Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date: 20001110

Dossier : 98-9236-IT-I

ENTRE :

CLAUDE DAVID,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifsdu jugement

Le juge Tardif, C.C.I.

[1]            Il s'agit d'un appel portant sur les années d'imposition 1993, 1994 et 1995, l'appelant s'étant désisté pour l'année d'imposition 1992. La question en litige est la suivante :

                " pour les années d'imposition 1993, 1994 et 1995, les montants, réclamés par l'appelant, étaient-ils déductibles au titre de pension alimentaire ou autre allocation payable périodiquement ? "

[2]            Pour établir l'avis de nouvelles cotisations, le ministre du Revenu national (le " Ministre ") a pris pour acquis les faits suivants reproduits à la Réponse à l'avis d'appel (la " Réponse ") :

a)              durant les années en litige, l'appelant et son ex-conjointe, Diane Lévesque, détenaient en copropriété un immeuble sis au 218 Chemin St-Bernard à Mont-Tremblant.

b)             au jugement sur requête, rendu par le juge Roland Durand le premier février 1993, il est dit que l'appelant était condamné à payer les versements hypothécaires de la propriété mentionnée en a) ci-dessus.

c)              les versements étaient effectués directement à l'institution financière par l'appelant.

d)             il n'est pas mentionné audit jugement que les frais d'hypothèque étaient déductibles par l'appelante et imposables entre les mains de l'ex-conjointe.

e)              les montants en litige refusés à l'appelant pour les années d'imposition 1993, 1994 et 1995 représentaient des paiements à des tiers à savoir des versements hypothécaires ainsi que les taxes municipales et scolaires.

f)              en 1992, le ministre a alloué à l'appelant la totalité de la déduction demandée à titre de pension alimentaire ou autre allocation payable périodiquement dans le calcul de son revenu s'élevant à 4 800 $.

[3]            La preuve a été relativement succincte. Le litige résulte principalement de l'interprétation des échanges intervenus entre les procureurs et le juge de la Cour supérieure préalablement au jugement. D'ailleurs, le jugement rendu par l'honorable juge Durand est très succinct et se lit comme suit : (pièce A-2)

" Total réclamé par madame 1 590 $ par mois, décision 880 $ mais monsieur paie pour madame sa part de sa dette hypothécaire. "

[4]            Le montant de 880 $ ne fait l'objet d'aucun litige. Le litige porte essentiellement sur les montants déboursés à titre de frais hypothécaires et autres frais payés, pour le bénéfice de l'ex-conjointe de l'appelant, relativement à son titre de propriété de la résidence située au Mont-Tremblant.

[5]            Les montants refusés sont notamment 7 368 $ pour l'année d'imposition 1993, 5 285 $ pour l'année d'imposition 1994 et 7 938 $ pour l'année d'imposition 1995.

[6]            Le jugement précité a résulté d'une requête pour mesures provisoires en date du 26 octobre 1992, dont les conclusions étaient libellées comme suit : (pièce A-2)

ACCUEILLIR la présente requête;

CONFIER à votre requérante la garde physique et légale de l'enfant mineure, Julie;

CONFIER à l'intimé la garde physique et légale de l'enfant mineure, Véronique;

CONDAMNER l'intimé à payer à votre requérante, pour son enfant mineure Julie, une pension alimentaire de 575,00 $, par semaine, payable au domicile de votre requérante le vendredi de chaque semaine, le tout avec indexation suivant les dispositions de la Loi;

CONDAMNER l'intimé à payer à votre requérante pour elle-même, une pension alimentaire de 1 015,00 $ par semaine, payable au domicile de votre requérante, le vendredi de chaque semaine, le tout avec indexation suivant les dispositions de la Loi;

ATTRIBUER à votre requérante l'usage exclusif des biens meubles et effets mobiliers garnissant et ornant le 2300, rue St-Germain, à Ville St-Laurent, de Montréal;

AUTORISER votre requérante à résider à la résidence secondaire sise au 2300 rue St-Germain, à Ville St-Laurent, district de Montréal et ce, à l'exclusion de l'intimé;

ORDONNER l'exécution provisoire du jugement à intervenir sur la présente requête, nonobstant appel et sans caution;

LE TOUT SANS FRAIS, sauf au cas de contestation.

[7]            Les argumentations ont principalement porté sur les échanges des procureurs avec le juge lors de la présentation du dossier devant le Tribunal, le 1er février 1993. Il y a lieu de reproduire un extrait de l'échange intervenu entre les procureurs et le juge : (pièce I-2)

                                ...

Juge Durand :        Ça c'est pour madame et l'enfant.

Me Fortin :              les montants qu'on demandait de 685 $ non imposables étaient pour madame seulement. Il y avait un montant de 220 $ pour les dépenses essentielles de Julie et un certain montant aussi alloué pour ses dépenses de patinage à Julie.

Juge Durand :        Oui [...] Oui [...] 685 $ exclut le patinage mais ça inclut [...] les dépenses courantes.

Me Fortin :              Non, ça n'incluait pas les dépenses courantes votre seigneurie. Si je calcule votre seigneurie seulement les dépenses courantes pour madame, et que je retire là [...]

Juge Durand :        Puisque la maison du Mont-Tremblant fait partie du patrimoine familial, si le je condamne à payer l'hypothèque du Mont-Tremblant, est-ce que ça aide ?

Me Fortin :              Il la paie déjà votre seigneurie.

Juge Durand :        Oui mais si je le condamne, au lieu que ça soit un versement volontaire.

Me Dubé :               C'est intéressant votre seigneurie. Est-ce que vous me permettez de suspendre et vérifier avec son fiscaliste ? Très bonne suggestion votre seigneurie.

Juge Durand :        5 minutes [...] enfin 10 minutes

[Pause]

Me Dubé :               Alors j'ai vérifié votre seigneurie; effectivement ça pourrait être déductible d'impôt; j'ai parlé aussi avec mon client, votre seigneurie, et ce qu'on est prêt à offrir c'est 800 $, c'est-à-dire 41 500 $, je pense que c'est ça 800 $ par semaine, 41 500 $ et la mention que vous avez offert, effectivement, ca été très brillant votre seigneurie, de condamner monsieur à payer l'hypothèque sur la résidence de [...]

Juge Durand :        800 $ par semaine n'inclut pas le patinage.

Me Dubé :               Oui, tout [...] tout inclus, on compte, ça arrive à 41 500 $ votre seigneurie.

Juge Durand :        C'est 4 000 $ de moins que [...]

Me Dubé :               Oui mais en fonction votre seigneurie de ce qu'on a pu vérifier et calculer votre seigneurie, à cause des dédoublements, les montants exagérés, les montants absolument inutiles, je ne suis pas rendu à mon argumentation là, mais votre seigneurie, c'est ce qui justifie quant à nous, là, c'est plus que suffisant en ce qui concerne les besoins de madame et de Julie.

Juge Durand :        Peut être pas quant à moi [...]

Me Fortin :              Votre seigneurie, moi aussi j'ai refait le calcul justement, compte tenu des dédoublements, et ce que j'ai recalculé c'est net non imposable le montant que Julie et madame Lévesque ont besoin comme dépenses courantes et n'incluant pas les dépenses anticipées était de 3 317,08 $. Et ça n'inclut pas le patinage, et c'est net. Alors [...]

Juge Durand :        Et ça vous en discuterez au fond. Pour le provisoire, moi [...]

Me Fortin :              C'est le montant auquel je suis arrivé simplement pour répondre à l'argument de mon confrère. Pis sans compter que ça n'inclut pas non une portion pour la provision pour frais.

Juge Durand :        Alors ça c'est votre requête du 26 octobre 92.

Me Fortin :              Dans laquelle on demandait un montant de 1 600 $, étant donné que c'est imposable, là, 1 600 $ par semaine.

Juge Durand :        Oui mais il n'y a pas eu de décision autre qu'une intérimaire, alors il faut que je rende une décision maintenant sur la requête elle-même.

Me Fortin :              C'est ça.

Juge Durand :        Très bien. Alors la requête de la requérante est accueillie en partie.

Me Dubé :               Excusez votre seigneurie, c'est parce que j'ai pas eu le loisir d'argumenter et de faire valoir mes points, je comprends ma consoeur.

Juge Durand :        Je vous dis que ce que vous offrez n'est pas assez.

Me Dubé :               Oui, mais je n'ai pas attaqué l'état de dépenses et revenus de madame. Je n'ai pas eu le loisir de [...]

Juge Durand :        Je ne lui donne pas 1 600 $ par semaine non plus.

Me Dubé :               J'en conviens mais il y a vraiment de l'exagération là.

Juge Durand :        Je lui donne 3 250 $ par mois brut, sur lequel elle va payer de l'impôt.

Me Dubé:                Très bien.

Juge Durand :        Et ça c'est ce [...] Au mérite, elle va recevoir plus.

Me Fortin :              Je comprend votre seigneurie que vous jugez seulement sur la requête pour [...]

Juge Durand :        C'est ça

Me Fortin :              Mais j'aurais de l'argumentation à faire sur la requête pour provisions pour frais évidemment.

[8]            L'appelant a soutenu qu'il s'agissait d'une pension alimentaire déductible du fait que les paiements avaient été imputés à une dette due par son ex-conjointe, des suites de l'acquisition d'une résidence; toujours selon l'appelant, il s'agissait de paiements faits à l'avantage et au bénéfice de cette dernière. En d'autres termes, l'ex-conjointe de l'appelant aurait renoncé à ses droits face à ce montant et octroyé du même coup un mandat exprès et spécifique à ce dernier pour qu'il en assume la responsabilité.

[9]            Partant de cette interprétation, l'appelant se réfère à un jugement du soussigné le 15 janvier 1999 dans l'affaire Raymond Marquette c. Sa Majesté la Reine, [1999] A.C.I. no 35. Dans ce dossier, j'arrivais à la conclusion que la bénéficiaire de la pension alimentaire avait elle-même renoncé expressément à son droit de disposer des montants litigieux; de plus, elle avait elle-même déterminé l'orientation et choisi le destinataire des versements. Il ne s'agissait aucunement d'interpréter l'intention de la bénéficiaire et du débiteur alimentaire puisque la preuve était claire et non équivoque quant à la volonté des parties exprimée tant au niveau des procédures préalables au jugement qu'au jugement lui-même.

[10]          En l'espèce, cette transparence n'est pas évidente d'autant plus que l'interprétation de l'appelant n'est sans doute pas partagée par son ex-conjointe.

[11]          La détermination d'une pension alimentaire n'est pas un exercice facile. Dans un premier temps, elle doit correspondre à l'équilibre entre les besoins du ou de la bénéficiaire et la capacité de payer du débiteur alimentaire. Dans un deuxième temps, l'exercice est essentiellement mathématique. Une des composantes fondamentales de la formule mathématique est l'évaluation de l'impact fiscal qui a des incidences majeures quant au fondement qui sert à l'établissement du montant de la pension alimentaire.

[12]          Je ne crois pas que ce Tribunal puisse s'attribuer dans ce dossier la compétence de déterminer ou fixer le montant d'une pension alimentaire; il s'agit là d'une juridiction exclusive de la Cour supérieure du Québec.

[13]          Les parties à un litige relatif à une pension alimentaire devant la Cour supérieure, doivent soumettre une preuve qui tienne compte de tous les éléments pertinents permettant au juge saisi du dossier de fixer le montant de la pension alimentaire.

[14]          Lors d'un litige devant la Cour canadienne de l'impôt, très généralement initié par le payeur et ayant trait à la qualification des sommes qu'il a payées, l'appelant voudrait que le Tribunal révise en quelque sorte la décision de la Cour supérieure. Là n'est pas la mission de cette Cour.

[15]          La Cour canadienne de l'impôt doit essentiellement décider si les montants ont été payés ou non dans le cadre de paiements périodiques ou d'une pension alimentaire et ce, à partir de la Loi de l'impôt sur le revenu et des divers principes dégagés par la jurisprudence.

[16]          Pour ce faire, l'analyse des discussions préalables à la signature d'une convention ou à l'obtention d'un jugement de la Cour supérieure est une opération très délicate puisqu'elle risque de constituer une révision de la convention ou du jugement. Pareil exercice est d'autant plus dangereux et inapproprié qu'une seule partie fait généralement valoir son interprétation devant la Cour canadienne de l'impôt.

[17]          Je crois que cette Cour doit s'en remettre essentiellement aux termes rigoureux de la convention qui a établi le droit et les obligations des parties ou du texte formel du jugement qui a édicté ces mêmes droits et obligations.

[18]          Dans l'hypothèse où le jugement de cette Cour ne corresponde pas aux attentes des parties, ils devront reformuler la convention ou retourner devant la Cour supérieure aux fins que leurs droits et obligations soient clarifiés de manière à ce que la pension alimentaire corresponde à sa fonction première : l'équilibre entre les besoins et la capacité de payer.

[19]          En l'espèce, les termes du jugement qui a établi les obligations de l'appelant à l'endroit de son ex-conjointe ne permettent aucunement de conclure que cette dernière ait joui d'un pouvoir de discrétion ou ait renoncé expressément à son pouvoir d'en disposer à son gré. En vertu du jugement, il n'y a donc rien qui permette de conclure que l'ex-conjointe ait renoncé à son droit de disposer à sa guise du montant, ni mandaté expressément un tiers pour le paiement du montant concerné.

[20]          Au moment de rédiger et de conclure une convention ou de plaider un dossier relatif à une pension alimentaire, les parties disposent de toutes les données pertinentes pour convenir d'une entente ou obtenir un jugement dont les conséquences fiscales devraient normalement être connues et acceptées par les parties. Au cas contraire, le jugement de cette Cour risque de créer un déséquilibre non voulu ni souhaitable.

[21]          Dans le présent dossier, l'appelant voudrait que ce Tribunal attribue au jugement de l'honorable juge Durand de la Cour supérieure une portée qu'il n'a pas. La lecture du jugement ne permet aucunement l'interprétation retenue par l'appelant. Sa formulation prévoit deux volets distincts :

·          l'un concerne un montant défini de 800 $ qui ne fait aucun doute quant à la liberté de l'ex-conjointe de l'utiliser comme bon lui semble;

·          l'autre est défini et spécifique :

                " Monsieur paie pour madame sa part de sa dette hypothécaire "

                ne laissant ainsi ni discrétion ni latitude à la bénéficiaire des paiements imposés.

[22]          Il m'apparaît approprié et pertinent de faire un bref survol de la jurisprudence.

Andrews c. Canada, [1995] A.C.I. no 1113, paragraphe 24 :

24.            ...

Le juge a cru accorder à l'appelant un allégement fiscal comme il le dit, mais si les dispositions en question ne sont pas expressément mentionnées, le payeur, soit le mari, ne peut pas déduire la somme et cette dernière n'a pas à être incluse dans le revenu de la bénéficiaire. Je regrette d'avoir à dire qu'il s'agit d'une des lacunes qui continuent d'être présentes dans les appels en matière d'impôt sur le revenu dont cette cour est saisie; il semble y avoir un manque réel de connaissances de la part des experts en droit de la famille en ce qui concerne les dispositions précises de la Loi sur le revenu qui influent sur les montants qui sont payés ou reçus par un conjoint lors de la rupture du mariage.

Armstrong c. Canada, [1996] A.C.F. no 599, paragraphes 16, 18 et 23 :

16.            L'applicabilité du paragraphe 60.1(2) peut être tranchée rapidement. À mon avis, la présomption que le Parlement utilise à la fin de cette disposition s'applique uniquement " lorsque l'ordonnance, le jugement ou l'accord écrit, selon le cas, prévoit que le présent paragraphe et le paragraphe 56.(2) s'appliquent à tout paiement effectué en vertu de ce document...". Aucun texte de cette nature ne figure dans l'une ou l'autre des ordonnances de la Cour. Il s'ensuit que le paragraphe 60.1(2) ne peut être invoqué pour permettre la déduction des montants du revenu de l'intimé.

...

18.            ...

Je ne puis comprendre comment l'on peut contester la conclusion du juge Collier selon laquelle la restriction touchant la discrétion dont jouit l'épouse bénéficiaire ne peut s'appliquer aux paiements effectués à des tiers en vertu de l'article 60.1. Les conjoints séparés ont vraisemblablement convenu que les paiements hypothécaires soient versés au créancier ou, en tout état de cause, ils sont liés par une ordonnance prescrivant que ces paiements soient faits au créancier. Dans une telle situation comment peut-on dire que l'épouse bénéficiaire jouit d'un pouvoir de discrétion ? Elle en jouissait par consentement avant l'ordonnance et l'on peut peut-être considérer qu'elle en jouissait par consentement avant que l'ordonnance soit rendue. Après l'ordonnance, toutefois, il est impossible qu'elle jouisse d'un pouvoir de discrétion. Insister sur le fait qu'il faut remplir la troisième condition énoncée dans l'affaire Pascoe, même lorsqu'il est question de paiements à des tiers, revient à annuler l'effet de l'article 60.1 dans de nombreuses affaires comme celle dont il est question en l'espèce.

...

23.            Il convient de souligner que ce langage descriptif ne figure pas au paragraphe 60.1(1). De plus, la définition du mot " allocation " du paragraphe 56(12) a été adoptée expressément, notamment, " pour l'application des alinéas... 60b), c) et c.1) ". Le paragraphe 60.1(1) ne prévoit pas en soi la déduction d'un montant payé et reçu. Il a plutôt pour effet d'étendre le droit à la déduction qui est prévu aux alinéas 60b), c) ou c.1) en présumant que, " pour l'application des alinéas 60b), c) et c.1) " un montant " a été payé à la personne et reçu par celle-ci ". À mon avis, il faut lire la définition du mot " allocation " contenue au paragraphe 56(12) de concert avec le paragraphe 60.1(1) de la Loi et interpréter cette dernière disposition en conséquence. Il s'ensuit que, étant donné que l'ex-conjointe n'avait aucune discrétion quant à l'utilisation des sommes d'argent, l'intimé ne peut les déduire de son revenu pour les années d'imposition en question.

Mambo c. Canada, [1995] A.C.I. no 931, paragraph 13 :

13.            L'exigence selon laquelle il doit être expressément fait mention de ces paragraphes par écrit a deux objectifs légitimes. Premièrement, confirmer que les deux parties savent qu'il y a des attributs fiscaux à une telle ordonnance ou à un tel accord. Deuxièmement, satisfaire à ce que les lois de toutes les provinces du Canada disposent maintenant, à savoir que chacune des parties assujetties à une telle ordonnance ou signant de tels accords doit recevoir des avis juridiques indépendants en raison des conséquences sérieuses et permanentes de tels documents. Un accord ou consentement verbal donné par l'ex-épouse de l'appelant en 1979 ne répond pas aux critères de la Loi de l'impôt sur le revenu ni aux principes décrits précédemment.

Monette c. M.R.N., [1991] A.C.I. no 609 :

...

J'ajouterais aussi que l'interprétation mise de l'avant par l'avocate de l'intimé ne me paraît pas tenir compte des dispositions des paragraphes 56.1(2) et 60.1(2). Ces paragraphes visent notamment des versements en remboursement de capital et d'intérêts sur des hypothèques grèvant l'immeuble où habite le bénéficiaire des allocations en question, des taxes municipales et scolaires, des frais médicaux et des frais d'études. Tous ces déboursés, sous réserve de certaines restrictions, peuvent être faits à des tiers mais au profit de l'autre conjoint ou de l'ancien conjoint ou à celui d'enfants confiés à sa garde. Or, ces paiements ne sont pas connus à l'avance avec une précision mathématique mais sont facilement déterminables normalement au cours de l'année en question ou peu de temps après. Par exemple, les mensualités hypothécaires peuvent fluctuer au cours d'une année à la suite d'un refinancement d'une obligation hypothécaire ou simplement d'une fluctuation des taux d'intérêts en application d'une clause prévue au contrat établissant l'hypothèque et les modalités de paiement de la dette hypothécaire. Dans le cas de paiements indexés, les taux d'indexation ne sont pas non plus connus à l'avance. Les taxes municipales et scolaires peuvent aussi être l'objet d'une augmentation au cours d'une année donnée ou même être l'objet d'une contestation judiciaire.

...

Assaf c. Canada, [1992] A.C.I. no 46 :

                                ...

En interprétant le paragraphe 56(12), il y a lieu de faire remarquer que, pour que des sommes reçues, par exemple, par un conjoint ou ex-conjoint constituent une allocation au sens de ce paragraphe, il n'importe pas que celui qui verse la pension ne contrôle pas ni ne tente de contrôler l'utilisation des fonds en question. Il faut cependant que le jugement ou l'accord, suivant le cas, ne précise pas l'utilisation qui doit être faite de ces sommes. Si une telle précision existe, il s'ensuit que si le conjoint ou l'ex-conjoint qui reçoit les sommes en question ne les utilise pas de façon prévue au jugement ou à l'accord, il y a, de sa part, inexécution de l'obligation qui est contenue dans le jugement ou dans l'accord. C'est dans ce sens que le bénéficiaire des sommes en question ne peut pas légalement utiliser les fonds ainsi reçus à sa discrétion, suivant le paragraphe 56(12).

...

Tremblay c. Canada, [1999] A.C.I. no 39,.paragraph 11 :

                                ...

11.            Lorsque l'on tient compte du libellé de l'alinéa 60b), du paragraph 56(12) et de l'article 60.1 de la Loi, il ressort clairement que les sommes précises versées à des tiers ne sont pas des sommes que l'on peut généralement déduire en vertu de l'alinéa 60b) de la Loi. Le législateur permet toutefois aux contribuables d'échapper à cette règle générale si les deux parties à un accord portant sur des prestations alimentaires conviennent que ces sommes - qui ne représentent pas des allocations : par exemple, les frais de résidence en l'espèce - seront déductibles par le payeur et imposables entre les mains du bénéficiaire. De même, un juge pourrait en décider ainsi dans son ordonnance. Toutefois, il est important que l'accord entre les parties ou l'ordonnance de la cour prévoie que les paragraphes 56.1(2) et 60.1(2) de la Loi s'appliquent à tout paiement visé par cet accord ou cette ordonnance. S'il fallait donner à l'expression " pension alimentaire " le sens large de toute somme versée en vertu d'un accord écrit ou d'une ordonnance, à quoi aurait-il servi d'adopter les paragraphes 56(12), 56.1(2) et 60.1(2) de la Loi ? Je crois qu'en adoptant le sens étroit de pension alimentaire, nous en arrivons à un sens plus en harmonie avec ces dispositions de la Loi.

...

[23]          Je dois disposer de l'appel sur la base du seul jugement intervenu; je n'ai pas compétence pour m'ingérer dans le processus qui a conduit à ce même jugement.

[24]          Pour ces raisons, l'appel doit être rejeté.

Signé à Ottawa, Canada ce 10e jour de novembre 2000.

" Alain Tardif "

J.C.C.I.

No DU DOSSIER DE LA COUR :        98-9236(IT)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :                 CLAUDE DAVID et Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                      Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :    le 9 juin 2000

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :         l'honorable juge Alain Tardif

DATE DU JUGEMENT :                      le 10 novembre 2000

COMPARUTIONS :

Avocat pour l'appelant :      Me Jean Richard

Avocat pour l'intimée :        Me Yanick Houle

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

Pour l'appelant :

                                Nom :       Me Jean Richard

                                                Montréal (Québec)

Pour l'intimée :                       Morris Rosenberg

                                                Sous-procureur général du Canada

                                                Ottawa, Canada

98-9236(IT)I

ENTRE :

CLAUDE DAVID,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 9 juin 2000, à Montréal (Québec), par

l'honorable juge Alain Tardif

Comparutions

Avocat pour l'appelant :                      Me Jean Richard

Avocat pour l'intimée :                        Me Yanick Houle

JUGEMENT

          L'appel des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1993, 1994 et 1995 est rejeté, selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour de novembre 2000.

" Alain Tardif "

J.C.C.I.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.