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Date: 20010316

Dossier: 2000-635-IT-I

ENTRE :

GEOFFREY HEWETT,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifsdu jugement

Le juge Bell, C.C.I.

QUESTION :

[1]            La question telle qu'elle a été formulée dans la réponse à l'avis d'appel est celle de savoir si l'appelant a le droit de déduire pour son année d'imposition 1996 sa part (soit 16 667 $) des pertes que la société en commandite a subies. Au cours de l'audience, l'appelant a déclaré, relativement aux hypothèses de fait du ministre, qu'il souscrivait à l'hypothèse suivante :

                                [TRADUCTION]

[...] l'appelant était l'un des trois associés d'une société en commandite, connue sous le nom de Three Buoys Vacations BVI Limited Partnership #4 (la " société "), qui a participé à l'exploitation d'une entreprise de location de caravanes flottantes dans les îles Vierges britanniques.

Toutefois, selon le témoignage de l'appelant en contre-interrogatoire, il n'y avait pas de société officielle aux termes de la loi. Il a déclaré que ses comptables avaient approuvé cette façon de procéder.

[2]            En 1997, l'appelant a assisté à une présentation de Three Buoys[1], et on lui a remis un état financier type. Il indiquait que l'affrètement d'autoyachts dans un centre de villégiature des îles Vierges britanniques produirait, à un taux d'utilisation de 46 p. 100, un profit au cours de la sixième année, lequel augmenterait chacune des neuf années suivantes.

[3]            L'appelant a acheté avec deux autres messieurs un bateau pour 199 500 $. Cet achat a été effectué au moyen d'un acompte de 12 000 $, chacun versant 4 000 $, et d'un prêt de 187 500 $ accordé par la Banque Royale du Canada. L'appelant a indiqué dans son témoignage que la banque avait émis un billet à ordre vierge payable sur demande de 207 000 $ le 27 janvier 1988 et avait envoyé aux trois acheteurs une lettre indiquant que le capital s'élevait à 207 000 $. Le groupe s'est vivement opposé à cette procédure. Il a reçu une lettre de la banque, datée du 12 février 1988, où l'on peut lire ce qui suit :

                                [TRADUCTION]

Veuillez prendre note que nous avons reçu un chèque d'un montant de 19 500 $ de Three Buoys et l'avons imputé à votre prêt.

À titre d'information, nous indiquons les détails de cette opération :

                Montant principal                                 187 500 $

[...]

[4]            Selon le témoignage de l'appelant, la banque a violé l'entente en avançant l'argent à Three Buoys, l'un de ses clients, avant la conclusion de la vente du bateau. Il soutenait que la banque n'avait pas divulgué les problèmes éprouvés par Three Buoys dont elle avait connaissance, notamment le fait que ces problèmes avaient incité la banque à placer quelqu'un au sein de cette compagnie afin de la superviser. Il a indiqué dans son témoignage que la banque avait fait mettre Three Buoys sous séquestre après que le groupe eut pris l'engagement d'investissement. Il a également déclaré qu'ils poursuivaient la banque pour manquement à son obligation fiduciaire.

[5]            L'appelant a indiqué dans son témoignage qu'ils avaient effectué des versements d'intérêt de 2 000 $ par mois pendant 15 mois. Il a également déclaré que la banque avait, en 1989, saisi le bateau pour le vendre 115 000 $ et avait, au début de cette même année, fait mettre Three Buoys sous séquestre. Il a indiqué que des avocats et des comptables, au nom des trois investisseurs, avaient examiné l'état financier type et avaient approuvé leur investissement.

[6]            L'appelant a déclaré que la réclamation de la banque contre le trio, qui était de 150 000 $, avait été réglée en 1996 pour 50 000 $, la part de l'appelant s'élevant à 16 667 $. Il a indiqué que, sur les conseils de son comptable, il avait déclaré ce montant à titre de perte finale en 1996. Il n'a formulé aucune observation à cet égard.

[7]            L'avocate de l'intimée a soutenu que le montant de 16 667 $ représentait une perte en capital de société, puisque l'appelant avait investi dans la société et avait, lorsque cette dernière avait cessé d'exister, subi cette perte. Comme argument subsidiaire, l'avocate a fait valoir que, si la Cour ne concluait pas qu'il y avait une perte en capital, il n'y avait pas, en tout état de cause, d'attente raisonnable de profit. Elle a déclaré que l'entreprise n'a jamais démarré, qu'il n'y a pas eu de profit, ni de revenu, que l'appelant s'est fondé sur des renseignements hypothétiques, et elle a fait référence à un certain nombre d'affaires traitant du concept de l'attente raisonnable de profit.

ANALYSE ET CONCLUSION :

[8]            Rien dans la preuve n'indique que la société de l'appelant, s'il y en a eu une, a cessé d'exister ou à quel moment elle a cessé d'exister. L'avocate n'a fait aucune observation sur le témoignage de l'appelant selon lequel il n'y avait pas de société officielle, ce qui soulevait un doute important pour ce qui est de savoir s'il était effectivement un associé. Il importe peu de savoir si la perte en cause représentait la part de l'appelant d'une perte de société ou si elle lui était personnelle en tant que particulier participant à l'activité.

[9]            Je n'ai aucun doute au sujet du fait que l'appelant a participé à une entreprise. Il avait vu les prévisions de l'état financier type et il a pris la décision de donner suite à ce projet après avoir obtenu l'approbation de professionnels. Par conséquent, le critère de l'" attente raisonnable de profit " ne s'applique pas en l'espèce.

[10]          Le coût du bateau, le produit de la disposition et les résultats financiers sont les suivants :

                Coût                                                        199 500 $

                Produit de la vente                                115 000 $

                Solde                                                       84 500 $

[11]          Le montant de 50 000 $ payé par le trio ne se rapporte qu'au remboursement du prêt bancaire et n'a aucun effet sur le solde susmentionné. Selon le paragraphe 20(16) de la Loi de l'impôt sur le revenu, lorsque, à la fin d'une année d'imposition, un contribuable a une " fraction non amortie du coût en capital " au titre des biens amortissables d'une catégorie prescrite et qu'il ne possède plus de biens de cette catégorie :

dans le calcul de son revenu pour l'année [...] il doit déduire [...]

la fraction non amortie du coût en capital. Le bateau a été vendu en 1989[2].

[12]          Le paragraphe 20(16) indique qu'il " doit déduire " la fraction non amortie du coût en capital. En conséquence, il y eu perte finale relativement au bateau en 1989 et non en 1996. Si la perte finale entraîne pour l'appelant une perte autre qu'une perte en capital en 1989, celle-ci peut être reportée en vertu de l'article 111 à son année d'imposition 1996. Aucune preuve à cet égard n'a été présentée.

[13]          L'appel est admis afin de prévoir une perte finale de 28 166 $ (soit le tiers du montant de 84 500 $) pour l'année d'imposition 1989 de l'appelant. Bien que cette année-là ne soit pas en litige, cette perte ouvre droit à une déduction en 1996, l'année en litige.

Signé à Ottawa, Canada, ce 16e jour de mars 2001.

" R. D. Bell "

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme ce 5e jour de septembre 2001.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Philippe Ducharme, réviseur

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

2000-635(IT)I

ENTRE :

GEOFFREY HEWETT,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 1er décembre 2000 à Toronto (Ontario), par

l'honorable juge R. D. Bell

Comparutions

Pour l'appelant :                         l'appelant lui-même

Avocate de l'intimée :                 Me Sointula Kirkpatrick

JUGEMENT

          L'appel de la nouvelle cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1996 est admis dans la mesure où l'appelante a le droit de déduire, pour son année d'imposition 1996, le montant approprié de toute perte autre qu'une perte en capital découlant d'une perte finale de 28 166 $ subie au cours de son année d'imposition 1989, et la nouvelle cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation suivant les motifs qui précèdent.

Signé à Ottawa, Canada, ce 16e jour de mars 2001.

" R. D. Bell "

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour de septembre 2001.

Philippe Ducharme, réviseur




[1]               Three Buoys Houseboat Charters Ltd., dont l'entreprise, par elle-même ou une ou des compagnies liées, consistaient en la construction et en l'affrètement de caravanes flottantes.

[2]           Il n'y avait aucune preuve que l'appelant avait d'autres biens de cette catégorie. Si une telle preuve avait existé, l'intimée l'aurait certainement présentée.

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