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Date: 20001214

Dossier: 97-2841-GST-G

ENTRE :

ITA TRAVEL AGENCY LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

La juge Lamarre, C.C.I.

[1]            L'appel dont il s'agit est interjeté contre une cotisation établie par le ministre du Revenu national (le « ministre » ) en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d'accise (la « Loi » ) pour la période du 1er juin 1992 au 31 mars 1996, soit une cotisation d'un montant de 396 871 $ au titre de la taxe sur les produits et services ( « TPS » ) non versée (la TPS payable a été augmentée de 280 175 $, et le crédit de taxe sur les intrants a été diminué de 116 696 $).

[2]            L'appelante est une société qui a été constituée en vertu des lois de l'Ontario et dont l'établissement principal est situé à Ottawa. Durant toute la période pertinente, l'appelante exploitait une entreprise comme agence de voyages inscrite, soit une entreprise consistant à vendre au public des produits et services de voyages et des produits et services connexes. Au cours de la période du 1er juin 1992 au 31 mars 1996 (la « période en cause » ), l'appelante, comme agence de voyages, fournissait des services de voyages à une clientèle composée de sociétés et de particuliers. Elle faisait notamment des réservations et s'occupait aussi de gérer des services de voyages pour certaines sociétés. Elle dit qu'elle était rémunérée pour ces services sous la forme de commissions ou honoraires et qu'elle devait faire payer de la TPS sur ces commissions ou honoraires.

[3]            L'appelante affirme que, outre qu'elle fournissait les services mentionnés précédemment, elle achetait et revendait des billets d'avion au rabais, soit le point en litige dans le présent appel. La revente de ces billets à prix réduit s'appliquait principalement à des voyages hors du Canada, soit une fourniture détaxée aux fins de la TPS. L'appelante soutient que, à la différence des arrangements en matière de commission qui s'appliquent à des services de voyages fournis par des agences de voyages à des compagnies aériennes, dans le cas de billets d'avion à prix réduit, ce sont les compagnies aériennes qui annoncent et vendent les billets à des revendeurs sur la base d'un tarif net. L'appelante dit qu'elle ne recevait aucune commission des compagnies aériennes pour la vente de ces billets et qu'elle n'avait donc pas à faire payer et à verser de la TPS à l'égard de ces billets tarif net.

[4]            De son côté, l'intimée estime que, concernant ces billets d'avion à prix réduit, l'appelante vendait des services de transport international (fournitures détaxées) à des voyageurs pour des transporteurs aériens et que, pour la prestation de ces services, elle recevait des transporteurs aériens une commission sur laquelle elle était tenue de percevoir de la TPS. En d'autres termes, l'intimée considère que l'appelante n'achète pas les billets pour ensuite les revendre elle-même, mais fait plutôt fonction de mandataire pour les transporteurs aériens en vendant les billets à prix réduit à des voyageurs. D'après l'intimée, la commission est la contrepartie reçue pour ce service fourni par l'appelante aux transporteurs aériens, soit une fourniture taxable.

[5]            L'appelante réplique que le ministre s'est trompé en considérant que le rabais sur des billets vendus à l'appelante pour revente est une commission sur laquelle de la TPS doit être payée.

Point en litige

[6]            En bref, le problème est le suivant. Lorsque l'agent vend un billet plein tarif pour la compagnie aérienne, il reçoit une commission, sur laquelle de la TPS doit être payée; du moins en était-il ainsi durant la période en cause.

[7]            Lorsque l'agent vend un billet à prix réduit ( « tarif net » ), il ne reçoit pas une commission au sens habituel de ce terme, c'est-à-dire un pourcentage du prix de vente. Il peut vendre le billet à des clients à un prix très réduit.

[8]            La compagnie aérienne traite la différence entre le plein tarif et le prix réduit comme une « commission » . Ce terme n'est pas particulièrement révélateur dans le contexte de l'espèce, si ce n'est qu'il comporte généralement l'idée d'une contrepartie.

[9]            Le mot « contrepartie » est défini comme suit au paragraphe 123(1) de la Loi :

est assimilé à une contrepartie tout montant qui, par effet de la loi, est payable pour une fourniture.

Le paragraphe 165(1) de la Loi est rédigé de la façon suivante :

                Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, l'acquéreur d'une fourniture taxable effectuée au Canada est tenu de payer à Sa Majesté du chef du Canada une taxe calculée au taux de 7% sur la valeur de la contrepartie de la fourniture.

La véritable question est de savoir si la différence entre le plein tarif et le prix réduit est une « contrepartie » .

[10]          Le problème s'est posé en raison du fait que les compagnies aériennes semblent avoir traité le montant intégral du rabais comme une « commission » , donc comme une « contrepartie » au sens du paragraphe 165(1). Elles calculaient de la TPS là-dessus et la payaient à l'appelante en s'attendant qu'elle la verse à Sa Majesté la Reine, ce que l'appelante n'a pas fait.

[11]          Il y a donc deux questions.

a)              Le montant du rabais est-il la « contrepartie » d'une fourniture, donc un montant assujetti à de la TPS?

b)             Dans la négative et si les 7 p. 100 de TPS ne sont pas exigibles sur le montant du rabais et ont été payés par erreur par les compagnies aériennes à l'appelante, qu'est-ce que l'appelante aurait dû faire avec cet argent?

La preuve

[12]          Les compagnies aériennes forment et contrôlent l'Association du transport aérien international ( « IATA » ), qui remplit diverses fonctions pour des compagnies aériennes du monde entier. Une de ses réalisations est la création du Plan de facturation et de règlement (en anglais : Billing Settlement Plan ou « BSP » ), soit un système neutre exploité pour environ 104 compagnies aériennes participantes du Canada et environ 4 000 agences de voyages. Dans le cadre du BSP, il y a, pour les 4 000 agences accréditées du Canada (y compris l'appelante), un programme de présentation de rapports par lequel les agences de voyages déclarent hebdomadairement leurs ventes totales. Il s'agit essentiellement d'un programme de règlement permettant d'établir la balance des sommes dues par les agences de voyages aux compagnies aériennes et vice versa. C'est un système de rapprochement de comptes conçu pour que les versements appropriés soient faits entre les agences et les compagnies aériennes. Tout ce processus est la norme aussi bien pour les agences de voyages que pour les compagnies aériennes.

[13]          Dans le rapport, les agences de voyages indiquent également le montant de la commission pour chaque vente. S'il s'agit d'une vente au tarif régulier, la commission indiquée représente normalement 8 à 10 p. 100 du tarif de base. S'il s'agit d'une vente au tarif net, la différence entre le plein tarif et le tarif net figure comme commission à verser à l'agence de voyages. La TPS sur cette commission est également calculée et figure dans le rapport comme montant devant être payé par les compagnies aériennes aux agences de voyages.

[14]          M. Said Ibrahim, qui est conseiller en voyages à la société appelante depuis huit ans, a témoigné que la commission sur la vente d'un billet n'est pas toujours la même et n'est pas toujours exprimée en pourcentage. Il a expliqué que, dans le cas d'une opération selon le tarif régulier, l'agence de voyages recevait une commission représentant un pourcentage du tarif (soit habituellement entre 8 et 10 p. 100, comme cela a été mentionné précédemment). Il a également expliqué qu'un tarif net était un prix fixe déterminé par les compagnies aériennes pour une certaine destination et pour certaines dates. Pour reprendre ses propres termes, les tarifs nets représentent simplement ce que l'agence doit payer à la compagnie aérienne. Lorsqu'il vend à des clients des billets tarif net, il indique sur la facture le tarif officiel publié (le plein tarif) et le montant du rabais utilisé par l'agence de voyages pour passer du plein tarif au tarif net proposé au client. En fait, dans une opération selon le tarif net, l'agence de voyages peut demander tout montant correspondant au prix du marché. Habituellement, l'agence de voyages demande au client un montant qui représente le tarif net et les diverses taxes de transport applicables et auquel elle ajoute sa marge bénéficiaire, soit entre 25 et 50 $ en sus du tarif net à payer aux compagnies aériennes.

[15]          Dans une opération au comptant, le client payait seulement le montant net qui lui était demandé et l'agence de voyages versait à la compagnie aérienne le montant du tarif net plus les taxes de transport applicables. Le rapport BSP indiquait dans le cas d'une vente au comptant le montant net dû à la compagnie aérienne par l'agence de voyages, soit le montant du plein tarif diminué de ce qui est appelé la commission et diminué de la TPS sur cette commission. Dans une opération sur carte de crédit, le client se voyait demander le plein tarif et la compagnie aérienne versait à l'agence de voyages le montant de ce qui est appelé la commission et le montant de la TPS calculé sur cette commission. De son côté, l'agence de voyages remboursait au client le montant du rabais en émettant un chèque de ce montant. Que le client paie comptant ou par carte de crédit, le résultat final est le même pour lui.

[16]          Mme Brenda Chénier, soit la contrôleuse de l'appelante, a témoigné que le prix qui est en fait imprimé sur un billet d'avion (c'est-à-dire le plein tarif) est le « prix de vente au détail du fabricant » . D'après elle, ce sont les compagnies aériennes qui fixent ce montant, et elles exigent que ce montant soit imprimé sur le billet. Elle a dit également que sur le billet, ainsi que dans le rapport aux compagnies aériennes, la différence entre le prix effectivement demandé au client et le plein tarif est appelée une commission. En fait, elle a dit que c'était la seule manière de faire passer ce rabais dans le système. En d'autres termes, elle a témoigné que la commission indiquée dans le rapport représentait davantage une inscription comptable qu'une commission proprement dite. Elle insistait toutefois sur le fait que l'appelante ne recevait pas une commission proprement dite sur les billets tarif net. Elle concède cependant que l'appelante recevait de la TPS sur la commission relative à un billet tarif net dans le cadre du processus de règlement du BSP.

[17]          Mme Chénier a témoigné que, initialement, la TPS sur le montant du rabais relatif à une opération tarif net était versée à Revenu Canada. Toutefois, comme l'appelante ne recevait pas en fait la commission relative à une opération tarif net, Mme Chénier est ultérieurement arrivée à la conclusion que l'appelante n'avait pas à payer toute la TPS sur les commissions. C'est pourquoi elle a demandé des crédits de taxe sur les intrants. Plus précisément, au cours de la période allant de juin 1992 au 31 mars 1994, Mme Chénier versait à Revenu Canada la TPS déclarée sur la commission. Elle demandait ensuite un crédit de taxe sur les intrants, de sorte que la TPS effectivement versée à Revenu Canada égalait 7 p. 100 du montant du profit effectif sur une opération tarif net, montant qu'elle considérait comme la véritable commission ou contrepartie reçue par l'appelante à l'égard d'une telle opération. En d'autres termes, l'appelante calculait le montant du profit effectivement reçu à l'égard de la vente du billet d'avion tarif net. L'appelante déduisait ensuite du montant de la TPS reçu des compagnies aériennes à l'égard du rabais 7 p. 100 de son profit effectif et déclarait le montant net comme crédit de taxe sur les intrants. Mme Chénier reconnaît qu'elle demandait des crédits de taxe sur les intrants en vue de n'avoir à verser à Revenu Canada que la TPS sur le profit relatif à une opération tarif net. Elle admet cependant que l'appelante n'achetait pas ni ne fournissait un service sur lequel elle payait de la TPS. Il ressort clairement de son témoignage que l'appelante ne payait pas de TPS lui donnant le droit de demander des crédits de taxe sur les intrants. Les crédits de taxe sur les intrants n'étaient demandés que pour réduire le montant que l'appelante était tenue de verser à Revenu Canada. En fait, en avril 1994, Mme Chénier a modifié sa façon de procéder et, au lieu de demander des crédits de taxe sur les intrants, elle versait simplement à Revenu Canada la TPS sur le profit effectif de l'appelante et non le montant total de la TPS crédité par les compagnies aériennes. Toutefois, l'appelante n'a jamais remboursé aux compagnies aériennes la TPS perçue en trop ou ne leur a jamais remis une note de crédit à cet égard.

[18]          M. Joseph Saab, soit le principal propriétaire de l'appelante, a dit également que le rabais considéré comme une commission dans le rapport BSP ne représentait rien de plus qu'une « inscription comptable établissant l'équilibre » . Il a dit ceci au sujet du fait qu'il était erroné et absurde de considérer le rabais comme une commission (volume 1 de la transcription, page 167) :

[TRADUCTION]

Je veux dire 1 125 $, si mon tarif net est de 1 000 $. Pourquoi me donnerait-on une commission de 1 200 $ ou, en l'occurrence, de 1 208 $? Je ne comprends pas.

[19]          En fait, il est à noter que, dans les opérations tarif net, le pourcentage de commission indiqué dans le rapport BSP est bien supérieur aux 8 à 10 p. 100 de commission dont convenaient les agences de voyages et les compagnies aériennes pour des ventes de billets tarif régulier. Dans les opérations dont parlaient les parties, le pourcentage représente environ 50 p. 100 du tarif de base, voire un peu plus. M. Saab a fait remarquer qu'il serait commercialement tout à fait insensé qu'une compagnie aérienne paie plus en commission que ce qu'elle reçoit de l'appelante comme contrepartie pour un billet tarif net.

[20]          Pour aider à mieux comprendre la situation, je reproduis un tableau basé sur un rapport BSP (pièce A-6) indiquant deux ventes tarif net — soit dans un cas une opération sur carte de crédit (de sorte que c'était la compagnie aérienne qui devait de l'argent à l'agence de voyages) et dans l'autre cas une opération au comptant (de sorte que c'était l'agence de voyages qui devait de l'argent à la compagnie aérienne) — ainsi qu'une vente tarif régulier.

Plein tarif

Tarif de base*

Taxes de transport appli-cables

%

de commission

Commission

TPS sur la commission

Versements

nets

1. 2 405,25 $

2 333,00 $

72,75 $

51,78 %

1 208,00 $

84,56 $

1 112,69 $

2. 1 949,63 $

1 897,00 $

52,63 $

49,92 %

947,00 $

66,29 $

1 013,29 $-

3. 469,41 $

395,10 $

74,31 $

8 %

   31,61 $

2,21 $

   33,82 $-

* le tarif de base est le plein tarif diminué des taxes de transport applicables.

1.              Vente tarif net au comptant : l'agence de voyages verse 1 112,69 $ à la compagnie aérienne (soit le plein tarif de 2 405,25 $ moins la commission de 1 208 $ et moins la TPS de 84,56 $ sur la commission.

2.              Vente tarif net sur carte de crédit : la compagnie aérienne verse 1 013,29 $ à l'agence de voyages (soit la commission de 947 $ plus la TPS de 66,29 $ sur la commission).

3.              Vente tarif régulier sur carte de crédit : la compagnie aérienne verse 33,82 $ à l'agence de voyages (soit la commission de 31,61 $ plus la TPS de 2,21 $ sur la commission).

[21]          D'après M. Wayne Oliver, soit un directeur de l'embauchage de l'IATA pour le centre de traitement canadien du BSP, c'est à l'agence de voyages qu'il incombe d'inscrire la commission devant être payée sur le billet émis, que ce soit en pourcentage ou en dollars. Le BSP n'a aucun contrôle sur l'inscription de ce montant. L'agence de voyages déclare la commission dans le cadre de son propre système de réservation automatisée ( « SRI » ). En fait, une norme internationale spécifie l'information que le SRI doit communiquer au BSP. Le BSP utilise le montant de la commission indiqué sur le billet à des fins de rapprochement de comptes; il traite le rapport même que l'agence de voyages a établi (et qui indique les commissions, la TPS sur les commissions et les versements nets), puis il l'envoie aux compagnies aériennes. M. Oliver a témoigné que le montant de la commission déclaré par l'agence de voyages est un montant déterminé bilatéralement par l'agence de voyages et la compagnie aérienne. Le BSP n'a pas le mandat de déterminer au nom des compagnies aériennes si la commission est juste dans le cas de quelque opération que ce soit. Les compagnies aériennes demandent un crédit de taxe sur les intrants à l'égard de la TPS payée sur chaque commission.

[22]          Au cours du contre-interrogatoire, M. Oliver a admis que ce rapport n'indique pas de tarifs nets, soit ce que les agences de voyages doivent verser aux compagnies aériennes. C'est le plein tarif et non le tarif net qui figure sur le billet d'avion. Si une agence de voyages a avec une compagnie aérienne une entente particulière en matière de tarif net, elle indique l'ajustement dans la case faisant état de la commission. M. Oliver a expliqué que c'était là une décision de la compagnie aérienne et que l'IATA n'avait pas voix au chapitre.

[23]          M. Oliver a cependant reconnu que la véritable opération économique entre la compagnie aérienne et l'agence de voyages est basée sur le tarif net et sur les taxes de transport applicables. La commission est en fait conçue pour ramener le plein tarif au niveau du tarif net. Pour que le billet soit imprimé, un montant doit être indiqué comme commission. M. Oliver a témoigné que ce modèle est en vigueur depuis des années. Il a dit que, à l'époque de l'introduction de la TPS, il leur avait fallu trouver une façon d'indiquer cela pour les agences de voyages, ce qui a été fait en consultation avec ces dernières. Il a dit qu'il n'avait jamais reçu de commentaires d'agences de voyages concernant le calcul de la TPS sur la commission.

[24]          Michelle Routhier, qui travaillait pour Revenu Canada — services à la clientèle de la TPS — a dit qu'elle avait établi à l'égard de l'appelante une cotisation fondée uniquement sur les rapports BSP. Pour calculer la TPS à payer, elle avait utilisé la TPS totale indiquée comme payée par les compagnies aériennes sur ce qu'elle appelait les « supercommissions » pour désigner, semble-t-il, les commissions sur les ventes nettes. Elle n'a pas tenu compte des factures effectives entre l'appelante et le client et n'était pas au courant de la nature d'une opération tarif net.

Arguments de l'appelante

[25]          L'appelante soutient que la pratique commerciale relative à la vente de billets tarif net est différente de la pratique courante du BSP en ce que le BSP est basé sur le fait que l'agence de voyages n'est qu'un mandataire et qu'elle reçoit un taux de commission déterminé à l'égard de services fournis. D'après l'appelante, les agences de voyages achètent des billets tarif net pour ensuite les revendre en leur propre nom. Le montant devant être payé à la compagnie aérienne est un montant fixe et exigeait que l'agence détermine sa propre rentabilité, en se fondant sur sa capacité de revendre le billet à un prix plus élevé. L'appelante soutient que tous les prix de vente demandés aux agences de voyages sont des prix nets et ne correspondent donc pas aux arrangements habituels en matière de commission en vertu desquels les agences de voyages reçoivent un pourcentage déterminé du prix auquel le billet est effectivement vendu à l'utilisateur final. L'appelante dit que, parce que le voyage couvert par les billets représente une fourniture détaxée, il n'y a pas de TPS à payer sur la portion de la contrepartie correspondant au voyage. Toutefois, la compagnie aérienne reçoit bel et bien des crédits de taxe sur les intrants à l'égard de la TPS à payer sur les commissions versées aux agences de voyages. D'après l'appelante, nonobstant la réalité économique de l'opération, les compagnies aériennes ont intérêt à traiter comme une commission le montant total du rabais relatif aux tarifs nets, pour maximaliser les crédits de taxe sur les intrants qu'elles peuvent demander.

[26]          D'après l'avocat de l'appelante, les commissions indiquées dans le rapport BSP étaient utilisées comme un ajustement pour déterminer le rendement tarif net entre les compagnies aériennes et les agences de voyages. Le tarif net est un prix que la compagnie aérienne présente à l'agence comme étant le prix auquel elle désire être payée à l'égard d'un vol quelconque, ce qui n'est pas contredit. L'avocat soutient que la commission représente une écriture de compensation nécessaire pour arriver au modèle négocié qui existait relativement à des opérations tarif net.

[27]          L'avocat soutient que, en vertu du paragraphe 165(1) de la Loi, de la TPS est exigible sur la valeur de la contrepartie de la fourniture. La Loi ne vise pas à taxer une opération artificielle, et il estime c'est ce que le ministre cherche à faire. Il soutient que, pour ce qui est des billets tarif net, l'appelante n'a reçu aucune commission et qu'il n'y a donc pas de contrepartie sur laquelle de la TPS devrait être payée. Il soutient qu'il y a de la TPS à payer seulement sur la commission effectivement gagnée, c'est-à-dire sur le montant de la rentrée d'argent réelle.

Arguments de l'intimée

[28]          L'intimée considère la position de l'appelante comme une façon pour cette dernière de transformer en bénéfices des fonds qui lui sont versés en fiducie par les compagnies aériennes. L'avocat de l'intimée souligne qu'il y a deux opérations : l'une est enregistrée sur la facture remise au client, laquelle indique le plein tarif, et l'autre est enregistrée dans le rapport BSP, qui reflète une entente entre les compagnies aériennes et les agences de voyages. D'après l'intimée, l'appelante faisait fonction de mandataire pour les transporteurs aériens; ainsi, elle vendait des billets à des voyageurs au plein tarif déterminé par les transporteurs aériens, qui établissaient des factures à son égard en conséquence. L'appelante réduisait en fait alors son revenu en offrant des rabais à des voyageurs. L'intimée soutient toutefois que cette réduction de revenu ne réduisait pas le montant des commissions versées à l'appelante par les transporteurs aériens, soit la contrepartie sur laquelle la TPS est calculée. Dans le cas présent, la fourniture est une fourniture de services à des compagnies aériennes basée sur une entente entre les compagnies aériennes et les agences de voyages, ce dont témoigne le rapport BSP.

[29]          L'avocat ajoute que la marge bénéficiaire de l'appelante est intégrée dans le montant de cette commission. Il argue que, ce qui ne va pas, c'est que l'agence empoche la TPS sur cette commission et dit que c'est un profit. En fait, donc, le profit réalisé par l'appelante sur chaque opération tarif net était le montant du profit effectif (moins la TPS sur ce profit) et la TPS perçue des compagnies aériennes et non versée à Revenu Canada.

[30]          L'avocat argue que la TPS est une taxe à stades multiples. Dans le cas présent, la TPS ne suivait pas son cours. Elle était perçue par l'appelante, mais non versée à Revenu Canada. La structure et le contexte de la Loi ne permettent pas de transformer la TPS en un profit. Ou bien la TPS est perçue à raison et ensuite versée, ou bien elle est perçue à tort, auquel cas la Loi prévoit des mécanismes pour que la TPS soit remboursée à la partie de qui elle a été perçue à tort.

[31]          Enfin, l'avocat de l'intimée soutient que l'appelante n'achetait pas les billets tarif net aux transporteurs aériens, de sorte qu'aucun fondement ne permettait à l'appelante de demander des crédits de taxe sur les intrants relativement à ces billets.

Analyse

[32]          Cette affaire tourne principalement autour de la question de savoir si les montants des rabais considérés comme des commissions par le ministre ainsi que dans les rapports BSP étaient de véritables commissions ou une véritable contrepartie, soit des montants payables pour une fourniture au sens du paragraphe 123(1) de la Loi. Dans l'affirmative, les parties ne contestent pas le fait que la TPS perçue par l'appelante sur ce qui est appelé les commissions doit être versée à l'intimée. Dans la négative, il faut déterminer si l'appelante avait droit à un crédit relativement à des sommes versées au receveur général en raison du fait que de la TPS avait été, par erreur, perçue en trop des compagnies aériennes.

Commissions

[33]          D'une manière générale, on ne conteste pas le fait que les commissions reçues des compagnies aériennes par l'agence de voyages sont la contrepartie de services fournis aux compagnies aériennes. Il s'agit maintenant de déterminer si les montants des rabais sont de véritables commissions.

[34]          Le Concise Oxford Dictionary (Oxford, presses de l'Université d'Oxford, 1990) définit le mot anglais « commission » (commission) comme désignant un pourcentage versé à un mandataire sur les profits tirés de produits ou autres éléments vendus ou d'occasions d'affaire obtenues. D'après cette définition, quelque chose doit effectivement être versé à quelqu'un pour qu'un montant constitue une commission, et le montant doit être exprimé en pourcentage.

[35]          Dans le Black's Law Dictionary (St. Paul, Minnesota, West Publishing Co., 1990), la définition du mot anglais « commission » se lit comme suit :

[TRADUCTION]

Récompense, rémunération ou rétribution qu'un mandataire, vendeur, exécuteur testamentaire, syndic, séquestre, facteur, courtier ou dépositaire se voit verser en pourcentage du montant de ses transactions ou en pourcentage du profit qui va au mandant. Weiner v. Swales, 217 Md. 123, à la p. 141, A.2d 749, à la p. 750. Honoraires qu'un mandataire ou employé se voit verser pour avoir fait une transaction ou rendu un service. Fryar v. Currin, App., 280 S.C. 241, à la p. 312, S.E. 2d 16, à la p. 18. Rémunération qu'un administrateur ou autre fiduciaire se voit verser pour avoir rempli fidèlement ses devoirs.

[36]          Il ressort de cette définition qu'une commission implique le paiement effectif d'une somme d'argent calculée en pourcentage du montant d'une transaction ou en pourcentage du profit qui va au mandant.

[37]          Dans l'affaire Campbell v. National Trust Co. Ltd., [1931] 1 W.W.R. 465, lord Russell, du Conseil privé, a défini comme suit le mot anglais « commission » , à la page 471 :

[TRADUCTION]

                La convention verbale entre M. Campbell et M. Wallberg prévoyait le paiement d' « une commission » , mais il n'y avait aucune indication quant au montant de celle-ci ou quant à la manière dont ce montant devait être déterminé. La preuve n'indique pas non plus qu'il existait une coutume applicable au cas présent et par rapport à laquelle le montant de la commission pourrait être déterminé. Dans ces circonstances, le contrat ne peut que vouloir dire que M. Campbell a droit à une somme forfaitaire à titre de rémunération pour les services qu'il a rendus en présentant M. Clarke. Le fait que fréquemment, voire ordinairement, une commission prend la forme d'un pourcentage ne s'oppose pas à ce point de vue. Le mot « commission » peut tout à fait à juste titre, d'un point de vue tant juridique que commercial, être utilisé pour désigner une somme forfaitaire ne représentant aucun pourcentage de quoi que ce soit, comme dans le cas d'une entente prévoyant le paiement d'une commission de 500 livres sterling, par exemple.

[38]          Dans le jugement Consolboard Inc. c. MacMillan Bloedel, C.F. 1ère inst., no T-388-74, 6 avril 1982 ((1982), 63 C.P.R. (2d) 1 [modifié par 74 C.P.R. (2d) 199, mais pas relativement à la question examinée ici], le juge Cattanach, de la section de première instance de la Cour fédérale, a traité de la signification des mots « commission » et « rabais » . Dans cette cause, la défenderesse, soit l'usine productrice, expédiait ses produits à une filiale chargée des ventes, qui entreposait le produit fini, puis le vendait aux commerçants. Cette filiale recevait en compensation de ses efforts un pourcentage prédéterminé du prix auquel le produit était vendu au consommateur, et cela représentait la base de ses revenus et de son bénéfice éventuel. Elle vendait en outre directement des voitures à des consommateurs, et ces voitures étaient directement envoyées de l'usine aux consommateurs, par divers moyens de transport. Pour avoir réalisé la vente, elle recevait une allocation représentant 5 p. 100 du prix auquel la voiture avait été vendue au consommateur. Au cours des témoignages et de l'argumentation, cette allocation était appelée un « rabais » ou une « commission » . Le juge Cattanach, de la section de première instance de la Cour fédérale, a défini comme suit les mots « commission » et « rabais » aux pages 56 et 57 ((1982) 63 C.P.R. (2d) 1 : à la page 22) :

. . . Ces mots ne peuvent être des termes de l'art utilisé dans un sens commercial et ils ne sont pas non plus des mots techniques d'un art ou d'une science quelconque. Par conséquent, il faut leur donner le sens qu'ils ont dans le langage courant.

Dans le domaine commercial, une commission est un pourcentage du prix d'un produit versé pour indemniser les efforts de l'agent ou de toute personne du genre qui effectue des transactions pour le compte d'une autre.

Également dans le domaine commercial, un rabais accordé lors de la vente d'un article de commerce est une diminution ou une déduction de la valeur nominale ou du prix dudit article.

Le noeud de la controverse consiste à déterminer si l'allocation versée à la filiale chargée des ventes constitue une « commission » ou un « rabais » .

S'il s'agit d'une commission, c'est alors une dépense d'exploitation de l'usine pouvant légitimement être déduite du revenu.

Par contre, s'il s'agit d'un rabais, ce montant ne fait alors par partie du prix exigé du consommateur et doit être déduit du revenu net à l'usine.

[39]          L'allocation versée à la filiale chargée des ventes n'avait absolument aucun effet sur le prix auquel le véhicule était vendu au consommateur. Les allocations pour ventes directes de voitures ont donc été considérées comme n'étant pas des rabais, car elles ne se traduisaient pas par un prix inférieur pour le consommateur au niveau du détail. Il a été statué qu'il s'agissait de dépenses d'exploitation engagées par l'usine dans la vente de son produit et que c'était donc des commissions.

[40]          Enfin, dans le jugement Pelko Electric Inc. v. Lenchyshyn, 31 C.P.R. (3d) 340, modifié par 32 C.P.R. (3d) 225 (Cour d'appel de l'Ontario), le juge Southey, de la Haute Cour de justice de l'Ontario, a décrit comme suit ce que désigne le mot anglais « commission » , aux pages 384-385 :

[TRADUCTION]

[...] Dans le Webster's New World Dictionary, 2nd college ed. (1980), la signification appropriée [du mot anglais « commission » utilisé dans une entente en matière de redevances entre les parties] est donnée comme suit :

Pourcentage du produit d'une vente versé à titre de rémunération à un commis vendeur ou mandataire, souvent en plus du salaire.

               

La signification appropriée est donnée comme suit dans le Shorter Oxford English Dictionary (1980) :

               

                10.            Rémunération au prorata au titre d'un travail qu'une personne accomplit en tant que mandataire.

Ce dictionnaire décrit les termes anglais « pro rata » comme équivalant à « selon le taux » et il en donne les significations suivantes :

               

                                en proportion de la valeur ou de l'ampleur (de la participation de la personne); proportionnellement. Également employé comme attribut ou adjectif au sens de « proportionnel » .

[41]          Deux caractéristiques semblent donc définir ce qu'est une commission. Premièrement, une commission est une somme effectivement versée à quelqu'un ou portée à son crédit. Cela n'inclut pas des paiements ou crédits artificiels, théoriques ou fictifs. J'estime qu'une inscription comptable ne peut être une commission. Deuxièmement, une commission est habituellement un pourcentage ou, s'il s'agit d'une somme forfaitaire, celle-ci doit au moins être proportionnelle au travail accompli ou à la valeur de l'article vendu. En l'espèce, je conclus que M. Saab a soulevé un très bon point en ce qu'il est un peu gauche de considérer un rabais comme une commission, alors que le montant de la commission théoriquement payé par les compagnies aériennes est plus élevé que le montant reçu des agences de voyages en contrepartie d'un billet tarif net. Dans le cas particulier des tarifs nets, la réduction de prix indiquée comme commission dans le rapport BSP serait plus exactement indiquée comme rabais, car il est clair que, comme disait le juge Cattanach dans l'affaire Consolboard, cela se traduisait par un prix inférieur pour le consommateur au niveau du détail.

[42]          La preuve indique nettement que, pour les ventes de billets tarif régulier, les agences de voyages reçoivent une commission représentant 8 à 10 p. 100 du prix du billet. Pour paraphraser ce que disait lord Russell dans l'affaire Campbell, précitée, c'est certainement une indication qu'il existe une coutume applicable, par rapport à laquelle le montant d'une commission peut être déterminé. Une commission de 50 p. 100 du tarif de base (qui représente en fait 100 p. 100 ou plus du tarif net) n'est certainement pas coutumière pour des agents de voyages, et il est évident à mes yeux que les compagnies aériennes traitaient comme une commission la réduction de prix relative aux tarifs nets dans leur propre intérêt, c'est-à-dire pour demander des crédits de taxe sur les intrants. Pour ce qui est de l'argument selon lequel les agents acceptaient que ce soit ainsi considéré dans le rapport BSP, je répondrai en citant l'observation particulière suivante formulée par le protonotaire Hilliard, de la Haute Cour de justice de l'Ontario, dans l'affaire Re Brooks Steam Motors Ltd., [1934] 2 D.L.R. 648, à la page 650 :

[TRADUCTION]

[...] une commission de 90 p. 100 peut être accordée, pourvu que ce soit une commission; toutefois, le simple fait qu'une somme soit appelée « commission » n'en fait pas une commission.

[43]          En considérant les montants des rabais comme des commissions, je conclus que le ministre se fondait sur un énoncé de faits qui figure dans la réponse de l'intimée à l'avis d'appel et qui s'est révélé inexact.

[44]          En effet, le ministre a présumé que l'appelante recevait une commission des transporteurs aériens et que les commissions versées à l'appelante étaient calculées en pourcentage du prix du billet. La preuve montre que la commission que le rapport BSP indique relativement aux ventes nettes n'est rien de plus qu'une inscription comptable visant à établir la balance entre les ventes plein tarif et tarif net. Il ressort clairement de la preuve que de telles supercommissions, comme les appelait le ministre, n'ont pas en fait été versées à l'appelante. Il ressort en outre clairement de la preuve que, dans le cas d'une opération tarif net, le montant inscrit dans la case du billet relative à la commission est exprimé en dollars. Il n'est pas exprimé en pourcentage du prix du billet.

[45]          De plus, le ministre fait valoir que c'est l'appelante qui réduit en fait le prix d'achat total du billet pour le voyageur en offrant un rabais. Je conviens avec l'avocat de l'appelante qu'une telle assertion fait fi de la notion de tarif net. À mon avis, l'appelante n'offre pas un rabais; ce sont les compagnies aériennes qui offrent un rabais. Comme l'indiquent les documents consignés en preuve, tout l'arrangement en matière de tarif net est fondé sur des décisions commerciales prises par les transporteurs aériens.

[46]          Je conclus donc que l'appelante a démontré qu'elle ne recevait pas de commissions des compagnies aériennes sur les billets tarif net. Il ressort de la preuve ainsi que de la jurisprudence que ce qui est considéré comme une commission par le ministre ainsi que dans les rapports BSP n'est pas une véritable commission et n'est donc pas une véritable contrepartie au sens de la Loi.

[47]          Une telle conclusion ne doit toutefois pas profiter à l'appelante. En effet, comme l'appelante ne recevait pas une véritable contrepartie, elle n'aurait pas dû percevoir de la TPS sur les sommes désignées comme étant des commissions. Quelles étaient les obligations de l'appelante dans les circonstances?

Obligations de l'appelante à l'égard de la TPS perçue par erreur

[48]          Les dispositions pertinentes de la Loi se lisent comme suit :

221. (1) Perception - La personne qui effectue une fourniture taxable doit, à titre de mandataire de Sa Majesté du chef du Canada, percevoir la taxe payable par l'acquéreur en vertu de la section II.

222. (1) Montants perçus détenus en fiducie - La personne qui perçoit un montant au titre de la taxe prévue à la section II est réputée, à toutes fins utiles, détenir ce montant en fiducie pour Sa Majesté jusqu'à ce qu'il soit versé au receveur général ou retiré en application du paragraphe (2).

225. (1) Taxe nette - Sous réserve des autres dispositions de la présente sous-section, la taxe nette pour une période de déclaration donnée d'un inscrit correspond au montant, positif ou négatif, obtenu par la formule suivante :

A - B

où :

A              représente le total des montants suivants :

                a) les montants devenus percevables et les autres montants perçus par l'inscrit au cours de la période donnée au titre de la taxe prévue à la section II;

                b) les montants à ajouter aux termes de la présente partie dans le calcul de la taxe nette de l'inscrit pour la période donnée;

B              le total des montants suivants :

                a) l'ensemble des montants dont chacun représente un crédit de taxe sur les intrants pour la période donnée ou une période de déclaration antérieure de l'inscrit, que celui-ci a demandé dans la déclaration produite en application de la présente section pour la période donnée;

                b) l'ensemble des montants dont chacun représente un montant que l'inscrit peut déduire en application de la présente partie dans le calcul de sa taxe nette pour la période donnée et qu'il a indiqué dans la déclaration produite en application de la présente section pour cette période. [Les italiques sont de moi.]

228. (2) Versement - La personne est tenue de verser au receveur général le montant positif de sa taxe nette pour une période de déclaration dans le délai suivant, sauf les paragraphes (2.1) ou (2.3) s'appliquent à la période de déclaration :

232. (1) Remboursement ou redressement - taxe perçue en trop - La personne qui exige ou perçoit d'une autre personne un montant au titre de la taxe prévue à la section II qui excède celui qu'elle pouvait percevoir peut, dans les deux ans suivant le jour où le montant a été ainsi exigé ou perçu :

                a)              si l'excédent est exigé mais non perçu, redresser la taxe exigée;

                b)             si l'excédent est perçu, le rembourser à l'autre personne ou le porter à son crédit.

[. . . ]

(3) Notes de crédit ou de débit - Les règles suivantes s'appliquent dans le cas où une personne redresse un montant en faveur d'une autre personne en application des paragraphes (1) ou (2), le lui rembourse ou le porte à son crédit :

                [. . . ]

                b) le montant est déductible dans le calcul de la taxe nette de la personne pour sa période de déclaration au cours de laquelle elle remet la note de crédit ou reçoit la note de débit, dans la mesure où il a été inclus dans le calcul de sa taxe nette pour cette période ou pour une de ses périodes de déclaration antérieures;

261. (1) Remboursement d'un montant payé par erreur - Dans le cas où une personne paie un montant au titre de la taxe, de la taxe nette, des pénalités, des intérêts ou d'une autre obligation selon la présente partie alors qu'elle n'avait pas à le payer ou à le verser, ou paie un tel montant qui est pris en compte à ce titre, le ministre lui rembourse le montant, indépendamment du fait qu'il ait été payé par erreur ou autrement.

[49]          En vertu du paragraphe 228(2), les contribuables qui effectuent des fournitures taxables sont tenus de verser au receveur général la taxe nette pour une période de déclaration. Le paragraphe 225(1) définit la « taxe nette » comme incluant « les montants devenus percevables » et « les autres montants perçus [...] au titre de la taxe » . Ainsi, en vertu du paragraphe 225(1), tous les montants perçus au titre de la taxe, même s'ils ont été perçus par erreur, doivent être inclus dans le calcul de la « taxe nette » et, en vertu du paragraphe 228(2), ils doivent être versés au receveur général (voir D.M. Sherman, Canada GST Service C4 (Scarborough, Carswell, feuilles mobiles), reliure C4, à la page 225-103). Dans la présente espèce, tous les montants perçus par l'appelante au titre de la TPS au cours de la période en cause, y compris les montants perçus par erreur, faisaient partie de la taxe nette de l'appelante pour cette période et devaient être versés au receveur général en vertu du paragraphe 228(2). Aux termes de l'article 261, une personne qui paie un montant au titre de la taxe nette alors qu'elle n'avait pas à le payer ou à le verser a droit au remboursement de ce montant. En l'espèce, la taxe perçue par erreur a été payée par les transporteurs aériens et non par l'appelante. Dans l'affaire intitulée Renvoi relatif à la taxe de vente du Québec, [1994] 2 R.C.S. 715 ([1994] G.S.T.C. 44), la Cour suprême du Canada faisait remarquer à la page 731 (G.S.T.C. : à la page 44-8) :

. . . les inscrits ne paient pas la taxe ni n'en assument le fardeau. Ils agissent simplement à titre de percepteurs d'impôt faisant remise des revenus au gouvernement [. . .].

[50]          L'économie de la Loi est telle que les transporteurs aériens qui ont payé de la TPS en trop pourraient en être directement remboursés par l'appelante dans un certain délai en vertu du paragraphe 232(1) ou demander un remboursement au ministre en vertu du paragraphe 261(1) (soit un montant qui dans ce cas particulier, je suppose, pourrait être déduit des crédits de taxe sur les intrants demandés par les compagnies aériennes à l'égard de la TPS payée sur les commissions). Cette solution ne s'offre pas au fournisseur (soit l'agence de voyages en l'espèce).

[51]          De plus, comme la taxe exigée en trop n'a pas été remboursée par l'appelante aux compagnies aériennes ni portée à leur crédit, l'appelante ne peut en déduire le montant dans le calcul de sa taxe nette en vertu de l'alinéa 232(3)b).

[52]          L'appelante avait donc l'obligation de verser toute la TPS perçue par erreur sur les prétendues commissions et n'a pas droit à un remboursement en vertu de la Loi.

[53]          En outre, il est clair que l'appelante demandait des crédits de taxe sur les intrants par dérogation aux dispositions de la Loi. L'article 169 de la Loi dit ce qui suit :

169. (1) Règle générale pour le crédit de taxe sur les intrants - Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, un crédit de taxe sur les intrants d'une personne, pour sa période de déclaration au cours de laquelle elle est un inscrit, relativement à un bien ou à un service qu'elle acquiert, importe ou transfère dans une province participante, correspond au résultat du calcul suivant si, au cours de cette période, la taxe relative à la fourniture, à l'importation ou au transfert devient payable par la personne ou est payée par elle sans qu'elle soit devenue payable :

A x B

où :

A              représente la taxe relative à la fourniture, à l'importation ou au transfert, selon le cas, qui, au cours de la période de déclaration, devient payable par la personne ou est payée par elle sans qu'elle soit devenue payable;

[. . . ]

[54]          On ne conteste pas le fait que l'appelante n'a pas acquis un service et n'a pas fourni un service relativement auquel elle a payé de la taxe sur les prétendues commissions. Un contribuable a droit à un crédit de taxe sur les intrants uniquement s'il paie de la taxe à un inscrit et que la taxe est enregistrée. En l'espèce, aucun fondement légal ne permettait d'indiquer les crédits de taxe sur les intrants. L'appelante a suivi la mauvaise voie. Elle aurait pu rembourser aux compagnies aériennes la TPS perçue en trop ou la porter à leur crédit. Cela n'a pas été fait. Comme je l'ai expliqué précédemment, ce n'est pas l'appelante qui a droit à un remboursement en vertu de la Loi, mais plutôt les compagnies aériennes qui ont en fait payé la TPS.

[55]          Vu les observations qui précèdent, bien que j'aie conclu que l'appelante n'avait reçu aucune commission ou contrepartie des compagnies aériennes à l'égard des billets tarif net sur lesquels elle devait percevoir de la TPS, je conclus également que, puisqu'elle avait perçu de la taxe par erreur, l'appelante devait verser le montant de cette taxe au receveur général conformément aux dispositions de la Loi. Dans les circonstances, je n'ai d'autre choix que de confirmer la cotisation. En conséquence, l'appel est rejeté, avec dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 14e jour de décembre 2000.

« Lucie Lamarre »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme ce 11e jour de juin 2001.

Mario Lagacé, réviseur

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

97-2841(GST)G

ENTRE :

ITA TRAVEL AGENCY LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 6 février 2000 à Ottawa (Ontario) par

l'honorable juge Lucie Lamarre

Comparutions

Avocat de l'appelante :               Me Paul C. LaBarge

Avocat de l'intimée :                   Me Peter M. Kremer

JUGEMENT

                L'appel de la cotisation établie en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d'accise, pour la période du 1er juin 1992 au 31 mars 1996, dont l'avis est daté du 5 décembre 1996, est rejeté avec dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 14e jour de décembre 2000.

« Lucie Lamarre »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 11e jour de juin 2001.

Mario Lagacé, réviseur


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

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