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Date: 20010817

Dossier: 2001-797-GST-I

ENTRE :

LAWRENCE DIMARIA,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifsdu jugement

Le juge Hamlyn, C.C.I.

[1]            L'appelant n'a pas déclaré ni versé un montant de 6 806,03 $ au titre de la taxe sur les produits et services ( « TPS » ) percevable sur la vente de trois camions. Par voie d'avis de (nouvelle) cotisation portant le numéro 00000010158 et daté du 22 juin 1999, le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a fixé comme suit l'obligation de l'appelant en matière de TPS pour les périodes de déclaration trimestrielle allant du 1er janvier 1996 au 31 mars 1998 :

[TRADUCTION]

Redressements de TPS                                                                                         6 806,03 $

Redressements de crédits de taxe sur les intrants                                          2 058,48

Total des redressements pour la période de cotisation                                   8 864,51

Pénalité                                                                                                                    1 583,92

Intérêts                                                                                                                    1 066,40

Autre pénalité                                                                                                      1 701,51

Montant dû                                                                                                          13 216,34 $

[2]            L'appelant, M. Lawrence DiMaria, interjette appel contre la nouvelle cotisation du ministre quant à son obligation en matière de TPS pour les périodes de déclaration trimestrielle allant du 1er janvier 1996 au 31 mars 1998, nouvelle cotisation dans laquelle le ministre exigeait que l'appelant paie de la TPS sur la vente de trois camions.

[3]            L'appelant a admis au procès certaines des hypothèses de la réponse à l'avis d'appel invoquées par l'intimée :

[TRADUCTION]

a)              pendant toute la période pertinente, une entreprise de transport, par camion notamment, était exploitée par l'appelant (l' « entreprise » );

b)             pendant toute la période pertinente, l'exercice de l'entreprise prenait fin le 31 décembre aux fins de la TPS;

c)              pendant toute la période pertinente, l'appelant effectuait des fournitures taxables dans le cadre de ses activités commerciales;

d)             en 1993, l'appelant avait acheté à Mercedes-Benz Canada Inc. ( « MBCI » ) trois camions devant être utilisés dans l'entreprise : un Kenworth de 1989, un Freightliner de 1994 et un Freightliner de 1991;

e)              en juin 1996, l'appelant a vendu le Kenworth de 1989 à Camions Freightliner Trucks Montreal pour 21 500 $, plus 1 505 $ de TPS, soit un prix total de vente de 23 005 $;

f)              à la demande de l'appelant, Camions Freightliner Trucks Montreal a payé 15 271,27 $ à l'appelant et 7 733,33 $ à MBCI, soit en tout 23 005 $;

g)             en 1996, l'appelant a en outre vendu le Freightliner de 1994 à East West Fashion Inc. pour 46 729 $, plus 3 271,03 $ de TPS, soit un prix total de vente de 50 000 $; [Remarque : la preuve présentée par l'appelant au sujet de cette hypothèse était que de la TPS n'était pas incluse.]

h)             à la demande de l'appelant, East West Fashion Inc. a payé 41 717,41 $ à MBCI et 8 282,59 $ à L & DD Trucking, soit en tout 50 000 $;

i)               en août 1996, l'appelant a vendu le Freightliner de 1991 à Gill Motors Inc. pour 29 000 $, plus 2 030 $ de TPS, soit un prix total de vente de 31 030 $;

j)               à la demande de l'appelant, Gill Motors Inc. a payé 14 494,70 $ à MBCI et 16 535,30 $ à Larry DiMaria, soit en tout 31 030 $;

k)              MBCI n'a pas saisi les trois camions ou n'en a pas repris possession en acquittement de la totalité ou d'une partie d'une dette ou obligation de l'appelant envers elle.

POSITION DE L'APPELANT

[4]            Dans son avis d'appel, adopté comme faisant partie de la preuve qu'il a présentée au procès, l'appelant dit qu'il a vendu trois camions pour éviter un désastre financier. Il y dit en outre que, autant qu'il sache, il n'a pas reçu de TPS à l'égard de l'une quelconque des trois opérations, de sorte qu'il n'a pas versé de TPS à l'égard de ces trois opérations[1]. L'appelant affirme en outre que, si de la TPS était incluse dans le solde relatif à chaque camion, c'est MBCI qui devrait être tenue de la payer, car c'est elle qui a perçu le solde.

POINTS EN LITIGE

[5]            Premièrement, il s'agit de déterminer si le ministre a à bon droit fixé à l'appelant de la TPS sur la vente des trois camions, ce qui dépend de la question de savoir si l'appelant a effectué une fourniture taxable en vendant les trois camions.

[6]            Deuxièmement, il s'agit de déterminer si le ministre a à bon droit imposé à l'appelant des pénalités pour faute lourde, ce qui dépend de la question de savoir si l'appelant a agi sciemment ou a commis une « faute lourde » en ne percevant pas et en ne versant pas de TPS à l'égard des trois opérations.

CADRE LÉGISLATIF

[7]            Les dispositions législatives applicables en matière de fournitures taxables sont les suivantes :

141. (1) Pour l'application de la présente partie, la consommation ou l'utilisation d'un bien ou d'un service par une personne, sauf une institution financière, est réputée se faire en totalité dans le cadre de ses activités commerciales si elle se fait presque en totalité dans ce cadre.

141.1 (1) Pour l'application de la présente partie :

a) la fourniture d'un bien meuble, sauf une fourniture exonérée, est réputée effectuée dans le cadre des activités commerciales du fournisseur si, selon le cas :

(i)             il a acquis ou importé le bien la dernière fois en vue de le consommer ou de l'utiliser dans le cadre de ses activités commerciales, ou il l'a consommé ou utilisé dans ce cadre après l'avoir acquis ou importé la dernière fois,

[...]

165. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, l'acquéreur d'une fourniture taxable effectuée au Canada est tenu de payer à Sa Majesté du chef du Canada une taxe calculée au taux de 7 % sur la valeur de la contrepartie de la fourniture.

221. (1) La personne qui effectue une fourniture taxable doit, à titre de mandataire de Sa Majesté du chef du Canada, percevoir la taxe payable par l'acquéreur en vertu de la section II.

285. Toute personne qui, sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde dans l'exercice d'une obligation prévue à la présente partie, fait un faux énoncé ou une omission dans une déclaration, une demande, un formulaire, un certificat, un état, une facture ou une réponse — appelés « déclaration » au présent article — établi pour une période de déclaration ou une opération, ou y participe, y consent ou y acquiesce, est passible d'une pénalité égale au plus élevé de 250 $ et de 25 % [...]

ANALYSE

[8]            L'alinéa 141.1(1)a) de la Loi sur la taxe d'accise (la « Loi » ) traite de la disposition d'un bien meuble. Il prévoit que la fourniture d'un bien meuble est réputée effectuée dans le cadre d'une activité commerciale si le fournisseur a consommé ou utilisé le bien dans le cadre d'une activité commerciale.

[9]            L'appelant n'oeuvrait pas dans la vente de camions; les camions ont été achetés pour l'entreprise, et l'utilisation des camions s'est faite presque en totalité dans le cadre de l'entreprise. L'appelant a utilisé les camions pour effectuer des fournitures taxables, c'est-à-dire la prestation d'un service de transport. Ainsi, la vente des camions représenterait une fourniture effectuée dans le cadre d'une activité commerciale.

[10]          Une fourniture effectuée dans le cadre d'une activité commerciale est une fourniture taxable en vertu de la Loi, et le fournisseur - l'appelant en l'espèce - est tenu aux termes de l'article 221 de la Loi de percevoir de la TPS à l'égard de la fourniture.

PÉNALITÉ POUR FAUX ÉNONCÉS OU OMISSIONS

(FAITS SCIEMMENT ET / OU DANS DES CIRCONSTANCES ÉQUIVALANT À FAUTE LOURDE)

[11]          La pénalité prévue à l'article 285 de la Loi est analogue à celle qui est prévue au paragraphe 163(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu.

[12]          La définition classique de « faute lourde » pour l'application d'une pénalité en vertu de la Loi ou de la Loi de l'impôt sur le revenu est énoncée dans l'affaire Venne c. La Reine, C.F. 1re inst., no T-815-82, 9 avril 1984 ([1984] C.T.C. 223), dans laquelle le juge Strayer disait à la page 19 (C.T.C. : à la page 234) :

La "faute lourde" doit être interprétée comme un cas de négligence plus grave qu'un simple défaut de prudence raisonnable. Il doit y avoir un degré important de négligence qui corresponde à une action délibérée, une indifférence au respect de la loi.

[13]          Cette définition a été citée dans de nombreuses causes fiscales et représente la norme que les tribunaux appliquent lorsqu'ils doivent déterminer si une pénalité pour faute lourde est appropriée.

[14]          Dans l'affaire 897366 Ontario Limited c. La Reine, C.C.I., no 98-2438(GST)I, 2 mars 2000 ([2000] G.S.T.C. 13), au paragraphe 19, le juge Bowman disait ceci au sujet de l'imposition d'une pénalité en vertu de l'article 285 :

[...] L'imposition des pénalités en vertu de l'article 285 exige un examen sérieux et circonspect par l'administration fiscale du comportement du contribuable afin de déterminer si ce dernier démontre un degré d'intention ou de faute lourde justifiant l'imposition de la pénalité. L'article 285 n'a pas pour but de permettre aux répartiteurs de punir les contribuables pour leur attitude frustrante ou ennuyante. On ne soulignera jamais assez le fait que les pénalités ne peuvent être imposées en vertu de l'article 285 que dans les cas les plus clairs et après un examen approfondi de la preuve.

[15]          Les propos du juge Bowman peuvent être considérés comme étayant davantage la notion selon laquelle il y a un élément subjectif dans la détermination de la question de savoir si une personne a agi sciemment ou a commis une faute lourde. En outre, le juge Bowman semblerait limiter l'application d'une pénalité en vertu de l'article 285 aux cas dans lesquels il est clair que le contribuable a agi sciemment ou a commis une faute lourde.

[16]          L'appelant a dit qu'il avait de la difficulté à comprendre qui était propriétaire des camions et quelles en étaient les conséquences en matière de TPS lorsqu'il a vendu les véhicules. La preuve indique que l'appelant avait la pleine propriété des trois camions, et je conclus que l'appelant savait qu'il était propriétaire des camions à l'époque pertinente.

[17]          Toutefois, la question de savoir si une conclusion selon laquelle l'appelant a agi sciemment et / ou a commis une faute lourde exige un examen plus approfondi de la preuve.

[18]          L'anomalie ayant conduit à la vérification a été découverte quand on a comparé les déclarations de revenu de l'appelant et ses déclarations de TPS. En particulier, un examen des tableaux de la déduction pour amortissement figurant dans la déclaration de revenu de l'appelant a permis à l'ADRC de se rendre compte que la disposition des camions n'avait pas été déclarée.

[19]          Au cours de la période de vérification, lorsque l'ADRC l'a interrogé, l'appelant a expressément nié avoir vendu des camions. De plus, il semblerait qu'il ait avisé d'autres personnes (notamment son ex-épouse) de nier cela elles aussi. Comme je l'ai mentionné, l'appelant a toutefois bel et bien reconnu au procès qu'il avait vendu les camions.

[20]          Il est clair que l'appelant n'a pas fait preuve d'une diligence raisonnable quant à ses obligations en matière de déclaration et de versement, et le fait qu'il a d'abord nié avoir procédé à la disposition des camions nous amène à conclure qu'il a sciemment fait un faux énoncé dans les déclarations de TPS.

[21]          L'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 17e jour d'août 2001.

« D. Hamlyn »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme ce 10e jour de juillet 2002.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Mario Lagacé, réviseur

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

2001-797(GST)I

ENTRE :

LAWRENCE DIMARIA,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu les 8 et 9 août 2001 à Ottawa (Ontario), par

l'honorable juge D. Hamlyn

Comparutions

Pour l'appelant :                                   L'appelant lui-même

Avocat de l'intimée :                            Me Yves Parent

JUGEMENT

          L'appel de la cotisation établie en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d'accise, dont l'avis est daté du 22 juin 1999 et porte le numéro 00000010158, est rejeté conformément aux motifs du jugement ci-joints.


Signé à Ottawa, Canada, ce 17e jour d'août 2001.

« D. Hamlyn »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 10e jour de juillet 2002.

Mario Lagacé, réviseur



[1] Comme je l'ai indiqué, l'appelant a reconnu au procès qu'il avait bel et bien reçu de la TPS à l'égard de deux des camions.

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