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Date: 20000724

Dossier: 97-950-IT-G, 97-951-IT-G, 97-952-IT-G

ENTRE :

PCL CONSTRUCTION MANAGEMENT INC.,

PCL CONSTRUCTORS EASTERN INC.,

PCL CONSTRUCTORS CANADA INC.

appelants,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Bowie, C.C.I.

[1]            Les appels en instance sont interjetés à l'encontre de cotisations établies pour les années d'imposition 1993 et 1994 en vertu de la partie I.3 de la Section B de la Loi de l'impôt sur le revenu (la Loi), qui porte sur l'impôt des grandes sociétés. Les appelantes sont toutes des filiales de PCL Construction Group Inc. Les appels portant tous sur les mêmes questions, à savoir le calcul du capital en vertu du paragraphe 181.2(3) de la Loi, ils ont donc été entendus ensemble sur preuve commune. Au début de l'audience, l'avocate de l'appelante a admis qu'il y avait lieu de rejeter l'appel de PCL Construction Management Inc. pour l'année d'imposition 1994 vu qu'il se rapporte à une cotisation prescrivant qu'aucun impôt n'est payable.

[2]            L'article 181.2, dans la mesure où il s'applique aux questions en litige, est libellé comme suit :

181.2(2) Le capital imposable d'une société, sauf une institution financière, pour une année d'imposition est égal à l'excédent éventuel de son capital pour l'année sur sa déduction pour placements pour l'année.

181.2(3) Le capital d'une société, sauf une institution financière, pour une année d'imposition correspond à l'excédent éventuel du total des éléments suivants :

a)             le capital-actions de la société (ou, si elle est constituée sans capital-actions, l'apport de ses membres), ses bénéfices non répartis, son surplus d'apport et tout autre surplus à la fin de l'année;

b)             ses réserves pour l'année, sauf dans la mesure où elles sont déduites dans le calcul de son revenu pour l'année en vertu de la partie I;

                                                c)              les prêts et les avances qui lui ont été consentis à la fin de l'année;

                                                d)             ses dettes à la fin de l'année sous forme d'obligations, d'hypothèques, d'effets, d'acceptations bancaires ou de titres semblables;

                                                e)              les dividendes qu'elle a déclarés mais n'a pas versés avant la fin de l'année;

                                                f)               toutes ses autres dettes, sauf celles afférentes à un bail, à la fin de l'année qui sont impayées depuis plus de 365 jours avant la fin de l'année;

                                [...]

                sur le total des montants suivants [ne s'applique pas en l'espèce].

[3]            Les appelantes contestent l'inclusion par le ministre du Revenu national (le ministre) de deux postes dans le calcul de leur capital pour les années en litige. Le ministre admet maintenant que l'un de ces postes, intitulé " chèques en circulation moins les soldes bancaires connexes " dans les bilans des appelantes, n'aurait pas dû être inclus, et que les appels doivent être admis dans cette mesure. Le seul autre poste en litige est un élément de passif intitulé " produits comptabilisés d'avance et avances contractuelles " dans les bilans des appelantes. Par souci de simplicité, je les appellerai simplement les " montants comptabilisés d'avance ", pour reprendre l'expression utilisée dans les plaidoiries et dans les témoignages.

[4]            Initialement, le ministre a prétendu, dans les réponses aux avis d'appel déposés en mai 1997, que les montants comptabilisés d'avance étaient des réserves, dont aucune portion n'était déductible dans le calcul des revenus des appelantes, et qu'ils étaient par conséquent assujettis aux dispositions de l'alinéa 181.2(3)b) de la Loi. En juillet 1998, les réponses ont été modifiées pour y ajouter l'argument selon lequel les montants comptabilisés d'avance " [...] constituaient des prêts et des avances consentis à l'appelante (aux appelantes) à la fin de chaque année visée par l'appel [...] ", et qu'ils étaient donc compris dans la définition du terme capital. Au moyen d'une deuxième modification des réponses en janvier 1999, le ministre soutient que les montants comptabilisés d'avance sont compris dans les termes " [...] tout autre surplus [...] " que l'on retrouve à l'alinéa 181.2(3)a) de la Loi.

[5]            Les appelantes sont d'avis que les montants comptabilisés d'avance ne sont pas assujettis aux dispositions du paragraphe 181.2(3) et qu'ils ne doivent donc pas être inclus dans le calcul de leur capital pour les années en cause.

[6]            Les faits exposés ci-après ont été admis par les parties dans un exposé conjoint des faits qui a été déposé au début de l'audience :

[TRADUCTION]

1.              Le 1er décembre 1995, PCL Civil Constructors (Canada) Inc. (" Civil ") et PCL Constructors Eastern Inc. (" Eastern ") ont fusionné pour former PCL Constructors Eastern Inc.

2.              Le 1er novembre 1995, PCL Constructors Pacific Inc. (" Pacific ") et PCL Constructors Prairie Inc. (" Prairie ") ont fusionné pour former PCL Constructors Canada Inc.

3.              PCL Construction Management Inc. (" CMI "), Civil, Eastern, Prairie et Pacific (collectivement appelées les " sous-entrepreneurs ") étaient à toutes les périodes pertinentes des sociétés exploitant une entreprise de construction qui résidaient au Canada aux fins de la Loi de l'impôt sur le revenu (la " Loi ").

4.              À toutes les périodes pertinentes, les sous-entrepreneurs étaient des filiales en propriété exclusive de PCL Construction Group Inc. (" PCL ").

5.              Des états financiers ont été préparés pour les exercices des sous-entrepreneurs se terminant le 31 octobre 1993 et le 31 octobre 1994. Ils ont été intégrés à ceux de PCL pour les mêmes exercices. Les états financiers consolidés de PCL pour les exercices se terminant le 31 octobre 1993 et le 31 octobre 1994 ont été vérifiés par le cabinet de comptables agréés Peat Marwick Thorne et ont été préparés en conformité avec les principes comptables généralement reconnus (" PCGR "). Les états financiers des filiales de PCL, dont ceux des sous-entrepreneurs, ont été dressés en conformité avec les PCGR, sauf pour ce qui est de certaines obligations d'information qui ne revêtent aucune importance dans les appels en instance.

6.              En conformité avec les PCGR, les sous-entrepreneurs ont dressé leurs états financiers pour les exercices 1993 et 1994 en utilisant la méthode comptable dite de l'avancement des travaux applicable aux contrats de construction, et qui consiste à calculer le montant estimatif des bénéfices nets au prorata du coût réel des travaux réalisés à la date d'établissement des états financiers et à appliquer ensuite le pourcentage aux bénéfices nets prévus dans le cadre du contrat afin de déterminer le montant des bénéfices à constater.

7.              Les montants facturés aux clients dans les faits étaient basés sur l'estimation de l'avancement des travaux faite par les sous-entrepreneurs.

8.              Dans les bilans des sous-entrepreneurs pour les exercices 1993 et 1994, sous la rubrique " produits comptabilisés d'avance et avances contractuelles ", figuraient des éléments de passif de 10 761 229 $ en 1993 et de 7 101 674 $ en 1994 pour CMI; de 6 014 $ en 1993 et de 6 433 831 $ en 1994 pour Civil; de 9 423 091 $ en 1993 et de 11 784 536 $ en 1994 pour Eastern; de 4 349 555 $ en 1993 et de 7 533 803 $ en 1994 pour Pacific; et de 1 973 921 $ en 1994 pour Prairie (les " montants comptabilisés d'avance "). Les montants comptabilisés d'avance représentent la différence entre les montants facturés dans les faits aux clients par les sous-entrepreneurs et les montants constatés par eux aux fins des états financiers à l'aide de la méthode comptable de l'avancement des travaux.

9.             Les montants comptabilisés d'avance à proprement dit ne sont pas en litige.

10.            Le ministre du Revenu national (le " ministre ") a établi de nouvelles cotisations à l'égard des entrepreneurs, ainsi qu'il suit :

                a)              CMI :

                                (i)             Au moyen d'un avis de nouvelle cotisation daté du 19 avril 1996 se rapportant à l'année d'imposition 1993, le ministre a notamment établi une cotisation brute de 7 754,94 $ au titre de l'impôt payable en vertu de la partie I.3, en déduction de laquelle ont été portés les crédits de surtaxe d'une année subséquente;

                                (ii)            Au moyen d'un avis de nouvelle cotisation daté du 19 avril 1996 se rapportant à l'année d'imposition 1994, le ministre a établi une cotisation brute de 3 294,79 $ au titre de l'impôt payable en vertu de la partie I.3, en déduction de laquelle ont été portés les crédits de surtaxe de l'année courante.

                b)             Civil — Au moyen d'avis de nouvelle cotisation datés du 25 avril 1993 se rapportant aux années d'imposition 1993 et 1994, le ministre a établi une cotisation de 873,31 $ pour 1993 et de 12 669,07 $ pour 1994 au titre de l'impôt payable en vertu de la partie I.3, au motif que Civil avait inclus dans son capital les montants comptabilisés d'avance.

                c)              Eastern — Au moyen d'avis de cotisation datés du 6 mai 1996, le ministre a établi une cotisation de 15 450,18 $ pour 1993 et de 20 507,07 $ pour 1994 au titre de l'impôt payable en vertu de la partie I.3. au motif qu'Eastern avait inclus dans son capital les chèques en circulation et les montants comptabilisés d'avance;

                d)             Pacific — Au moyen d'avis de nouvelle cotisation datés du 22 avril 1996 se rapportant aux années d'imposition 1993 et 1994, le ministre a notamment établi une cotisation de 10 972,70 $ pour 1993 et de 8 020 $ pour 1994 au titre de l'impôt payable en vertu de la partie I.3, au motif que Pacific avait inclus dans son capital les chèques en circulation et les montants comptabilisés d'avance;

                e)              Prairie — Au moyen d'un avis de nouvelle cotisation daté du 6 mai 1996 se rapportant à l'année d'imposition 1994, le ministre a établi une cotisation de 8 008,67 $ au titre de l'impôt payable en vertu de la partie I.3, au motif que Prairie avait inclus dans son capital les chèques en circulation et les montants comptabilisés d'avance.

11.            Chacun des sous-entrepreneurs s'est opposé aux nouvelles cotisations dans les délais prévus.

12.            Le ministre a ratifié les nouvelles cotisations des sous-entrepreneurs au moyen des avis de ratification indiqués ci-après.

                a)              CMI — 29 novembre 1996 (pour l'année d'imposition 1993 seulement);

                b)             Eastern et Civil — 29 novembre 1996;

                c)              Pacific et Prairie — 29 novembre 1996.

[7]            Il n'y a pas de litige entre les parties au sujet des calculs effectués pour établir les cotisations; la divergence de vues porte essentiellement sur la question de savoir si les montants comptabilisés d'avance doivent être inclus dans le calcul du capital. Aux fins des présents motifs, je ne tiendrai pas compte des fusions qui ont lieu en 1995. Pour désigner les appelantes et leurs prédécesseurs, j'utiliserai simplement " les appelantes ".

[8]            M. Duane Sommerfeld, directeur général des finances et de la comptabilité du groupe, a exposé dans le cadre de son témoignage la méthode comptable dite de l'avancement des travaux utilisée par ces appelantes. Les contrats de construction que les appelantes exécutent sont d'une telle importance et d'une telle nature que leur réalisation s'étale sur plusieurs années. De façon générale, les contrats ne sont pas réalisés en un exercice. Les prix des contrats sont établis par voie de soumission, et les paiements sont effectués périodiquement pendant la période d'exécution des contrats en utilisant la méthode de la facturation proportionnelle. Lorsqu'un contrat est achevé dans un exercice, la totalité des produits du contrat est considérée comme ayant été gagnée dans cet exercice. Cependant, lorsque la réalisation d'un contrat s'étale sur plusieurs exercices, il est nécessaire d'utiliser une méthode de constatation des bénéfices réalisés pendant la durée du contrat. C'est là que la méthode comptable dite de l'avancement des travaux trouve son utilité. L'entrepreneur, en théorie du moins, utilise cette méthode pour constater les bénéfices se rapportant aux travaux exécutés dans le cadre du contrat au cours de la période en cause et pour les inclure ensuite dans ses produits pour chaque exercice.

[9]            Dans le cas des appelantes, le montant des bénéfices qui devait être constaté et inclus dans les produits pour chaque exercice aux fins des états financiers était calculé à l'aide de la méthode dite des coûts engagés. Suivant cette méthode, les coûts engagés par l'entrepreneur aux fins de l'exécution de chacun des contrats dans chaque exercice sont comparés au coût estimatif total du contrat, ce qui permet d'établir le pourcentage d'avancement des travaux pour la période. Ce pourcentage est ensuite appliqué au montant total des bénéfices que l'entrepreneur prévoit réaliser dans le cadre du contrat pour établir le bénéfice qui doit être constaté relativement à ce contrat pour l'exercice en cause. Les calculs pour les exercices subséquents sont fondés sur des estimations révisées du coût total et du bénéfice total en tenant compte des données cumulatives.

[10]          Pendant la période d'exécution du projet, les appelantes envoient aux maîtres d'ouvrage des factures proportionnelles, qui sont réglées après certification des travaux par l'architecte. Ces factures sont fondées sur une estimation du degré d'avancement des projets établie par les contremaîtres et les superviseurs des appelantes après inspection du chantier. Contrairement à la méthode qui consiste à envoyer une facture une fois les travaux achevés, ni l'envoi d'une facture au maître d'ouvrage, ni la certification des travaux, ni le paiement de la facture ne donne lieu à l'établissement d'un produit gagné. Les produits, et par conséquent les bénéfices, sont constatés à la fin de chaque exercice seulement, à l'aide de la méthode que je viens de décrire.

[11]          En utilisant la méthode comptable de l'avancement des travaux, il se peut que les montants facturés proportionnellement au cours d'une période donnée soient supérieurs à la somme des coûts engagés et des bénéfices censément réalisés au cours de cette période. Cela tient à plusieurs raisons. La soumission peut avoir été structurée de manière à ce que les bénéfices réalisés dans les premières phases du projet soient supérieurs à la moyenne. Il se peut aussi que l'entrepreneur ait facturé au maître d'ouvrage un montant fondé sur une estimation optimiste du degré d'avancement, ce que dans les témoignages on a appelé la surfacturation. Aux fins des présentes, il suffit de savoir qu'à la fin de chacun des exercices 1993 et 1994, les appelantes avaient facturé aux propriétaires des projets de construction en cours des montants qui, additionnés, excédaient le montant total des coûts engagés et des bénéfices constatés relativement à ces projets à la fin des exercices en cause. La différence comprend les montants comptabilisés d'avance, qui, à la fin de l'exercice, sont consignés comme éléments de passif dans les bilans, sous la rubrique " produits comptabilisés d'avance et avances contractuelles ". En prévision des éclaircissements qui seront donnés plus tard, il est important de noter que, même si ce montant est fondé sur les factures qui avaient été envoyées aux clients avant la fin de l'exercice, ces factures n'avaient pas toutes été payées à la fin de la période.

[12]          Les appelantes ont appelé M. Kenneth Sutley à témoigner à titre d'expert relativement à la question de savoir si, aux termes des principes comptables généralement reconnus (PCGR), les montants comptabilisés d'avance qui figurent dans les éléments de passif dans les bilans des appelantes constituent des réserves, des provisions, des prêts ou des avances sur le plan comptable. Compte tenu de la deuxième modification qui a été apportée aux réponses, on lui a également demandé d'indiquer si ces montants sont des surplus. L'intimée a appelé le professeur Leonard Eckel, à qui il a soumis la question suivante :

                                [TRADUCTION]

Dans le bilan de PCL, figure dans les éléments de passif un compte intitulé " produits comptabilisés d'avance et avances contractuelles "; il est évident que ce compte se rapporte aux activités de construction de PCL. Quelle est la nature de ce compte, comment se fait-il qu'il puisse afficher des comptes débiteurs et créditeurs, et de quelle manière ces soldes sont-ils créés et comptabilisés?

[13]          Les deux témoins sont certainement très compétents pour formuler des opinions sur des questions relatives aux principes comptables en général, et aux PCGR en particulier. MM. Sutley et Eckel sont tous deux titulaires d'un MBA et d'un doctorat, le premier de l'Université de Chicago et le second, de l'Université de Michigan. Ils détiennent le titre de comptable agréé depuis plus de 20 ans. M. Sutley a enseigné à l'Université de l'Alberta, et, depuis 1993, il travaille comme comptable et expert-conseil. Le professeur Eckel a plutôt fait carrière dans le domaine de l'enseignement. De 1966 à 1981, il a enseigné à l'Université McMaster. Depuis 1981, il est professeur de comptabilité à l'Université de Waterloo. Les titres de compétence des deux témoins sont essentiellement les mêmes. Selon moi, ils se sont véritablement employés à éclairer la Cour, comme est censé le faire un témoin-expert.

[14]          Dans son témoignage, M. Sutley a renvoyé au Manuel de l'Institut canadien des comptables agréés (ICCA) ainsi qu'à la publication de l'ICCA intitulée Terminology for Accountants. À son avis, le poste " produits comptabilisés d'avance et avances contractuelles " (c'est-à-dire les montants comptabilisés d'avance) ne constitue pas une réserve, une provision, un prêt ou un surplus sur le plan comptable. Pour ce qui est de savoir si c'est une avance, il a précisé ce qui suit dans la partie écrite de son témoignage :

[TRADUCTION]

5.              À mon avis, le poste intitulé " produits comptabilisés d'avance et avances contractuelles ", pris globalement, ne constitue pas une avance sur le plan comptable en vertu des principes comptables généralement reconnus, mais ce n'est pas nécessairement le cas de certains contrats qui sont compris dans le montant total. Voir la partie 5.

[15]          Je n'ai pas l'intention d'examiner son témoignage dans les moindres détails pour ce qui est de l'affirmation selon laquelle les montants comptabilités d'avances pourraient constituer des provisions ou des prêts. En ce qui concerne les provisions, il s'appuie sur la publication Terminology for Accountants. Cet ouvrage ne donne pas de définition du mot prêt, mais M. Sutley a consulté plusieurs dictionnaires, lesquels indiquent tous qu'il doit y avoir une somme d'argent mise à la disposition d'une autre partie, qui a charge de la rembourser. Plus particulièrement, c'est la conclusion tirée par le juge en chef adjoint Christie dans l'affaire A.C. Simmonds & Sons Limited c. M.R.N.[1] . Je considère que cet aspect de l'opinion de M. Sutley est inattaquable. À ce que je sache, les avocats de l'intimée n'ont pas véritablement contesté cette partie du témoignage.

[16]          Au sujet de la définition de réserve, M. Sutley a déclaré ce qui suit :

[TRADUCTION]

Réserve

Dans la publication de l'ICCA intitulée Terminology for Accountants, le terme réserve est défini de la manière suivante :

1.              Les montants affectés à même les bénéfices non répartis et les autres postes du surplus et qui n'ont pas pour objet de constater une obligation réelle ou reconnue ni la dépréciation d'une valeur active, à la discrétion de la direction ou pour donner suite à une disposition de la loi, à la constitution et aux statuts de l'entreprise, à un acte de fiducie ou à un contrat quelconque, à une fin particulière ou générale comme une dépréciation éventuelle des stocks, des éventualités, une expansion et le rachat d'actions ou d'obligations.

2.              En vertu des lois en matière d'impôt sur le revenu, le terme revêt plusieurs sens particuliers.

La deuxième définition n'est d'aucune utilité aux fins de l'opinion que je dois formuler aux termes des principes de comptabilité généralement reconnus.

Au chapitre 3260 du Manuel de l'ICCA, qui porte sur les " réserves ", sont formulées les recommandations suivantes :

1.              Le terme " réserve " doit servir exclusivement à désigner [reprend la définition donnée au paragraphe 1 qui précède]. (par 3260.01)

2.              Les réserves ne doivent pas être créées ni accrues à même les bénéfices de l'exercice. (Par. 3260.02)

3.              Les réserves doivent être rangées sous l'avoir des actionnaires. (Par. 3260.04)

[...]

Pour que les montants comptabilisés d'avance soient considérés comme une réserve sur le plan comptable, il faudrait qu'ils satisfassent à la définition de réserve donnée dans la partie 4. Une appropriation à même les bénéfices non répartis se trouve à réduire les bénéfices non répartis non affectés et à augmenter les bénéfices non répartis qui ont été affectés. En outre, comme il est précisé au chapitre 3400 du Manuel de l'ICCA, les réserves sont à ranger sous l'avoir des actionnaires.

Comme il est indiqué dans la partie 3, les montants comptabilisés d'avance résultent de l'application de la méthode de l'avancement des travaux servant à constater les produits. Ces montants ne sont pas des affectations à même les bénéfices non répartis, ou encore des surplus, comme l'envisage l'ICCA, et ils ont été inclus dans les éléments de passif.

Conclusion — Le poste du passif intitulé " produits comptabilisés d'avance et avances contractuelles " dans le bilan ne constitue pas une réserve sur le plan comptable en vertu des principes comptables généralement reconnus.

Cette conclusion n'a pas été contestée par les avocats de l'intimée. Le professeur Eckel n'a pas non plus formulé d'opinion contradictoire.

[17]          Le témoignage de M. Sutley sur la question de savoir si les montants comptabilisés d'avance constituent des avances comporte deux volets. Selon la publication Terminology for Accountants, un montant reçu au titre d'un contrat, avant l'achèvement des travaux, ou encore, avant la livraison des biens ou des services, est considéré comme une avance sur le plan comptable. Cependant, il faut absolument, aux dires du témoin, que le paiement ait été reçu. M. Sutley conclut son analyse du problème lié à la définition du terme " avance " de la manière suivante :

[TRADUCTION]

L'élément de passif consigné dans le bilan en vertu des PCGR est le montant total de chacun des contrats, dont il existe trois types :

a)              Le contrat dit " conventionnel ", où les produits constatés à la date d'établissement du bilan sont supérieurs aux montants facturés à cette même date. Dans ce genre de contrat, l'excédent ne représente pas des produits comptabilisés d'avance et ne peut donc pas constituer une avance.

b)             Un contrat de type " produits comptabilisés d'avance — comptes clients ", où les montants facturés à la date d'établissement du bilan sont supérieurs aux produits constatés à cette même date, mais où l'excédent est inclus dans les comptes clients parce que le montant en cause n'avait pas été reçu à la date à laquelle le bilan a été dressé. Dans ce genre de contrat, l'excédent représente des produits comptabilisés d'avance, non pas des avances, parce qu'aucun montant d'argent n'a été reçu en excédent des produits constatés.

c)              Un contrat de type " produits comptabilisés d'avance — avances ", où les montants facturés à la date d'établissement du bilan sont supérieurs aux produits constatés à cette même date, et où au moins une portion de l'excédent a été payée par le client. Dans ce type de contrat, la portion payée par le client constitue une avance. Le montant des avances est égal à l'excédent des produits comptabilisés d'avance sur les comptes clients se rapportant au contrat.

En conséquence, il est possible que le total de l'élément de passif consigné dans le bilan englobe des avances se rapportant à des contrats particuliers. Mais cela suffit-il pour conclure que la totalité de l'élément de passif constitue une avance? À mon avis, la réponse est non. Je ne crois pas qu'il soit possible, à la simple lecture du bilan, de qualifier d'avance la totalité des montants comptabilisés d'avance, car alors, on ne tient pas compte des interactions complexes qui doivent exister pour produire des avances et de la nature de l'élément de passif, qui est la somme de trois types de contrats, dont un seul constitue une avance. Si une portion du montant total peut être qualifiée d'avance, nous ne pouvons affirmer avec certitude qu'il y en a une. Selon moi, dans ces circonstances, on devrait se garder de conclure que le montant total constitue une avance.

Conclusion

Je suis d'avis que le poste intitulé " produits comptabilisés d'avance et avances contractuelles " ne constitue pas une avance sur le plan comptable en vertu des principes comptables généralement reconnus; cependant, si chaque contrat est examiné individuellement, il se peut qu'une portion du montant total constitue une avance sur le plan comptable en vertu des principes comptables généralement reconnus.

Utilisation des renseignements relatifs à chacun des contrats

Pacific et Prairie m'ont fourni les annexes ci-jointes, lesquelles indiquent, pour chaque contrat, le montant inclus dans les produits comptabilisés d'avance (les deux premières colonnes) et le montant inclus dans les comptes clients (les trois dernières colonnes). Cette information est utilisée pour faire ressortir les contrats de type " produits comptabilisés d'avance — avances " et pour calculer le montant des avances à la date d'établissement du bilan pour chaque contrat, selon la méthode décrite à l'alinéa c) qui précède.

Les avances ainsi calculées font l'objet d'une écriture de compensation négative dans la dernière colonne, sous la rubrique " solde net ". Le total de tous les contrats affichant des soldes négatifs est également indiqué dans l'annexe.

En s'appuyant sur ces annexes, et après examen de chacun des contrats, on peut dire que les montants de 1 691 295 $ pour l'exercice 1993 et de 1 419 681 $ pour l'exercice 1994 de Pacific, ainsi que le montant de 302 599 $ pour l'exercice 1994 de Prairie constituent des avances sur le plan comptable.

[18]          Le professeur Eckel, sans nul doute en raison de la manière dont la question a été formulée, a examiné la question sous un autre angle dans le cadre de son témoignage. Il s'est surtout employé à décrire l'application de la méthode de l'avancement des travaux aux fins de la constatation des produits. Contrairement à M. Sutley, il ne s'est pas penché sur les éléments de la définition du terme capital énoncée au paragraphe 181.2(3). La portion écrite de son témoignage porte sur la nature des montants comptabilisés d'avance, non pas sur la méthode de calcul de ces montants, comme en témoignent les deux passages reproduits ci-après :

[TRADUCTION]

Avances contractuelles

En théorie, une " avance " englobe les montants que l'entreprise a reçus ou qu'elle recevra avant d'avoir achevé les travaux qui lui donnent droit au paiement des montants prévus. Essentiellement, c'est un paiement effectué par anticipation au titre de travaux qui seront exécutés à une date ultérieure. Les travaux n'ayant pas encore été exécutés, l'avance n'est pas incluse dans les produits dans l'état des résultats; elle est plutôt incluse dans les éléments de passif dans le bilan en conformité avec les PCGR. C'est là une interprétation raisonnable à prime abord : puisque le projet n'est pas terminé, l'entreprise a une " obligation " d'exécution envers le client, ce qui, vraisemblablement, lui occasionnera des coûts et exigera des efforts de sa part, à défaut de quoi il devra rembourser le montant reçu. Une fois les travaux exécutés, l'avance sera enlevée du bilan et incluse dans les produits dans l'état des résultats. En théorie, une avance résulte de la réception d'un bien sur lequel l'entrepreneur ne peut exercer aucun droit en ce qui concerne les coûts engagés ou l'exécution.

Le calcul du montant de la vente peut poser des difficultés. Si le montant total est reçu et qu'une partie se rapporte à des travaux qui n'ont pas encore été exécutés, il faudra alors, pour déterminer le montant de l'avance, calculer le degré d'avancement des travaux dans les faits.

Une avance est un élément de passif.

et aussi le passage suivant :

[TRADUCTION]

Que signifie ce " surplus " ou ce " produit comptabilisé d'avance "? Que peut-on dire des " produits comptabilisés d'avance et des avances contractuelles " consignés par PCL, et du capital utilisé?

Notre analyse a montré qu'il n'existe qu'une manière de définir ce montant " comptabilisé d'avance ", soit comme " l'excédent des montants facturés sur les coûts et les bénéfices constatés en conformité avec les PCGR et la méthode de l'avancement des travaux ".

Quand il y a eu augmentation de l'actif net, soit des produits de l'entreprise, cette augmentation doit être constatée en conformité avec les PCGR. Si l'augmentation est liée à l'exécution d'un contrat à long terme, elle peut être consignée soit comme une avance, soit comme un produit gagné, ou encore, comme un produit comptabilisé d'avance.

·          Si l'augmentation est consignée comme une avance, elle devient alors un élément de passif, qui peut être inclus dans le calcul du capital utilisé.

Si les montants facturés comprennent une avance, celle-ci doit être comptabilisée séparément. Le solde, c'est-à-dire le montant net facturé, sera constaté soit comme un produit gagné, soit comme un produit comptabilisé d'avance.

·          Dans la mesure où le montant net facturé est un produit gagné, ce montant sera inclus dans les produits dans l'état des résultats et les produits nets, puis dans les bénéfices non répartis. Ces derniers sont compris dans l'avoir des actionnaires et dans le capital utilisé.

·          Le solde des montants facturés constitue un produit comptabilisé d'avance; il est égal au solde du montant net facturé après que le produit gagné a été inclus dans l'état des résultats, dans les produits et dans les bénéfices non répartis. Comme il a été précisé précédemment, les produits comptabilisés d'avance sont un élément de passif. À ce titre, ils peuvent donc être inclus dans le calcul du capital utilisé.

Il convient toutefois de noter que l'exposé dont découle cette dernière conclusion est précédé de l'énoncé suivant, à la page 13 :

[TRADUCTION]

Aux fins de la discussion, nous prenons pour acquis que le montant estimatif des produits calculé à l'aide de la méthode de l'avancement des travaux a été établi en conformité avec les PCGR, et que le client a payé les factures. (Je souligne).

[19]          La première de ces hypothèses est correcte. La seconde l'est en partie, mais seulement en ce qui concerne certains des contrats des appelantes à la fin des exercices en cause. La principale faiblesse du témoignage de M. Eckel réside dans les deux dernières phrases, ainsi que dans cette hypothèse. Le professeur Eckel ne fait aucun cas de la définition de capital que l'on trouve au paragraphe 181.2(3); il formule plutôt l'hypothèse que, si le montant est un élément de passif, il peut être " inclus dans le calcul du capital [...] ". Pour tirer cette conclusion, il ne tient pas compte du fait que ce capital est composé de tous les éléments énumérés aux alinéas 181.2(3)a) à g). Les alinéas c), d), e) et f) mentionnent des types particuliers de dettes; cependant, pour l'application de la partie I.3 de la Loi, seules les dettes qui sont expressément mentionnées dans ces dispositions peuvent être incluses dans le capital. La seule de ces dispositions qui pourrait vraisemblablement s'appliquer en l'espèce, selon la preuve, est l'alinéa

c)              les prêts et les avances qui lui ont été consentis à la fin de l'année [...].

[20]          Par conséquent, il n'y a pas de divergence de vues entre M. Sutley et le professeur Eckel sur ce point; les montants comptabilisés d'avance sont des éléments de passif. Le professeur Eckel les inclurait en totalité dans le calcul du capital, pour la simple raison qu'ils sont un élément de passif. Peut-être cela tient-il au fait qu'il suppose à tort que " les clients ont payé les factures ". Il se peut aussi que ce soit parce qu'il fait sienne l'interprétation libérale du terme " capital " que les avocats de l'intimée m'ont exhorté à retenir. Cette interprétation libérale gagne en popularité aux États-Unis, pour l'application de lois dont l'objet, mais non la structure, est comparable à celui de la partie I.3 de la Loi : voir United North & South Development Co. v. Heath[2]; Central Power & Light Co. v. Bullock[3].

[21]          Cependant, ce genre d'affaires ne se présente pas lorsque la législation, par exemple la partie I.3, indique très clairement les éléments de passif qui doivent être inclus dans le calcul du capital. Au paragraphe 181.2(3), le législateur a dressé la liste détaillée des éléments du bilan et en particulier les éléments de passif qui doivent être inclus dans le calcul du capital. Les produits comptabilisés d'avance ne sont pas compris dans cette liste, sauf dans la mesure où ce sont des " avances ". Je ne vois rien dans le témoignage du professeur Eckel qui permette d'affirmer que les montants comptabilisés d'avance qui sont impayés à la fin de l'exercice doivent être considérés comme des avances. Je retiens plutôt l'opinion de M. Sutley, qui est exposée clairement et qui s'appuie sur des publications de l'ICCA faisant autorité en la matière, à savoir que les montants comptabilisés d'avance peuvent être considérés comme des avances seulement après que les factures y ayant donné naissance ont été payées et que ces montants ont par conséquent été reçus. Ce point de vue est également compatible avec la décision rendue par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Oerlikon Aérospatiale Inc. c. La Reine[4] et par la Cour d'appel de l'Ontario dans l'affaire TransCanada Pipelines Ltd. v. Ontario (Minister of Revenue)[5].

[22]          Aux dires des avocats de l'intimée, les montants comptabilisés d'avance devraient, suivant une interprétation libérale du terme surplus, être inclus dans le calcul du capital en vertu de l'alinéa 181.2(3)a) à titre d'" autres surplus ". Son argument serait fondé sur la décision rendue dans l'affaire Upper Lakes Shipping Ltd. v. Ontario (Minister of Revenue)[6]. Dans cette affaire, le juge Potts a conclu que le montant total d'une subvention versée par le gouvernement aurait dû être inclus dans le calcul du capital versé de la société aux fins de la Corporations Tax Act, R.S.O. 1980, c. 97, dans l'année au cours de laquelle il a été reçu. La définition de capital versé que l'on trouve dans cette loi à l'alinéa 53(1)b) englobe pour une corporation [TRADUCTION] " son surplus gagné, son surplus de capital et tout autre surplus ". Le juge Potts s'est appuyé sur une interprétation libérale et non technique du terme pour en arriver à sa décision, laquelle a été annulée en appel. La Cour d'appel de l'Ontario a conclu que, même si les PCGR ne sont pas les seuls principes applicables aux fins de la loi, il n'en demeure pas moins que

[TRADUCTION]

[...] le sens ordinaire et courant de ces termes devrait prendre sa source dans le langage des comptables, non pas dans celui de personnes qui ne participent d'aucune manière à l'établissement des bilans d'entreprise. Les répartiteurs de l'impôt connaissent la terminologie comptable, ainsi que les comptables qui certifient les états financiers des sociétés[7].

Les avocats de l'intimée ont fait valoir que depuis que la Cour suprême du Canada s'est prononcée dans l'arrêt Canderel Limitée c. Canada[8], le jugement du juge Potts doit l'emporter sur celui de la Cour d'appel. Cependant, je ne trouve rien dans l'arrêt Canderel, une affaire qui portait sur le calcul du revenu, qui aurait pu amener la Cour d'appel à tirer une conclusion différente au sujet de l'interprétation d'une disposition qui définit le capital imposable d'une société.

[23]          Je relève également qu'au paragraphe 181(3) de la Loi, le législateur insiste sur l'utilisation d'un bilan préparé en conformité avec les PCGR pour déterminer les valeurs comptables et les autres montants.

181(1) Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente partie.

[...]

181(3)      Pour déterminer la valeur comptable d'un des éléments d'actif d'une société ou tout autre montant en vertu de la présente partie afférent au capital d'une société, à sa déduction pour placements, à son capital imposable et à son capital imposable utilisé au Canada pour une année d'imposition ou afférent à une société de personnes dans laquelle une société a une participation :

                a)             la consolidation et la méthode de comptabilisation à la valeur de consolidation ne peuvent être utilisées;

                b)             sous réserve de l'alinéa a) et sauf disposition contraire de la présente partie, les montants à utiliser sont les suivants :

(i)                    soit ceux qui figurent au bilan présenté aux actionnaires de la société - s'il s'agit d'une société qui n'est ni une compagnie d'assurance à laquelle le sous-alinéa (ii) s'applique, ni une banque - ou aux associés de la société de personnes, ou, si un tel bilan n'est pas dressé conformément aux principes comptables généralement reconnus ou si aucun bilan n'est dressé, ceux qui y figureraient si un tel bilan était dressé conformément à ces principes [...].

(ii)                 

Sauf si une autre disposition de la partie I.3 de la Loi[9] prescrit expressément le contraire, il faut appliquer les PCGR pour déterminer " les montants ". Cela semble être une indication très claire qu'à défaut d'appliquer les PCGR il faut à tout le moins utiliser le " langage des comptables " pour qualifier les montants aux fins de cette partie. Je ne suis pas convaincu que ces montants comptabilisés d'avance pourraient être qualifiés à juste titre de surplus, même en retenant une interprétation libérale du terme. Les deux experts s'entendent pour dire que ce sont des éléments de passif.

[24]          La dernière question à trancher est celle de savoir s'il est nécessaire de décortiquer les éléments du bilan pour déterminer ceux des montants comptabilisés d'avance qui avaient été reçus à la fin de l'exercice et qui, selon le témoignage de l'expert des appelantes, devraient donc être considérés comme des avances et être inclus dans le calcul du capital à ce titre, et ceux qui n'avaient pas été reçus et qui ne doivent donc pas être inclus. Cette question a à peine été abordée dans les plaidoiries.

[25]          Je ne vois pas d'autre façon raisonnable de procéder. D'après le témoignage de M. Sutley, que j'accepte, le répartiteur se doit de procéder de la sorte pour arriver à un résultat fiable. Le libellé du paragraphe 181(3) l'en empêche-t-il? Je ne le crois pas. Dans la mesure où ils se rapportent à la question en litige, les termes utilisés dans cette disposition sont les suivants :

Pour déterminer [...] tout [...] montant en vertu de la présente partie afférent au capital d'une société [...] les montants à utiliser sont [...] ceux qui figurent au bilan [the amounts reflected in the balance sheets] [...] dressés conformément aux principes comptables généralement reconnus [...].

L'utilisation des termes " reflected in the balance sheet " — qui figurent au bilan — dans le texte anglais de la disposition est une indication que le législateur entendait clairement permettre l'examen des divers éléments d'un poste du bilan lorsqu'une partie de ces éléments seulement est visée par la définition de capital énoncée dans la loi. Cela correspond à la situation en l'espèce. Si on concluait que le poste intitulé " produits comptabilisés d'avance et avances contractuelles " ne peut être exclu ou inclus qu'en totalité, on irait à l'encontre de l'intention du législateur d'utiliser les PCGR pour établir les montants en cause. Si le législateur avait voulu qu'il en soit ainsi, il aurait utilisé les termes " appearing on the balance sheet " — consignés dans le bilan. Les montants comptabilisés d'avance qui constituent des avances ne sont pas consignés dans le bilan des appelantes, mais elles y figurent en tant qu'éléments identifiables des montants consignés.

[26]          L'appel de PCL Construction Management Inc. pour l'année d'imposition 1994 sera rejeté. Les autres appels seront admis, et les cotisations seront déférées au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation afin de soustraire du capital les montants se rapportant aux chèques en circulation, que l'intimée a admis à l'audience, et de soustraire les portions des montants comptabilisés d'avance qui n'avaient pas été reçus à la fin de l'exercice pertinent dans chaque affaire.

[27]          À défaut de s'entendre sur l'adjudication des dépens, les avocats peuvent s'adresser au bureau du greffier pour formuler des observations écrites. L'avocate des appelantes doit préparer des ébauches de jugement qu'elle me remettra pour signature après en avoir fait approuver le fond et la forme par les avocats de l'intimée.

Signé à Ottawa, Canada, ce 24e jour de juillet 2000.

" E.A. Bowie "

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme ce 16e jour d'octobre 2001.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Martine Brunet, réviseure



[1]                C.C.I., no 88-1104(IT), 9 novembre 1989, à la page 3 (89 DTC 707, à la page 709).

[2]               78 S.W. (2d) 650.

[3]               696 S.W. 2d 30.

[4]                C.A.F., no A-460-97, 13 avril 1999, aux pages 6 à 9 (99 DTC 5318, aux pages 5323 et 5324).

[5]               [1993] 1 C.T.C. 277, à la page 279.

[6]               [1995] O.J. No. 960.

[7]                Upper Lakes Shipping Ltd. v. Minister of Finance, 98 DTC 6264, à la page 6265.

[8]               [1998] 1 R.C.S. 147 (98 DTC 6100).

[9]                Voir, par exemple, Oerlikon Aérospatiale Inc. c. La Reine, précitée.

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