Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date: 19980202

Dossier: 97-159-IT-I

ENTRE :

BLAIR SIMPSON,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge McArthur, C.C.I.

[1]            Les présents appels se rapportent à de nouvelles cotisations établies pour les années d'imposition 1992 et 1993. Aux termes de ces nouvelles cotisations, la demande de déduction des pertes locatives qu'a subies l'appelant relativement à une unité condominiale d'une chambre à coucher située à Whistler (Colombie-Britannique) a été rejetée au motif qu'il n'y avait pas d'attente raisonnable de profit.

[2]            En 1990, l'appelant a acheté l'unité condominiale avec James et Janette Morris. Ils l'ont payé 153 000 $. L'appelant a conservé une participation de 50 p. 100. L'achat a été financé avec une première hypothèque représentant 75 p. 100 du prix d'achat et 50 000 $ comptant provenant de leurs propres fonds distincts. Une projection de location préparée par la société de gestion et exposant le revenu anticipé a été déposée en preuve. Le bien a été inscrit pour être vendu en mai 1991. James et Janette Morris ont transféré leur participation de 50 p. 100 à Danik Industries Ltd. (Danik) en mai 1992. L'appelant et Danik ont vendu la totalité de leur participation 115 000 $ en décembre 1993.

[3]            Dans ses déclarations de revenu pour les années d'imposition 1990, 1991, 1992 et 1993, l'appelant a demandé la déduction de pertes de 6 667,69 $, de 9 221,53 $, de 3 519,88 $ et de 3 398,00 $ respectivement relativement à la location du bien. Ces pertes étaient en grande partie attribuables aux intérêts annuels versés et aux frais de gestion représentant 40 p. 100 du revenu brut payés aux gestionnaires du bien en conformité avec une entente de pool locatif. L'appelant a expliqué que les pertes sont attribuables au fait que les projections de location ne se sont pas concrétisées en raison notamment de la faible quantité de neige au sol.

[4]            L'unité condominiale était située dans un lieu de villégiature hivernal et estival où l'on trouve des pistes de ski et des terrains de golf de niveau international. L'appelant pratique le ski et le golf. Âgé de 33 ans, il occupe un poste de cadre chez Motorola et détient un diplôme en administration des affaires de l'Université Sir Wilfrid Laurier.

[5]            L'appelant a déclaré les revenus, les dépenses et les pertes qui suivent relativement au bien en question :

Blair Simpson

Tableau des pertes locatives découlant du bien dont la déduction est demandée dans le calcul du revenu pour les années d'imposition 1990, 1991, 1992 et 1993

Détails

1990

1991

1992

1993

Revenu

    3 418,24 $

6 387,55 $

6 519,20 $

3 966,33 $

Moins :

Frais d'intérêt

13 644,72 $

20 814,60 $

8 492,83 $

7 721,55 $

Autres frais

    3 108,90 $

4 016,00 $

5 066,12 $

4 242,58 $

Pertes locatives pour l'année

13 335,38 $

18 443,05 $

7 039,75 $

7 997,80 $

Part de l'appelant des pertes locatives

    6 667,69 $

9 221,53 $

3 519,88 $

3 998,90 $

[6]            Les projections de location fournies par Nordic Accommodations faisaient état d'un revenu de location brut, en 1989, de 13 775,43 $. L'appelant a déclaré qu'il a acheté l'unité en s'appuyant sur cette projection et qu'il s'attendait à ce que le revenu augmente progressivement au fil des années. Ce revenu de location brut était assujetti à toutes les déductions, lesquelles comprenaient un montant correspondant à 40 p. 100 du revenu brut versé à Nordic au titre du pool locatif, des intérêts, des taxes, du service de nettoyage et des services publics.

[7]            En s'appuyant sur un revenu brut de 14 463 $[1], les frais payés à Nordic, les intérêts et les taxes pour 1990 totaliseraient :

                1)              Intérêt (taxes)         13 644 $

                2)              Frais payés à Nordic             5 785 $

                                Total        19 429 $

[8]            Compte tenu de ces projections, la perte dépasse 4 000 $ par année. En outre, les autres dépenses dépassaient 3 000 $ par année au cours de chacune des années pertinentes. L'appelant occupait à l'occasion le bien pour son usage personnel, mais il payait le juste prix de location moins les frais de gestion. Les deux parties ont renvoyé la Cour à l'arrêt Tonn v. The Queen, 96 DTC 6001.

[9]            Dans d'autres affaires, j'ai hésité à conclure " qu'il n'y avait pas d'attente raisonnable de profit ". De façon générale, dans les cas où il y a véritablement exploitation d'une entreprise, il est plus indiqué d'insister sur le caractère raisonnable des dépenses dont la déduction est demandée[2]. Un investisseur raisonnable ne ferait pas l'acquisition d'un placement qui ne lui occasionne que de lourdes pertes une fois payés les intérêts sur un montant représentant 75 p. 100 du coût d'acquisition. Le juge Linden, dans l'arrêt Tonn (précité), a déclaré que le ministre du Revenu national ne devrait pas substituer son jugement à celui du contribuable; malgré cela, en l'instance, les dépenses prévisibles sont si élevées par rapport aux revenus prévisibles qu'il n'est pas raisonnable d'en admettre la déduction. Chaque affaire doit être tranchée en fonction des faits qui lui sont propres. Dans la plupart des affaires, les pertes sont imprévisibles mais, en l'espèce, les projections les plus optimistes ne laissent pas entrevoir de profit dans un avenir prévisible. Même en excluant les frais d'intérêt, l'opération a été très peu profitable si tant est qu'elle l'a été, hormis le fait que l'appelant a payé un loyer lorsqu'il a personnellement occupé l'unité condominiale.

[10]          Il faut se demander pourquoi l'appelant a investi dans quelque chose qui, de toute évidence, allait lui faire perdre de l'argent. Le bien est situé dans une région touristique attrayante et il était raisonnable de supposer qu'il allait prendre de la valeur. On peut inférer que l'acquisition de ce bien comportait un élément personnel. Quelle que soit la nature de l'opération, il faut conclure que ce n'est pas une entreprise commerciale.

[11]          Les appels sont rejetés.

Signé à Ottawa, Canada, ce 2e jour de février 1998.

" C. H. McArthur "

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 22e jour de mars 2000.

Mario Lagacé, réviseur



[1] Obtenu en multipliant les projections de 1989 par 5 p. 100.

[2] Tonn v. H.M.Q., 96 DTC 6001, à la page 6009 et article 67 de la L.I.R..

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.