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Date: 20000323

Dossier: 98-253-IT-I

ENTRE :

MAXIME HUOT,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifsde l'ordonnance et du jugement

Le juge Lamarre Proulx, C.C.I.

[1]            Au début de cette audience, il y a eu l'audition d'une requête pour procéder par voie de la procédure informelle. L'appelant avait interjeté appel par voie de la procédure générale. Le 16 mars 1999, il y a eu une audience sur l'état de l'instance qui a été entendue par voie de conférence téléphonique. C'est l'appelant seul qui avait participé à cette audience. Une des conditions de cette ordonnance était qu'une liste des documents établie conformément à l'article 81 des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale) soit produite et signifiée au plus tard le 30 avril 1999. Une requête pour rejet d'appel pour défaut de produire et signifier la liste de documents a été produite à la Cour le 1er août 1999.

[2]            Lors de l'audition de cette requête le 7 septembre 1999, l'appelant a expliqué à la Cour qu'il n'avait pas de documents à produire parce que tous les documents à l'appui de la cotisation étaient des documents en la possession du ministre du Revenu national (le « Ministre » ). À la lecture de l'Avis d'appel et de la Réponse à l'avis d'appel, il m'a paru que tel fût bien le cas, mais je n'ai pas jugé approprié de déterminer immédiatement l'issue de cette requête, car la question qui se posait à moi était de savoir pourquoi un appelant non représenté par avocat procédait par voie de la procédure générale plutôt que par voie de la procédure informelle. L'appelant a alors informé la Cour qu'il était ignorant de l'effet de cette distinction entre la procédure générale et la procédure informelle, et qu'il avait tout simplement signé l'avis d'appel préparé et rédigé pour lui par le comptable.

[3]            La Cour a alors demandé à l'avocate de la requête de lui faire savoir si les montants d'impôt en cause étaient à l'intérieur de la limite prescrite ouvrant droit à la procédure informelle. Elle a, par écrit, informé la Cour qu'il en était ainsi. Par la suite, monsieur Huot a fait une requête écrite à la Cour pour obtenir la permission de procéder par voie de la procédure informelle. L'avocat de l'intimée s'étant opposé à cette requête, il y a eu audition de la requête préalablement à celle de l'appel au fond. L'appelant a expliqué qu'il croyait se souvenir que le comptable pensait que la limite prescrite demandait d'additionner les montants de chacune des années en appel. Quant à lui, il était ignorant des conditions et des conséquences du choix. L'avocat de l'intimée a fait valoir que l'intimée, pour sa part, était une partie innocente et qu'elle ne devait pas subir les frais de l'ignorance de la partie appelante.

[4]            La Cour a rappelé que c'est le législateur lui-même qui a permis aux contribuables de contester les cotisations du Ministre sans engager de frais à l'égard des avocats du Ministre lorsque les montants dont il y a appel sont à l'intérieur de la limite prescrite. C'est dans cet esprit qu'il faut décider de la requête de l'appelant de procéder selon la procédure informelle. Il aurait été préférable que cette requête se fasse au moment de l'audition sur l'état de l'instance, mais il faut se rappeler qu'elle a été faite par conférence téléphonique. La Cour est donc d'avis, selon les faits révélés à l'audition et ci-avant relatés, qu'il est dans l'intérêt de la justice que la requête soit accordée. En ce qui concerne la requête pour rejet d'appel pour défaut de produire et signifier la liste des documents, ci-avant mentionnée, elle devient donc caduque.

[5]            En ce qui concerne l'appel lui-même, cet appel concerne les années d'imposition 1989 à 1993. La question en litige est de savoir si l'appelant a omis de déclarer des revenus de vidéo-poker dans le calcul de son revenu pour les années d'imposition en litige.

[6]            Les faits sur lesquels le Ministre s'est appuyé pour cotiser l'appelant sont décrits au paragraphes 6 et 7 de la Réponse à l'avis d'appel (la « Réponse » ) :

6.              En établissant les nouvelles cotisations en litige, le ministre du Revenu national a tenu pour acquis, notamment, les faits suivants :

a)              L'appelant était, durant ses années d'imposition 1989 à 1993, le propriétaire unique d'un commerce de dépanneur situé 6 rue Palm à Montréal, province de Québec.

b)             Dans le cadre de ce commerce, l'appelant mettait à la disposition de ses clients une machine de jeu de type vidéo-poker dont le propriétaire était la société Les Amusements Wiltron Inc. ou une société qu'elle contrôlait (ci-après désignée collectivement sous le nom de Wiltron).

c)              Selon 1'entente entre l'appelant et Wiltron, les recettes nettes générées par la machine de jeu était divisées entre eux selon un pourcentage préétabli selon lequel l'appelant obtenait au moins 50% des recettes.

d)             Un représentant de Wiltron visitait périodiquement le commerce de l'appelant de façon à déterminer quelles étaient les recettes nettes à partager et en recouvrer la part due à Wiltron.

e)              Des compteurs mécaniques et électroniques dont étaient munies chacune des machines de Wiltron permettaient de déterminer quel montant des recettes nettes avaient été obtenues depuis la visite précédente.

f)              On obtenait l'accès aux compteurs en utilisant une c1é dont le tenancier, avait la possession et une autre clé que le représentant de Wiltron apportait avec lui.

g)             Tout différend entre Wiltron et le(s). tenancier(s) quant au montant des recettes à partager était rég1é en donnant le bénéfice du doute au(x) tenancier(s).

h)             Une perquisition effectuée le 10 août 1993 en vertu d'un mandat à cet effet dans les locaux de Wiltron a permis aux agents de Revenu Canada de recouvrer des données informatiques fiables sur les revenus nets générés par les machines de Wiltron incluant celle qui était placée au dépanneur de l'appelant et révélant entre autres les parts respectives de Wiltron et de l'appelant pour chacun des mois des années d'imposition 1991 à 1993 de l'appelant, de même que la part de Wiltron pour les années 1989 et 1990, tel qu'indiqué ci-dessous : (Les parts de l'appelant pour ces deux années étant au moins égales à celles de Wiltron)

WILTRON

DÉPANNEUR

WILTRON

DÉPANNEUR

1989

1989

1990

1990

Janvier

0$

0$

688

688

Février

772$

772$

744$

744$

Mars

644$

644$

1982$

1982$

Avril

178$

178$

1402$

1402$

Mai

212$

212$

736$

736$

Juin

185$

185$

2296$

2296$

Juillet

117$

117$

537$

537$

Août

353$

353$

2100$

2100$

Septembre

681$

681$

604$

604$

Octobre

272$

272$

915$

915$

Novembre

529$

529$

1 117$

1 117$

Décembre

520$

520$

1 335$

1 335$

WILTRON

DÉPANNEUR

WILTRON

DÉPANNEUR

1991

1991

1992

1992

Janvier

1 338$

1 339$

1 099$

1 099$

Février

2082$

2083$

429$

429$

Mars

1513$

1517$

447$

448$

Avril

1754$

1754$

342$

342$

Mai

948$

948$

502$

504$

Juin

1 162$

1 162$

410$

411$

Juillet

476$

476$

380$

380$

Août

1023$

1 023$

533$

533$

Septembre

489$

589$

501$

502$

Octobre

1262$

1264$

354$

354$

Novembre

455$

457$

259$

259$

Décembre

395$

396$

271$

273$

WILTRON

DÉPANNEUR

1993

1993

Janvier

330$

330$

Février

181$

182$

Mars

170$

169$

Avril

167$

166$

Mai

257$

246$

Juin

414$

415$

Juillet

550$

549$

Août

non disponible

non disponible

Septembre

non disponible

non disponible

Octobre

non disponible

non disponible

Novembre

non disponible

non disponible

Décembre

non disponible

non disponible

i)               Au cours de la vérification des affaires de l'appelant, ce dernier n'a pu mettre à la disposition des vérificateurs, ni les rubans de caisse enregistreuse ni les bordereaux de dépôt relatifs aux recettes de l'entreprise. L'appelant a reconnu qu'il avait eu une machine de jeu mais n'avait déclaré aucun revenu de vidéo-poker.

j)               L'appelant a déclaré seulement 448$ A titre de revenus de vidéo-poker pour le 16 janvier 1991, 1227$ pour le 30 janvier 1991, 399,54$ pour le 16 février 1991 et 373,84$ pour le 1er mars 1991.

k)              La part des recettes conservées par l'appelant était au moins égale à celle remise au représentant de Wiltron lors de ses visites périodiques.

1)              L'appelant a déclaré lors de son contact initial avec le vérificateur qu'il n'avait eu une machine de vidéo-poker que pour quelques jours.

m)             Lorsque le vérificateur l'a informé que sur les cinq ans les montants de revenus de vidéo-poker étaient de quelque 38 000$, l'appelant a répondu, après réflexion, que le vérificateur avait raison et a reconnu qu'il n'avait pas déclaré ces montants.

n)             Un examen des livres de l'appelant a révélé que certains jours au début de 1991 l'appelant aurait fait deux dépôts le même jour et que pour certains de ces jours un des dépôts portait la mention « poker » .

o)             L'appelant faisait un dépôt de ces recettes (ou du moins d'un montant représentant supposément ses recettes journalières) à tous les jours. L'appelant n'a pu fournir les rubans de caisse enregistreuse où seraient consignées ses ventes quotidiennes.

p)             L'appelant n'a réclamé aucune dépense de salaire dans les états financiers de son commerce et déclaré les revenus bruts et revenus (pertes) nets suivants dans ses déclarations T-1:

1989

1990

1991

1992

1993

Revenu brut

285508$

415319$

356725$

294343$

264257$

Revenu net

(14112$)

4875$

7320$

7857$

5082$

7.              L'appelant a sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde omis d'inclure dans le calcul de son revenu d'entreprise des montants d'au moins 4 463$, 14 456$, 10 448$, 5 534$ et 2 070$ pour ses années d'imposition 1989 à 1993 respectivement et était donc sujet à des pénalités cotisées en vertu du paragraphe 163(2) de laLoi de l'impôt sur le revenu de 203,94$, 1754,22$, 1219,31$, 721,90$ et 152,21$ pour ces années d'imposition.

[7]            Les motifs invoqués par l'appelant sont décrits à son Avis d'appel comme suit :

3.              Lesdits revenus de machines vidéo-poker estimés sont basés en fonction du système informatique du propriétaire de la machine.

Je suis en désaccord avec ces inclusions dans mes revenus, et ce, pour les motifs suivants :

1.              Je suis en désaccord avec les revenus provenant de machines vidéo-poker que vous considérez que j'ai reçus au cours des années 1989 à 1993, inclusivement. La preuve sur laquelle vous vous appuyez pour considérer les revenus en question est basée sur le système informatique du propriétaire des machines qui ne s'appuie pas sur une preuve tangible de compteur (exemple : relevé de compte hebdomadaire ou mensuel).

2.              Ces revenus en question ne reflètent pas la réalité. La logique (bon sens) milite en ma faveur. En effet, il est inconcevable que pour un établissement de cette taille et situé dans ce quartier (considéré comme étant l'un des plus pauvre à Montréal), de pouvoir générer des revenus tels que vous les décrivez pour les mois de mars, juin, août 1990 et février 1991 par exemple. ...

[8]            Seul l'appelant a témoigné pour sa partie. Quant à l'intimée, elle a fait témoigner plusieurs personnes. L'appelant s'est décrit comme un rentier. Il a expliqué qu'il avait, à titre d'instruction, terminé la cinquième année du primaire.

[9]            Il a admis les alinéas 6(a) à 6(f) et 6(i) de la Réponse. En ce qui concerne l'énoncé de l'alinéa 6(g), l'appelant a dit qu'il n'y avait jamais eu de différend entre lui et les personnes chargées de la perception pour Wiltron.

[10]          En ce qui concerne l'alinéa 6(h), il a suggéré que le revenu mensuel moyen provenant de la machine de vidéo-poker pouvait être de 117 $. La perception se faisait tous les deux vendredis.

[11]          En ce qui concerne l'énoncé de l'alinéa 6(j) et la dernière partie de l'alinéa 6(n), l'appelant a dit qu'il n'avait jamais déclaré de revenus de vidéo-poker et n'avait jamais eu l'intention d'en déclarer et que si ce terme se retrouvait quatre fois à son journal, dont quelques extraits ont été déposés comme pièce I-2, il ne comprend pas pourquoi. Il donne comme raison de n'avoir pas déclaré les revenus de vidéo-poker par le fait que la première personne qui est venue le recruter comme client de Wiltron lui aurait dit de jeter les reçus donnés par Wiltron lors de la perception.

[12]          L'appelant a admis l'alinéa 6(k). En ce qui concerne l'énoncé de l'alinéa 6(l), il a dit qu'il ne se souvenait pas d'avoir fait une telle affirmation au vérificateur. Il a expliqué que ce qui c'était passé dans les faits était qu'il avait pris une première machine de vidéo-poker à l'essai, et que par la suite, il avait eu une telle machine de façon régulière dans son dépanneur. Il a nié les alinéas 6(m) et (n). Il a admis l'alinéa 6(o) tout en faisant la nuance qu'il ne faisait pas de dépôt le vendredi, samedi et dimanche. Il a admis l'alinéa 6(p).

[13]          L'appelant a expliqué en contre-interrogatoire qu'il avait acheté en 1983 le dépanneur pour sa femme, qui travaillait dans une manufacture de sacs. Quant à lui, il a travaillé jusqu'en 1991 comme opérateur-machiniste chez Jenkins Canada Inc. Pendant cette période, il travaillait le soir au dépanneur. En 1994, l'appelant se serait départi de la machine de vidéo-poker. Le dépanneur aurait été vendu au commencement de 1996.

[14]          Monsieur Roland Lorrain, maintenant retraité, était en 1996, vérificateur des dossiers d'entreprises pour Revenu Canada. En 1996, il avait eu comme tâche spéciale de calculer les revenus de vidéo-poker. Il a téléphoné à monsieur Huot le 18 janvier 1996 et s'est rendu le voir le 22 janvier 1996. Il a révisé le Journal et le Grand Livre. Ayant vu quelques montants sous la colonne « Recettes » concernant l'article « Poker » , monsieur Lorrain a soustrait ces montants des revenus de poker non déclarés par monsieur Huot. Il a inclus dans le calcul du revenu de l'appelant les recettes de vidéo-poker décrites dans les imprimés informatiques, trouvés lors de la perquisition chez Wiltron. Il a relaté, à nouveau, sa conversation décrite à l'alinéa 6(m) de la Réponse. Le 13 février 1996, il a envoyé le projet de nouvelle cotisation à monsieur Huot (pièce I-3).

[15]          Monsieur Pierre St-Aubin, retraité, était en 1993 enquêteur régional en informatique pour Revenu Canada. Il a expliqué qu'il faisait partie de l'équipe formée pour la perquisition chez Wiltron. Il y avait chez Wiltron, quelques dix postes de travail, tous en réseau, sauf un. Les enquêteurs ont saisi trois ordinateurs dont deux en réseau et celui qui n'était pas en réseau. Monsieur St-Aubin a affirmé que l'information des ordinateurs avait été transférée correctement dans leurs propres ordinateurs. Les disques durs des ordinateurs de Wiltron ont été enlevés pour être remplacés par d'autres disques durs contenant des informations similaires et qui ont été remis à Wiltron. Les disques durs originaux ont été conservés pour les poursuites en cour criminelle. Il y a eu également des copies supplémentaires faites pour s'assurer de la conservation de l'information électronique. Deux logiciels étaient utilisés par Wiltron, celui du réseau était le logiciel « Silent Partner » et celui pour l'ordinateur seul, était le logiciel « MKS » .

[16]          Les avis de nouvelles cotisations ont été déposés comme pièce I-4. Les déclarations de revenus pour les années 1990 à 1995 ont été produites sous la cote I-5. Un imprimé informatique contenant les points essentiels de la déclaration pour l'année 1989 a été produit comme pièce I-7.

[17]          Monsieur Raymond Dugré est enquêteur analyste pour Revenu Canada. Le 10 août 1993, il a également participé à la perquisition chez Wiltron. C'est lui qui a fait l'analyse des données recueillies auprès de chez Wiltron. Il a expliqué qu'il pouvait y avoir 1,500 clients et peut-être 2,500 machines. Il a expliqué les pièces de I-8 à I-13 dont on parlera au prochain paragraphe. Il a produit comme pièce I-14 la photocopie de la carte cardex se retrouvant chez Wiltron. On y voit que le Dépanneur Max a comme numéro de client 153. On y retrouve l'adresse et les numéros de téléphone de la résidence et du bureau. Il a produit comme pièce I-15 toute la série des routes suivies par les percepteurs de Wiltron, de septembre 1992 à février 1993. On y voit à la page LC-3 que le Dépanneur Max est sujet à perception le vendredi et qu'il est situé dans Montréal - St-Henri. Certains clients ont à coté de leurs noms un astérisque. La raison donnée pour cet astérisque était que ces clients étaient sujets à perception chaque semaine, soit parce qu'ils étaient de très gros clients, ou encore soit parce qu'ils étaient des clients difficiles. La division des profits des revenus de machines à vidéo-poker pouvait se faire sur la base de 50/50, 40/60, dépendant de la négociation. Monsieur Dugré a expliqué que les trois années qu'il avait en mains étaient celles de 1991, 1992 et 1993, qu'en ce qui concerne les années 1989 et 1990, la décision avait été prise d'établir la cotisation sur une base proportionnée.

[18]          Les pièces I-8, I-9 et I-16 montrent les relevés informatisés des revenus faits par l'appelant selon Wiltron. C'est à partir de cette information que l'appelant a été cotisé. On y voit le nom du dépanneur, le numéro de client, l'adresse du dépanneur, le nom de la personne à rencontrer, soit monsieur Huot, et on y voit les revenus mensuels identiques faits par le propriétaire, Wiltron et par le locataire, l'appelant. Dans les dites pièces, on voit aussi la feuille de route des différentes machines qui ont été installées chez le dépanneur et enlevées du dépanneur. On y voit aussi les chiffres comparatifs d'une année à l'autre.

[19]          Les pièces I-10, I-11, I-12 et I-13 sont les mêmes données informatiques, mais pour des dépanneurs différents situés dans le même voisinage ou environnement que celui de l'appelant. On y voit que les revenus sont comparables et même plus élevés que celui de l'appelant. Ces comparables ont été apportés parce que l'appelant avait fait valoir aux avocats de l'intimée et dans son avis d'appel que des compétiteurs avaient fait des revenus de vidéo-poker moindres que les siens et qu'il n'était pas possible dans le site géographique où se trouvaient ces dépanneurs de faire les revenus établis par le Ministre à partir des données informatisées de Wiltron.

[20]          La pièce I-17 est un document produit à partir de l'information électronique de Wiltron concernant des rapports de perception. On y voit pour le Dépanneur Max, pour le 14 janvier 1991, un montant de 448 $, pour le 28 janvier 1991, un montant de 1 227 $, pour le 11 février 1991, 855 $, pour le 25 février 1991, 810 $, pour le 11 mars 1991, 119 $, ce qui explique l'énoncé de l'alinéa 6(j) de la Réponse. Les montants de 448 $ et 1 227 $ étant montrés au Journal comme étant des recettes et ayant été inclus dans le revenu de l'appelant, ceci explique pourquoi monsieur Lorrain les a déduits des revenus ajoutés.

[21]          Monsieur Jacques Gosselin s'est décrit comme propriétaire de commerce. Il a commencé à travailler pour Wiltron vers 1988. Au début, il faisait la perception et également de la représentation et par la suite, il est devenu en charge des percepteurs. C'est lui qui établissait les routes et faisait le contrôle. Un percepteur devait remplir le registre des compteurs mécaniques et électroniques. Le percepteur faisait le compte avec le client et lui demandait le paiement. À la fin de sa visite, le percepteur laissait dans la partie compteur une feuille de compteur et reprenait la feuille laissée la fois précédente. Sur cette feuille de compteur, le percepteur indiquait le nouveau chiffre du compteur. Sur la feuille de la fois précédente, il indiquait le chiffre actuel du compteur et la différence entre le premier et le deuxième montant était la somme à partager entre le client et Wiltron. On acceptait très rarement des chèques en paiement. Le paiement se faisait habituellement au comptant. Un reçu était donné au client, dont copie était gardée par Wiltron. Le percepteur rapportait l'argent au bureau ainsi que les deux feuilles, soit la feuille du compteur et la copie du reçu. Les données étaient entrées par une personne.

[22]          Le dépanneur de l'appelant était connu sous le nom de « Dépanneur Max » et portait le numéro 153 chez Wiltron. Monsieur Gosselin a expliqué que « 153 » , le numéro de client de l'appelant signifiait qu'il était un des premiers clients de Wiltron. Les numéros de clients allaient par ordre numérique. Monsieur Gosselin a aussi dit que Dépanneur Max n'était pas un gros client. Il n'a toutefois pas mentionné quel était, à son avis, les revenus de Dépanneur Max. La question ne lui pas été posée et il n'a produit aucune preuve documentaire à ce sujet. Selon monsieur Gosselin, le client savait que l'impôt devait se payer.

[23]          Monsieur Gosselin a vu les documents produits comme pièce I-18 et I-19 étant les feuilles de compteurs. Il a mentionné que la feuille de compteur, produite comme pièce I-18, était peut-être celle d'un commerce qui avait été acquis par Wiltron parce la feuille utilisée par Wiltron est celle qui est produite sous la pièce I-19. On y voit les renseignements mentionnés par monsieur Gosselin.

[24]          Madame Michèle Gendron travaille présentement à son compte. De 1991 à 1994, elle travaillait pour Wiltron. C'est par elle que sortaient les imprimés pour les routes des percepteurs et elle entrait dans l'ordinateur les informations rapportées par les percepteurs. Madame Gendron entrait, pour chaque client, les données apportées par les percepteurs dans le logiciel « Silent Partner » tant pour les relevés des compteurs que pour les sommes perçues. Elle entrait aussi les données relatives à l'emplacement des machines. Tout l'inventaire des machines était décrit dans le logiciel.

[25]          Monsieur Ronald Miron s'est décrit comme travailleur autonome. Il a travaillé à partir de 1991 pour Wiltron et a quitté en décembre 1994. Pendant huit ans auparavant, il avait travaillé à titre de représentant pour une entreprise louant des jeux électroniques. Pour Wiltron, il travaillait comme percepteur. Les routes lui étaient affectées et il ramassait les sous. Chaque matin, il se présentait au bureau et il trouvait dans son casier la feuille de route à suivre. On lui donnait également l'information sur le type d'appareil et les pourcentages affectés. Quand il arrivait chez le client, il demandait la clé, prenait les relevés du compteur et l'inscrivait sur le papier de compteur laissé dans l'appareil. À partir de ces deux chiffres, il faisait une facture au client indiquant ce qui avait été perçu par Wiltron et par le client. Il en donnait une copie au client et rapportait l'autre copie à Wiltron. Il laissait une nouvelle fiche dans le compteur indiquant le chiffre où en était rendu le compteur. Monsieur Miron a dit qu'en ce qui le concerne, il n'a jamais mentionné au client de ne pas déclarer le revenu provenant de ses machines à sous. Il connaissait très bien l'appelant et son épouse et a manifesté beaucoup de sympathie à leur égard.

[26]          Madame Linda Moreau est présentement secrétaire réceptionniste. C'est ce genre de poste qu'elle occupait également chez Wiltron de septembre 1989 à novembre 1993. Elle recevait les appels, s'occupait de coordonner les réparations aux machines et entrait les données. La pièce I-19, qui est la feuille de compteur, lui a été montrée. Il s'agit de la bonne feuille. En la recevant des percepteurs, elle entrait les chiffres des compteurs à l'ordinateur sous les noms de chaque client. Elle remettait la feuille à ses superviseurs immédiats.

Arguments et conclusion

[27]          L'appelant fait valoir que les propos de monsieur Gosselin confirment que les machines de vidéo-poker installées dans son dépanneur ne rapportaient pas beaucoup et il reprend sa suggestion qu'elles ne rapportaient que 117 $ par mois.

[28]          L'avocat de l'intimée à fait valoir que, bien que les années 1989 à 1992 aient été des années prescrites au sens du paragraphe 152(4) de la Loi, il y avait eu admission de la part de l'appelant qu'aucun revenu de vidéo-poker n'avait été inclus dans son revenu. Le Ministre avait droit de cotiser à nouveau l'appelant pour ces années.

[29]          En ce qui concerne le montant des revenus ajoutés, l'avocat de l'intimée fait valoir qu'il n'y a pas de raison pourquoi ces revenus auraient été exagérés par Wiltron. En fait, s'il y avait eu des modifications à être apportées au revenu de l'appelant, tel qu'inscrit par Wiltron, elles l'auraient plutôt été dans le sens de la diminution que dans le sens de l'augmentation. Le témoignage de monsieur Gosselin que les revenus générés par l'appelant étaient marginaux doit se prendre dans la perspective des autres tenanciers dont les revenus étaient plus élevés. Des reçus étaient donnés par les percepteurs à monsieur Huot et il n'y a aucune raison de croire que les données entrées dans l'ordinateur de Wiltron n'étaient pas des données fiables. De toute façon, c'est monsieur Huot qui détruisait ces reçus et dans ce sens, il est l'auteur de sa propre situation. L'avocat de l'intimée prie donc la Cour de considérer que la prépondérance de la preuve est que les revenus de l'appelant provenant des machines de vidéo-poker sont ceux établis par le Ministre à partir des données du propriétaire des machines.

[30]          De plus, comme c'est sciemment que monsieur Huot n'a pas déclaré les revenus provenant de ces machines, l'avocat de l'intimée soutient qu'il est sujet à l'imposition des pénalités en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi.

[31]          Les affirmations de l'intimée dans la Réponse à l'avis d'appel ont été entièrement prouvées par les témoins qui étaient les agents du Ministre et corroborées par les témoins qui étaient à l'emploi de Wiltron. Ces témoins ont témoigné en l'absence des autres témoins. L'appelant était au courant de la preuve que l'intimée apporterait. Il n'a fait aucune preuve contraire. Par exemple il n'a pas posé de questions ni à monsieur Gosselin ni à monsieur Miron en ce qui concerne le montant approximatif des recettes provenant des machines installées dans son dépanneur. Monsieur Miron qui a été le percepteur attitré à son dépanneur pour plusieurs années aurait pu se souvenir du montant approximatif des recettes moyennes mensuelles. Il ne lui a posé aucune question. On ne peut que penser par ailleurs que le montant suggéré de 117 $ par mois n'est pas raisonnable. Il n'est guère plausible qu'une entreprise de location de machine de vidéo-poker mette en place tout un système de location et de perception impliquant plusieurs employés pour le maigre revenu suggéré par l'appelant.

[32]          En ce qui concerne l'imposition des pénalités en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi, la preuve a clairement révélé que c'est sciemment que l'appelant n'a pas inclus dans le calcul de son revenu les recettes provenant de la location des machines à vidéo-poker. Les pénalités ont donc été imposées en conformité avec la Loi.

[33]          Eu égard aux années pour lesquelles le Ministre a cotisé en dehors de la période normale de cotisation, comme l'appelant a fait une présentation erronée des faits par omission volontaire, le Ministre avait droit de le faire.

[34]          Les appels sont rejetés.

Signé à Ottawa, Canada, ce 23e jour de mars, 2000.

« Louise Lamarre Proulx »

J.C.C.I.

No DU DOSSIER DE LA COUR :        98-253(IT)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :                                 Maxime Huot et La Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                      Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                    les 17 et 18 janvier 2000

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :         l'hon. Louise Lamarre Proulx

DATE DU JUGEMENT :                      le 23 mars 2000

COMPARUTIONS :

Pour l'appelant :                                    l'appelant lui-même

Pour l'intimée :                                       Me Bernard Fontaine

                                                                                Me Valérie Tardif

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

Pour l'appelant :

                                Nom :                      

                                Étude :                    

Pour l'intimée :                                       Morris Rosenberg

                                                                                Sous-procureur général du Canada

                                                                                Ottawa, Canada

98-253(IT)I

ENTRE :

MAXIME HUOT,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Requête et appels entendus les 17 et 18 janvier 2000 à Montréal (Québec) par

l'honorable juge Louise Lamarre Proulx

Comparutions

Pour l'appelant :                                                                    L'appelant lui-même

Avocats de l'intimée :                                                          Me Bernard Fontaine

                                                                                                                Me Valérie Tardif

ORDONNANCE ET JUGEMENT

                Vu la requête de l'appelant afin de procéder selon la procédure informelle, en vertu du paragraphe 16(1) des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure informelle);

                Et vu les déclarations des parties;

                La requête est accordée et les appels seront régis par la procédure informelle;

                Les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu, pour les années d'imposition 1989, 1990, 1991, 1992 et 1993 sont rejetés;

                Le tout selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 23e jour de mars, 2000.

« Louise Lamarre Proulx »

J.C.C.I.

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