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2000-1101(EI)

ENTRE :

BANQUE NATIONALE DU CANADA,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

Appel entendu le 29 juin 2001 à Montréal (Québec) par

l'honorable juge Lucie Lamarre

Comparutions

Avocate de l'appelante :             Me Marie-Hélène Jetté

Avocate de l'intimé :                  Me Anne Poirier

JUGEMENT

          L'appel en vertu du paragraphe 103(1) de la Loi sur l'assurance-emploi ( « Loi » ) est admis et la décision rendue par le ministre du Revenu national, en vertu du paragraphe 93(3) de cette Loi est modifiée sur la base que la rémunération reçue par madame Lise Messier-Lafleur de la société Financière Manuvie au cours de la période s'échelonnant du 28 novembre 1997 au 28 novembre 1998, totalisant la somme de 16 677 $, ne constituait pas une rémunération assurable au sens du paragraphe 2(1) de la Loi et des articles 1 et 2 du Règlement sur la rémunération assurable et la perception des cotisations.

Signé à Ottawa, Canada, ce 21e jour de février 2002.

« Lucie Lamarre »

J.C.C.I.


Date: 20020221

Dossier: 2000-1101(EI)

ENTRE :

BANQUE NATIONALE DU CANADA,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

MOTIFS DU JUGEMENT

La juge Lamarre, C.C.I.

[1]      Il s'agit d'un appel à l'encontre d'une décision du ministre du Revenu national ( « Ministre » ) prise en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi ( « Loi » ), par laquelle il a été déterminé que madame Lise Messier-Lafleur avait reçu, lorsqu'au service de l'appelante, une rémunération assurable totalisant 16 677 $ au cours de la période s'échelonnant du 28 novembre 1997 au 28 novembre 1998.

[2]      Selon l'appelante, la somme ci-dessus mentionnée ne constitue pas une rémunération assurable au sens du paragraphe 2(1) de la Loi et de l'alinéa 2(1)a) du Règlement sur la rémunération assurable et la perception des cotisations ( « Règlement » ). Les dispositions pertinentes de la Loi et du Règlement se lisent comme suit :

Loi sur l'assurance-emploi

            2. (1) Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente loi.

« employeur » Sont assimilés à un employeur une personne qui a été employeur, de même que, du point de vue de la rémunération qu'il en tire, le particulier promoteur ou coordonnateur d'un projet visé à l'alinéa 5(1)e).

« rémunération assurable » Le total de la rémunération d'un assuré, déterminé conformément à la partie IV [Rémunération assurable et perception des cotisations], provenant de tout emploi assurable.

Règlement sur la rémunération assurable

et la perception des cotisations

DÉFINITIONS ET INTERPRÉTATION

           1. (1) Les définitions qui suivent s'appliquent au présent règlement.

[...]

            (2) Pour l'application de la partie IV de la Loi et pour l'application du présent règlement, « employeur » s'entend notamment d'une personne qui verse ou a versé la rémunération d'un assuré pour des services rendus dans l'exercice d'un emploi assurable.

PARTIE I

RÉMUNÉRATION ASSURABLE

Rémunération provenant d'un emploi assurable

2. (1) Pour l'application de la définition de « rémunération assurable » au paragraphe 2(1) de la Loi et pour l'application du présent règlement, le total de la rémunération d'un assuré provenant de tout emploi assurable correspond à l'ensemble des montants suivants :

          a) le montant total, entièrement ou partiellement en espèces, que l'assuré reçoit ou dont il bénéficie et qui lui est versé par l'employeur à l'égard de cet emploi;

[...]

(3) Pour l'application des paragraphes (1) et (2), sont exclus de la rémunération :

a) la somme représentant la valeur de la pension, du logement et autres avantages qu'une personne a reçus ou dont elle a joui au cours d'une période de paie au titre de son emploi, si l'employeur ne lui verse aucune rétribution en espèces pour cette période;

a.1) toute somme qui est exclue du revenu en vertu des alinéas 6(1)a) ou b) ou des paragraphes 6(6) ou (16) de la Loi de l'impôt sur le revenu;

b) les allocations de retraite;

c) tout montant supplémentaire versé par l'employeur à une personne afin d'augmenter les indemnités d'accident du travail versées à celle-ci par un organisme provincial;

d) tout montant supplémentaire versé par l'employeur à une personne afin d'augmenter les indemnités d'assurance-salaire versées à celle-ci par une tierce partie;

e) les prestations supplémentaires de chômage versées à une personne dans le cadre d'un régime de prestations supplémentaires de chômage visé au paragraphe 37(2) du Règlement sur l'assurance-emploi;

f) tout montant versé par l'employeur à une personne, soit à titre d'indemnité durant le délai de carence visé à l'article 13 de la Loi, soit pour augmenter les prestations de maternité payables en vertu de l'article 22 de la Loi ou les prestations parentales payables en vertu de l'article 23 de la Loi, si les conditions énoncées à l'article 38 du Règlement sur l'assurance-emploi sont respectées.

Faits

[3]      Les faits admis par les parties se lisent comme suit :

Madame Messier-Lafleur a été employée de la [Banque Nationale du Canada] BNC du 11 juin 1992 au 3 septembre 1999 à titre d'agent service à la clientèle;

En vertu de son horaire régulier madame Messier-Lafleur occupait un poste permanent à temps partiel en raison d'environ 20 heures par semaines;

Toutefois, pour la période de décembre 1995 à septembre 1966, madame Messier-Lafleur bénéficiait d'une affection temporaire de 37 heures et demi par semaine;

Au cours de cette période, madame Messier-Lafleur continuait d'être une employée avec un statut de régulier à temps partiel mais elle travaillait un nombre d'heures équivalent aux employés réguliers à temps plein;

Bien que l'affectation temporaire de madame Messier-Lafleur devait se poursuivre jusqu'en septembre 1996, elle a dû cesser de travailler en mai 1996 en raison d'une insuffisance cardiaque;

Compte tenu de son incapacité à accomplir son travail, madame Messier-Lafleur était admissible à une rente hebdomadaire d'invalidité, le tout conformément au régime d'invalidité de courte durée qui est offert par la BNC à ses employés;

Après vingt-six (26) semaines d'invalidité, madame Messier-Lafleur devenait admissible à une rente d'invalidité pour une période de vingt-quatre (24) mois si elle était incapable d'exercer son emploi;

Au delà des trente (30) premiers mois d'invalidité, pour avoir droit à une rente jusqu'à l'âge de soixante-cinq (65) ans, elle devait être incapable d'exercer tout emploi;

Ainsi, dès le début de son incapacité, madame Messier-Lafleur a présenté une demande de prestation à la Financière;

La demande d'indemnisation pour invalidité de madame Messier-Lafleur a été traitée conformément à la procédure de traitement des demandes prévue au régime;

Pour les six premiers mois de son absence, madame Messier-Lafleur a reçu une indemnité hebdomadaire de la Financière en vertu du régime d'invalidité;

Après cette période, madame Messier-Lafleur a demandé des prestations en vertu du régime d'invalidité de longue durée;

Ainsi, de mai 1996 à novembre 1998, madame Messier-Lafleur a touché des prestations d'invalidité (court et long terme), soit pendant environ trente (30) mois;

Ainsi, pour la période en litige, soit du 28 novembre 1997 au 28 novembre 1998, madame Messier-Lafleur recevait une rente d'invalidité de 1 389,74 $ par mois versée directement par la Financière;

Conformément au régime, cette rente a été calculée en utilisant le salaire de référence de l'indemnité de courte durée annualisé et divisé par 12;

Or les 6 derniers mois de travail actif de madame Messier-Lafleur ont été faits en vertu d'une affectation temporaire à temps plein bien que celle-ci était une employée à temps partiel;

Conformément au régime, madame Messier-Lafleur a eu droit pour la période de décembre 1996 à novembre 1998 à 75 % de la somme ainsi obtenue;

La moyenne d'heure pour cette période de 26 semaines avant l'invalidité était de 36.2 heures par semaine;

Le taux horaire de madame était de 11,81 $ de l'heure;

Lorsqu'on fait 11,81 $ multiplié par 36.2 heures multipliées par 52 semaines divisées par 12 mois on obtient un salaire mensuel moyen de 1 852,60;

Conformément au régime d'invalidité de longue durée, madame Messier-Lafleur avait droit à une indemnité mensuelle de 75 % de cette somme, soit 1 389,45 $, ce qui représente, à quelques sous près l'indemnité qu'elle recevait de la Financière;

Au cours de la période en litige, madame Messier-Lafleur a travaillé 294 heures à la BNC, le tout en vertu d'un programme de Rééducation Professionnelle convenu entre madame Messier-Lafleur, son médecin et la Financière;

En effet, le régime prévoit spécifiquement la Rééducation professionnelle qui est alors considérée comme une activité de réadaptation jugée salutaire pour l'adhérent;

C'est donc dans le cadre de ce programme de Rééducation professionnelle que madame Messier-Lafleur a effectué 294 heures entre le 28 novembre 1997 et le 28 novembre 1998;

Madame Messier-Lafleur n'a pas reçu de salaire de la BNC pour ces heures;

Suite à une décision de la Financière à laquelle la BNC n'a pas participé, les prestations ont cessé le 28 novembre 1998, soit après trente (30) mois d'invalidité car la Financière estimait que même si madame Messier-Lafleur n'était pas en mesure d'exercer son emploi, elle pouvait tout de même exercer un emploi;

Suite à cette décision de la Financière, madame Messier-Lafleur n'a pas repris le travail à la BNC mais est tout de même demeuré employé de la BNC jusqu'en septembre 1999, date de son congédiement administratif, faute de travail correspondant à ses limitations;

Il découle du dossier que suite à la décision de la Financière de cesser le versement des prestations d'invalidité à madame Messier-Lafleur celle-ci a adressé une demande d'assurance-emploi à Développement des ressources humaines du Canada (ci-après « DRHC » ) à compter du 28 novembre 1998;

DRHC a demandé au ministère du revenu une décision relativement à l'assurabilité de l'emploi de madame Messier-Lafleur pour la période du 28 novembre 1997 au 28 novembre 1998;

Par une décision datée du 4 mars 1999, le Bureau des Services fiscaux de Revenu Canada concluait que Mme Lise Messier-Lafleur avait exercé un emploi assurable au sens de l'article 5(1) de la Loi sur l'assurance-emploi durant la période du 28 novembre 1997 au 28 novembre 1998 et que ses gains assurables pour les sept (7) derniers mois de la période en litige s'élevaient à 9 728,18 $, le tout tel qu'il appert de cette décision, Pièce A-1;

Le 1er juin 1999, la BNC demandait à la Division des appels de réviser cette décision. Les motifs énoncés au soutien de cette demande de révision se retrouvent dans une lettre du 15 novembre 1999, adressée à M. Jean-Pierre Houle de la Division des appels, en liasse, Pièce A-2;

Le 8 décembre 1999, la Division des appels de Revenu Canada rejetait la demande de révision de la BNC estimant que la rémunération assurable aux fins de l'assurance-emploi de Mme Messier-Lafleur pour la période du 28 novembre 1997 au 28 novembre 1998 était de 16 677 $, Pièce A-3;

[4]      En sus des faits précédemment admis, l'appelante a fait témoigner monsieur Rémi St-Germain, spécialiste normes et services pour la société Financière Manuvie (la « Financière » ) et monsieur Claude Plante, analyste au service des avantages sociaux à la Banque Nationale du Canada, afin de venir expliquer les régimes d'assurances dont bénéficient les employés de l'appelante. L'intimé a fait témoigner brièvement madame Lise Messier-Lafleur sur sa capacité de travail lors de son retour au travail dans le cadre d'une rééducation professionnelle recommandée par la Financière au cours de la période en litige.

[5]      Monsieur St-Germain a expliqué que les employés de l'appelante étaient couverts par un régime d'assurance visant à procurer un remplacement de salaire ou une perte financière pour les employés qui sont en incapacité totale temporaire ou permanente. L'appelante a opté pour un régime d'assurance de type « ASO » ( « administrative services only » ou en français « services administratifs seulement » ) avec la Financière. Un tel contrat ASO est défini dans l'exposé du régime en vigueur entre l'appelante et la Financière comme suit (aux pièces A-4 et A-5, à la page 4) :

Contrat ASO : contrat conclu entre l'employeur et la Financière Manuvie, en vertu duquel cette dernière représente l'employeur et convient de lui fournir certains services administratifs relativement au présent régime, sans que cela ait pour effet de décharger l'employeur de ses obligations.

[6]      Monsieur St-Germain a expliqué que dans un régime d'assurance de type ASO, l'employeur finance la totalité du régime (sans contribution de l'employé) et supporte seul les prestations aux employés invalides. Ainsi, dans un tel régime, l'employeur retient les services administratifs d'un administrateur (ici la Financière), lequel est rémunéré pour les services administratifs qu'il rend, sous forme de commissions estimées sur l'incidence des réclamations prévues et sur le nombre d'employés. Ces services consistent à administrer les demandes de prestations qui sont reçues des employés qui cessent de travailler à cause d'une incapacité. Un tel régime se distingue d'un régime d'assurance ordinaire où l'assureur impose à l'employeur une certaine tarification pour offrir une couverture d'assurance aux employés selon leur âge ou autres critères généralement utilisés pour un groupe assuré.

[7]      Selon monsieur St-Germain, un régime de type ASO a l'avantage d'assurer une plus grande impartialité des demandes de prestations soumises par les employés. En effet, comme l'employeur finance le groupe assuré et le versement des prestations d'assurance aux employés, l'assureur qui agit comme administrateur uniquement, se concentre donc seulement sur l'admissibilité des prestations d'un point de vue purement objectif, soit du point de vue médical (et non d'un point de vue plus subjectif relié, entre autres, à ses disponibilités financières, puisque ce n'est pas lui qui assume la responsabilité financière du régime mais l'employeur). L'assureur joue le rôle d'un administrateur et fait toutes les interventions nécessaires à la gestion d'un dossier d'invalidité. Il est rémunéré pour ceci selon les termes qu'il a négociés avec l'employeur.

[8]      Du côté de l'employeur, un régime de type ASO est aussi plus avantageux en ce sens qu'il paie l'assureur selon les expériences de l'année courante par opposition à un régime d'assurance de type non ASO où la tarification chargée à l'employeur est faite par l'assureur sur la base des expériences des années antérieures (ce qui implique que les primes chargées à l'employeur peuvent être plus élevées que sous un régime de type ASO).

[9]      Dans un régime d'assurance de type ASO, tout comme dans un contrat d'assurance régulier, c'est l'employeur qui détermine le pourcentage du salaire et la période qu'il veut couvrir en cas d'invalidité d'un employé.

[10]     Dans le cas actuel, il existe deux régimes de protection mis en place par l'appelante pour ses employés. Le premier est un régime de protection en cas d'incapacité totale de courte durée qui prévoit un remplacement salarial de 26 semaines (pièce A-4). En vertu de ce régime, l'employé reçoit 85 pour cent de son salaire hebdomadaire brut avant l'invalidité. Le deuxième est un régime d'assurance invalidité de longue durée qui prend effet lorsque l'employé a atteint le maximum de 26 semaines sous le régime de courte durée (pièce A-5). A partir de ce moment, l'employé reçoit 75 pour cent de son salaire mensuel brut avant qu'il ne devienne invalide. Sous ce régime longue durée, l'employé recevra des prestations pour une période initiale de 24 mois, s'il est incapable d'accomplir l'occupation propre qu'il avait avant l'arrêt de travail. A l'expiration de cette période initiale de 24 mois, l'employé aura le droit à des prestations s'il est inapte à occuper tout autre emploi, et ce jusqu'à l'âge de 65 ans uniquement.

[11]     Il est à noter que la fin du lien d'emploi n'affecte pas le droit à des prestations en autant que la période d'incapacité de l'employé ait débuté antérieurement à la fin du lien d'emploi.

[12]     Quant à la procédure à suivre pour un employé qui veut faire une demande de prestations d'assurance-invalidité, il doit faire cette demande auprès de l'employeur qui l'achemine par la suite à l'assureur avec une confirmation que l'employé est couvert en vertu du régime. L'assureur fait ensuite l'évaluation du dossier en transigeant directement avec l'employé et son médecin traitant. C'est l'assureur qui prend seul la décision d'accepter ou non une demande de prestations. C'est également l'assureur qui décide seul si l'employé continue de se qualifier en vertu du régime et s'il peut continuer à recevoir des prestations.

[13]     Si l'assureur n'accepte pas la réclamation d'un employé ou s'il met un terme au paiement des prestations après une certaine période, l'employeur ne peut contester cette décision. Toutefois, l'employé peut faire appel de cette décision auprès de l'assureur directement, en fournissant des informations additionnelles dans les 60 jours de la communication de la décision par l'assureur. Cette procédure n'est pas prévue explicitement dans les deux régimes existants pour les employés de l'appelante (pièces A-4 et A-5), mais il s'agit d'une procédure interne à la Financière. Si l'employé n'est toujours pas d'accord avec la décision de la Financière, il peut prendre un recours judiciaire ou demander un emploi moins exigeant de l'employeur. Toutefois, il est bien indiqué dans les régimes négociés entre l'appelante et la Financière, qu'aucune action ne peut être intentée contre cette dernière. Par ailleurs, une action peut être intentée contre le titulaire du contrat d'assurance (l'appelante), à l'intérieur d'un certain délai (pièce A-4, page 8; pièce A-5, page 9).

[14]     Les prestations d'assurance-invalidité sont payées par la Financière à partir du budget du Service des avantages sociaux de l'appelante. Les employés reçoivent leurs chèques d'invalidité de la Financière, qui tire l'argent d'un compte ouvert au nom de la Banque nationale, Service des avantages sociaux, invalidité de courte et longue durée. C'est aussi la Financière qui fait les prélèvements à la source sur les prestations à être versées aux employés relativement aux déductions fiscales puisque la rente d'invalidité est imposable aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu. Aucun prélèvement n'a jamais été fait pour l'assurance-emploi sur ces indemnités d'assurance-invalidité.

[15]     Le Régime d'invalidité longue durée (pièce A-5) prévoit également un programme de rééducation professionnelle auquel collabore l'appelante comme employeur. Ainsi dans le cas de madame Messier-Lafleur, celle-ci est retournée travailler pour l'appelante à temps partiel (six heures par semaine) dans le cadre de ce programme, à compter du 4 août 1997 (alors qu'elle était en congé d'invalidité depuis le mois de mai 1997). Il s'est avéré rapidement toutefois que la capacité de madame Messier-Lafleur de réintégrer son poste de travail, selon le même horaire qu'avant, était à toutes fins pratiques impossible.

[16]     Ainsi, dès le mois de décembre 1997, elle a fait une rechute et a dû s'absenter du travail pour une période de trois mois. Elle a repris le travail en février 1998 à raison de six heures par semaine selon la prescription de son médecin traitant. Elle a travaillé par la suite en moyenne sept heures par semaine (avec un maximum de 10 heures par semaine pendant trois semaines) jusqu'au 27 novembre 1998 où elle a définitivement arrêté de travailler. Tout au long de cette période de réadaptation, elle a travaillé un total de 294 heures pour l'appelante et elle n'a reçu aucun salaire de l'appelante mais avait droit à ses indemnités d'assurance-invalidité de la Financière, puisqu'elle était encore considérée invalide vis-à-vis son occupation habituelle. A compter du 27 novembre 1998, la Financière a cessé de faire des versements à madame Messier-Lafleur. Celle-ci a toutefois conservé auprès de l'appelante son statut d'employée en absence sans traitement jusqu'au 3 septembre 1999, date de son congé administratif par l'appelante.

[17]     Selon monsieur St-Germain, l'appelante n'aurait fourni un rendement que de 10 pour cent de son rendement normal lors de son retour au travail dans le cadre de sa rééducation professionnelle. Ceci a été démenti par madame Messier-Lafleur qui a dit, qu'au cours de cette période, elle exécutait exactement les mêmes tâches qu'auparavant mais travaillait un nombre réduit d'heures.

[18]     Monsieur Claude Plante, parlant au nom de l'appelante, a confirmé que durant toute la période d'invalidité, soit du mois de mai 1996 au mois de septembre 1999, madame Messier-Lafleur bénéficiait des autres régimes d'assurance applicables offerts par l'appelante à ses employés, soit le régime d'assurance des soins dentaires, des frais médicaux et d'assurance-vie. Quant au régime de retraite, elle était exonérée des cotisations à ce régime au cours de cette période mais elle continuait à accumuler ses années de participation comme si elle travaillait pour l'appelante.

Arguments des parties

[19]     L'appelante soutient que les prestations d'assurance-invalidité versées à madame Messier-Lafleur au cours de la période en litige ne constituaient pas une rémunération assurable au sens de la Loi et n'étaient donc pas assujetties aux cotisations au Régime de pensions du Canada ( « RPC » ) et à l'assurance-emploi ( « AE » ). L'avocate de l'appelante se réfère en premier lieu au Guide de l'employeur-Retenues sur la paie (97-98 et 98-99) ( « Guide » ) publié par Revenu Canada. Dans ce Guide, on indique que les prestations d'assurance-salaire sont assujetties aux cotisations au RPC et à l'AE si un employé reçoit ces prestations d'un fiduciaire ou d'une compagnie d'assurance en vertu d'un régime d'assurance-salaire dont l'employeur :

-     finance une partie du régime;

-    exerce un certain contrôle sur les modalités du régime;

-     détermine l'admissibilité aux prestations.

[20]     Par ailleurs, ce Guide indique également que les prestations d'assurance-salaire ne sont pas assujetties aux cotisations au RPC et à l'AE lorsque l'employé reçoit ces prestations d'un fiduciaire ou d'une compagnie d'assurance en vertu d'un régime d'assurance-salaire dont l'employeur n'exerce pas un certain contrôle sur les modalités du régime et ne détermine pas l'admissibilité aux prestations. Dans ce dernier cas, même si ces paiements sont imposables pour l'employé qui les reçoit, on indique que le payeur n'est pas tenu d'effectuer une retenue d'impôt.

[21]     L'avocate de l'appelante soutient que si l'on peut dire ici que l'employeur finançait le régime et exerçait un contrôle sur les modalités du régime (l'appelante déterminait le montant des prestations à être versées), on ne peut dire toutefois que l'employeur déterminait l'admissibilité aux prestations (c'est la Financière qui exerçait cette fonction dans son rôle d'administrateur). Comme l'une des trois conditions prévues dans le Guide n'est pas remplie, l'avocate soutient que les prestations d'assurance-invalidité ne sont donc pas assujetties aux cotisations au RPC et à l'AE.

[22]     L'avocate de l'appelante considère également que deux conditions doivent être satisfaites pour qu'une somme versée à un employé soit considérée comme une rémunération assurable aux termes de l'alinéa 2(1)a) du Règlement. D'une part, la somme doit être versée par l'employeur à l'égard de son emploi et d'autre part, elle doit être versée en contrepartie de services rendus.

[23]     L'avocate se réfère à la décision de la Cour d'appel fédérale dans M.R.N. c. Visan, [1983] 1 C.F. 820. Dans cette affaire, le contribuable avait reçu des prestations d'assurance-invalidité d'une compagnie d'assurance en vertu d'un régime d'assurance prévu dans le contrat de travail. Comme dans le cas présent, c'est l'employeur qui assumait la totalité du coût du régime d'assurance-invalidité. Il avait été argumenté que ces prestations étaient en fait une rémunération versée par l'employeur du contribuable puisqu'ils résultaient des conditions d'emploi qui exigeaient que des services soient rendus avant que l'employeur puisse être tenu d'effectuer ces paiements. La Cour d'appel fédérale a conclu que ces prestations visaient à dédommager l'employé de la perte des paiements qui auraient été faits pour des services qu'il aurait rendus n'eût été de son invalidité, et n'avaient pas été versées pour services rendus.

[24]     En l'occurrence, la Cour d'appel fédérale concluait que les sommes versées au contribuable au titre de son invalidité ne pouvaient constituer une rémunération au sens de l'article 54 du Règlement tel qu'il se lisait alors (lequel excluait des emplois assurables un emploi exercé pour le compte d'un employeur par une personne qui était employée et rémunérée moins d'un certain nombre d'heures par semaine par son employeur, ou qui touchait de cet employeur une rémunération inférieure à un certain pourcentage du maximum de la rémunération hebdomadaire assurable).

[25]     L'avocate de l'appelante soutient que ce raisonnement a été repris par notre Cour dans l'affaire Banque Nationale du Canada c. Canada, [1997] A.C.I. no 471 (Q.L.), dans laquelle il a été décidé qu'une employée de la Banque Nationale qui recevait des prestations d'invalidité d'une compagnie d'assurance en vertu d'un contrat de type ASO négocié avec la Banque Nationale, n'occupait pas un emploi assurable au cours de cette période. La Cour invoque, à l'instar de la Cour d'appel fédérale, que les paiements reçus par un employé ne sont pas de la nature d'une rémunération s'ils n'ont pas été versés par l'employeur pour des services rendus.

[26]     Par ailleurs, l'avocate de l'appelante se fonde également sur la décision rendue par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Gagné c. Canada, [1998] A.C.F. no 1811 (Q.L.), où le juge Pratte dit ceci au paragraphe 5 :

           Il ressort de tout ceci que la rémunération assurable d'une personne peut, contrairement à ce qu'a dit la Cour canadienne de l'impôt, provenir d'une autre personne que l'employeur. Il est cependant nécessaire que cette rémunération soit payée "pour des services fournis dans le cadre d'un emploi assurable". Or, il est évident que les indemnités d'assurances qui ont été versées à la demanderesse ne lui ont pas été payées pour la rémunérer des services qu'elle avait rendus dans le cadre de son emploi.

[27]     Dans cette affaire, l'employée travaillait à mi-temps pour son employeur qui la rémunérait pour son travail, et elle était compensée pour l'autre moitié du temps par des indemnités qui lui étaient versées directement par une compagnie d'assurance, selon un régime collectif des indemnités d'invalidité.

[28]     Dans l'affaire Wongc. Canada, [1995] A.C.F. no 984 (Q.L.), on a jugé que les paiements reçus de l'employeur par erreur en vertu d'une convention collective non applicable à l'employé ne constituaient pas une rémunération assurable. Selon la Cour d'appel fédérale, ces paiements reçus de l'employeur découlaient bien du fait que monsieur Wong était employé, mais ils n'avaient pas été effectués à titre d'indemnité versée à un employé ou à titre de rémunération pour des services rendus dans le cadre d'un contrat de travail.

[29]     L'avocate de l'appelante soutient donc que les sommes versées par la Financière à madame Messier-Lafleur ne constituent pas une rémunération assurable au sens du Règlement puisque les deux conditions nécessaires pour les qualifier ainsi ne sont pas satisfaites. D'une part, ces sommes n'ont pas été versées par l'employeur et d'autre part, elles n'ont pas été versées en contrepartie de services rendus.

[30]     De son côté, l'avocate de l'intimé s'appuie sur d'autres décisions de la Cour d'appel fédérale pour soutenir qu'il y a rémunération assurable. Elle cite les affaires Canada (Attorney General) c. Quinlan (F.C.A.), [1994] F.C.J. No. 276 (Q.L.); NanaimoRegional General Hospital c. Canada, [1997] F.C.J. No. 1706 (Q.L.); et Rousseau c. Canada, [1996] A.C.F. no 1346 (Q.L.).

[31]     Dans les affaires Quinlanet Nanaimo, l'employé recevait un salaire de son employeur directement alors qu'il ne rendait pas de services pour l'employeur. Dans ces deux cas, l'employeur était tenu de continuer à verser le salaire en cas d'arrêt de travail en vertu d'une convention collective liant l'employeur et les employés (l'employeur était ensuite remboursé par la compagnie d'assurance ou par un organisme provincial). Il a été jugé que le salaire ainsi versé constituait une rémunération assurable.

[32]     Dans l'affaire Rousseau, l'employeur avait versé à l'employée une indemnité de congé de maternité ainsi que l'y obligeait la convention collective, pendant une période de chômage causée par une grossesse pour laquelle le régime d'assurance-chômage ne prévoyait rien. La Cour a jugé qu'il s'agissait d'une rémunération non exclue de la rémunération assurable aux termes de l'ancien paragraphe 3(1) du Règlement sur l'assurance-chômage (perception des cotisations), maintenant remplacé par l'article 2 du Règlement.

[33]     Dans toutes ces affaires, l'avocate de l'intimé soutient que le lien d'emploi avait été considéré déterminant pour décider qu'il y avait une rémunération assurable. A cet égard, elle cite également la décision de la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Canada (Procureur général) c. Sirois, [1999] A.C.F. no 523 (Q.L.), où il fut décidé qu'une employée qui se prévalait d'un congé de préretraite, pour lequel elle était rémunérée par son employeur sans fournir de prestation de travail, occupait toujours un emploi assurable tant que le lien d'emploi n'avait pas été rompu.

[34]     Selon l'avocate de l'intimé, madame Messier-Lafleur avait conservé son lien d'emploi avec l'employeur tout au cours de sa période d'invalidité. Elle pouvait bénéficier de tous les avantages dont bénéficiaient les autres employés de l'appelante. La rente qu'elle recevait était imposable aux termes des lois fiscales. Bien que les versements d'assurance-indemnité étaient versés par la Financière, celle-ci n'agissait qu'en vertu d'un mandat qui lui avait été confié par l'appelante de gérer son régime d'invalidité. C'est l'appelante qui finançait totalement ce régime et qui, selon l'avocate de l'intimé, en assumait l'entière responsabilité. Tel que jugé dans l'affaire Sirois, précitée, il peut y avoir un contrat de louage de services même en l'absence de prestation de services, dans la mesure où le lien d'emploi n'est pas rompu. Or ici le lien d'emploi n'était pas rompu. L'avocate de l'intimé considère donc que, dans les circonstances, madame Messier-Lafleur a bel et bien reçu une rémunération assurable au cours de la période en litige.

Analyse

[35]     C'est l'article 2 du Règlement qui définit ce qu'est une rémunération assurable. Ainsi, l'alinéa 2(1)a) du Règlement définit une rémunération assurable comme le total de la rémunération d'un assuré provenant d'un emploi assurable qui lui est versé par l'employeur à l'égard de cet emploi. Sont exclus de la rémunération assurable, aux termes du paragraphe 2(3) du Règlement, certaines sommes reçues au titre d'un emploi qui ne sont pas imposables en vertu de certaines dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu, de même que, entre autres, tout montant supplémentaire versé par l'employeur à une personne afin d'augmenter les indemnités d'accident du travail versées par un organisme provincial ou les indemnités d'assurance-salaire versées par une tierce partie.

[36]     Par ailleurs, le paragraphe 1(2) du Règlement définit le terme « employeur » ainsi :

« employeur » s'entend notamment d'une personne qui verse ou a versé la rémunération d'un assuré pour des services rendus dans l'exercice d'un emploi assurable.

[37]     Il ressort des affaires Visan, Banque Nationale du Canada et Gagné, précitées par l'avocate de l'appelante, que les indemnités d'assurance versées par des compagnies d'assurance ou par un organisme provincial ne constituent pas une rémunération assurable au sens de la Loi. Il ressort également de ces décisions que le lien d'emploi n'avait pas été rompu avec l'employeur au moment où l'employé recevait ainsi ses indemnités d'assurance.

[38]     Par ailleurs, il ressort des affaires Quinlan, Nanaimo et Rousseau, précitées par l'avocate de l'intimé, que le salaire reçu par un employé de son employeur, sans qu'il n'y ait eu prestation de travail, constitue une rémunération assurable si ce salaire est versé en raison de son contrat de travail avec l'employeur. Je ne suis toutefois pas du même avis que l'avocate de l'intimé lorsqu'elle dit que dans ces dernières causes, le lien d'emploi avait été considéré déterminant pour décider qu'il y avait rémunération assurable.

[39]     En effet, on a vu plus haut qu'un employé pouvait recevoir une indemnité d'assurance qui ne constituait pas une rémunération assurable malgré le fait qu'il existait toujours un lien d'emploi entre l'employé et l'employeur. Dans les causes citées par l'avocate de l'intimé, c'est plutôt le contrat de travail, particulier à chacun des cas, qui avait été analysé pour déterminer la nature du paiement effectué à l'employé par son employeur.

[40]     A mon avis, la situation présente est la même que celle qui prévalait dans les affaires Visan et Banque Nationale du Canada, précitées, dans lesquelles l'employé recevait des prestations d'assurance-invalidité d'une compagnie d'assurance en vertu d'un régime d'assurance prévu dans son contrat de travail. Dans ces affaires, la compagnie d'assurance ne jouait qu'un rôle d'administrateur où elle seule décidait de l'admissibilité d'un employé à des prestations d'assurance-invalidité, mais où c'était l'employeur qui assumait la totalité du coût du régime. Le fait que l'employé était toujours à l'emploi de l'employeur n'avait pas été retenu comme un argument concluant pour établir autrement la nature du paiement effectué par la compagnie d'assurance. C'est plutôt le fait que les sommes versées ne correspondaient pas à des services rendus mais visaient plutôt à dédommager l'employé en partie de la perte des paiements qui auraient été faits pour des services qu'il aurait rendus s'il n'en avait été empêché par son invalidité, qui a été déterminant dans la conclusion qu'il ne s'agissait pas d'une rémunération assurable.

[41]     A mon avis, les décisions citées par l'avocate de l'intimé n'ont pas d'impact sur les décisions rendues dans les affaires Visanet Banque Nationale du Canada, précitées. Les premières ne font qu'établir qu'un montant versé par un employeur à un employé aux termes d'une entente contractuelle entre les deux, sans intervention d'une tierce-partie, peut constituer une rémunération assurable même s'il n'y a pas de prestation de services. Ce n'est pas la situation qui prévaut ici, puisque l'on est face à une situation où c'est une tierce partie (la Financière) qui après avoir déterminé que l'employé avait droit aux prestations d'assurance-invalidité sans consultation avec l'employeur, prend la responsabilité de verser ces sommes à l'employé. Le fait que c'est l'employeur qui finance le régime d'assurance ne change pas la nature des paiements effectués dans ce contexte.

[42]     Compte tenu des décisions rendues dans les affaires Visan, Banque Nationale du Canada et Gagné, précitées, je considère que les indemnités d'assurance versées par la Financière à madame Messier-Lafleur ne constituaient pas une rémunération assurable aux termes de la Loi et du Règlement.

[43]     Par ailleurs, je ne crois pas que le fait que madame Messier-Lafleur ait travaillé 294 heures au cours de la période en litige change la nature des paiements reçus de la Financière. En effet, ce n'est pas en vertu de son contrat d'emploi avec l'appelante qu'elle a rendu ces services et qu'elle a été rémunérée. C'est en vertu du contrat d'assurance liant l'appelante et la Financière qu'on a demandé à l'appelante de reprendre madame Messier-Lafleur à temps partiel dans une tentative de réadaptation. L'appelante ne faisait ici que collaborer à ce programme de rééducation. Celle-ci n'a d'ailleurs versé aucun salaire à madame Messier-Lafleur pour les heures où elle a travaillé dans le cadre de ce programme. Cette dernière était toujours sous le couvert du régime d'assurance-invalidité.

[44]     Pour les raisons invoquées dans l'affaire Wong, précitée, je suis d'avis que l'indemnité d'assurance-invalidité versée à madame Messier-Lafleur au cours de sa période de réadaptation ne constituait pas non plus une rémunération assurable.

[45]     Pour ces raisons, je suis d'avis d'accueillir l'appel et de modifier la décision rendue par le ministre, en vertu du paragraphe 93(3) de cette Loi sur la base que la rémunération reçue par madame Lise Messier-Lafleur de la Financière


au cours de la période s'échelonnant du 28 novembre 1997 au 28 novembre 1998, totalisant la somme de 16 677 $, ne constituait pas une rémunération assurable au sens du paragraphe 2(1) de la Loi et des articles 1 et 2 du Règlement sur la rémunération assurable et la perception des cotisations.

Signé à Ottawa, Canada, ce 21e jour de février 2002.

« Lucie Lamarre »

J.C.C.I.


No DU DOSSIER DE LA COUR :       2000-1101(EI)

INTITULÉ DE LA CAUSE :               Banque Nationale du Canada c. M.R.N.

LIEU DE L'AUDIENCE :                    Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                  le 29 juin 2001

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :        l'honorable juge Lucie Lamarre

DATE DU JUGEMENT :                    le 21 février 2002

COMPARUTIONS :

Pour l'appelante :                       Me Marie-Hélène Jetté

Pour l'intimé :                            Me Anne Poirier

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER :

Pour l'appelant(e) :

                    Nom :           Me Marie-Hélène Jetté

                   Étude :                   Ogilvy Renault

Pour l'intimé(e) :                        Morris Rosenberg

                                                Sous-procureur général du Canada

                                                Ottawa, Canada

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