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Date: 20001005

Dossiers : 1999-3890-IT-I

ENTRE :

FRANCO DIQUINZIO,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifsdu jugement

La juge Lamarre Proulx, C.C.I.

[1]            Il s'agit d'un appel par voie de la procédure informelle concernant l'année d'imposition 1994.

[2]            La question en litige est de savoir si l'appelant, au cours de l'année d'imposition 1994, a fait un gain en capital imposable au montant de 97 200 $ devant être inclus dans le calcul de son revenu, au sens de l'article 3 de la Loi de l'impôt sur le revenu (la " Loi "). Ce gain en capital imposable était entièrement déductible dans le calcul du revenu imposable en vertu de l'article 110.6 de la Loi. Il fut pris en compte dans le calcul du revenu rajusté de l'appelant pour l'année au sens de ce terme à l'article 122.5 de la Loi portant sur le crédit pour la taxe sur les produits et services, ci-après appelé " CTPS ". Cette augmentation du revenu a eu comme effet que l'appelant n'était plus éligible au CTPS. Elle a aussi eu des effets sur des prestations que l'épouse de l'appelant avait obtenu du Québec.

[3]            Les faits concernant la nouvelle cotisation sont décrits aux paragraphes 3, 4 et 5 de la Réponse à l'avis d'appel (la " Réponse ") :

3.              Par avis de nouvelle cotisation néant, en date du 30 janvier 1998 pour l'année d'imposition en litige, le Ministre a ajouté au revenu de l'appelant un gain en capital imposable de 97 200 $ (129 600 $ X 75%), et a accordé à l'appelant une déduction pour gain en capital de 97 200 $.

4.              Par avis de détermination daté du 27 février 1998, relatif au CTPS, le Ministre avisait l'appelant qu'il n'était pas éligible au CTPS pour l'année d'imposition 1994, étant donné que le revenu familial de ce dernier excédait 35 980 $.

5.              Pour établir la nouvelle avis de détermination de CTPS pour l'année d'imposition 1994, le Ministre a tenu notamment pour acquis les faits suivants :

a)              l'appelant a déclaré un revenu de 8 571,53 $ à sa déclaration de revenu produite pour l'année d'imposition 1994;

b)              en date du 10 février 1994, la société Lacadi Construction Inc. (ci-après, la " société ") rachetait à l'appelant les 2 610 actions privilégiées qu'il détenait;

c)              la juste valeur marchande des actions dont il est fait mention dans le sous-paragraphe précédent avait été établie à 10 $ l'action, par les parties soit l'appelant et la société;

d)              la contrepartie reçue par l'appelant, relativement aux actions mentionnées à l'alinéa b) ci-dessus, prenait la forme d'un billet promissoire à demande portant intérêt;

e)              le prix de base rajusté des actions mentionnées à l'alinéa b) ci-dessus, a été établi à zéro;

f)               de même, en date du 11 février 1994, l'appelant vendait ses 75 actions ordinaires de catégorie A de la société, à celle-ci;

g)              en contrepartie, l'appelant a reçu 103 500 actions de catégorie D d'une valeur de 1 $ l'action, de la même société;

h)              toujours en date du 11 février 1994, l'appelant signait le formulaire T2057 attestant de la transaction quant au transfert de ses 75 actions ordinaires de catégorie A en contrepartie des 103 500 actions de catégorie D;

i)               le prix de base rajusté des actions mentionnées à l'alinéa f) ci-dessus, a été établi à zéro;

j)               la société était une société de gestion qui contrôlait la société Construction Larc Inc.;

k)              la société Construction Larc Inc. exploitait une petite entreprise;

l)               donc, pour l'année d'imposition 1994, le Ministre a calculé un gain en capital imposable au montant de 97 200 $, et a accordé une déduction pour gain en capital de 97 200 $, dont les calculs sont détaillés en annexe;

m)             conséquemment pour l'année d'imposition en litige, le Ministre a établi que le revenu rajusté de l'appelant excédait 35 980 $;

n)              l'appelant n'était donc plus éligible au CTPS pour l'année d'imposition 1994;

[4]            Selon la pièce I-1, qui est l'avis de nouvelle détermination du crédit pour la taxe sur les produits et services, l'appelant n'a droit à aucun crédit parce que le revenu familial net est supérieur à 35 980 $ et l'appelant doit rembourser la somme de 503 $.

[5]            Seul l'appelant a témoigné. Il a admis les alinéas 5a) et 5j) de la Réponse.

[6]            L'appelant a expliqué qu'il était en effet actionnaire de la société Lacadi Construction Inc. (" Lacadi "). Vers la fin de l'année 1993, il y a eu un différend entre lui et les deux autres actionnaires de Lacadi, soit les deux frères Giovanni et Calogero La Rocca. Le différend a donné suite aux ententes décrites aux alinéas 5b) et suivants de la Réponse.

[7]            L'appelant conteste fortement qu'il ait jamais reçu les montants décrits aux alinéas 5c) et 5g) de la Réponse pour en arriver à un gain en capital imposable de 97 200 $.

[8]            La convention de rachat des actions mentionnée aux alinéas 5b) à 5e) de la Réponse a été produite comme pièce I-3. On y retrouve les allégués mentionnés aux alinéas 5c) et 5d) de la Réponse. Par cette convention en date du 10 février 1994, l'acheteur, qui est Lacadi, rachète 2,610 actions privilégiées pour un prix de 26 100 $. La contrepartie payée pour ce prix d'achat sera un billet promissoire à demande portant un taux d'intérêt préférentiel plus un pour-cent.

[9]            L'appelant dit qu'on lui a fait signer cela pour régler avec le gouvernement. L'appelant prétend qu'il n'a pas reçu le billet promissoire. Ce billet n'a pas été produit. En fait, il aurait même perdu la mise de fonds qu'il a faite en 1978. Il dit aussi qu'il ne connaît pas la valeur marchande des actions.

[10]          En ce qui concerne l'énoncé des alinéas 5f) et 5g) de la Réponse, la pièce I-4 a été déposée. À ce sujet, l'appelant a dit qu'il a signé les documents que le comptable lui présentait. La pièce I-4 est une convention en date du 11 février 1994 par laquelle Lacadi, en tant qu'acheteur, achète 75 actions catégorie A pour 103 500 $. Le prix sera payé par 103 500 actions de catégorie D de Lacadi.

[11]          La pièce I-5 a été déposée à l'appui des énoncés de l'alinéa 5h) de la Réponse. Il s'agit de la formule T2057, intitulée : " Choix concernant la disposition de biens par un contribuable en faveur d'une corporation canadienne imposable ". Il y est indiqué que la juste valeur marchande est de 103 500 $. Le document est signé par l'appelant et par monsieur Giovanni La Rocca et est daté du 11 février 1994.

[12]          L'appelant soutient que la vraie convention, c'est celle qu'il présente comme pièce A-2. Il s'agit d'une entente manuscrite en date du 13 décembre 1994, où l'appelant et monsieur Calogero La Rocca ont tous les deux signés à titre personnel. L'entente était pour une somme totale de 100 000 $ : 40 000 $ payable le 18 décembre 1994, la balance de 60 000 $ payable dans les cinq ans, avec cinq pour-cent d'intérêts, 10 000 $ les premiers quatre ans et 20 000 $ la dernière année. Cette entente avait pour but selon ses termes la séparation de biens.

[13]          L'appelant produit comme pièce A-1, un projet de convention qui aurait fait suite à l'entente manuscrite. Elle n'a pas été signée. Cette entente de vente concernait les 103 500 actions de catégorie D mentionnées à l'alinéa 5g) de la Réponse. L'entente concernait aussi 15 actions de catégorie B ainsi que toutes les actions détenues dans la corporation Larc Inc. Le prix de vente était de 40 000 $. Il s'agissait d'un projet. Le jour n'est pas mentionné mais l'année l'est. Il s'agit de l'année 1995.

[14]          La pièce A-3 est une entente signée intervenue le 7 juin 1995 entre l'appelant et Construction Lacadi Inc. L'appelant vend pour un dollar toutes ses actions tant privilégiées qu'ordinaires qu'il détient dans les corporations Lacadi et Construction Larc Inc. À la lecture de ce document, il semblerait que cette vente ait causé une perte en capital. Cependant, rien n'a été dit à ce sujet lors de l'audience.

[15]          La pièce I-7 est une demande de déduction pour le gain en capital pour l'année 1994. L'appelant explique que c'est à la demande des agents de Revenu Canada qu'il a fait une telle demande mais que cela ne veut pas dire qu'il a, en effet, fait un gain en capital cette année-là.

Conclusion

[16]          La définition de " revenu rajusté " à l'article 122.5 de la Loi se lit comme suit :

                " revenu rajusté " S'agissant du revenu ajusté d'un particulier pour une année d'imposition, le total des montants dont chacun représente le revenu pour l'année, selon le cas :

                a)             du particulier;

                b)             du proche admissible du particulier pour l'année;

[17]          La lecture de cette définition nous indique que pour le crédit de la taxe sur les produits et services on tient compte du revenu et non du revenu imposable.

[18]          L'article 3 de la Loi, qui définit la notion de revenu se lit comme suit :

3.              Pour déterminer le revenu d'un contribuable pour une année d'imposition, pour l'application de la présente partie, les calculs suivants sont à effectuer :

a)             le calcul du total des sommes qui constituent chacune le revenu du contribuable pour l'année (autre qu'un gain en capital imposable résultant de la disposition d'un bien) dont la source se situe au Canada ou à l'étranger, y compris, sans que soit limitée la portée générale de ce qui précède, le revenu tiré de chaque charge, emploi, entreprise et bien;

b)             le calcul de l'excédent éventuel du montant visé au sous-alinéa (i) sur le montant visé au sous-alinéa (ii) :

(i)             le total des montants suivants :

(A)           ses gains en capital imposables pour l'année tirés de la disposition de biens, autres que des biens meubles déterminés,

(B) son gain net imposable pour l'année tiré de la disposition de biens meubles déterminés,

(ii)            l'excédent éventuel de ses pertes en capital déductibles pour l'année, résultant de la disposition de biens autres que des biens meubles déterminés sur les pertes déductibles au titre d'un placement d'entreprise pour l'année, subies par le contribuable;

c)              le calcul de l'excédent éventuel du total établi selon l'alinéa a) plus le montant établi selon l'alinéa b) sur le total des déductions permises par la sous-section e dans le calcul du revenu du contribuable pour l'année (sauf dans la mesure où il a été tenu compte de ces déductions dans le calcul du total visé à l'alinéa a));

d)             le calcul de l'excédent éventuel de l'excédent calculé selon l'alinéa c) sur le total des pertes subies par le contribuable pour l'année qui résultent d'une charge, d'un emploi, d'une entreprise ou d'un bien et des pertes déductibles au titre d'un placement d'entreprise subies par le contribuable pour l'année;

Pour l'application de la présente partie, les règles suivantes s'appliquent :

e)              si un montant est calculé selon l'alinéa d) à l'égard du contribuable pour l'année, le revenu du contribuable pour l'année correspond à ce montant;

f)               sinon, le revenu du contribuable pour l'année est réputé égal à zéro.

[19]          On voit à la disposition 3b)(i)(A) ci-dessus que le revenu tient compte du gain en capital imposable. C'est au niveau du calcul du revenu imposable qu'intervient la déduction du gain en capital dans les circonstances de l'article 110.6 de la Loi.

[20]          En 1995, tel que mentionné au paragraphe 14 de ces motifs, il semble y avoir une perte en capital puisque les actions de l'appelant ont été vendues pour la somme de un dollar. À l'audience, on n'a pas parlé de cette de perte en capital possible en 1995, mais si cela était le cas ainsi que la pièce A-3 tend à l'indiquer, le report des pertes en capital ne se fait pour les années antérieures qu'à l'égard du revenu imposable ainsi que le prévoit l'article 111 de la Loi. Cela n'aurait donc pas d'effet sur le calcul du revenu pour l'année 1994.

[21]          En ce qui concerne les prétentions de l'appelant voulant qu'il n'ait en 1994 eu aucun gain en capital, elles viennent en contradiction avec les documents qu'il a lui-même signés. Pour que je puisse considérer ces documents comme ne représentant pas la vérité, il aurait fallu en faire état dans l'avis d'appel. De tels motifs devraient être exprimés avant l'audience afin que la partie intimée puisse se préparer et procéder au débat judiciaire requis. L'avis d'opposition n'a pas été produit. J'ai pris connaissance de l'avis d'appel. Cet avis ne mentionne aucunement que les documents sur lesquels s'appuie le Ministre sont contraires à la vérité ou qu'il ont été obtenus sans le consentement éclairé de l'appelant. En réalité, l'avis d'appel ne donne aucun motif expliquant pourquoi la cotisation devrait être modifiée ou annulée.

[22]          Les moyens soulevés par l'appelant sont des moyens de droit très sérieux qui doivent avoir été indiqués préférablement dans l'avis d'opposition mais sûrement dans l'avis d'appel. De plus une preuve d'ententes contraires à la vérité ou une preuve de vice de consentement exige beaucoup plus que la seule affirmation de l'une des parties signataires. Vu l'absence de preuve que ces documents ne représentent pas la réalité ou qu'ils devraient être considérés comme nuls parce qu'ils ont été obtenus par quelque vice entachant leur validité, je dois considérer ces contrats comme valides.

[23]          Au motif que le gain en capital imposable doit être inclus dans le calcul du revenu de l'appelant pour l'année 1994 et au motif que les ententes sur lesquelles s'est fondé le Ministre doivent être considérées comme valides, l'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada ce 5e jour d'octobre 2000.

" Louise Lamarre Proulx "

J.C.C.I.

No DU DOSSIER DE LA COUR :        1999-3890(IT)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :                 Franco DiQuinzio c Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                      Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :    le 15 juin 2000

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :         l'honorable juge Louise Lamarre Proulx

DATE DU JUGEMENT :                      le 2 octobre 2000

COMPARUTIONS :

Pour l'appelant :                    L'appelant lui-même

Avocat de l'intimée :            Me Mounes Ayadi

AVOCAT(e) INSCRIT AU DOSSIER :

Pour l'appelant(e) :

                                Nom :                      

                                Étude :                    

Pour l'intimée :                       Morris Rosenberg

                                                Sous-procureur général du Canada

                                                Ottawa, Canada

1999-3890(IT)I

ENTRE :

FRANCO DIQUINZIO,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 15 juin 2000, à Montréal (Québec), par

l'honorable juge Louise Lamarre Proulx

Comparutions

Pour l'appelant :                                  L'appelant lui-même

Avocat de l'intimée :                            Me Mounes Ayadi

JUGEMENT

          L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1994, est rejeté, selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 5e jour d'octobre 2000.

" Louise Lamarre Proulx "

J.C.C.I.


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