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Date: 19980508

Dossiers: 96-774-IT-I; 96-1623-IT-I

ENTRE :

DAVID D. HAYDEN, PEGGY T. HAYDEN,

appelants,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

Intimée.

Motifs du jugement

Le juge Rip, C.C.I.

[1]            David D. Hayden et Peggy T. Hayden interjettent appel de cotisations d'impôt sur le revenu dans lesquelles le ministre du Revenu national (le " ministre ") a refusé la déduction de diverses pertes locatives subies par les appelants pour le motif que les dépenses en cause étaient des frais personnels ou de subsistance au sens du paragraphe 248(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu (" Loi ") et que, par conséquent, elles n'étaient pas déductibles dans le calcul du revenu pour l'année : alinéa 18(1)h) de la Loi. Le ministre a également refusé la déduction de frais d'intérêt demandée par Peggy Hayden dans le calcul de son revenu de 1991 puisque les frais en question n'ont pas été engagés en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien : alinéa 18(1)a) de la Loi. Les appels de David Hayden sont interjetés à l'encontre de cotisations établies pour les années 1988 et 1989 et ceux de Peggy Hayden, de cotisations établies pour les années 1991, 1992 et 1993.

[2]            David Hayden et Peggy Hayden sont mariés ensemble. Leurs appels ont été entendus sur preuve commune. Ils n'étaient pas représentés par un avocat.

[3]            Les montants de l'impôt et de l'intérêt que les appelants contestent pour chaque année d'imposition sont inférieurs à 12 000 $. J'ai demandé à M. Hayden pourquoi, compte tenu des circonstances, lui et son épouse avaient interjeté appel sous le régime de la procédure générale de la Cour plutôt que sous le régime de la procédure informelle. Je lui ai expliqué certaines des différences entre les deux procédures. M. Hayden a répondu qu'il avait été " amené à croire " qu'ils devaient interjeter appel sous le régime de la procédure générale. Après l'audition des appels en l'instance, j'ai prié le greffier d'écrire aux appelants pour les informer que, s'ils souhaitaient que leurs appels soient régis par la procédure informelle, ils devaient faire le choix nécessaire au plus tard le 30 avril 1998. Ils ont fait ce choix en vertu du paragraphe 16(1) des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure informelle), et la Couronne a donné son consentement. La procédure informelle prévue dans la Loi s'applique aux appels en l'instance.

[4]            En 1981, alors qu'ils étaient en voyage de ski avec leurs enfants — pendant le congé scolaire du mois de mars — au Mont Ste-Marie (Québec), à 60 milles environ d'Ottawa, M. et Mme Hayden ont visité un kiosque où l'on présentait des plans d'expansion de la montagne par le propriétaire, Mont Ste. Marie Limited (" Limited "). Impressionnés par ce qu'ils ont vu, les Hayden sont retournés à Toronto avec la documentation promotionnelle et ont pris des dispositions pour acquérir au Mont Ste-Marie un logement en copropriété qui répondait à la définition d'immeuble résidentiel à logements multiples (" IRLM ") au sens du règlement pris en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu (" Loi ") en vigueur à l'époque. Les Hayden ont payé le logement 96 000 $ au total — le logement, les meubles et les frais juridiques. M. Hayden a fait à la Banque Canadienne Impériale de Commerce un emprunt de 67 500 $ dont le remboursement était garanti par une hypothèque grevant le logement dont le terme était de cinq ans; l'intérêt annuel sur l'emprunt était de 17,075 p. 100. Le bien a été hypothéqué en faveur de la banque pour un montant de 12 900 $ afin de garantir d'autres sommes payables par la banque.

[5]            M. Hayden a déclaré qu'il avait acquis le logement pour le principal motif qu'il était un IRLM. Qui plus est, la famille pouvait utiliser le logement un certain nombre de jours dans l'année, c'est-à-dire, à l'époque, 77 jours. Limited devait louer le logement le reste de l'année et les Hayden devaient en tirer un revenu de location. En d'autres termes, Limited était censée exploiter l'immeuble d'habitation en copropriété comme un hôtel et louer les logements pour le compte des propriétaires non gérants.

[6]            Pendant toutes les périodes pertinentes, les Hayden vivaient à Toronto et, en raison de la distance entre Mont Ste-Marie et Toronto, approximativement 7 heures de route, ils ne prévoyaient pas utiliser le logement aussi souvent que les propriétaires de logements vivant à Ottawa. Ils estimaient néanmoins que l'acquisition était une " bonne affaire ".

[7]            M. Hayden a déclaré que, lorsqu'il a acquis le bien, il savait que celui-ci ne serait pas un placement rentable; cependant, il a examiné la croissance prévue au Mont Ste-Marie et y a vu un " potentiel incroyable ". Il a indiqué qu'il était disposé à " souffrir " pendant quelques années, sachant qu'il allait faire de l'argent à la revente du logement. Il a reconnu qu'au moment où il avait acheté le logement il croyait être en mesure de le revendre à profit après quatre ou cinq ans.

[8]            M. Hayden a expliqué que, chaque automne, vers le 1er octobre, il faisait la liste des jours que lui et sa famille souhaitaient passer au Mont Ste-Marie; le reste du temps, le logement pouvait être loué.

[9]            M. Hayden a déclaré que la famille n'avait jamais passé au logement les 77 nuits permises. En 1982, ils ont transféré le nombre de nuits inutilisées à Limited pour louer le logement et ainsi tirer un revenu additionnel.

[10]          Au cours des hivers 1981-1982 et 1982-1983, les Hayden ont passé environ 16 nuits au logement. Au printemps de 1983, Limited leur a demandé de réduire le nombre de nuits passées au logement à des fins personnelles parce que, d'après M. Hayden, les affaires étaient bonnes. En tant que membre de l'association des propriétaires de logements en copropriété, M. Hayden a convenu de modifier l'entente intervenue entre Limited et les propriétaires de logements de façon que, de 77 nuits par année, comme il avait initialement été prévu, le nombre de nuits pouvant être utilisées à des fins personnelles soit ramené à 60. (Les Hayden avaient antérieurement réduit leur utilisation personnelle.) Au cours des hivers 1984 à 1987, les Hayden ont passé au logement de 35 à 45 nuits par année. En 1987, Limited a demandé aux propriétaires de réduire leur utilisation personnelle du logement de 10 à 45 nuits pour que Limited ait plus de facilité à louer les logements, et ils ont tous accepté.

[11]          L'entente initiale conclue avec Limited, d'une durée de 10 ans, a expiré en 1988. Limited et l'association des propriétaires n'ont pu s'entendre sur les modalités d'une nouvelle entente. Cependant, Limited avait besoin de logements à louer. M. Hayden a convenu avec Limited de limiter son usage personnel du logement à 40 nuits et de laisser le logement libre le reste du temps pour qu'il soit loué. À l'époque, d'après M. Hayden, Limited et les gouvernements fédéral et provincial investissaient quelque 20 millions de dollars au Mont Ste-Marie, de sorte qu'il avait très confiance en l'avenir.

[12]          En 1989, la famille a passé 36 nuits au logement et, en 1990, 30 nuits. En 1991, les Hayden ont passé 10 nuits seulement au logement. M. Hayden a déclaré que l'entreprise familiale était en faillite et qu'il était incapable d'aller au Mont Ste-Marie régulièrement. La famille a à l'occasion pris ses vacances au Mont Ste-Marie au cours de l'hiver et au mois d'août. Les Hayden ont passé la plupart de leurs vacances de Noël au logement.

[13]          Entre-temps, la valeur des logements en copropriété au Mont Ste-Marie s'était mise à chuter. En 1992, sept logements en copropriété ont été mis en vente; le prix demandé était de 92 000 $; aucun n'a été vendu. Cette année-là, Limited a cessé d'exploiter l'immeuble d'habitation en copropriété comme un hôtel. Deux employés de Limited ont formé une compagnie de location pour représenter les propriétaires de logements en copropriété aux fins de louer ceux-ci. Les Hayden ont accepté de laisser ces gens louer leur logement en leur nom. Ils se sont réservé 10 nuits à des fins personnelles. En 1993, ils ont accepté de passer 15 nuits au logement.

[14]          En 1993, M. Hayden a-t-il déclaré, la valeur du logement en copropriété a chuté à moins de 56 000 $. En 1993, huit logements ont été vendus entre 46 000 $ et 53 000 $.

[15]          En 1991, les Hayden se sont retrouvés enfermés dans un dilemme. L'entreprise familiale était en faillite et M. Hayden ne pouvait vendre le logement en copropriété sans subir une perte. Pour faire ses frais et se départir du bien, il devait vendre le logement, selon ses calculs, près de 60 000 $. Puisqu'une vente à ce prix était impossible, la famille a décidé de conserver le logement.

[16]          En 1994, les Hayden ont mis le logement en vente. Ils demandaient 69 000 $, mais l'agent immobilier était autorisé à accepter 60 000 $. Pendant les neuf mois de son mandat de vente, l'agent n'a attiré que trois clients intéressés. En juin 1995, la vente du logement a été confiée à un nouvel agent et le prix demandé a été fixé à 66 000 $, mais, pendant les trois mois qu'a duré le mandat de vente de l'agent, personne n'a visité le logement.

[17]          M. Hayden a déclaré qu'il y avait " toujours des rumeurs " que quelque chose allait se passer au Mont Ste-Marie, ce qui aurait pour effet de faire augmenter la valeur des logements. M. et Mme Hayden hésitaient à vendre car ils craignaient que, une fois le logement vendu, la valeur de celui-ci augmente en raison d'un facteur inconnu. Ainsi que M. Hayden l'a dit " il y avait toujours des rumeurs lorsque nous étions sur le point de vendre ". Cela l'a donc encouragé à conserver le logement. Il a reconnu qu'il n'avait jamais tenté de vendre le logement à profit; il voulait seulement faire ses frais.

[18]          L'entente initiale conclue avec Limited garantissait aux Hayden des loyers de 3 200 $ par année pour les 288 nuits possibles. M. Hayden, qui était le témoin principal pour lui et son épouse, a déclaré qu'il savait à combien devaient s'élever les dépenses relatives au logement, mais qu'il s'attendait à faire ses frais lorsque le taux d'occupation atteindrait 80 p. 100 pour l'année au complet. L'hôtel n'a jamais atteint un taux d'occupation annuel de 80 p. 100.

[19]          M. Hayden a reconnu que, avant l'achat du logement, il ne s'était pas renseigné au sujet du taux d'occupation des autres hôtels ou logements en copropriété qui étaient à louer dans la région du Mont Ste-Marie, y compris dans la Gatineau et les Laurentides. M. Hayden a déclaré que le Mont Ste-Marie avait récemment été acquis par Intrawest Inc., un important promoteur et exploitant de centres de ski en Amérique du Nord, et qu'il était maintenant très optimiste que le logement allait prendre de la valeur.

[20]          Dans ses déclarations de revenus des années 1988 à 1991, M. Hayden a déduit toutes les pertes subies. Pour les années 1992 à 1996, les pertes ont été déduites par M. et Mme Hayden dans une proportion de 50 p. 100 chacun. Mme Hayden a fait valoir que, quelque temps après 1990, M. Hayden lui avait transféré une moitié indivise du logement en copropriété. En 1992, elle a commencé à déduire 50 p. 100 des pertes subies dans le cadre de l'exploitation du logement. Cependant, il n'y a aucune preuve qu'un tel transfert a effectivement eu lieu. M. et Mme Hayden ont tous deux concédé que, bien qu'il eût été dans leur intention de transférer le bien, il n'y avait en fait pas eu de transfert. M. Hayden a déclaré qu'il n'a réalisé que récemment, lorsqu'il a communiqué avec le notaire qui détenait les documents faisant état de l'achat du logement et de l'hypothèque grevant celui-ci, que le transfert du bien n'avait pas été effectué.

[21]          Les chiffres suivants représentent les revenus de location bruts et les pertes relatives au logement en copropriété, que M. Hayden ou Mme Hayden ou les deux ont déduites dans leurs déclarations de revenus des années 1988 à 1996 :

Année                     Revenu brut                           Perte                        Perte révisée[1]

1988         1 575 $     (12 004 $)                14 567 $

1989         2 510 $     (10 172 $)                13 097 $

1990         2 705 $     (10 897 $)                14 375 $

1991         1 300 $     (12 595 $)                15 195 $

1992         586 $        (12 696 $)                14 766 $

1993         928 $        (11 860 $)                13 220 $

1994         0               (11 420 $)

1995         3 200 $     (6 491 $)

1996         800 $        (8 210 $)

[22]          M. Hayden a tenté de réduire l'intérêt hypothécaire en remplaçant une hypothèque de deuxième rang grevant sa maison par une hypothèque grevant un bien dont il était propriétaire à Cobourg (Ontario). Le montant des emprunts garantis par les hypothèques a été utilisé pour financer l'achat du bien à Mont Ste-Marie.

[23]          Dans sa déclaration de revenus de 1991, Mme Hayden a déduit des frais financiers et des intérêts de 13 047 $. Elle n'a pu dire avec certitude à quoi l'argent avait servi. Elle a déclaré avoir cru comprendre qu'elle garantissait personnellement le remboursement des emprunts de l'entreprise familiale. En fait, la résidence familiale a été hypothéquée pour garantir le remboursement d'un emprunt bancaire de Hayden Galleries Inc., la société dont les Hayden étaient propriétaires. Lorsque Hayden Galleries Inc. a fait faillite, Mme Hayden a dû honorer sa garantie. M. Hayden a déclaré que, lorsque Hayden Galleries Inc. a fait faillite en 1990, lui et Mme Hayden ont perdu l'argent qu'ils y avaient investi. En outre, ils ont perdu de l'argent du fait des garanties personnelles qu'ils avaient dû consentir à la banque. M. Hayden a expliqué que, pour payer la banque, lui et son épouse avaient dû contracter d'autres emprunts. Le montant de 13 047 $ représentait l'intérêt payable sur l'argent emprunté par Mme Hayden pour honorer les garanties personnelles qu'elle avait offertes à la banque.

[24]          Ce n'est que lorsqu'un contribuable perd de l'argent relativement à un bien et qu'il déduit ses pertes d'un revenu provenant d'une autre source, qu'il a gagné ou reçu dans l'année, que le ministre remet les pertes en question. Le ministre se demande si les dépenses inhérentes à un bien ont été faites par le contribuable pour son propre usage et non dans le but ou dans l'attente raisonnable de tirer un profit de l'exploitation d'une entreprise. Si le bien n'a pas été entretenu dans le but ou dans l'attente raisonnable de tirer un profit de l'exploitation d'une entreprise, la Loi, au paragraphe 248(1), prévoit que les dépenses inhérentes à ce bien sont des frais personnels et de subsistance qui ne sont pas déductibles par le contribuable dans le calcul du revenu : alinéa 18(1)h).

[25]          En 1977, la Cour suprême du Canada[2] a examiné la question de savoir à quels critères devait satisfaire un contribuable pour tirer un profit ou avoir une attente raisonnable de profit d'une activité, de façon que les dépenses relatives à un bien ne soient pas qualifiées de frais personnels ou de subsistance. Le juge Dickson (tel était alors son titre) a expliqué ceci à la page 5215 :

                Il y a d'abord eu controverse, mais il est maintenant admis que pour avoir une "source" de revenu, le contribuable doit avoir en vue un profit ou une expectative raisonnable de profit. L'expression source de revenu équivaut donc au terme entreprise: Dorfman c. M.R.N. [72 DTC 6131], [1972] C.T.C. 151. Voir également l'al. 139(1)ae) de la Loi de l'impôt sur le revenu qui inclut à titre de " frais personnels ou frais de subsistance ", donc non déductibles aux fins de l'impôt, les dépenses inhérentes aux propriétés entretenues par le contribuable pour son propre usage et avantage, et non entretenues relativement à une entreprise exploitée en vue d'un profit ou dans une expectative raisonnable de profit. Si le contribuable, en exploitant sa ferme, se livre simplement à un passe-temps, sans expectative raisonnable de profit, il ne peut réclamer aucune déduction pour les dépenses engagées.

[26]          Le juge Dickson a ensuite expliqué le sens de l'expression " expectative raisonnable de profit " [attente raisonnable de profit] :

                Une jurisprudence volumineuse traite de la signification de l'expression expectative raisonnable de profit, mais il ne s'en dégage aucune constante. À mon avis, on doit s'appuyer sur tous les faits pour déterminer objectivement si un contribuable a une expectative raisonnable de profit. On doit alors tenir compte des critères suivants: l'état des profits et pertes pour les années antérieures, la formation du contribuable et la voie sur laquelle il entend s'engager, la capacité de l'entreprise, en termes de capital, de réaliser un profit après déduction de l'allocation à l'égard du coût en capital. Cette liste n'est évidemment pas exhaustive. Les facteurs seront différents selon la nature et l'importance de l'entreprise: La Reine c. Matthews (1974), 74 DTC 6193. Personne ne peut s'attendre à ce qu'un fermier qui achète une affaire déjà productive subisse au départ les mêmes pertes que celui qui met sur pied une exploitation forestière sur un terrain vierge.

[27]          Récemment, la Cour d'appel fédérale a examiné de nouveau dans l'arrêt Tonn et al. v. M.N.R.[3] la pertinence de l'attente raisonnable de profit relativement à la déductibilité des pertes. Dans l'arrêt A.G. of Canada v. Mastri et al.[4], la Cour a statué que, lorsqu'il n'y a aucun élément personnel en cause relativement aux dépenses, " le juge devrait appliquer le critère de l'attente raisonnable de profit de façon moins assidue qu'il ne l'aurait fait en présence d'un tel facteur "[5]. Le juge Robertson, se prononçant pour la Cour d'appel fédérale, a confirmé que l'arrêt Tonn avait fait une mise en garde concernant l'" appréciation rétrospective " des décisions commerciales d'un contribuable[6] dont l'activité commerciale se révèle moins rentable que ce qui avait été prévu[7].

[28]          Peu après avoir rendu sa décision dans l'arrêt Mastri, la Cour d'appel a prononcé des motifs dans l'arrêt Watt v. The Queen[8]. S'exprimant pour la Cour, le juge Décary a déclaré qu'une interprétation juste des arrêts Tonn et Mastri permettait de tirer la conclusion suivante[9] lorsqu'il s'agit de déterminer si un contribuable pouvait raisonnablement s'attendre à tirer un revenu d'une activité :

un élément personnel peut effectivement coexister avec un but lucratif; b) l'existence d'un élément personnel portera la Cour à faire une application plus assidue du critère de l'attente raisonnable de profit; et c) là où l'élément personnel est "poursuivi d'abord et avant tout", la preuve incombant au contribuable sera beaucoup plus exhaustive.

[29]          Dans les appels en l'instance, l'objectif " poursuivi d'abord et avant tout " par M. Hayden lorsqu'il a acheté le logement du Mont Ste-Marie était double : la déduction des pertes découlant du logement dans le calcul du revenu et l'utilisation du logement par la famille pendant les vacances. M. Hayden ne s'attendait pas à tirer de revenu ou à réaliser de profit de la location du logement. De fait, M. Hayden n'a consulté que la documentation promotionnelle préparée par le vendeur avant de décider d'acheter le logement; il n'a pas fait l'effort de comparer la viabilité économique du bien visé à celle des biens semblables situés près du Mont Ste-Marie. Il était — si je comprends bien son témoignage, et je crois que je le comprends bien — enthousiaste à l'idée d'avoir un bien immeuble qu'il pourrait utiliser pour les vacances et qui pourrait en même temps l'aider à réduire ses impôts. M. Hayden espérait également pouvoir, à un moment donné, revendre le logement à profit.

[30]          Je ne souhaite pas " apprécier rétrospectivement " la décision de M. Hayden. Il a acheté le logement dans une région que lui et sa famille aimaient. L'achat a été financé par une hypothèque grevant le logement et une autre grevant un bien dont M. et Mme Hayden étaient propriétaires en Ontario. L'intérêt hypothécaire représentait la plus importante des dépenses faites relativement au logement. En outre, il y avait un élément personnel dans l'achat du logement. Je ne peux conclure qu'il y avait dans l'activité en cause un élément commercial justifiant la conclusion que M. Hayden pouvait raisonnablement s'attendre à tirer un profit du logement lorsqu'il l'a acheté.

[31]          Il n'y a aucune preuve que M. Hayden a transféré à Mme Hayden une participation dans le logement.

[32]          Finalement, Mme Hayden a payé de l'intérêt, mais ce n'était pas en vue de tirer un revenu d'un bien ou d'une entreprise. Elle a emprunté de l'argent (et a payé de l'intérêt sur cet emprunt) en vue d'honorer la garantie personnelle qu'elle avait donnée au prêteur d'un montant d'argent à Hayden Galleries Inc. Elle ne faisait pas le commerce des garanties, n'a tiré aucun revenu de la garantie, et la garantie n'a pas été donnée dans le cadre d'un projet comportant un risque de caractère commercial.

[33]          Les appels de M. et Mme Hayden sont rejetés. Puisque ces appels sont maintenant régis par la procédure informelle, il n'y a pas de frais.

Signé à Ottawa, Canada, le 8 mai 1998.

" Gerald J. Rip "

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 23e jour de mars 2000.

Mario Lagacé, réviseur



[1]               Les appelants ont modifié leurs déclarations de revenus des années 1988 à 1993 pour réviser l'état des loyers immobiliers et pour hausser les dépenses déduites pour les années 1988 à 1993 inclusivement.

[2]               Moldowan v. The Queen, 77 DTC 5213.

[3]               96 DTC 6001.

[4]               97 DTC 5420.

[5]               5423.

[6]               5423.

[7]               5423.

[8]               [1997] 3 C.T.C. 462.

[9]               464.

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