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Date: 20010119

Dossier: 2000-2106-IT-I

ENTRE :

DEAN SPEARING,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Hershfield, C.C.I.

Faits

[1]            L'appelant vend des produits Amway depuis 1991.

[2]            Le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a établi à l'égard de l'appelant pour ses années d'imposition 1996 et 1997 de nouvelles cotisations refusant les pertes que l'appelant avait déduites comme pertes d'entreprise provenant de son activité de vente. L'appelant a interjeté appel de ces nouvelles cotisations.

[3]            À l'appui des nouvelles cotisations, l'intimée affirme que les pertes des années d'imposition 1996 et 1997 n'étaient pas des pertes de démarrage, que l'appelant n'a pris aucune mesure importante pour que l'activité de vente devienne rentable, qu'il n'avait pas d'attente raisonnable de profit durant les années en question et que l'activité de vente ne constituait pas une source de revenu pour lui dans les années en question aux termes des articles 3 et 4 de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ). L'intimée affirme également que les dépenses déduites relativement à l'activité de vente étaient des frais personnels ou de subsistance de l'appelant, et elle fait valoir subsidiairement que, s'il est conclu que l'appelant avait bel et bien une attente raisonnable de profit ainsi qu'une source de revenu, l'appelant a à juste titre fait l'objet de nouvelles cotisations en vertu des alinéas 18(1)a) et h) de la Loi au motif que toutes les pertes des années en question constituaient des frais personnels ou de subsistance de l'appelant.

[4]            Pour la période allant de 1991 à 1997, l'appelant a déclaré les montants suivants comme revenus (pertes) provenant de la vente de produits Amway :

                [TRADUCTION]

                Année                                     Revenus                 Dépenses                               Revenus

                d'imposition                           bruts                        brutes                      (pertes) nets

                1991                                         25 240 $ 28 237 $ (    2 997 $)

                1992                                         185 040 $                 191 433 $                (    6 393 $)

                1993                                         160 540 $                 167 124 $                ( 6 584 $)

                1994                                         147 250 $                 173 975 $                ( 26 725 $)

                1995                                         74 878 $ 101 293 $                ( 26 415 $)

                1996                                         72 976 $ 98 044 $ ( 25 068 $)

                1997                                         54 407 $ 71 339 $ ( 16 932 $)

                Total                                        720 331 $                 831 445 $                 ( 111 114 $)

[5]            La perte suivante a été déclarée pour 1998 (pièce A-3) :

                Revenus bruts :     45 608 $

Dépenses totales :                63 095 $

                Perte :                                      17 487 $.

[6]            L'appelant a témoigné que les revenus bruts avaient été de 27 700 $ en 1999 mais que l'entreprise (transférée à une société de personnes au cours de cette année-là) avait enregistré un profit de 100 $. Bien que la déclaration d'impôt complète de l'appelant de 1998 ait été consignée en preuve, la déclaration de 1999 que l'appelant avait apportée à la Cour ne contenait pas l'état de revenu d'entreprise et n'a pas été consignée en preuve. Cependant, l'avocat de l'intimée a reconnu et a accepté comme faisant partie de la preuve non contredite de l'appelant la première page de la déclaration de 1999 indiquant un profit net d'entreprise de 100 $. Par contre, l'absence d'un état des résultats de l'entreprise pour 1999 limite l'utilité de la prise en considération du profit net pour cette année-là dans l'analyse de la question de savoir si l'entreprise avait une attente raisonnable de profit ou constituait une source de revenu. Un facteur reconnu relativement à la déclaration d'un profit était que l'appelant n'avait pas, cette année-là, accordé de salaire à sa conjointe; cette dernière était plutôt devenue associée dans l'entreprise. L'appelant admet qu'il était au courant des cotisations refusant les pertes lorsque la déclaration d'impôt de 1999 a été établie. Dans les circonstances, l'autodiscipline par rapport à la déduction de dépenses peut avoir contribué au léger profit, ou l'appelant a peut-être liquidé son stock de clôture. Ce n'est là que pure spéculation. Rien ne me permet de conclure que l'activité en cause est devenue commercialement rentable en 1999.

[7]            La vente de produits Amway se fait par un système de commercialisation en aval dans lequel des produits sont achetés à Amway par un distributeur. Le distributeur peut utiliser une partie des produits pour consommation personnelle, mais l'objectif principal de ce dernier est de vendre les produits au détail à un consommateur ou de les revendre à un autre distributeur en aval. Les ventes en aval à des personnes qui sont elles-mêmes des distributeurs sont des ventes faites au coût de revient. Seules les ventes pour consommation personnelle à une personne qui n'est pas un distributeur sont des ventes au détail qui assurent au vendeur une marge bénéficiaire. Les revenus provenant de ventes en aval à des distributeurs en aval sont calculés selon une formule complexe déterminant les primes versées par Amway à des groupes de distributeurs.

[8]            L'appelant avait commencé à exploiter sa franchise de distribution de produits Amway au cours de l'année d'imposition 1991. Il a témoigné que, pour l'essentiel, le plan d'entreprise Amway n'a pas changé depuis, si ce n'est que des modifications récentes ont eu pour effet de simplifier la comptabilité et l'administration. Des ventes en aval peuvent maintenant être portées au crédit des distributeurs en amont sans qu'une série d'achats et ventes et de livraisons ne soit nécessairement faite à chaque niveau de distribution.

[9]            Comme l'indiquent les ventes brutes, le revenu de l'appelant a atteint un sommet en 1993.

[10]          L'appelant a témoigné qu'il avait un plan d'entreprise, qui était d'avoir six distributeurs relevant de lui, ce qui était tout ce dont il estimait avoir besoin pour maintenir une « valeur en points » rentable dans la hiérarchie relative aux commissions Amway. Les valeurs en points représentent un pourcentage de la « valeur commerciale » des produits achetés à Amway par l'appelant et son groupe de distributeurs. L'appelant semblait bien comprendre le système de primes, qui était compliqué. Les primes dépendaient de ce que l'on appelle la « valeur commerciale » des produits achetés à Amway. La valeur commerciale représente un pourcentage variable du prix de détail des produits. Le pourcentage pertinent varie de temps en temps et selon le produit. L'appelant a produit un témoignage crédible relativement au fait qu'il surveillait constamment la valeur commerciale de divers produits par rapport à leur prix de détail et qu'il était ainsi toujours au courant des commissions effectives associées à la vente de différents produits.

[11]          En 1993, l'appelant avait un groupe de six distributeurs, qui a maintenu pendant environ six mois une valeur en points suffisante pour que l'appelant obtienne le statut de distributeur de niveau « platine » . Bien que ses revenus bruts de 1993 aient été importants, l'appelant a quand même subi une perte. La perte subie au cours des premières années de l'entreprise ne justifiait pas une conclusion selon laquelle l'entreprise ne deviendrait jamais une source de revenu. En fait, le plan d'entreprise de l'appelant n'était pas loin de la réalité à ce stade. Si le groupe de six distributeurs avait pris un essor, l'appelant aurait bien pu se trouver avec une source positive de revenu net.

[12]          Un autre aspect du plan d'entreprise de l'appelant tient au caractère transférable des primes Amway. Le système de commercialisation Amway permet de gagner des primes tant et aussi longtemps qu'une personne est active au sein du réseau de distribution. L'appelant croyait qu'il réussirait avec le temps à établir des groupes de distribution grâce auxquels il pourrait gagner des commissions sans personnellement faire de ventes au détail. De telles commissions ou valeurs résiduelles ne comportaient essentiellement aucuns frais et étaient transférables à sa famille à son décès. En théorie du moins, l'appelant considérait que ses efforts créaient pour sa famille une source de revenus à venir ne dépendant pas de son travail personnel. Sa motivation en engageant des dépenses et en prenant en charge des pertes était d'accumuler des valeurs résiduelles. Il a témoigné énergiquement que ses efforts comme distributeur Amway constituaient un investissement lui permettant de générer pour sa famille un flux de revenu comparable à un régime de retraite. Toutefois, l'appelant a témoigné que les valeurs résiduelles représentaient seulement 4 p. 100 des valeurs en points (qui correspondent à un pourcentage des valeurs commerciales, lesquelles correspondent à un pourcentage des ventes brutes) et que, si les ventes de 1997 étaient toutes calculées en valeurs résiduelles, son revenu serait inférieur à 2 000 $ par année. Même cette modeste valeur résiduelle pourrait être difficile à maintenir dans le cas d'une retraite ou d'un legs. L'investissement (la perte) des sept années précédentes pour gagner cette valeur résiduelle type s'élevait à plus de 100 000 $.

[13]          L'appelant a reconnu qu'il avait perdu son statut de distributeur de niveau « platine » en 1994 et que, en 1995, son groupe ne comptait plus six distributeurs et était devenu moins actif. Il a témoigné que, en 1995, le volume de ses ventes ou de celles du groupe a diminué considérablement à cause de la fermeture d'une industrie importante de Melford (Saskatchewan). Ainsi, un ou plusieurs membres de son groupe ont dû abandonner l'entreprise de distribution de produits Amway. En outre, un membre de son groupe a fait l'objet d'une vérification, et les obligations fiscales qui en ont résulté pour lui l'ont incité à laissé tomber.

[14]          Les dépenses déclarées pour les années en cause sont les suivantes :

[TRADUCTION]

                1996                1997

Profit brut (ventes moins coût des

produits et rajustements des stocks)                 3 989,00 $               7 799,00 $

Dépenses

Publicité 932,00 $ 360,00 $

Livraison                1 594,00 $                1 170,00 $

Assurances            84,00 $     165,00 $

Intérêts 2 622,00 $                1 719,00 $

Repas et frais de représentation         1 084,00 $                1 067,00 $

Véhicule automobile             81,00 $     85,00 $

Frais de bureau      1 004,00 $                966,00 $

Frais juridiques et comptables            250,00 $ 250,00 $

Loyer       25,00 $

Salaires 7 601,00 $                7 601,00 $

Fournitures            2 858,00 $                1 470,00 $

Déplacements        4 319,00 $                2 375,00 $

Téléphone              2 671,00 $               2 519,00 $

                25 125,00 $             19 747,00 $

Déduction pour amortissement          378,00 $                 276,00 $

                25 503,00 $             20 023,00 $

Frais de véhicule automobile              3 554,00 $               4 708,00 $

Dépenses d'entreprise totales            29 057,00 $              24 731,00 $

Perte nette              (25 068,00 $)           (16 932,00 $)

Frais domiciliaires :

Impôts fonciers     1 718,00 $               1 848,72 $

Services publics    1 470,85 $                1 584,84 $

Location de chauffe-eau      65,40 $     64,20 $

Assurances            513,00 $ 516,00 $

Intérêts hypothécaires         3 827,29 $                3 734,99 $

Réparations et entretien       58,63 $ 91,68 $

                __________          _________

                7 653,42 $               7 840,43 $

Utilisation commerciale : 20,4 %         1 561,30 $               1 599,45 $

[15]          L'appelant a dit qu'il avait effectué en 1993 un emprunt sur stocks d'environ 13 500 $ et que cette dette avait un peu diminué à la fin de 1997. Les frais d'intérêts de 2 622 $ en 1996 et de 1 719 $ en 1997 se rapportaient à des emprunts sur stocks.

[16]          Les frais salariaux déduits par l'appelant comprenaient un salaire de 600 $ par mois versé à sa conjointe pour chacune des années 1996 et 1997. Les frais de déplacement de 4 319 $ en 1996 et de 2 375 $ en 1997 incluaient le coût de billets d'avion achetés afin que son épouse et lui puissent aller au Colorado et se rendre à un centre de villégiature du Minnesota pour participer à des congrès ou colloques Amway. Les frais de bureau, les frais de fournitures et les frais de véhicule automobile n'ont pas été bien expliqués par l'appelant au cours de son témoignage. Aucune déduction pour amortissement n'a été indiquée à l'égard d'un véhicule. L'appelant a témoigné que ses véhicules étaient de vieux modèles et qu'une déduction pour amortissement n'aurait pas, dès le début de l'entreprise, été importante. Les frais de bureau à domicile qui ont été déduits représentaient 20,4 p. 100 des frais domiciliaires annuels de l'appelant (surface de bureau et aire d'entreposage utilisées pour l'entreprise Amway par rapport à la superficie totale de la maison de l'appelant).

[17]          L'appelant a témoigné qu'il consacrait à l'entreprise de 15 à 20 heures par semaine.

[18]          L'appelant a témoigné que, au cours des années en cause, de 10 à 12 p. 100 des produits acquis d'Amway ont été utilisés personnellement par lui et sa famille à domicile. Plus particulièrement, l'appelant estimait que la consommation personnelle de produits Amway faite par sa famille totalisait environ 6 800 $ par an pour chacune des années 1996 et 1997. Cela représentait environ 9,5 p. 100 des ventes brutes de 1996 et environ 12,5 p. 100 des ventes brutes de 1997. L'appelant attribue une bonne part de la consommation de produits Amway faite par sa famille aux restes de stocks de son entreprise. Amway vendait ses produits aux distributeurs par boîtes de 12 articles, indépendamment du fait que le client d'un distributeur pouvait avoir commandé à ce dernier un seul article. Dans cet exemple, le distributeur aurait eu un reste de stock de 11 articles. L'appelant a témoigné que la consommation personnelle résultait de ces stocks excédentaires. Le solde des stocks de clôture des exercices se terminant en 1996, en 1997 et en 1998 était de 26 460 $, de 23 973 $ et de 21 257 $ respectivement. Ces stocks de clôture pourraient indiquer que les produits Amway se prêtaient à des pratiques normales pour ce qui est de la gestion des stocks, sans qu'une consommation personnelle ne soit nécessaire. Comme il n'y a ni bénéfice ni revenu imputé, on ne peut que se demander si une telle consommation personnelle contribue à établir l'existence d'un élément personnel dans l'exploitation de l'entreprise Amway par l'appelant. Il semble en outre que le coût des produits vendus vise notamment des stocks utilisés pour consommation personnelle. À mon avis, il s'agirait nettement de frais personnels non déductibles, malgré l'explication donnée par l'appelant au sujet des « restes de stock » , et je conclus que cette explication ne change rien au fait qu'il s'agit en soi de frais de subsistance.

[19]          Au sujet de l'existence d'un plan quelconque visant à rentabiliser l'entreprise, l'appelant a témoigné qu'il avait fait tous les efforts pour réduire les dépenses et reconstituer son groupe de distribution. Il a attiré l'attention de la Cour sur des circonstances difficiles et inusitées survenues au cours des dernières années et ayant occasionné une baisse des ventes du groupe par rapport au bon départ que ce dernier avait connu en 1993 et en 1994. À cet égard, je conclus que le témoignage de l'appelant n'est pas convaincant. De 1992 à 1999, les ventes brutes ont diminué constamment, étant ramené de 185 040 $ à 27 700 $. De 1995 à 1997, elles ont été ramenées de 74 878 $ à 54 407 $ et, en 1998, elles ont été de 45 608 $. Aucun élément de preuve n'étaye l'affirmation de l'appelant selon laquelle ce dernier avait ambitieusement recours à un plan pour accroître les ventes ou la rentabilité au cours des années en causes. La baisse de revenus en 1994 et en 1995 était quelque peu attribuable aux circonstances, d'après le témoignage de l'appelant, mais l'absence d'explications supplémentaires à l'égard d'autres baisses considérables de revenus indique selon moi que l'appelant a graduellement consacré moins d'efforts à l'égard de l'entreprise. Je ne suis toutefois pas disposé à conclure que, au cours des années en cause, il n'y avait aucune entreprise. L'activité de vente de l'appelant constituait quand même une véritable entreprise commerciale au cours de ces années-là.

Analyse

[20]          Le fondement des nouvelles cotisations portées en appel est énoncé au paragraphe 3 des présents motifs. L'intimée affirme notamment que, durant les années en cause, l'appelant n'avait pas d'attente raisonnable de profit à l'égard de ses activités de vente et que celles-ci ne constituaient pas une source de revenu pour lui au cours de ces années-là. Subsidiairement, l'intimée fait valoir que les pertes constituaient des frais personnels ou de subsistance de l'appelant et que ce dernier a à juste titre fait l'objet de nouvelles cotisations en vertu des alinéas 18(1)a) et h) de la Loi[1].

[21]          Bien que de nombreux jugements laissent entendre qu'il faut une source de revenu pour déduire des pertes, une telle exigence semble souvent n'être qu'une autre façon d'exprimer le critère de l'attente raisonnable de profit énoncé par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Moldowan c. La Reine[2]. Des jugements assimilant le critère de source de revenu au critère de l'attente raisonnable de profit semblent indiquer qu'une entreprise ne peut exister sans attente raisonnable de profit. Cela signifierait que, s'il n'y a pas d'attente raisonnable de profit, il n'y a pas d'entreprise et que, s'il n'y a pas d'entreprise, il n'y a pas de source de revenu. De telles applications du critère de l'attente raisonnable de profit ne sont à mon avis pas bien fondées[3].

[22]          Il est utile de considérer le critère de source de revenu comme distinct du critère de l'attente raisonnable de profit. Il est bien reconnu que seules certaines sources de revenus et de pertes sont visées par la Loi. Il s'agit des quatre sources mentionnées à l'article 3. Le fait que les gains fortuits, les gains de loterie, les dons, les héritages et les gains de jeux d'argent, par exemple, ne soient pas des sources de revenus ou de pertes pour l'application de la Loi n'a jamais été mis en question. Ils ne font pas partie des quatre sources prévues par la Loi; donc, ce ne sont pas toutes les rentrées brutes d'argent qui sont des revenus et ce ne sont pas toutes les dépenses qui sont déductibles. Les concepts de gains ou profits nets ne sont pas pertinents s'il n'y a aucune source pour l'application de la Loi. Les articles 9, 18 et 67 ne s'appliquent pas s'il n'y a aucune source pour l'application de la Loi. Dire que, lorsqu'il n'y a aucune source, il n'y a aucune reconnaissance de perte déductible sous le régime de la Loi est trompeur si cela implique que la « possibilité » d'une perte ou d'un profit est pertinente. Contrairement au critère de l'attente raisonnable de profit, le critère de source de revenu n'est pas axé sur les résultats. Si le critère approprié (dans ces causes relatives à l'attente raisonnable de profit) est le critère de source de revenu, il s'agit simplement de savoir s'il existe une véritable entreprise commerciale. Lorsque l'approche du contribuable à l'égard d'une activité devient suffisamment systématique, organisée et commerciale ¾ compte tenu d'une véritable motivation à réaliser un profit ¾ pour apporter éventuellement des récompenses pour les efforts déployés à cette fin dans un contexte commercial, cette activité devient une entreprise, et les revenus et les pertes provenant de cette activité sont reconnus comme des sources de revenus ou de pertes pour l'application de la Loi[4]. Dans l'arrêt Walls c. La Reine (en appel devant la Cour suprême du Canada)[5], la Cour d'appel fédérale a conclu que, sauf s'il y a quelque chose de plus à prendre en considération, par exemple un élément personnel[6],une entreprise commerciale en pleine activité n'a pas à satisfaire au critère de l'attente raisonnable de profit.

[23]          Lorsque le critère de l'attente raisonnable de profit est appliqué, même si une activité est considérée comme étant une entreprise, donc une source de revenu, il est difficile de comprendre comment ce critère, issu de la common law, peut s'appliquer de manière à refuser des pertes. La règle du rejet d'une « perte » empêche de déduire non pas des dépenses, mais plutôt la partie des dépenses admissibles qui excède le revenu provenant de cette source. Les règles du rejet des pertes relèvent et devraient continuer à relever du Parlement; elles ne relèvent pas des tribunaux[7]. Le Parlement peut déterminer si une perte particulière est admise ou refusée ou restreinte en raison de la source. Il peut déterminer si une perte restreinte en raison de la source peut être reportée sur une année antérieure ou ultérieure et, dans l'affirmative, sur combien d'années, de manière à abriter un revenu provenant de cette source (mais non d'autres sources). La règle du rejet des pertes issue de la common law ne permet pas une telle possibilité de modélisation conceptuelle. Examinons le cas d'une disposition législative particulière en matière de report et de rejet de dépense qui traite d'un élément de dépense souvent présent dans les causes relatives à l'attente raisonnable de profit. Le paragraphe 18(12) ne permet pas la déduction des frais de bureau à domicile dans la mesure où ils créent une perte, mais il permet un report de telles pertes. Comment cette disposition peut-elle être appliquée lorsqu'une perte a été refusée au titre de la doctrine de l'attente raisonnable de profit? Si les dépenses indiquées par le contribuable qui déclare une perte d'entreprise incluent des frais de bureau à domicile, de telles dépenses ou une partie de celles-ci peuvent-elles être reportées comme le prévoit l'alinéa 18(12)c) si la perte a été refusée au titre du critère de l'attente raisonnable de profit? L'avantage du report semble être perdu. Malgré le fait que le report ne serait admissible que s'il y avait un revenu l'année suivante (soit peut-être un scénario improbable dans une cause relative à l'attente raisonnable de profit), cette illustration sert quand même d'exemple des difficultés que peut poser l'application d'une doctrine de common law dans un modèle législatif global. Même si les tribunaux considèrent que le modèle n'est pas assez global ou juste ou approprié, une intervention judiciaire n'est pas conseillée, notamment à l'égard d'une loi fiscale.

[24]          Le critère de l'attente raisonnable de profit a acquis de l'autonomie et a débordé le cadre du critère que la Cour suprême du Canada avait énoncé dans l'arrêt Moldowan au sujet d'une ferme représentant un « passe-temps » . On conteste maintenant des activités commerciales ordinaires en soulevant la question de savoir si des entreprises d'un contribuable sont commercialement exploitables. On applique le critère à des abris fiscaux (comme dans l'affaire Walls, par exemple) lorsque des dispositions anti-évitement expresses ne s'appliquent pas en soi. Autrement dit, on utilise de plus en plus le critère comme une vaste mesure anti-évitement issue de la common law, sans fondement législatif pour ce faire. De plus, l'application de la doctrine a fait que, dans le cadre de l'analyse, on cherche principalement non plus à considérer la déductibilité de dépenses particulières en vertu de la Loi, mais plutôt à circonscrire l'application de la règle du rejet d'une « perte » , issue de la common law. L'arrêt Moldowan préconisait d'accorder plus d'importance aux refus de pertes qu'aux refus de dépenses envisagés par la Loi, mais seulement dans le contexte de passe-temps. À la page 485 (DTC : à la page 5215), le juge en chef Dickson faisait remarquer, relativement au principe de l'attente raisonnable de profit (qu'il acceptait), que « si le contribuable, [...] se livre simplement à un passe-temps, sans expectative raisonnable de profit, il ne peut réclamer aucune déduction pour les dépenses engagées » . (L'italique est de moi.) Pourtant, en envisageant et en décrivant trois catégories d'agriculteurs à la page 488 (DTC : à la page 5216), le juge en chef Dickson faisait observer que les « pertes » subies par un contribuable pour qui l'agriculture est un passe-temps « ne sont pas déductibles » . Pour ce qui est d'un « passe-temps » , il ne vaut pas la peine de clarifier la différence entre refuser des déductions de dépenses et refuser des pertes si le passe-temps n'est pas une source de revenu. Dans l'arrêt Moldowan, le principe qui sous-tend l'application d'une règle de refus de perte (à des agriculteurs de la troisième catégorie) est que les passe-temps, soit des activités ne constituant pas une entreprise, ne sont pas des sources de revenu. L'agriculteur de la troisième catégorie subit des pertes en exerçant une activité agricole « qui ne constitue pas une entreprise » , et de telles pertes ne sont pas reconnues par notre régime fiscal. La question de savoir si une activité particulière est une « entreprise » ¾ une source de revenu ¾ est une question de fait dans chaque cas. Il faut dans chaque cas examiner l'activité particulière et déterminer s'il y a une véritable motivation à réaliser un profit et si les caractéristiques commerciales de l'activité sont suffisantes pour que l'activité soit considérée comme une entreprise. Dans certains cas, par exemple dans le cas d'un agriculteur de la troisième catégorie, ces facteurs seront absents, et l'activité sera considérée comme un passe-temps ou un divertissement semblable qui ne constitue pas une entreprise.

[25]          Une des hypothèses dominantes dans les causes relatives à l'attente raisonnable de profit est que, sans l'application de ce critère, le seul résultat raisonnablement prévisible de l'activité serait une déduction fiscale non appropriée de dépenses qui auraient été engagées (pour des raisons personnelles) même si l'activité n'avait pas été entreprise. Si l'activité ne permet d'atteindre que le seuil de rentabilité à d'autres égards, de telles dépenses génèrent des pertes qui annulent d'autres revenus de manière à conférer un avantage fiscal. À mon avis, lorsque l'activité a été considérée comme une véritable entreprise commerciale (ou comme n'étant pas une activité « qui ne constitue pas une entreprise » au sens de l'arrêt Moldowan), il ne devrait pas être nécessaire de pousser l'examen au-delà des dispositions de la Loi en matière de déduction de dépenses pour trancher cette question. En fait, le seul article 18 devrait suffire[8]. Pour qu'une dépense soit déductible, l'alinéa 18(1)a) exige qu'elle ait été engagée en vue de gagner un revenu. L'intention du contribuable de pouvoir éventuellement tirer un revenu imposable régit l'application de ce critère (Mattabi Mines c. Ontario[9]). Cette interprétation de l'alinéa 18(1)a) de la Loi a été citée avec approbation par la Cour suprême du Canada en 1994 dans l'arrêt Symes c. La Reine[10], à la page 733 (DTC : à la page 6013). Le critère de l'objet a été appliqué sur une base subjective dans l'arrêt Mattabi Mines pour rejeter la notion selon laquelle il fallait qu'il y ait un lien de causalité entre la dépense et le revenu. L'arrêt Symes étaye néanmoins le fait qu'il faut incorporer des normes objectives à des critères subjectifs comme le critère de l'objet qui est prévu à l'alinéa 18(1)a) :

                Comme dans d'autres domaines du droit, lorsqu'il faut établir l'objet ou l'intention des actes, on ne doit pas supposer que les tribunaux se fonderont seulement, en répondant à cette question, sur les déclarations du contribuable, ex post facto ou autrement, quant à l'objet subjectif d'une dépense donnée. Ils examineront plutôt comment l'objet se manifeste objectivement, et l'objet est en définitive une question de fait à trancher en tenant compte de toutes les circonstances. [11]

Autrement dit, si la « réalité » n'est pas conforme aux buts déclarés, des dépenses peuvent être refusées au titre de l'alinéa 18(1)a). Ainsi, l'application du libellé de la Loi peut permettre d'examiner non seulement l'authenticité et la crédibilité de l'intention d'un contribuable d'exploiter une entreprise commerciale - ce qui permet de déterminer s'il y a ou non une source de revenu - mais également l'authenticité et la crédibilité du but d'un contribuable en engageant une dépense donnée. C'est particulièrement vrai dans les cas où des éléments personnels sont liés à l'activité ou à la dépense donnée. Lorsque des éléments personnels sont pris en considération lors de la recherche de manifestations objectives de l'objet de dépenses particulières, il ne devrait guère être nécessaire d'invoquer le critère de l'attente raisonnable de profit pour introduire un critère objectif afin de déterminer quel était le but du contribuable en exerçant une activité ou en engageant une dépense relativement à l'exercice de cette activité[12].

[26]          Outre qu'il est possible d'appliquer l'alinéa 18(1)a) pour examiner de plus près le but d'un contribuable, on pourrait également recourir davantage dans ces types de causes à l'alinéa 18(1)h) de la Loi, qui proscrit la déduction de frais personnels ou de subsistance. Il est nettement possible, en appliquant cette disposition de rejet d'une dépense, de conclure dans des causes relatives à l'attente raisonnable de profit que des dépenses particulières sont simplement des frais personnels. Encore là, en appliquant le libellé de la Loi, on peut examiner la véritable nature d'une dépense.

[27]          Compte tenu de ce qui précède, le critère de l'attente raisonnable de profit issu de la common law devrait à mon avis être appliqué seulement lorsqu'il n'y a pas d'entreprise commerciale véritable. Il existe toutefois une abondante jurisprudence de common law dans laquelle on a bel et bien appliqué ce critère, même lorsqu'une activité était considérée comme une véritable entreprise commerciale. De tels cas devraient à mon avis se limiter aux circonstances décrites dans l'affaire Walls. Par ailleurs, une autre approche dans laquelle on applique sur une base très limitée le critère de l'attente raisonnable de profit (même lorsqu'une véritable activité commerciale existe) est décrite dans l'affaire Kuhlmann c. La Reine[13]. Dans cette cause, le critère de l'attente raisonnable de profit serait appliqué uniquement si l'attente de profit (c'est-à-dire l'intention subjective de gagner un revenu) était objectivement irrationnelle, absurde et ridicule.

Conclusion

[28]          En l'espèce, l'activité de vente de l'appelant est clairement une entreprise. Ce n'est ni un passe-temps ni une activité « qui ne constitue pas une entreprise » au sens de l'arrêt Moldowan. Le pire qui puisse être dit, c'est que l'entreprise, au cours des années en cause, a connu un ralentissement considérable des ventes et que la tendance enregistrée ces dernières années indique qu'il est possible que l'appelant réduise progressivement ses activités et qu'il y consacre moins de temps. Toutefois, il s'agissait quand même au cours des années en cause d'une véritable entreprise commerciale. Bien que l'énergie déployée pour réaliser un profit puisse avoir diminué au cours des années en question, j'accepte le témoignage de l'appelant selon lequel il continuait quand même à exploiter l'entreprise avec l'intention véritable de réaliser un profit. Je conclus également qu'il n'y a pas en l'espèce d'élément personnel important qui me dissuaderait d'appliquer les conclusions de l'arrêt Walls. Je conclus donc que le critère de l'attente raisonnable de profit ne s'applique pas ici. Comme l'arrêt Walls a été frappé d'appel, j'irai plus loin. Sur la foi de la preuve dont je dispose, je suis convaincu que les faits de l'espèce ne permettent pas de conclure que l'attente de profit de l'appelant à l'égard de l'entreprise ou l'intention de l'appelant de tirer un revenu de l'entreprise au cours des années en question était irrationnelle, absurde ou ridicule. Ainsi, je suis convaincu qu'il a été satisfait au critère de l'attente raisonnable de profit, pour peu qu'il s'applique ici. Cela ne veut pas dire que la crédibilité de l'appelant relativement au but qu'il déclarait avoir en engageant un certain nombre de dépenses n'est pas douteuse. En fait, plus les ventes baissent et plus l'activité relative à la réalisation de ventes diminue, plus je doute des raisons pour lesquelles l'appelant a engagé un certain nombre de dépenses. En outre, bien que j'aie conclu qu'il n'y avait pas d'élément personnel assez important pour modifier mon point de vue selon lequel l'activité de vente au cours des années en cause était une véritable entreprise commerciale, cela ne m'empêche pas de conclure que certaines dépenses sont des frais personnels.

[29]          Pour ce qui est de l'examen de dépenses particulières, il aurait été utile que l'intimée effectue une vérification détaillée de cette entreprise pour les années en cause. Cela n'a pas été fait. Cela reflète une tendance regrettable de la part du ministre à accepter essentiellement, dans ces cas-là, les dépenses et les pertes telles qu'elles ont été déclarées, puis à invoquer le critère de l'attente raisonnable de profit pour rectifier des déductions inopportunes. Le fait d'accepter des déductions de dépenses et d'examiner par la suite si une entreprise est commercialement exploitable constitue une pratique paresseuse et inacceptable. La première tâche dans le processus d'établissement d'une nouvelle cotisation consiste assurément à déterminer si le contribuable a correctement calculé son revenu ou sa perte, en conformité avec ce que prévoit la Loi. En fait, il n'est guère sensé de chercher à appliquer le critère d'attente raisonnable de profit sans avoir d'abord déterminé quel est le véritable revenu ou la véritable perte provenant de l'activité. N'était-ce la thèse que l'intimée faisait valoir subsidiairement dans sa réponse à l'avis d'appel, à savoir que les pertes correspondent à des dépenses qui sont des frais personnels ou de subsistance de l'appelant, je serais tenté d'admettre l'appel en totalité en me fondant sur le principe que, si des dépenses n'ont pas été contestées, elles doivent être permises. De plus, l'examen que je dois faire de la déductibilité de dépenses particulières pour confirmer l'ensemble ou une partie des cotisations en cause consiste à chercher des faits étayant une nouvelle thèse en matière de cotisation. Si telle est l'opération à effectuer, c'est alors au ministre qu'incombe la charge d'établir que les déductions de dépenses de l'appelant devraient être refusées. Indépendamment de ces questions, je suis convaincu de toute façon qu'un certain nombre des dépenses en cause ici sont des frais personnels ou des dépenses qui n'ont pas été véritablement engagées dans le but de gagner un revenu. Je mets également en question le caractère raisonnable de certaines des dépenses, étant donné que, au cours des années en cause, l'entreprise semblait être à tout le moins aux étapes initiales d'un démantèlement.

[30]          Sur la foi de la preuve présentée au procès, les revenus et les dépenses peuvent être rajustés selon ce qui suit. Pour les deux années, le coût des ventes a été surévalué dans la mesure où il incluait des stocks pour utilisation personnelle. Je conclus de la preuve présentée au procès qu'aucun rajustement semblable n'a été effectué et que des profits ont ainsi été déclarés en moins, c'est-à-dire qu'il aurait fallu déclarer à cet égard 6 553 $ de plus en 1996 et 5 826 $ de plus en 1997[14]. Vu l'absence de preuve du contraire et vu mes doutes quant au véritable objet des dépenses, je conclus que les frais de repas et les frais de représentation étaient en l'espèce des frais personnels. Je conclus que le salaire versé à la conjointe de l'appelant était déraisonnablement élevé vu la réduction importante de l'activité de vente au cours des années en cause par rapport aux années antérieures (lorsque les paiements ont commencé) et vu l'absence de preuve portant que le salaire de la conjointe de l'appelant était raisonnable. Je refuse 50 p. 100 de ce salaire, soit 3 600 $, pour chacune des années 1996 et 1997[15]. L'appelant ne pouvait fournir d'explication au sujet des dépenses relatives aux fournitures ni distinguer entre ce qui pourrait avoir été inclus dans les frais de bureau et ce qui pourrait avoir été inclus dans les frais de fournitures. Me fondant là-dessus, je refuse les dépenses indiquées à l'égard des fournitures (2 858 $ en 1996 et 1 470 $ en 1997). Je refuse les frais de déplacement au motif que, à mon avis, il s'agit de voyages d'agrément que l'appelant a faits avec sa conjointe. Il me semble simplement impossible de croire que, alors que l'entreprise est en voie de démantèlement, ce soit dans le but de gagner un revenu que l'appelant a décidé de faire ces voyages. Donc, je refuse la totalité des frais de déplacement pour les deux années. De plus, si, après ces rajustements, il y avait encore une perte qui serait augmentée par des frais de bureau à domicile (de 1 561 $ en 1996 et de 1 599 $ en 1997), ces frais seraient refusés en application du paragraphe 18(2).

[31]          En conséquence, les appels sont admis sans dépens et les cotisations sont déférées au ministre pour nouvelle cotisation sur la base des rajustements décrits au paragraphe 30 ci-dessus lesquels permettront, d'après mes calculs, la déclaration de pertes de 5 093 $ en 1996 et de 995 $ en 1997.

Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de janvier 2001.

« J. E. Hershfield »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme ce 11e jour de juin 2001.

Philippe Ducharme, réviseur

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

2000-2106(IT)I

ENTRE :

DEAN SPEARING,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appels entendus le 5 octobre 2000 à Regina (Saskatchewan) par

l'honorable juge J. E. Hershfield

Comparutions

Pour l'appelant :                         l'appelant lui-même

Avocat de l'intimée :                   Me Lyle Bouvier

JUGEMENT

          Les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1996 et 1997 sont admis sans dépens et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de janvier 2001.

« J. E. Hershfield »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 11e jour de juin 2001.

Philippe Ducharme, réviseur


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]



[1] La Loi ne prévoit pas le refus de « pertes » en tant que frais personnels. Elle prévoit le refus de dépenses particulières en tant que frais personnels. Je considère donc que la thèse présentée subsidiairement par l'intimée est en fait que les dépenses, ou du moins certaines d'entre elles, sont des frais personnels jusqu'à concurrence du montant des pertes.

[2] [1978] 1 R.C.S. 480 (77 DTC 5213).

[3] Il est clair dans la Loi que celle-ci envisage l'existence d'une entreprise sans une attente raisonnable de profit. Voir le paragraphe 111(5), qui permet qu'une perte continue pendant des années après un changement de contrôle, non pas si la même entreprise est exploitée tout au long de l'année subséquente donnée, mais seulement si la même entreprise est exploitée en vue de générer un profit ou avec une attente raisonnable de profit tout au long de l'année donnée. Par déduction, il est clair que, exception faite de cette disposition, une entreprise peut être exploitée en vertu de la Loi aux fins d'utilisation de pertes, même si elle n'est pas exploitée en vue de générer un profit ou avec une attente raisonnable de profit. Le libellé du paragraphe 111(5) remonte à 1981 et a été repris dans d'autres dispositions en matière d'acquisition de contrôle, y compris par exemple aux paragraphes 88(1.1), 125.3(3) et 37(6.1). En outre, le paragraphe 248(1) donne du mot « entreprise » une vaste définition qui inclut les activités de quelque genre que ce soit. Cela élargit la portée de la Loi non seulement pour ce qui est des sources de revenus d'entreprise, mais aussi en ce qui a trait aux sources de pertes d'entreprise. Les sources de revenus et les sources de pertes sont traitées sur un pied d'égalité aux articles 3 et 4 de la Loi. Rien ne permet de conclure qu'une source de perte n'existe pas si ce n'est pas une source éventuelle de revenu.

[4] Pour ce qui est des facteurs permettant de conclure à l'existence d'une entreprise commerciale, voir, par exemple, des causes en matière de jeux d'argent comme Balanko c. M.R.N., C.F. 1re inst., no T-4312-81, 25 février 1988 (88 DTC 6228); Chapman v. M.N.R., 71 DTC 88 (C.A.I.); Hammond c. M.R.N., [1971] C.F. 341 (71 DTC 5389); Graham v. Green, [1925] B.R. 37. Voir aussi les jugements Kaye c. La Reine, C.C.I., no 97-2772(IT)I, 9 avril 1998 (98 DTC 1659), et Bonin c. La Reine, C.C.I., no 98-1477(IT)I, 14 décembre 1999 (2000 DTC 3568), soit des affaires entendues par notre cour sous le régime des règles de procédure informelle.

[5] (1999) 2000 DTC 6025 (C.A.F.); [2000] A.C.S.C. no 22 (Q.L.).

[6] Il est possible qu'une activité pouvant par ailleurs être une source de revenu soit considérée comme ne faisant pas partie des sources prévues à l'article 3, lorsque l'élément personnel éclipse les caractéristiques commerciales de l'activité. Si, par exemple, les passe-temps ne sont pas une « source » comme l'indique l'arrêt Moldowan, l'hypothèse est que les éléments personnels sont assez importants pour soulever un doute sur l'authenticité des éléments commerciaux de l'activité. Dans de telles causes (passe-temps), des motivations crédibles, véritables et rationnelles à réaliser un profit peuvent être considérées comme absentes au point de permettre de conclure que les éléments commerciaux ne sont qu'une façade. Toutefois, il est probable qu'il serait rare que, aux termes d'une application stricte de la théorie relative à la règle de la source, une activité exercée d'une manière commerciale soit considérée comme n'étant pas une « source » .

[7] Voir, par exemple, les règles concernant la couverture de l'excédent de pertes que prévoient l'alinéa 8(1)f) et les paragraphes 13(21.2), 14(12), 18(2), 18(15), 31(1), 40(3.3), 40(3.4), 40(3.6), 88(1.1), 96(2.1), 111(5), 112(3) à (3.32) inclusivement et 112(4) à (4.22) inclusivement. Ces exemples ne sont qu'une illustration de l'activité législative se rapportant au contrôle de l'utilisation des pertes.

[8] Il ne s'agit pas de faire fi de l'article 67 dans ces causes ou d'en sous-estimer l'importance. Il est toujours possible de conclure que des dépenses particulières ne sont pas raisonnables lorsque les circonstances le justifient. Par exemple, une conclusion selon laquelle une entreprise est en voie de démantèlement pourrait non seulement indiquer qu'un voyage dans un centre de villégiature n'avait pas véritablement pour objet de permettre de gagner un revenu, mais elle pourrait également justifier une conclusion selon laquelle les frais de déplacement n'étaient pas raisonnables dans cette situation.

[9] [1988] 2 R.C.S. 175, à la page 189.

[10] [1993] 4 R.C.S. 695 (94 DTC 6001).

[11] Arrêt Symes, à la page 736 (DTC : à la page 6014).

[12] Dans l'affaire Tonn c. La Reine, [1996] 2 C.F. 73, aux pages 93 et 94 (96 DTC 6001, à la page 6008), la Cour d'appel fédérale a conclu que le paragraphe 9(1) et l'alinéa 18(1)a) appliquent tous deux un critère subjectif quant au motif du contribuable pour engager une dépense, de sorte que, pour appliquer un critère objectif à l'égard d'activités comportant un élément personnel, la Cour a jugé nécessaire de recourir au critère de l'attente raisonnable de profit issu de la common law (tel qu'il est exprimé dans l'arrêt Moldowan). La décision Symes indique que cela peut ne pas toujours être le cas.

[13] C.A.F., no A-981-96, 30 octobre 1998 (98 DTC 6652).

[14] Les stocks ayant fait l'objet d'une utilisation personnelle représentaient 9,5 p. 100 de 68 987 $ en 1996 et 12,5 p. 100 de 46 608 $ en 1997.

[15] Il est à noter que, avec les autres rajustements, le fait de refuser l'intégralité des frais salariaux pour 1997 placerait l'appelant dans une situation de profit pour 1997. Conclure que de tels rajustements sont appropriés montrerait alors la faiblesse inhérente, dans ce cas-ci, à la thèse de l'intimée selon laquelle il n'y avait absolument pas d'attente raisonnable de profit en l'espèce. Cela souligne l'importance d'examiner les dépenses avant de considérer la question de savoir si l'activité sera un jour rentable.

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