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Date: 20010221

Dossier: 2000-1232-IT-G

ENTRE :

CANADIAN OCCIDENTAL U.S. PETROLEUM CORPORATION,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifsdu jugement

Le juge en chef adjoint Bowman

[1]            Il s'agit d'appels interjetés à l'encontre de cotisations établies à l'égard de l'appelante pour ses années d'imposition 1994 et 1995. La question en litige est celle de savoir si le paragraphe 17(3) tel qu'il était libellé pendant ces années a pour effet de soustraire l'appelante à l'application du paragraphe 17(1).

[2]            L'article 17 est ainsi rédigé :

                17(1)        Lorsqu'une société résidant au Canada a prêté de l'argent à une personne non-résidente et que le prêt est resté impayé pendant une année ou plus sans que des intérêts sur ce prêt, à un taux raisonnable, aient été inclus dans le calcul du revenu du prêteur, la société est réputée avoir reçu, le dernier jour de chaque année d'imposition où le prêt était impayé, des intérêts sur ce prêt calculés au taux prescrit pour la période de l'année d'imposition où le prêt était impayé.

                (2)            Le paragraphe (1) ne s'applique pas si un impôt a été acquitté sur le montant du prêt en vertu de la partie XIII.

                (3)            Le paragraphe (1) ne s'applique pas si le prêt a été consenti à une filiale contrôlée et s'il est établi que l'argent prêté a été utilisé dans l'entreprise de cette filiale en vue de tirer un revenu.

[3]            Une filiale contrôlée est définie comme suit à l'article 248 :

                " filiale contrôlée " Société dont plus de 50 % du capital-actions émis (ayant plein droit de vote en toutes circonstances) appartient à la société dont elle est la filiale.

[4]            Le paragraphe 17(1) fait partie, sous une forme ou une autre, de la loi canadienne de l'impôt sur le revenu depuis 1934. Le paragraphe 17(3) a été introduit dans la Loi de l'impôt sur le revenu en 1951.

[5]            Le problème en un mot est le suivant : en 1988, l'appelante a consenti un prêt sans intérêt à une filiale à cent pour cent non-résidente et a renouvelé ce prêt en 1993. La filiale a investi l'argent dans son entreprise tout au long de la période. Le 15 novembre 1994, les actions de la filiale ont été transférées à une société soeur de sorte que l'emprunteur non-résident a cessé d'être une filiale contrôlée de l'appelante à partir de cette date. Le ministre a établi une cotisation au motif que l'exception du paragraphe 17(3) a cessé de s'appliquer à ce moment.

[6]            L'appelante prétend que la date pertinente pour déterminer la situation de l'emprunteur correspond au moment où le prêt a été consenti. Le ministre affirme qu'un critère continu doit être appliqué tout au long de la période pendant laquelle le prêteur veut que l'exception s'applique.

[7]            L'exposé conjoint des faits est le suivant :

                [TRADUCTION]

1.              L'appelante était une société constituée en vertu de la Business Corporations Act de l'Alberta et était, tout au long de la période allant du 31 mai 1988 au 30 novembre 1995, une société de portefeuille dont l'établissement était situé au 635, 8e Avenue S.O. à Calgary (Alberta).

2.              L'appelante était une filiale à cent pour cent de Canadian Occidental Petroleum Ltd. (" COPL ") jusqu'au 30 novembre 1995, et Canadian Occidental International Petroleum Corporation (" IPC ") était une société dont toutes les actions ordinaires étaient détenues par COPL jusqu'au 1er décembre 1995.

3.              Pendant toute la période pertinente, l'appelante, IPC et COPL étaient des " sociétés canadiennes imposables " au sens du paragraphe 89(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la " Loi ").

4.              Pendant toute la période pertinente jusqu'au 15 novembre 1994, CanadianOxy Holdings B.V. (" B.V. ") résidait aux Pays-Bas et était une filiale à cent pour cent de l'appelante en raison du fait que cette dernière détenait toutes les actions ordinaires émises et en circulation et comportant en toutes circonstances plein droit de vote. En conséquence, BV était une filiale contrôlée de l'appelante, au sens du paragraphe 248(1) de la Loi, jusqu'au 15 novembre 1994.

5.              Le 31 mai 1988 ou vers cette date, l'appelante (alors appelée Canadian Occidental Services Ltd.) a consenti un prêt d'une durée de cinq ans (le " prêt ") et d'un montant de 67 547 200 $US à BV. Le 31 mai 1988, BV a émis un billet à ordre non productif d'intérêts de 67 547 200 $US (le " billet ") en faveur de l'appelante.

6.              À l'échéance du billet le 31 mai 1993, BV a de nouveau émis le billet en faveur de l'appelante et l'a modifié de sorte qu'il était remboursable sur avis de deux jours. Le prêt est demeuré impayé tout au long de la période allant du 31 mai 1988 au 30 novembre 1995.

7.              L'argent prêté par l'appelante à BV a été investi dans l'entreprise de prêt d'argent de cette dernière en vue d'en tirer un revenu tout au long de la période allant du 31 mai 1988 au 30 novembre 1995.

8.              Le 15 novembre 1994, en raison de la réorganisation du groupe de compagnies de COPL, l'appelante a transféré ses actions ordinaires de BV à IPC en vertu du paragraphe 85(1) de la Loi en échange d'actions privilégiées de catégorie B d'IPC. Du 15 novembre 1994 au 30 novembre 1995, l'appelante détenait toutes les actions privilégiées de catégorie B émises et en circulation d'IPC qui à son tour détenait toutes les actions ordinaires de BV. En conséquence, BV était une " société étrangère affiliée contrôlée " de l'appelante au sens du paragraphe 17(15) tout au long de la période pertinente.

9.              Le 30 novembre 1995, l'appelante a fusionné avec IPC et a continué sous le nom d'IPC. Le 1er décembre 1995, IPC a été liquidée et fondue dans COPL, ce qui fait que BV est devenue une filiale contrôlée de COPL.

10.            Aucune taxe d'un montant du prêt n'a été payée en vertu de la partie XIII de la Loi.

11.            Le 26 août 1999, le ministre du Revenu national a établi une nouvelle cotisation à l'égard de l'appelante pour ses années d'imposition 1994 et 1995 au motif que le paragraphe 17(1) de la Loi s'appliquait à elle, considérant qu'elle était réputée avoir reçu des intérêts d'un montant de 734 144 $ et de 5 752 312 $ à l'égard des années d'imposition 1994 et 1995 respectivement et que le paragraphe 17(3) ne s'appliquait pas parce que BV n'avait pas été une filiale contrôlée de l'appelante du 15 novembre 1994 au 1er décembre 1995 et que l'argent prêté n'avait pas été investi par une " filiale contrôlée " de l'appelante dans son entreprise en vue d'en tirer un revenu pendant cette période.

[8]            Il est manifeste que du 15 novembre 1994 au 30 novembre 1995, BV n'était pas une filiale contrôlée de l'appelante.

[9]            Selon l'intimée, la société non résidente doit être une filiale contrôlée tout au long de la période pour laquelle l'exception du paragraphe 17(3) est invoquée.

[10]          Je vais présenter ce qui selon moi forme le fondement de cet argument, qui a été exprimé succinctement par Me Plourde. Il a commencé avec le point inattaquable selon lequel le " sens ordinaire " des mots dans une loi doit être déterminé dans le contexte où ces mots figurent, et il s'appuie sur la déclaration que le juge Binnie a faite dans un jugement dissident dans l'affaire Will-Kare Paving & Contracting c. La Reine, [2000] 1 R.C.S. 915, à la page 940.

[11]          À partir de là, il continue en affirmant qu'il faut lire le paragraphe 17(3) de concert avec le paragraphe 17(1).

[12]          Il est difficile de ne pas souscrire à ces affirmations.

[13]          Ensuite, il se penche sur l'affaire La Reine c. Bronfman Trust, [1987] 1 R.C.S. 32 (87 DTC 5059) dans laquelle le juge en chef Dickson a interprété l'alinéa 20(1)c) de la Loi de l'impôt sur le revenu et a soulevé la distinction faite entre l'utilisation originale et l'utilisation actuelle de l'argent emprunté avant de déclarer que c'est l'utilisation actuelle qu'on doit retenir pour déterminer si les intérêts sont déductibles en vertu de l'alinéa 20(1)c). À partir de cela, il établit une analogie avec l'utilisation de l'argent emprunté par la filiale en vertu du paragraphe 17(3) et affirme que si un critère continu ou actuel s'applique en vertu de l'alinéa 20(1)c), un critère continu ou actuel devrait s'appliquer en vertu du paragraphe 17(3). Je ne propose pas de décider du bien-fondé de ce lien dans le raisonnement de l'intimée. Premièrement, l'article 17 a été modifié et deuxièmement, l'alinéa 20(1)c) et l'article 17 ont des objets très différents. Le fait de tenter d'interpréter une disposition d'une loi fiscale en la comparant avec une autre est une entreprise précaire et peu sûre.

[14]          Même si j'acceptais la position de l'intimée selon laquelle l'interprétation de l'alinéa 20(1)c) relative au critère continu et actuel nécessitait qu'une interprétation semblable soit donnée à l'utilisation de l'argent aux termes du paragraphe 17(3), il ne s'ensuit pas à mon avis, comme le suggère l'intimée, que l'autre condition du paragraphe 17(3) concernant la situation de la filiale doive recevoir une interprétation semblable.

[15]          La règle fondamentale qu'un tribunal doit suivre en interprétant une loi est qu'il faut lire les mots et, s'ils sont raisonnablement compréhensibles, il n'est pas nécessaire d'aller plus loin. J'ai fait face à un problème d'interprétation du mot " use " dans l'affaire Glaxo Wellcome Inc. c. La Reine, C.C.I., no 93-1327(IT)G, 4 janvier 1996 (96 DTC 1159) (confirmé C.A.F., no A-114-96, 8 octobre 1998 (98 DTC 6638); autorisation de pourvoi devant la Cour suprême du Canada refusée), dans laquelle j'ai suivi l'observation du juge en chef Fauteux dans l'affaire Ville de Montréal c. ILGWU Center et al., [1974] R.C.S. 59, à la page 66 où il a déclaré :

                Le Législateur est présumé vouloir dire ce qu'il exprime. Et il n'y a pas lieu de recourir à l'interprétation lorsqu'un texte est clair, [...]

[16]          En l'espèce, le libellé est parfaitement clair :

if the loan was made to a subsidiary controlled corporation ...

[17]          En français, les mots sont les suivants :

si le prêt a été consenti à une filiale contrôlée

[18]          Le français et l'anglais sont des instruments linguistiques capables d'une grande précision d'expression. Les rédacteurs parlementaires sont censés maîtriser l'une ou l'autre de ces langues ou les deux et exprimer ce qu'ils veulent dire et vouloir dire ce qu'ils expriment.

[19]          Aucune des conditions, comme l'ambiguïté, l'incohérence ou l'absurdité, qui pourraient justifier l'application des règles d'interprétation ayant été élaborées dans d'autres affaires, n'existent en l'espèce. La Cour, à mon avis, n'est pas justifiée d'ajouter les mots [TRADUCTION] " et tout au long de la période au cours de laquelle le prêt était impayé, l'emprunteur a continué d'être une filiale contrôlée ". Le fait de combler judiciairement ce qui est perçu comme une lacune législative afin de réaliser un objectif politique non précisé constitue une usurpation par la Cour de la fonction législative, et cette usurpation n'est pas acceptable.

[20]          Dans l'affaire Friesen c. La Reine, [1995] 3 R.C.S. 103 (95 DTC 5551), le juge Major, s'exprimant pour la majorité de la Cour suprême du Canada, a refusé de voir dans la définition du terme " inventaire " des mots qui ne s'y trouvaient pas. Il a déclaré aux pages 120 et 121 (DTC : à la page 5556) :

                L'intimée demande à notre Cour d'interpréter la définition du terme " inventaire " comme si elle était ainsi formulée :

" inventaire " [pour une année d'imposition] signifie la description des biens dont le prix ou la valeur entre dans le calcul du revenu qu'un contribuable tire d'une entreprise pour [l']année d'imposition;

Le principal problème que pose l'interprétation préconisée par l'intimée découle du fait que les mots entre crochets ne figurent pas dans la définition de la Loi de l'impôt sur le revenu. L'ajout de ces mots à la définition a pour effet de changer considérablement le sens de la définition. Selon un principe fondamental en matière d'interprétation des lois, un tribunal ne devrait pas accepter une interprétation qui nécessite l'ajout de mots, lorsqu'il existe une autre interprétation acceptable qui ne requiert aucun ajout de cette nature. L'ajout de mots dans une définition qui figure dans une loi est encore moins acceptable lorsque les termes qui doivent être ajoutés figurent dans plusieurs autres définitions de cette même loi. Si le législateur avait voulu exiger que le bien entre dans le calcul du revenu au cours d'une année particulière, de manière à constituer un bien figurant dans un inventaire pour cette même année, il aurait ajouté la phraséologie nécessaire pour exprimer clairement cette volonté.

[21]          Le raisonnement dans cette affaire est également pertinent en l'espèce.

[22]          Si le législateur souhaite ajouter à la version anglaise une autre condition contenant des mots comme " throughout the period ", [TRADUCTION] " tout au long de la période ", " pendant toute la période ", il sait certainement comment s'y prendre. La liste suivante contient les dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu qui comportent précisément ces mots :

1.              division 6(6)a)(i)(A)

2.              alinéa 12(11)i) — sous la définition de " contrat de placement "

3.              paragraphe 13(25) — préambule

4.              alinéa 13(25)b)

5.              alinéa 40(4)a)

6.              alinéa 66(11.4)b)

7.              paragraphe 66(11.5) — préambule

8.              alinéa 66(11.5)b)

9.              alinéa 89(1)b) — sous la définition de " société canadienne "

10.            alinéa 89(2)b)

11.            paragraphe 108(1) — sous la définition de " fiducie au profit du conjoint antérieure à 1972 "

12.            sous-alinéa 110.6(1)a)(vi) — sous la définition de " bien agricole admissible "

13.            sous-alinéas 110.6(1)e)(i) et f)(i) — sous la définition de " action admissible de petite entreprise "

14.            paragraphe 112(2)

15.            alinéa 131(8.1)a)

16.            alinéa 132(7)a)

17.            alinéa 138.1(1)a)

18.            paragraphe 146(4)

19.            paragraphe 146.1(5)

20.            paragraphe 146.3(3)

21.            alinéa 147.1(3)a)

22.            alinéa 149(1)o.1)

23.            sous-alinéa 149(1)o.2)(ii.1)

24.            paragraphe 149(5)

25.            sous-alinéa 187.3(2)f)(i)

26.            alinéa 189(3)b)

27.            alinéa 250(1)d.1)

28.            alinéa 260(1)c) — sous la définition de " mécanisme de prêt de valeurs mobilières "

[23]          Cela suffit pour trancher la question. Toutefois, deux autres points soulevés par les avocats de l'appelante méritent un bref commentaire. Le premier est qu'en 1998, l'article 17 a été considérablement modifié. L'un des changements visait à prévoir explicitement les critères relatifs à la situation et à l'utilisation continues qui, selon l'intimée, sont implicites dans le paragraphe 17(3) pendant les années en litige.

[24]          Le nouveau paragraphe 17(8) se lit en partie comme suit : (les italiques sont de moi)

                (8)            Le paragraphe (1) ne s'applique pas à une société résidant au Canada pour une année d'imposition de celle-ci relativement à une somme qu'une personne non-résidente lui doit si cette personne est une société étrangère affiliée contrôlée de la société tout au long de la période de l'année pendant laquelle la somme est due et s'il est établi que cette somme :

a)             soit est attribuable à un prêt ou à une avance d'argent consenti à la société affiliée et dont elle s'est servi, tout au long de la période ayant commencé au moment où le prêt ou l'avance a été consenti et s'étant terminée à la fin de l'année ou, s'il est antérieur, au moment où la somme a été remboursée, à l'une des fins suivantes :

(i)             tirer un revenu [...]

[25]          En ce qui concerne la prétention selon laquelle je devrais me servir de la mesure législative ultérieure comme d'un outil d'interprétation de la loi antérieure, je réponds brièvement que l'article 45 de la Loi d'interprétation l'interdit. Il est libellé comme suit :

                45(1)        L'abrogation, en tout ou en partie, d'un texte ne constitue pas ni n'implique une déclaration portant que le texte était auparavant en vigueur ou que le Parlement, ou toute autre autorité qui l'a édicté, le considérait comme tel.

                (2) La modification d'un texte ne constitue pas ni n'implique une déclaration portant que les règles de droit du texte étaient différentes de celles de sa version modifiée ou que le Parlement, ou toute autre autorité qui l'a édicté, les considérait comme telles.

                (3)            L'abrogation ou la modification, en tout ou en partie, d'un texte ne constitue pas ni n'implique une déclaration sur l'état antérieur du droit.

                (4)            La nouvelle édiction d'un texte, ou sa révision, refonte, codification ou modification, n'a pas valeur de confirmation de l'interprétation donnée, par décision judiciaire ou autrement, des termes du texte ou de termes analogues.

[26]          L'examen le plus approfondi de la règle figure dans l'affaire Mountain Park Coals Limited v. Minister of National Revenue, [1952] Ex.C.R. 560. Le droit y est bien déterminé sur ce point. En effet, le juge Iacobucci dans l'affaire Ikea Ltd. c. Canada, [1998] 1 R.C.S. 196, à la page 208, a considéré qu'il était évident que la loi ultérieure ne pouvait avoir aucun poids dans l'interprétation d'une disposition antérieure.

[27]          Outre l'article 45 de la Loi d'interprétation et de la jurisprudence portant sur ce point, des raisons convaincantes empêchent d'utiliser une loi ultérieure comme outil d'interprétation. Différentes personnes examinant la même modification ultérieure pourraient en venir à une conclusion tout à fait opposée quant à son effet. Une personne pourrait tirer la conclusion selon laquelle le législateur ne faisait que rendre explicite ce qui a toujours été implicite. Une autre pourrait conclure qu'il cherchait à corriger des faiblesses présentes dans la loi antérieure. Une troisième pourrait en venir à la conclusion que le législateur avait l'intention de modifier la loi. Ces incertitudes font en sorte que la loi ultérieure constitue un guide d'interprétation très peu fiable.

[28]          Les dispositions du nouvel article 17 méritent d'être examinées si ce n'est pas pour une raison autre que de prendre connaissance des différents styles de rédaction dans les années 50 et 90. L'ancien article 17 était clair et bref. Il est présenté dans sa totalité ci-dessus. Le nouvel article 17 compte quinze paragraphes, dont quatre règles anti-évitement, et s'étale sur six colonnes.

[29]          Le deuxième point concerne l'interprétation faite par le ministère. Dans une interprétation technique publiée le 17 avril 1991, le ministère du Revenu national a déclaré :

                                [TRADUCTION]

Le ministère est d'avis que le paragraphe 17(1) envisage un critère annuel et continu pour les besoins du calcul des intérêts réputés reçus par la société prêteuse en ce qui concerne le prêt consenti à une personne non résidente. Nous sommes également d'avis que le paragraphe 17(3) ne peut être interprété indépendamment du paragraphe 17(1). En conséquence, dans la détermination de la question de savoir si le paragraphe 17(3) de la Loi suspend l'application du paragraphe 17(1) pour une année d'imposition en particulier, l'emprunteur doit être une filiale contrôlée au moment où le prêt est consenti et il est nécessaire de déterminer annuellement si, pendant l'année, l'argent prêté a continué d'être investi dans l'entreprise de la filiale en vue de tirer un revenu et si, pendant l'année, l'emprunteur est demeuré une " filiale contrôlée ".

[30]          La Cour n'est pas liée par la pratique du ministère même s'il n'est pas rare de l'examiner pour voir si elle peut être utile pour résoudre un doute : Nowegijick c. La Reine, [1983] 1 R.C.S. 29, aux pages 36 et 37 (83 DTC 5041, à la page 5044). J'ajouterais comme corollaire que la pratique du ministère peut être utile pour résoudre un doute en faveur d'un contribuable. On ne pourrait justifier son utilisation comme moyen de résoudre un doute en faveur du ministère même qui a élaboré cette pratique.

[31]          La partie de l'interprétation technique que j'ai citée ci-dessus représente, bien entendu, l'interprétation que j'ai rejetée. Ce qui est plutôt intéressant et quelque peu incohérent est le fait que, dans une autre partie du document, le ministère applique à la situation de la filiale ce même critère du moment qu'il a rejeté ici. Il examinait la situation où une filiale étrangère devient par fusion une filiale contrôlée de la société fusionnée. Le commentaire du ministère était le suivant :

                                [TRADUCTION]

De plus, comme la fusion a eu pour conséquence que U.S. Co est devenue une filiale d'Amalco, on pourrait avoir tendance à examiner la disposition d'allègement du paragraphe 17(3). Toutefois, en l'absence d'une disposition semblable au paragraphe 87(7) permettant de considérer qu'Amalco a consenti le prêt original, puisque U.S. Co n'était pas une filiale contrôlée au moment où le prêt a été consenti, Amalco/Canco continuerait d'être soumise à l'application du paragraphe 17(1).

[32]          Tout cela est intéressant mais très peu pertinent à l'égard de ce qui doit être décidé en l'espèce. Ma seule observation est que si une personne cherche la cohérence parfaite dans l'interprétation administrative d'une loi fiscale, elle risque d'être déçue.

[33]          Les appels sont admis, avec dépens, et les cotisations pour les années d'imposition 1994 et 1995 sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations en tenant compte du fait que le paragraphe 17(3) s'appliquait au prêt consenti par l'appelante à CanadianOxy Holdings B.V. pendant ces années.

Signé à Toronto, Canada, ce 21e jour de février 2001.

" D. G. H. Bowman "

J.C.A.

Traduction certifiée conforme ce 31e jour d'août 2001.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Isabelle Chénard, réviseure

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

2000-1232(IT)G

ENTRE :

CANADIAN OCCIDENTAL U.S. PETROLEUM CORPORATION,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appels entendus le 15 février 2001 à Ottawa (Ontario), par

l'honorable juge en chef adjoint D. G. H. Bowman

Comparutions

Avocats de l'appelante :              Me Roger Taylor

                                                Me Edward Rowe

Avocats de l'intimée :                 Me Paul Plourde

                                                Me Catherine Letellier de St-Just

JUGEMENT

          Il est ordonné que les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1994 et 1995 soient admis, avec dépens, et que les cotisations soient déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations en tenant compte du fait que le paragraphe 17(3) s'appliquait au prêt consenti par l'appelante à CanadianOxy Holdings B.V. pendant ces années.


Signé à Toronto, Canada, ce 21e jour de février 2001.

" D. G. H. Bowman "

J.C.A.

Traduction certifiée conforme

ce 31e jour d'août 2001.

Isabelle Chénard, réviseure


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