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Date: 20000823

Dossier: 98-1640-IT-G

ENTRE :

AZIZ MÉRABET,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifsdu jugement

Le juge P.R. Dussault, C.C.I.

[1]            Alors, je rends mon jugement dans le dossier de monsieur Aziz Mérabet, (dossier de la Cour numéro 98-1640(IT)G) et je vais le faire en me référant, comme je vous ai demandé de le faire pour votre argumentation, à la réponse à l'avis d'appel dans laquelle l'on traite des différentes questions en litige. Je traiterai d'abord du paragraphe 12, où il est dit :

Les revenus d'intérêts au montant de 10 567 $, 11 133 $ et 8 137 $, doivent-ils être ajoutés au revenu de l'appelant, pour ses années d'imposition 1991, 1992, 1993 respectivement.

[2]            Alors, ma décision à cet égard c'est oui. Ces montants doivent être inclus au revenu de l'appelant. L'intimée a utilisé le paragraphe 56(4.1) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la " Loi "), qui m'apparaît applicable en l'espèce, compte tenu de la preuve qui a été fournie.

[3]            Je m'empresse d'ajouter qu'on aurait pu, tout simplement, ne pas ajouter ces revenus et refuser tous les intérêts payés, donc de ne pas ajouter les intérêts gagnés par le fils de monsieur Mérabet et qui ont été ajoutés au revenu de ce dernier et refuser tous les intérêts payés car il n'y a définitivement pas d'expectative raisonnable de gagner un revenu dans la mesure où on paie un taux d'intérêt de 12 % pour recevoir des intérêts au taux de 8 %.

[4]            La solution arithmétique aurait été exactement la même que d'ajouter des revenus en vertu du paragraphe 56(4.1) et de refuser simplement les intérêts excédentaires pour 1991 au montant de 1 799 $ et pour 1993 au montant de 6 281 $.

[5]            Cela tient compte aussi des paragraphes 17 et 18 de la réponse à l'avis d'appel.

[6]            Je passe au paragraphe 13 qui se lit comme suit :

Pour les années d'imposition 1991 à 1993, est-ce que l'appelant peut déduire de ses revenus, des pertes locatives au montant de 8 635 $ et 3 145 $ respectivement.

[7]            Ma réponse est non. Il n'y a, ici, aucune expectative raisonnable de profits dans la mesure où premièrement, on doit constater l'élément personnel de location de chambres à des membres de la famille, soit au fils de l'appelant, à ses parents et à son frère. Ce que ces gens-là ont fait, finalement, c'est qu'ils ont en réalité payé une partie des dépenses réclamées. Il est évident avec les chiffres qui ont été donnés, qu'il n'y a absolument aucun espoir raisonnable de gagner un profit. Il s'agit carrément de ce qu'on retrouve dans la Loi comme étant des frais personnels ou des frais de subsistance et je me réfère à l'alinéa 18(1)h) de la Loi, où on dit que :

Ne sont pas déductibles le montant des frais personnels ou des frais de subsistance du contribuable, à l'exception... etc.

[8]            L'exception n'est pas applicable, en l'espèce, ici. Le paragraphe 248(1) de la Loi définit frais personnels et frais de subsistance, comme étant :

... les dépenses inhérentes aux biens entretenus par toute personne pour l'usage ou l'avantage du contribuable ou de toute personne unie à ce dernier par les liens du sang, du mariage ou de l'adoption et non entretenus dans le but ou avec l'espoir raisonnable de tirer un profit de l'exploitation d'une entreprise.

[9]            Je dois souligner, en plus, en ce qui concerne 1991, que l'appelant n'était même pas propriétaire de la résidence où il y avait des chambres louées. Donc, la cotisation est également confirmée en ce qui concerne le paragraphe 13.

[10]          Le paragraphe 14 se lit :

Pour l'année d'imposition 1992, le montant de vingt-deux mille....

Et je le corrige.

... 22 851,17 $...

Au lieu de 850.

.... réclamé comme une partie des dépenses d'entreprise de l'appelant, représente-t-il les dépenses déductibles à l'encontre du revenu d'entreprise de l'appelant.

[11]          Ma réponse est non. Il n'y a absolument aucune preuve que ces dépenses de quelques 22 000 $ ont été refusées sans droit.

[12]          D'abord, sous plusieurs rubriques, les dépenses réclamées contiennent un pourcentage indéterminé de dépenses personnelles; c'est le cas en rapport avec l'utilisation du véhicule et on peut retrouver le détail des dépenses réclamées, accordées et refusées à la page 3 de la réponse à l'avis d'appel, au paragraphe 4(b)i).

[13]          Notamment, sous la rubrique : " Maintenance and Repairs " et " Motor Vehicule ", la preuve démontre qu'il y a un pourcentage indéterminé de dépenses personnelles premièrement en rapport avec l'utilisation de son véhicule par l'appelant, qui a dit s'en servir pour aller au travail et il s'agit-là d'une dépense personnelle et jamais une dépense d'entreprise, puis deuxièmement en rapport avec l'utilisation d'un second véhicule par son épouse.

[14]          En ce qui concerne les dépenses reliées à l'utilisation d'un véhicule pour fins d'affaires, la preuve ne permet définitivement pas d'aller au-delà du 25 % accordé, l'appelant ne tenant notamment aucun registre de ses déplacements.

[15]          Pour ce qui est des autres dépenses refusées sous les différentes rubriques, aucun élément sauf le témoignage de l'appelant ne permet de les relier à l'entreprise. La preuve n'est qu'une affirmation générale, sans aucune explication spécifique ou détaillée de la nature des dépenses et du lien qu'elles peuvent avoir avec l'exploitation d'une entreprise.

[16]          Le fait que l'appelant ait réclamé déjà des dépenses personnelles concernant les dépenses d'automobile permet de penser qu'ici aussi il y a une proportion indéterminée des dépenses réclamées qui pourrait aussi être de nature personnelle.

[17]          C'est donc sur la base d'insuffisance de preuve que je ne peux modifier ce montant de 22 851,17 $, refusé.

Le paragraphe 15 se lit :

L'appelant, pour ses années d'imposition 1992 et 1993, a-t-il droit à des frais pour l'utilisation de la résidence pour affaire;

Ma réponse est oui pour 1992 et je me réfère ici au paragraphe 18(12) de la Loi, qui nous dit :

Nonobstant les autres dispositions de la présente loi, dans le calcul du revenu d'un particulier tiré d'une entreprise pour une année d'imposition :

a)             un montant n'est déductible pour la partie de l'établissement domestique autonome où le particulier réside que si cette partie d'établissement

i) soit est son principal lieu d'affaires,

ii) soit lui sert exclusivement aux fins de tirer un revenu d'une entreprise et pour rencontrer des clients ou des patients sur une base régulière et continue dans le cadre de l'entreprise.

[18]          Je pense que le motif du refus, essentiellement, on le retrouve - et j'y ai fait référence tout à l'heure - on le retrouve à l'alinéa nn) du paragraphe 11 de la Réponse à l'avis d'appel. Ce paragraphe se retrouve à la page 9, où on dit :

Le salon du domicile de l'appelant ne servait pas exclusivement à tirer un revenu d'entreprise et à rencontrer des clients.

[19]          Lors de l'argumentation, l'appelant a fait état de l'utilisation et de la salle à manger et du salon, l'un comme bureau et l'autre pour y recevoir des clients.

[20]          Cependant, ce que j'ai pu constater lors de la preuve, lors du témoignage principal de monsieur Mérabet ou lors de son contre-interrogatoire, c'est qu'il s'agit de son seul lieu d'affaires en ce qui concerne l'entreprise, de telle sorte que je suis prêt à l'accepter sur cette base-là, puisqu'il s'agit d'une alternative. Il s'agit non seulement du principal lieu d'affaires, mais du seul lieu d'affaires, donc je suis prêt à l'accepter sur cette base.

[21]          Toutefois, il faut aller dans les détails, la réponse est donc oui, en principe. L'appelant a déclaré un revenu de 9 450 $ en ce qui concerne l'entreprise pour cette année-là. Les dépenses acceptées ont été de 5 293,48 $ et je n'ai pas accepté d'autres dépenses, c'était dans le paragraphe précédant. On a donc un solde de 4 156 $ disponible, donc un revenu de 4 156 $ disponible pour 1992, pour absorber cette dépense de bureau à domicile.

[22]          Selon votre admission, monsieur Mérabet, les dépenses pour bureau à domicile ont été de 3 969 $ et non de 9 382 $, pour cette année-là. Il y a donc une déduction possible de cette dépense de 3 969 $ ce qui laisse un revenu de 187 $ après déduction de cette dépense.

[23]          J'applique le même principe pour 1993, sauf que je ne peux y répondre de la même façon puisque je n'ai pas les détails concernant 1993. En prenant le revenu de 1993, si toutes les dépenses ont été acceptées comme on me l'a dit, il y aurait ici une perte de 6 895 $. Alors, il y a déjà une perte de 6 895 $ et vous avez fait état qu'il y a une dépense de 4 414 $ et non de 3 185 $ à ce titre.

[24]          Alors, en prenant l'un ou l'autre montant, il ne m'apparaît pas qu'il puisse y avoir une déduction pour 1993 comme telle. Cependant, je ne dis pas que la dépense ne peut pas être reportée dans les années futures.

[25]          Donc, sur cet aspect-là, la cotisation est retournée au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation pour 1992 seulement.

[26]          Il a été convenu de rayer le paragraphe 16, alors ça règle la question.

[27]          Les paragraphes 17 et 18, j'en ai déjà traité en rapport avec le paragraphe 12, il s'agit des frais d'intérêt excédentaires qui ont été refusés.

[28]          Le paragraphe 19 ne constitue plus une question en litige, je n'en traite donc pas.

[29]          La question au paragraphe 20 est la suivante :

Pour les années d'imposition 1991, 1992 et 1993, existe-t-il des pertes réalisées lors de l'exercice de la profession de l'appelant, non utilisées, qui peuvent être reportées aux années 1991, 1992 et 1993.

[30]          Pour 1991, je n'ai pas de détail et il ne semble pas y avoir de perte d'entreprise.

[31]          Pour 1992, il y a un revenu, donc pas de perte qui puisse être reportable. Pour 1993, je vois qu'il y a une perte d'entreprise. En principe, dans la mesure où il y a une perte, elle est reportable si elle ne peut être absorbée par les revenus de l'année. Alors, c'est tout ce que je peux dire sur ce point.

[32]          En ce qui concerne le paragraphe 21, celui-ci se lit :

L'appelant a-t-il renoncé à l'application de la période normale de nouvelle cotisation à l'égard de l'année d'imposition 1991.

[33]          La réponse est oui, la renonciation est valide, la révocation ne l'est pas car elle a été faite après la cotisation. Il suffit de se référer au paragraphe 152(4.1) de la Loi.

[34]          Il reste un dernier point, celui du paragraphe 22 qui se lit comme suit :

Le ministre du Revenu national était-il justifié d'imposer à l'appelant pour ses années d'imposition 1991, 1992 et 1993, le paiement d'une pénalité prévue à l'alinéa 163(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu, sur les montants de pertes locatives refusées et les revenus d'intérêt ajoutés.

[35]          Alors, je vous dirais là-dessus qu'à l'égard du revenu ajouté, la façon dont le ministère s'y est pris c'est de faire appel à une présomption de la Loi ou si on veut à une règle spéciale d'attribution que l'on retrouve au paragraphe 56(4.1) de la Loi.

[36]          Certes, à l'égard de toute cette question d'intérêts on aurait pu aborder la question sous un autre angle, comme je le soulignais tout à l'heure et dire qu'il n'y avait simplement pas d'expectative raisonnable de profit, compte tenu du fait, qu'évidemment, il n'y avait pas de revenu comme tel, gagné par vous. Vous vous étiez organisé plutôt pour le faire gagner par votre fils et on aurait pu refuser tout simplement les pertes en totalité.

[37]          En ce qui concerne le revenu de location, vous m'avez fait part, monsieur Mérabet, qu'il y a eu location à des tiers, après location à votre parenté, j'en tiens compte. La location aux parents m'apparaît toutefois fictive et une façon détournée de réclamer des dépenses personnelles. Jusqu'à quel point, je ne peux pas le déterminer, cependant. Toutefois, à l'égard du revenu de location, ce qui est invoqué par l'intimée c'est qu'il n'existait pas d'expectative raisonnable de tirer un profit de cette activité-là durant les années en litige.

[38]          On n'est pas allé très loin dans les autres éléments, à part le fait que vous ayez tenté de passer des revenus à votre fils, vous l'avez admis vous-même d'ailleurs, d'une façon qui n'était peut-être pas tout à fait correcte.

[39]          Non sans une certaine hésitation, je dois bien l'avouer, j'ai décidé d'annuler les pénalités dans ce cas-ci, en tenant compte de la lettre de votre médecin et du fait qu'en réalité on pourrait considérer qu'il ne s'agit pas de revenus non déclarés, mais plutôt des dépenses non justifiées.

[40]          Donc, comme je vous le dis, non sans une certaine hésitation et probablement à cause de l'insuffisance d'une preuve un peu plus forte de la part de l'avocate de l'intimée, j'ai décidé d'annuler les pénalités.

[41]          Donc, les appels sont admis avec dépens en faveur de l'intimée, cependant puisque la majeure partie des cotisations demeure inchangée. À part les pénalités, il y a un seul point qui est modifié. Il s'agit de la possibilité de réclamer des dépenses d'utilisation d'un bureau à domicile pour l'année 1992. Compte tenu des calculs auxquels on en est arrivé, cette déduction est possible pour 1992. Donc, la cotisation pour cette année est déférée au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation.

[42]          Les cotisations pour les trois années sont aussi déférées au ministre pour annulation des pénalités. À tous autres égards, les cotisations demeurent inchangées.

Signé à Ottawa, Canada, ce 23e jour d'août 2000.

" P.R. Dussault "

J.C.C.I.

No DU DOSSIER DE LA COUR :                        98-1640 (IT)G

INTITULÉ DE LA CAUSE :                                                 AZIZ MÉRABET

et Sa Majesté La Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                                      Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                                    5 mai 2000

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :                         L'honorable juge P.R. Dussault

DATE DU JUGEMENT :                                      12 mai 2000

COMPARUTIONS :

Pour l'appelant :                                                    L'appelant lui-même

Pour l'intimée :                                                       Me Anne-Marie Boutin

AVOCATE INSCRIT(E) AU DOSSIER :

Pour l'appelant :

                                Nom :                                       --

                                Étude :                                     --

Pour l'intimée :                                                       Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

                                                                                                Ottawa, Canada

Dossier : 98-1640(IT)G

ENTRE :

AZIZ MÉRABET,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

CERTIFICATION DE LA TRANSCRIPTION DES MOTIFS DU JUGEMENT

          Je demande que la copie ci-jointe, telle que corrigée, des motifs de la décision prononcés à l'audience à la Cour canadienne de l'impôt, 500 Place d'Armes, Montréal (Québec), le 5 mai 2000, soit déposée.

Signé à Ottawa, Canada, ce 23e jour d'août 2000.

" P.R. Dussault "

J.C.C.I.


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