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Date: 20001027

Dossier: 97-440-IT-G,

97-462-IT-I

ENTRE :

SIXGRAPH INFORMATIQUE LTÉE,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifsde l'ordonnance

(Prononcés oralement sur le banc le 26 septembre 2000 à Montréal (Québec) et modifiés à Ottawa (Ontario) le 27 octobre 2000.)

La juge Lamarre, C.C.I.

[1]            La requête présentée par l'appelante en date du 7 avril 2000 afin d'obtenir la rétractation des désistements déposés auprès de cette Cour en date du 14 avril 1997 par les avocats qui la représentaient à l'époque, de même qu'aux fins de désavouer ces mêmes avocats, est rejetée. La chronologie des faits peut se résumer ainsi :

1.              Le 3 janvier 1995, Revenu Canada-Impôt a reçu des avis d'opposition de l'appelante, portant la date du 20 décembre 1994, pour ses années d'imposition 1991 et 1992, signés par Me Sylvain Castonguay en tant que représentant autorisé.

                                Pièces A et B de la déclaration sous serment de Josée                                                                Rodrigue.

2.              Le 16 janvier 1995, Revenu Canada-Impôt a reçu un avis d'opposition de l'appelante, portant la date du 20 décembre 1994, pour son année d'imposition 1993, signé par Me Sylvain Castonguay en tant que représentant autorisé.

                                Pièce C de la déclaration sous serment de Josée Rodrigue.

3.              Par lettre en date du 9 octobre 1996, Me Sylvain Castonguay avisait Revenu Canada-Impôt qu' " en conséquence de la décision du conseil d'administration de [l'appelante]" les nouvelles cotisations établies pour les années d'imposition 1991, 1992 et 1993 n'étaient plus contestées et qu'il retirait les avis d'opposition logés pour le compte de l'appelante.

4.              Le 15 novembre 1996, Revenu Canada-Impôt avisait l'appelante et Me Sylvain Castonguay que les cotisations de l'appelante relativement à ses années d'imposition 1991, 1992 et 1993 étaient donc ratifiées.

                                Pièces E et F de la déclaration sous serment de Josée                                                                Rodrigue.

5.              Le 13 février 1997, Me James Bonhomme, en tant que procureur de l'appelante, a déposé des avis d'appel auprès de cette Cour concernant les années d'imposition 1991, 1992 et 1993 de l'appelante (97-440(IT)G et 97-462(IT)I).

6.              Le 10 avril 1997, l'intimée a déposé et signifié au procureur de l'appelante des avis de requête demandant le rejet des appels 97-440(IT)G et 97-462(IT)I, en vertu du paragraphe 169(2.2) de la Loi de l'impôt sur le revenu.

7.              Le 14 avril 1997, l'appelante, par l'entremise de son procureur Me James Bonhomme, déposait auprès de cette Cour des avis de désistement.

8.              Dans sa requête, l'appelante soutient que ce n'est que le 4 août 1999 que son nouveau procureur aurait pris connaissance de ces désistements. Elle soutient qu'à aucun moment ses administrateurs n'ont autorisé ni été informés de ces désistements.

[2]            La preuve que j'ai entendue ne me convainc pas que les avocats Sylvain Castonguay et James Bonhomme qui ont tous deux représenté l'appelante, le premier lors du retrait des oppositions logées pour l'appelante auprès de Revenu Canada-Impôt, et le deuxième lorsqu'il s'est désisté des Avis d'appel qu'il avait logés devant cette Cour au nom de l'appelante, ont agi en fraude de leur mandat.

[3]            Dans sa déclaration sous serment, madame Anh Huyen Nguyen affirme qu'à aucun moment en tant qu'administratrice de l'appelante, elle n'a autorisé ni été informée de ces désistements. Toutefois, Madame Anh Huyen Nguyen qui se dit présidente de l'appelante depuis le mois de mai 1996, n'a pas nié le fait relaté par Me Castonguay lors de son témoignage, que ce dernier a bel et bien rencontré madame Anh Huyen Nguyen à son bureau au cours du mois d'octobre 1996. Il l'aurait alors avisé que faute de documentation, il était d'avis que l'appelante devait se désister de ses oppositions. Selon Me Castonguay, madame Anh Huyen Nguyen aurait alors accepté et Me Castonguay a avisé le Ministre en date du 9 octobre 1996 qu'il retirait les oppositions logées pour le compte de l'appelante relativement aux années d'imposition 1991, 1992 et 1993.

[4]            Par suite de ces désistements, le Chef des appels de Revenu Canada a envoyé à l'appelante, en date du 15 novembre 1996, un avis confirmant les cotisations pour les années d'imposition 1991, 1992 et 1993 à l'adresse indiquée au dossier (laquelle aurait été confirmée par madame Anh Huyen Nguyen lors du contre-interrogatoire sur sa déclaration assermentée). Celle-ci aurait affirmé lors de ce même contre-interrogatoire qu'elle n'aurait jamais reçu cette confirmation du Ministre. Si ceci est le cas, elle était tout de même au courant de l'intention de Me Castonguay de déposer un désistement. Si elle n'était plus du même avis que son avocat, elle avait le devoir de s'occuper de son dossier avec plus de diligence. La requérante a attendu trois ans (après le dépôt du désistement des avis d'appel logés devant cette Cour) avant de réagir. Ce délai est beaucoup trop long et démontre clairement un manque de diligence.

[5]            Par ailleurs, en se désistant de ses oppositions, l'appelante ne pouvait plus faire appel devant cette Cour aux termes des paragraphes 169(1) et (2.2) de la Loi de l'impôt sur le revenu. Les Avis d'appel logés par Me Bonhomme pour les mêmes années d'imposition n'étaient dès lors pas valides.

[6]            Je me rallie entièrement aux raisons invoquées par l'intimée aux paragraphes 25, 26, 29, 31 et 33 de son argumentation écrite lesquels se lisent comme suit :

25.     Si cette Cour devait conclure qu'elle a juridiction pour désavouer les actes des anciens procureurs de l'appelante et pour annuler les désistements produits par ces derniers, l'intimée fait valoir qu'il s'agit alors d'une mesure exceptionnelle, en raison du souci pour une bonne administration de la justice et du caractère définitif du rejet d'un appel.

                                Moutisheva c. Canada (M.E.I.), (1993) 24

                                Imm. L.R. (2d) 212 (C.A.F.) - permission

                                d'en appeler à la C.S.C. refusée, p. 218;

                                Laskaris c. M.R.N., 90 DTC 1364 (C.C.I. j.

                                Sarchuk);

                                Tibbits c. M.R.N., 96 DTC 1199 (C.C.I. j.

                                Sarchuk);

                                Saywack c. M.E.I., (1986) 3 CF 189 (C.A.F.);

                                Anglo-Marine Inc. c. 2963-5976 Québec

                                Inc., (1995) F.T.R. 207 (C.F.S.P.I.).

26.     En l'absence de fraude, la conduite d'une partie au litige, comprend celle de son procureur et une partie au litige elle-même doit faire preuve de diligence et être raisonnablement active relativement à son appel.

                                Moutisheva c. Canada (M.E.I.), (1993) 24

                                Imm. L.R. (2d) 212 (C.A.F.) - permission

                                d'en appeler à la C.S.C. refusée, p.217-218;

                                Bogie c. La Reine, [1998]4 CTC 195 (C.A.F.);

                                Saywack c. M.E.I., [1986]3 CF 189 (C.A.F.);

                                2855-6330 Québec Inc. c. La Reine, [1998]

                                T.C.J. No. 1030 (C.C.I. - j. Lamarre-Proulx),

                                confirmé par [1999]A.C.F. no. 1786 (C.A.F.);

                                120112 Canada Ltée c. Québec (S.-M.R.),

                                [1997]CarswellQue 1683 (C.Q. - j. St-Hilaire).

29.     Également, madame Anh Huyen Nguyen a affirmé qu'elle n'a pas fait de démarches auprès de ses représentants afin de vérifier ce qu'il advenait des oppositions effectuées par l'appelante à l'égard des années d'imposition 1991, 1992 et 1993.

                                Contre-interrogatoire sur la déclaration sous

                                serment de madame Anh Huyen Nguyen,

                                p.31, 32, 35, 73 et 74.

31. Pourtant, l'appelante avait été avisée par écrit le 15 novembre 1996 du fait que les cotisations de l'appelante relativement à ses années d'imposition 1991, 1992 et 1993 étaient ratifiées.

                                Pièce E de la déclaration sous serment de

                                Josée Rodrigue.

33.     Également et à plus forte raison, l'appelante n'a pas réussi à démontrer que ses anciens procureurs avaient commis quelque fraude que ce soit à son égard en produisant des désistements, tant en appel qu'en opposition, preuve dont le fardeau lui incombait.

                                Moutisheva c. Canada (M.E.I.), (1993) 24

                                Imm. L.R. (2d) 212 (C.A.F.) - permission

                                d'en appeler à la C.S.C. refusée;

                                2855-6330 Québec Inc. c. La Reine, [1998]

                                T.C.J. No. 1030 (C.C.I. - j. Lamarre-Proulx),

                                confirmé par [1999]A.C.F. no. 1786 (C.A.F.);

                                120112 Canada Ltée c. Québec (S.-M.R.),

                                [1997]CarswellQue 1683 (C.Q. - j. St-Hilaire);

                                Adas c. P.-G. Canada, [2000]A.C.F. no. 330

                                (protonotaire Morneau).

[7]            J'ajouterai que même si les procureurs de l'appelante à l'époque ont pu commettre une erreur, ce dont je ne suis pas convaincue, les erreurs des procureurs ne peuvent être dissociées de la négligence et de l'incurie de leur cliente à poursuivre avec diligence les procédures qu'elle avait entreprises. (Voir la décision récente de la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Donald Donovan c. La Reine, [2000]A.C.F. no 933 (Q.L.).

[8]            Dans les circonstances, je ne suis pas en mesure d'accéder à la requête de l'appelante dans les deux dossiers présentés devant moi.

[9]            La requête est rejetée avec frais en faveur de l'intimée.

Signé à Ottawa, Canada, ce 27e jour d'octobre 2000.

" Lucie Lamarre "

J.C.C.I.

Nos DES DOSSIERS DE LA COUR : 97-440(IT)G et 97-462(IT)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :                                 Sixgraph informatique Ltée c. La Reine

LIEU DES AUDIENCES :                                     Montréal (Québec)

DATES DES AUDIENCES :                                les 3 août et 26 septembre 2000

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR :               l'honorable juge Lucie Lamarre

DATE DE L'ORDONNANCE :                            le 4 octobre 2000

ET MOTIFS DE L'ORDONNANCE :                 le 27 octobre 2000

COMPARUTIONS :

Pour l'appelant(e) :                               Me Martin Côté

Pour l'intimé(e) :                                    Me Nathalie Lessard

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER :

Pour l'appelant(e) :

                                Nom :                      

                                Étude :                    

Pour l'intimé(e) :                                    Morris Rosenberg

                                                                Sous-procureur général du Canada

                                                                Ottawa, Canada

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