Dans l'affaire Donnawell, il est manifeste que le « contrat se poursuivait durant le congé d'été même si aucun service n'était rendu et qu'aucun salaire n'était versé durant la période » . En l'espèce, il est évident que le contrat envisage l'interruption de l'emploi pendant les vacances d'été ou, à tout le moins, résulte en une cessation d'emploi, ce qui n'était pas le cas dans l'affaire Donnawell.

[93]     Les dispositions de la Education Act de la Saskatchewan entrent évidemment en ligne de compte dans chaque affaire. Le juge O'Connor a déclaré ce qui suit :

[...] il ressort clairement de l'article 166 de The Education Act que le congé d'été est une période de vacances et non pas une période de mise à pied.

Cependant, avec tout le respect que je lui dois, je ne crois pas que la Education Act traite des vacances des travailleurs. Cette question fait l'objet de dispositions soit dans la convention collective, soit dans la Labour Standards Act. La période de vacances mentionnée dans la Education Act est de toute évidence la période des vacances scolaires des étudiants. On peut admettre d'office en justice les vacances scolaires que prennent les étudiants partout dans le monde. Cependant, il faut se garder de conclure qu'elles correspondent à la période de vacances des travailleurs, qui peuvent continuer à travailler ou être licenciés pour cause de manque de travail, comme c'est le cas en l'espèce. J'en tiens pour preuve le fait que l'article 166 se trouve à la rubrique « Fonctionnement des écoles » , qui, pour sa part, figure dans la Partie 4 de la Education Act, qui traite des « élèves, programmes et services » . La Partie 5, par exemple, porte sur les titres et qualités ainsi que sur l'emploi des enseignants. Les conditions d'emploi ne sont pas mentionnées dans cette partie.

[94]     En résumé, il m'apparaît nécessaire de faire une distinction entre les termes « licenciement » et « cessation d'emploi » . Dans la jurisprudence, le terme licenciement a été interprété comme un arrêt provisoire, prolongé ou définitif. Selon moi, une « cessation d'emploi » désigne généralement une situation provisoire qui peut survenir même lorsque le contrat de travail continue de s'appliquer. Dans un cas comme dans l'autre, la Loi sur l'assurance-emploi n'exclut pas la possibilité que l'interruption de la relation de travail ne soit ni finale ni définitive. La Loi sur l'assurance-emploi exige qu'aucun travail ne soit effectué pendant sept jours consécutifs au moins. La Labour Standards Act de la Saskatchewan en fonction de laquelle la convention collective conclue avec le syndicat a été négociée et rédigée et doit être interprétée, utilise ce terme pour désigner une période d'au moins six jours consécutifs et semble envisager elle aussi une situation aussi bien provisoire que définitive.

[95]     À mon avis, le mot « licencié » comme les termes « cesse d'être au service » que l'on retrouve au paragraphe 14(1) du Règlement sur l'assurance-emploi ne signifient pas nécessairement et automatiquement une interruption définitive de l'emploi. Ils peuvent revêtir ce sens dans un contexte particulier (voir P.G. c. Gray (précitée)), mais dans le cas du paragraphe 14(1) du Règlement sur l'assurance-emploi, ils veulent dire autre chose. De même, le terme « licencié » n'a pas nécessairement le sens que lui attribue la Labour Standards Act de la Saskatchewan. Il est manifeste que le terme « licencié » utilisé dans la convention collective a le sens que lui attribue la Labour Standards Act car elle a de toute évidence été rédigée dans le contexte de cette loi, dont elle doit respecter les exigences comme en font foi les divers renvois à ce texte législatif. Cependant, le terme « licencié » utilisé au paragraphe 14(1) du Règlement sur l'assurance-emploi a aussi le sens de « séparation provisoire, prolongée ou définitive de l'emploi par suite du manque de travail » . Cette définition a été approuvée par le juge Heald dans l'affaire Gray, précitée, et je ne vois aucune raison d'en utiliser une autre. Si le licenciement est provisoire, il devient alors nécessaire de satisfaire à l'exigence énoncée dans le Règlement lui-même, à savoir qu'aucun travail ne doit être effectué durant une période d'au moins sept jours consécutifs à l'égard de laquelle aucune rémunération n'est payable ni attribuée. Si le législateur avait voulu que le terme « licencié » utilisé dans la Loi sur l'assurance-emploi s'applique uniquement aux cessations d'emploi ou aux séparations définitives, je doute fort qu'il aurait imposé les deuxième et troisième exigences. Bien entendu, la Commission aurait pu utiliser les termes « cessation ou séparation définitive » , si elle avait voulu, mais elle ne l'a pas fait.

[96]     Un employeur qui désire licencier ou congédier un travailleur en Saskatchewan est obligé de lui donner un préavis écrit correspondant à ses états de service, en conformité avec l'article 43 de la Labour Standards Act. En conséquence, pour licencier les appelantes chaque année, la commission scolaire aurait été obligée de leur donner un préavis écrit. La convention collective conclue avec le syndicat permettait de passer outre à cette exigence en prévoyant explicitement le licenciement et le rappel d'office des travailleurs. Aux dires du syndicat, le libellé utilisé visait expressément à satisfaire aux exigences de la Labour Standards Act.

[97]     En ce qui concerne la question de savoir s'il y a eu arrêt de rémunération en l'espèce en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi, je suis d'avis que la première exigence a sans contredit été remplie en ce sens que les appelantes ont été licenciées. Durant une période provisoire correspondant à la période de fermeture de l'école pour les vacances d'été, il n'y avait aucun travail pour elles. La convention collective renferme une clause suivant laquelle les appelantes étaient réputées être licenciées durant la période en cause. L'article 5.1 est intitulé « Licenciement d'office » . Il tient lieu, y est-il dit, d'avis de licenciement et de rappel. De toute évidence, on a adopté cette façon de faire dans le but de satisfaire aux exigences de la Labour Standards Act relativement au préavis de licenciement et de soustraire la commission scolaire à l'obligation d'avoir à envoyer une série d'avis de licenciement et de rappel chaque année. On a dit que c'était un moyen pratique, administrativement parlant, de régler la situation. Je ne vois pas pourquoi les avis de licenciement et de rappel ne devraient pas être donnés de cette manière. La convention collective ne pouvait pas préciser en termes plus clairs que les appelantes étaient licenciées pour les périodes des vacances scolaires, qui englobaient les vacances d'été. Elles étaient aussi rappelées d'office, à moins d'avoir reçu un avis de cessation d'emploi ou de licenciement d'une durée indéterminée, en conformité avec l'article 43 de la Labour Standards Act. De toute évidence, le terme « cessation » utilisé dans ce contexte désigne une « cessation définitive d'emploi » . Les termes « durée indéterminée » désigneraient sans contredit un licenciement prolongé. Le licenciement en cause était de toute évidence un licenciement provisoire pour la période des vacances scolaires d'été. Je fais observer que la commission scolaire a délivré les relevés d'emploi nécessaires.

[98]     La deuxième exigence du paragraphe 14(1) n'est pas contestée par le ministre, à savoir qu'aucun travail n'a été effectué pendant une période d'au moins sept jours consécutifs, et il ne m'est pas nécessaire de m'y attarder davantage.

[99]     La troisième exigence qui s'applique, à savoir qu'aucune rémunération ne doit être payable ni attribuée à l'égard de la période en question, me semble aussi avoir été remplie. Le ministre soutient que la rémunération était un salaire annuel, qui a été payé et qui était payable sur une période de dix mois. C'est aussi la première raison invoquée par K. Wolchuk, chef des appels, dans sa lettre datée du 29 juillet 1999. Je ne trouve aucune clause dans la convention collective qui dise clairement cela. En fait, la convention collective semble indiquer exactement le contraire, et exclure la période des vacances d'été de la période d'emploi. On pourrait soutenir que la clause de la convention collective qui prévoit le licenciement et le rappel d'office des travailleurs est une construction de l'esprit. Si tel est le cas, pourquoi alors l'a-t-on adoptée? Le syndicat soutient que la clause a été libellée ainsi afin de soustraire à l'administration à l'obligation d'adresser chaque année des lettres de licenciement et de rappel à chaque travailleur, et que la convention comme telle servait justement à cela, les licenciements étant provisoires dans les circonstances. Cet argument me semble certainement plus logique que celui qui consiste à soutenir que la clause est une construction de l'esprit et qu'elle ne s'applique pas. La commission scolaire aurait tout aussi bien pu envoyer des avis de licenciement et de rappel, mais à quelles fins? Ils ont fait en sorte d'atteindre le même objectif dans le libellé même de la convention collective, et je suis convaincu que les clauses adoptées étaient conformes à la Labour Standards Act et qu'elles permettaient d'arriver au résultat recherché, à savoir le licenciement et le rappel des travailleurs durant une période prédéterminée.

[100] Il m'est impossible d'accepter les arguments non fondés selon lesquels la période de l'été correspond à la période des vacances des appelantes. Elles ont reçu chaque mois leur indemnité de congés annuels, qui représentait un pourcentage de leur salaire. Cette indemnité ne se rapportait d'aucune manière à la période de sept semaines durant laquelle elles étaient sans travail l'été. L'école était fermée pour les vacances scolaires au sens généralement entendu des étudiants qui sont en vacances l'été. À mon avis, il ne faut pas confondre cette situation avec la question de savoir si cette même période était une période de vacances pour les travailleurs en vertu de la Labour Standards Act ou de la convention collective applicable. La période de vacances des étudiants, qui est prévue dans la Education Act, n'est pas la même que celle des travailleurs, qui est prévue dans la Labour Standards Act ou dans la convention collective. Il devient donc nécessaire de trancher la question de savoir si une partie de la rémunération reçue était attribuable à la période d'été. Les appelantes n'ont accumulé aucun avantage, mais certains d'entre eux ont été suspendus aux termes de la convention collective.

[101] Il a été établi à ma satisfaction, compte tenu de la preuve produite, que les salaires et avantages des appelantes étaient attribuables uniquement à la période qui s'est terminée le 30 juin. Il y a eu maintien des avantages, sans possibilité d'accumulation, durant la période en cause et, en conséquence, on ne peut pas dire qu'ils étaient payables ou qu'ils ont été attribués à l'égard de la période d'été. J'estime donc que la troisième exigence a aussi été remplie en l'espèce.

Conclusion

[102] En conclusion, je reprends à mon compte les propos tenus par Madame la juge Wilson de la Cour suprême du Canada qui, saisie d'une affaire portant sur le versement de prestations en vertu de l'ancienne Loi sur l'assurance-chômage, a déclaré dans l'arrêt Abrahams c. Le procureur général du Canada, [1983] 1 R.C.S. 2, à la page 10 :

[...] Puisque le but général de la Loi est de procurer des prestations aux chômeurs, je préfère opter pour une interprétation libérale des dispositions relatives à la réadmissibilité aux prestations. Je crois que tout doute découlant de l'ambiguïté des textes doit se résoudre en faveur du prestataire.

[103] Je suis convaincu que les appelantes ont subi un arrêt de rémunération en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi. Elles n'ont rendu aucun service durant une période d'au moins sept jours. Le contrat de travail prévoyait le licenciement des travailleurs pour la période en question. Cela équivaut à tout le moins à une cessation d'emploi. Je serais plutôt enclin à dire que c'était un licenciement, provisoire, attribuable à un manque de travail, comme cela se produit régulièrement à certains moments de l'année dans de nombreux secteurs d'activité au Canada. Aucune rémunération, au sens large de ce terme, sous la forme d'avantages ou d'émoluments, provenant d'un emploi, aux termes du Règlement, n'était payable ou n'a été attribuée à l'égard de la période en question. Tout doute découlant de l'interprétation du libellé doit se résoudre en faveur des appelantes.

[104] Pour les motifs que je viens d'exposer, je conclus que chaque appelante a subi un « arrêt de rémunération » en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi durant la période en cause. Aucune d'elle n'exerçait un emploi assurable pendant cette période. Chacun des appels est accueilli et les décisions du ministre sont annulées.

Signé à Calgary (Alberta), ce 16e jour de mars 2001.

« Michael H. Porter »

J.S.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour d'octobre 2001.

Mario Lagacé, réviseur

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

1999-3894(EI)

ENTRE :

MARJORIE DESCHAMBAULT,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

BOARD OF EDUCATION OF THE POTASHVILLE

SCHOOL DIVISION NO. 80 OF SASKATCHEWAN,

intervenant.

Appel entendu sur preuve commune avec les appels de Lori Sutherland (1999-3895(EI)) et de Veronica M. Ulmer (1999-3896(EI)), le 5 juillet 2000 à

Regina (Saskatchewan), par

l'honorable juge suppléant Michael H. Porter

Comparutions

Représentant de l'appelante :                Don Moran

Avocate de l'intimé :                            Me Stacy Cawley

Pour l'intervenant :                     Personne n'a comparu

JUGEMENT

          L'appel est accueilli et la décision du ministre est infirmée selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Calgary (Alberta), ce 16e jour de mars 2001.

« Michael H. Porter »

J.S.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour d'octobre 2001.

Mario Lagacé, réviseur


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

1999-3895(EI)

ENTRE :

LORI SUTHERLAND,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

Appel entendu sur preuve commune avec les appels de Marjorie Deschambault (1999-3894(EI)) et de Veronica M. Ulmer (1999-3896(EI)), le 5 juillet 2000 à

Regina (Saskatchewan), par

l'honorable juge suppléant Michael H. Porter

Comparutions

Représentant de l'appelante :                Don Moran

Avocate de l'intimé :                            Me Stacy Cawley

JUGEMENT

          L'appel est accueilli et la décision du ministre est infirmée selon les motifs du jugement ci-joints.


Signé à Calgary (Alberta), ce 16e jour de mars 2001.

« Michael H. Porter »

J.S.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour d'octobre 2001.

Mario Lagacé, réviseur


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

1999-3896(EI)

ENTRE :

VERONICA M. ULMER,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

Appel entendu sur preuve commune avec les appels de Marjorie Deschambault (1999-3894(EI)) et de Lori Sutherland (1999-3895(EI)), le 5 juillet 2000 à

Regina (Saskatchewan), par

l'honorable juge suppléant Michael H. Porter

Comparutions

Représentant de l'appelante :                Don Moran

Avocate de l'intimé :                            Me Stacy Cawley

JUGEMENT

          L'appel est accueilli et la décision du ministre est infirmée selon les motifs du jugement ci-joints.


Signé à Calgary (Alberta), ce 16e jour de mars 2001.

« Michael H. Porter »

J.S.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour d'octobre 2001.

Mario Lagacé, réviseur


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

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