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Date: 20011003

Dossier: 2000-2281-GST-I

ENTRE :

CENTRE DE LA CITÉ POINTE CLAIRE,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

La juge Lamarre Proulx, C.C.I.

[1]            Il s'agit d'un appel sous le régime de la procédure informelle de la cotisation dont l'avis porte le numéro T99-G-0007 en date du 10 mai 1999 pour la période allant du 1er juillet 1995 au 31 décembre 1998.

[2]            La question en litige est de savoir si l'appelante a droit d'inclure dans le calcul du crédit de taxe sur les intrants au sens du paragraphe 169(1) de la Loi sur la taxe d'accise (la " Loi "), un paiement de taxe fait à un mandataire apparent de l'intimée relativement à une fourniture.

[3]            Au début de l'audience, l'avocat de l'intimée a demandé de produire une Réponse à l'avis d'appel amendée parce que le contrat du 20 octobre 1997 était au nom de R.N. Bosada & Associates et non R.N. Bosada. L'avocat de l'intimée voulait modifier sa Réponse à l'avis d'appel pour radier une admission que les services de R.N. Bosada avaient été retenus par l'appelante. Selon lui, R.N. Bosada & Associates avait accompli la fourniture et la facture aurait dû être établie à ce nom. L'avocat de l'intimée n'avait aucune preuve qu'il s'agissait d'entités différentes. L'avocat de l'appelante s'est opposé à cette demande au motif qu'elle était tardive et qu'il n'en voyait pas la pertinence. La Cour a refusé la demande aux mêmes motifs.

[4]            L'avocat de l'intimée a informé la Cour que le ministre du Revenu national (le " Ministre ") consentait à la radiation de l'imposition de la pénalité.

[5]            L'appelante avait assigné par subpoena Robert N. Bosada de Toronto. Le subpoena a été signifié le 18 juin 2001 et l'audition de la cause était le 27 juin 2001. On demandait à monsieur Bosada dans l'assignation d'apporter avec lui toutes ses déclarations d'impôt des années 1990 à 1998, ainsi que tous les documents relatifs à son compte sur la taxe sur les produits et services de 1991 à 1998 et tous documents relatifs au compte portant le numéro R-116990961.

[6]            Monsieur Bosada ne s'est pas présenté à l'audience. Il s'est fait représenter par un avocat qui a produit une affirmation solennelle de monsieur Bosada. Cette affirmation indiquait : a) qu'il avait reçu signification du subpoena le 18 juin 2001 à 19h41; b) qu'il ne lui était pas possible de produire tous les documents demandés dans le temps qui lui était accordé; c) que l'allocation de voyage de 196,38 $ était trop peu pour un tel voyage; d) que l'avis qu'on lui donnait était beaucoup trop court parce qu'il avait déjà des engagements pour des voyages à l'étranger. Il attachait à l'affirmation solennelle un billet d'avion émis par Carson Wagonlit en date du 26 juin 2001 et une date de départ du 27 juin. Le billet d'avion a, en effet, été acheté à la veille de l'audition, mais selon l'avocat de monsieur Bosada, ce billet n'a pas été acheté dans le but de se défiler. C'est que les billets seraient toujours achetés à la dernière minute.

[7]            L'avocat de monsieur Bosada a fait valoir que l'on aurait pu avant le 18 juin prévenir monsieur Bosada qu'on lui demanderait de venir témoigner. La réclamation de taxe sur les produits et services (la " TPS ") était pour deux factures en 1997 et en 1998. Il était donc abusif de demander à monsieur Bosada d'amener ses rapports d'impôt fédéral pour 1990 à 1998 inclusivement.

[8]            L'avocat de l'appelante a expliqué que cette dernière a tenté souvent de rejoindre monsieur Bosada depuis 1997, mais toujours sans succès. L'avocat de l'appelante a déposé comme pièce A-1 du courrier recommandé et des télécopies qui lui ont été envoyées. Le courrier recommandé n'a pas été réclamé et il n'y a eu aucune réponse en ce qui concerne les télécopies. L'avocat de l'appelante explique qu'il a demandé les déclarations de revenus pour toutes ces années parce qu'il voulait faire la preuve que les fournitures faites par monsieur Bosada étaient de montants tels qu'il devait être un inscrit pour les fins de la Loi.

[9]            L'avocat de monsieur Bosada informe la Cour qu'il a offert à la partie appelante un document de 1991 qui accorde à monsieur Bosada un numéro de TPS. Il a aussi offert de consigner le témoignage de monsieur Bosada dans une déclaration assermentée indiquant qu'il n'avait jamais été mis au courant de quelque façon qu'on lui avait retiré le droit d'utiliser le numéro de TPS. Cette offre a été refusée.

[10]          La Cour a fait état qu'il s'agissait peut-être d'un cas d'outrage au tribunal ce qui permettrait de faire amener de force le témoin à témoigner. Cependant ceci est utilisé dans les cas où le témoignage est essentiel. À la fin de la preuve, la Cour, après avoir entendu les parties à ce sujet, a déterminé que le témoignage de monsieur Bosada, bien qu'il aurait été pertinent, n'était pas essentiel pour déterminer l'issue de l'appel.

[11]          Le premier témoin de l'appelante a été monsieur Giovanni Cristinziani. Il a expliqué que l'appelante est une société en commandite qui était propriétaire et exploitait un édifice commercial situé dans la Ville de Pointe Claire, Québec. L'appelante a fait construire cet immeuble en 1977. En 1997, monsieur Cristinziani était le président de l'appelante. Cette dernière a désiré vendre l'immeuble et monsieur Bosada a offert ses services pour essayer de trouver un acheteur. Monsieur Cristinziani connaissait monsieur Bosada depuis plusieurs années et il avait déjà fait affaire avec lui par le biais d'autres compagnies dont il avait la gestion. L'appelante elle-même n'a pas fait affaires avec R.N. Bosada, à titre de consultant, à une autre époque qu'en 1997.

[12]          Le 20 octobre 1997, une entente est signée entre R.N. Bosada and Associates et l'appelante où elle accepte de payer un certain pourcentage du prix de vente de son immeuble commercial, vu que R.N. Bosada avait identifié un acheteur possible. L'entente a été déposée comme pièce A-2.

[13]          R.N. Bosada a émis à l'appelante une facture en date du 24 décembre 1997 pour des services de consultation, au montant total de 286 027,05 $, incluant un montant de 17 570 $ relatif à la TPS. Cette facture a été produite comme pièce A-1. Une deuxième facture a été émise le 14 janvier 1998, au montant total de 9 321,52 $, incluant un montant de 572,60 $ relatif à la TPS. Cette facture a été produite comme pièce A-3.

[14]          La facture (pièce A-1) se lit pour la partie pertinente comme suit :

re : Sale of Centre de la Cité Pointe-Claire

Consulting Fee                                                                                                                251 000,00 $

7% GST                                                                                                                               17 570,00 $

6.5% QST                                                                                                                           17 457,05 $

TOTAL                                                                                                                             286 027,05 $

GST # 116990961

[15]          La deuxième facture, (pièce A-3), est identique sauf quant aux nombres.

[16]          Selon monsieur Christinziani, il s'agissait de factures comme des milliers d'autres qu'il a payées pour les entreprises qu'il a gérées.

[17]          L'argent de la vente a été remis en fidéicommis aux avocats Byers Casgrain. Les chèques provenant du compte en fiducie des avocats en question et faits à l'ordre de monsieur Bosada ont été produits comme pièce A-4. On voit deux chèques, un au montant de 286 027,05 $ et le deuxième au montant de 9 321,52 $.

[18]          Monsieur Christinziani a relaté qu'à part ces deux factures, il n'y avait eu rien d'autre en litige lors de la vérification du Ministre. La raison donnée par le vérificateur était que R.N. Bosada n'a jamais été inscrit. Il croit que l'enquêteur a communiqué une fois avec monsieur Bosada, mais cela n'a pas eu de suite et il n'a rien fait par la suite à son souvenir.

[19]          Le deuxième témoin de l'appelante a été monsieur Alain Boulanger, chef de service à la Direction générale de la législation et des enquêtes. Au sein de cette direction, il s'occupe des demandes d'accès à l'information concernant les lois sur les impôts. Monsieur Boulanger a été dans ce poste de juin 1999 jusqu'au 22 mai dernier. Il est au courant de la demande d'accès à l'information présentée par l'appelante en date du 6 février 2001 concernant R.N. Bosada.

[20]          L'avocat de l'intimée s'est opposé à ce témoignage au motif de la non pertinence. Cette opposition a été rejetée.

[21]          L'appelante a déposé comme pièce A-6 une première lettre en date du 12 février 2001, signée par monsieur Boulanger. La pièce A-7 est une lettre en date du 22 février 2001, de monsieur Boulanger donnant avis d'un délai supplémentaire. La dernière réponse a été produite comme pièce A-8. Elle est en date du 6 mars 2001. Elle refuse la demande de divulgation des renseignements.

[22]          La pièce I-2 est une lettre en date du 21 juin 2001 qui indique que la demande aurait dû être acheminée pour la partie Loi sur la taxe d'accise à la Direction de l'accès à l'information de l'Agence des douanes et du revenu du Canada.

[23]          La pièce A-9 est un document qui a été envoyé par monsieur Bosada par télécopieur à son avocat, le 26 juin 2001. Le document a été produit par l'avocat de l'appelante pour faciliter la preuve bien qu'il aurait souhaité la présence même de monsieur Bosada. Il s'agit d'une lettre de Revenu Canada, douanes et accise, adressée à monsieur Bosada, en date du 7 janvier 1991. Le premier paragraphe de cette lettre se lit comme suit :

Thank you for returning your completed GST registration form. You have been assigned the following GST registration number:

R116990961

[24]          Le troisième témoin de l'appelante est monsieur Reynald Gignac, vérificateur en taxe de vente. Le vérificateur a relaté que sa vérification a duré environ deux semaines et que cela était une durée normale pour ce genre de dossier. Le vérificateur a affirmé que dans l'ensemble, c'était un dossier très bien et qu'il n'y a eu aucun problème à l'exception de ces deux factures. Le vérificateur a expliqué que ce sont habituellement les factures les plus importantes qui sont vérifiées et c'est ainsi qu'il a eu en mains celle de 251 000 $ de R.N. Bosada, qui était adressée à l'appelante. La première chose qu'il a remarquée c'est qu'il n'y avait pas de numéro d'inscription de la taxe de vente du Québec (" TVQ ") sur la facture. Le vérificateur a téléphoné à monsieur Bosada pour lui indiquer que le numéro de TVQ ne paraissait pas sur la facture. Monsieur Bosada a confirmé qu'il n'était pas inscrit en TVQ. C'était une erreur de sa part et qu'il rembourserait le client pour la TVQ perçue par erreur. Le vérificateur a alors, vérifié auprès de son Ministère, le numéro de TPS de monsieur Bosada. On l'a rappelé pour lui dire que le numéro de TPS n'était pas valide. Il a communiqué une autre fois avec monsieur Bosada pour lui mentionner que le numéro de TPS était invalide et qu'il apprécierait qu'on lui donne le bon numéro. Ce dernier a confirmé qu'il utilisait toujours ce numéro de TPS sur sa facturation. Dans son rapport, le vérificateur a mentionné que le numéro de TPS apparaissant sur la facture, soit le 116990961, est un numéro invalide et n'a jamais été en vigueur selon les informations disponibles par le Ministère.

[25]          Monsieur Jean-Marc Beaudoin a témoigné à la demande de l'avocat de l'intimée. Il est chef de service, inscription et soutien, à Revenu Québec. Le formulaire d'inscription de monsieur Bosada a été reçu le 4 janvier 1991. Ce compte a été géré par le bureau de Toronto. Il y a eu diverses communications entre le mandataire, monsieur Bosada, et Revenu Canada, à partir du 31 mars 1995. L'agent de Toronto a vérifié les déclarations d'impôt personnel de monsieur Bosada pour les années 1991 à 1994. Monsieur Bosada n'a jamais déclaré de revenus d'affaires dans ses déclarations d'impôt personnel. Le 13 juin 1995, le compte a été fermé. Le Ministère a procédé rétroactivement à l'annulation de l'inscription de monsieur Bosada au 1 er janvier 1991. Une lettre de fermeture a été acheminée à monsieur Bosada, l'informant que le compte a été fermé. Selon le témoin, il y a eu dans ce dossier 29 téléphones et 20 lettres. Le témoin a relaté qu'il arrivait régulièrement que le Ministère ferme des comptes de façon rétroactive. Cette annulation rétroactive se fait habituellement, selon le témoin, dans les cas où il n'y a pas d'activités commerciales déclarées de la part de l'inscrit. Le témoin a répondu à la question à savoir quels étaient les moyens à la disposition d'un acquéreur de services pour vérifier la validité d'un numéro d'inscrit qu'il ne pouvait pas répondre à cela et que cela relevait du service d'information.

Arguments

[26]          L'avocat de l'appelante fait valoir que les deux factures contenaient les informations réglementaires requises : la description des services rendus, soit des services de consultation relatifs à la vente du Centre de la Cité de Pointe Claire, le nom du fournisseur, la date des factures, les montants payables, la mention que les services étaient sujets à la TPS, les montants totaux de TPS payables et le numéro d'inscription du fournisseur au registre de la TPS, soit le numéro 116990961.

[27]          L'avocat fait valoir que ce sont des montants de taxe qui ont été versés à R.N. Bosada, que ce dernier les a perçus à tire de mandataire de l'état et se devait de remettre ces montants de TPS. L'avocat de l'appelante fait valoir que le versement de ces sommes a reçu une attention particulière puisque le versement a été approuvé par monsieur Christinziani et par un important cabinet d'avocats national à même les sommes détenues en fidéicommis.

[28]          L'avocat soumet que les factures en litige contiennent manifestement les informations requises par règlement. Le numéro de TPS avait été attribué au fournisseur en vertu de l'article 241 de la Loi. C'est la totalité de l'information exigée par la Loi. Quand la Loi exige la validité d'un renseignement, elle le spécifie. L'avocat de l'appelante donne l'exemple de l'article 2 de l'Annexe III P. XVI de la Loi ainsi que l'article 362 de la Loi qui utilisent le mot " valide " :

Art. 2      Pour l'application de l'article 1 de la présente partie, " institution agréée " désigne une institution sise au Canada, dont le principal objet est le soin des personnes visées à cet article, et qui détient un certificat valide délivré par le ministre.

Art. 362(3) Certificat d'exemption — Le paragraphe (2) ne s'applique aux fournitures effectuées au profit d'un acquéreur autre que le maître d'oeuvre que si l'acquéreur présente au fournisseur un certificat d'exemption valide concernant les fournitures, délivré par le groupe consultatif.

[29]          Si le numéro d'inscription n'était plus valide au moment de l'émission des factures, l'appelante n'avait, dans les circonstances, ni l'obligation ni les moyens de vérifier le statut de l'inscription du fournisseur, particulièrement dans le contexte où ce dernier était connu de l'appelante et que le numéro apparaissant sur les factures était valide prima facie. L'appelante soumet qu'elle a agi avec diligence et a respecté les obligations que lui impose la Loi.

[30]          L'avocat de l'intimée fait valoir que le fournisseur qui a émis les pièces justificatives n'était pas inscrit au fin de la Partie IX de la Loi ni au moment d'effectuer la fourniture de service acquise par l'appelante, ni au moment d'émettre les pièces justificatives. Il a évité de répéter tel que mentionné dans sa Réponse "ni à tout autre moment". Ainsi, l'appelante n'a pas pu se conformer aux exigences du paragraphe 169(4) de la Loi et n'a pas droit au crédit de taxe sur les intrants pour le montant payé à titre de taxe à R.N. Bosada.

[31]          Les crédits de taxe sur les intrants ont été refusés parce que l'appelante n'a pas obtenu les renseignements suffisants pour établir le montant desdits crédits, y compris les renseignements visés par règlement.

Conclusion

[32]          Les paragraphes 169(1), 169(4), 221(1), 222(1), 241(1), 242(1) et 242(3), pour leur partie pertinente, se lisent ainsi :

169(1)     Règle générale — Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, un crédit de taxe sur les intrants d'une personne, pour sa période de déclaration au cours de laquelle elle est un inscrit, relativement à un bien ou à un service qu'elle acquiert, importe ou transfère dans une province participante, correspond au résultat du calcul suivant si, au cours de cette période, la taxe relative à la fourniture, à l'importation ou au transfert devient payable par la personne ou est payée par elle sans qu'elle soit devenue payable :

A x B

où :

A              représente la taxe relative à la fourniture, à l'importation ou au transfert, selon le cas, qui, au cours de la période de déclaration, devient payable par la personne ou est payée par elle sans qu'elle soit devenue payable;

...

169(4)     Documents — L'inscrit peut demander un crédit de taxe sur les intrants pour une période de déclaration si, avant de produire la déclaration à cette fin :

a)             il obtient les renseignements suffisants pour établir le montant du crédit, y compris les renseignements visés par règlement;

...

221(1)     Perception — La personne qui effectue une fourniture taxable doit, à titre de mandataire de Sa Majesté du chef du Canada, percevoir la taxe payable par l'acquéreur en vertu de la section II.

222(1)     Montants percus détenus en fiducie — La personne qui perçoit un montant au titre de la taxe prévue à la section II est réputée, à toutes fins utiles et malgré tout droit en garantie le concernant, le détenir en fiducie pour Sa Majesté du chef du Canada, séparé de ses propres biens et des biens détenus par ses créanciers garantis qui, en l'absence du droit en garantie, seraient ceux de la personne, jusqu'à ce qu'il soit versé au receveur général ou retiré en application du paragraphe (2).

241(1)     Inscription — Le ministre peut inscrire toute personne qui lui présente une demande d'inscription. À cette fin, il lui attribue un numéro d'inscription et l'avise par écrit de ce numéro ainsi que de la date de prise d'effet de l'inscription.

242(1)     Annulation — Après préavis écrit suffisant donné à la personne inscrite aux termes de la présente sous-section, le ministre peut annuler son inscription s'il est convaincu qu'elle n'est pas nécessaire pour l'application de la présente partie.

242(3)     Avis d'annulation ou de modification — Le ministre informe la personne de l'annulation ou de la modification de l'inscription dans un avis écrit précisant la date de la prise d'effet de l'annulation ou de la modification.

[33]          L'article 3 du Règlement sur les renseignements nécessaires à une demande de crédit de taxe sur les intrants se lit ainsi pour la partie pertinente :

3. Renseignements — Les renseignements visés à l'alinéa 169(4)a) de la Loi, sont les suivants :

a)             lorsque le montant total payé ou payable, selon la pièce justificative, à l'égard d'une ou de plusieurs fournitures est de moins de 30 $ :

(i)             le nom du fournisseur ou son nom commercial;

(ii)            si une facture a été remise pour la ou les fournitures, la date de cette facture;

(iii)           si aucune facture n'a été remise pour la ou les fournitures, la date à laquelle il y a un montant de taxe payée ou payable sur celles-ci;

(iv)           le montant total payé ou payable pour la ou les fournitures;

b)             lorsque le montant total payé ou payable, selon la pièce justificative, à l'égard d'une ou de plusieurs fournitures est de 30 $ ou plus et de moins de 150 $ :

(i)             les renseignements requis à l'alinéa a);

(ii)            le numéro d'inscription attribué au fournisseur conformément à l'article 241 de la Loi;

...

c)              lorsque le montant total payé ou payable, selon la pièce justificative, à l'égard d'une ou de plusieurs fournitures est de 150 $ ou plus :

(i)             les renseignements requis à l'alinéa a) et aux sous-alinéas b)(ii) à (v).

...

                                                                (Le souligné est de moi)

[34]          Je crois utile de citer quelques paragraphes de la Réponse à l'avis d'appel de l'intimée, soit les paragraphes 9, 20 e), 26 et 27, où il y a des affirmations voulant que le numéro d'inscription n'ait jamais existé ou ne soit pas un numéro d'inscription de TPS :

9.              Il nie tel que rédigé le paragraphe 9 de l'avis d'appel, précisant que le numéro apparaissant sur les factures en litige n'est pas un numéro d'inscription de TPS;

20 e)         Plus précisément, l'appelant a fourni au Ministre des pièces justificatives relatives à la demande de CTI au montant de 18 142,60 $ dans le calcul de sa taxe nette pour la période visée qui ne contenaient pas de numéro d'inscription attribué au fournisseur conformément à l'article 241 de la L.T.A.;

26.            Plus précisément, lesdites pièces justificatives fournies au Ministre ne contenaient pas de numéro d'inscription attribué au fournisseur conformément à l'article 241 de la L.T.A.;

27.            Plus précisément, le fournisseur qui a émis lesdites pièces justificatives n'était pas inscrit aux fins de la Partie IX de la L.T.A. au moment d'effectuer la fourniture de service acquise par l'appelant ni au moment d'émettre lesdites pièces justificatives ni à tout autre moment.

[35]          Ce qui frappe dans l'analyse de ce dossier c'est que les faits sur lesquels le Ministre s'est prétendument fondé ne sont pas exacts en ce qui concerne le numéro d'inscription du fournisseur. Il est étonnant que les faits tels que relatés par le témoin de l'intimée, monsieur Jean-Marc Beaudoin n'aient pas été décrits dans la Réponse. Ce qui est aussi étonnant c'est le motif pour lequel l'avocat de l'intimée au début de l'audience demandait de modifier la Réponse. Ce n'était pas pour rectifier la description des événements concernant le numéro d'inscription, mais pour insister sur le détail que l'entente avait été passée avec R.N. Bosada and Associates plutôt qu'avec R.N. Bosada, sans avoir de preuve qu'il ne s'agissait pas exactement de la même personne et bien que la facture ait été établie par celui qui avait rendu le service soit R.N. Bosada.

[36]          Il est aussi étrange que l'avocat de l'intimée se soit opposé à la preuve faite par l'avocat de l'appelante concernant sa demande d'accès à l'information concernant R.N. Bosada. Il est surtout à noter qu'il n'a fait aucune preuve quant aux moyens à la disposition de l'acquéreur d'un service pour vérifier la validité d'un numéro d'inscription.

[37]          À mon sens, le litige dans cet appel, fait appel à la théorie du mandat. Si l'appelante a payé le montant de taxe inscrit à la facture, c'est que selon le régime de la Loi la personne qui effectue une fourniture taxable doit percevoir la taxe payable à titre de mandataire de Sa Majesté du chef du Canada et la personne qui acquiert le service doit payer la taxe payable à cette personne et non à Sa Majesté. C'est la Loi qui de par son régime fait appel aux notions du mandat. Certaines dispositions de la Loi prévoient les devoirs imposés au mandataire. Je ne crois pas parce que la Loi semble muette en ce qui concerne les devoirs du mandant que l'on ne puisse pas se référer aux notions du droit civil concernant le mandat. Dans la décision de la Cour Suprême du Canada dans Verreault & Fils c. P.-G. Québec, [1977] 1 R.C.S. 41, à la page 47 le juge Pigeon s'est ainsi exprimé :

Sa Majesté est évidemment une personne physique, et je cherche en vain le principe d'après lequel les règles générales du mandat, y compris celles du mandat apparent, ne lui seraient pas applicables. ...

[38]          Il y a en droit civil certaines obligations imposées à un mandant. Je me réfère à l'article 2163 du Code civil du Québec :

2163. Celui qui a laissé croire qu'une personne était son mandataire est tenu, comme s'il y avait eu mandat, envers le tiers qui a contracté de bonne foi avec celle-ci, à moins qu'il n'ait pris des mesures appropriées pour prévenir l'erreur dans des circonstances qui la rendaient prévisible.

2163. A person who has allowed it to be believed that a person was his mandatory is liable, as if he were his mandatory, to the third person who has contracted in good faith with the latter, unless, in circumstances in which the error was foreseeable, he has taken appropriate measures to prevent it.

[39]          La Loi prévoit que celui qui effectue une fourniture taxable doit percevoir la taxe payable à titre de mandataire de Sa Majesté. Comment l'acquéreur d'un service peut-il savoir si la personne qui effectue une fourniture est un mandataire authentique de Sa Majesté? Ni l'un ni l'autre des vérificateurs du Ministre n'a pu faire état des mesures prises par le Ministre pour l'information des acquéreurs de services. Même l'avocat de l'intimée, au moment de la rédaction de la Réponse, ne savait pas je crois, car la bonne foi se présume, que le numéro d'inscription avait déjà été attribué et que plusieurs années par la suite il avait été annulé rétroactivement.

[40]          Dans la présente affaire, il ne s'agit pas d'un cas de manque de diligence de la part de l'acquéreur du service. Le vérificateur du Ministre n'avait rien à reprocher à la tenue des dossiers de l'appelante. Les factures en question ont été revues par le gestionnaire de l'entreprise et par des avocats. Il s'agit de circonstances où le mandant a laissé croire aux tiers qu'une personne était son mandataire et où il n'a pas fourni les services d'information nécessaires à ces tiers. Le mandant n'est pas sans moyens. Il a la capacité de fournir aux tiers acquéreurs les renseignements concernant la validité d'un numéro d'inscription et le nom de l'inscrit. Je suis d'avis que n'ayant pas pris les mesures appropriées pour prévenir l'erreur, il ne peut contester la validité de l'inscription à l'égard de l'appelante. Les pièces justificatives doivent donc être acceptées pour les fins du crédit de taxe sur les intrants car les renseignements requis par la Loi s'y trouvaient apparemment.

[41]          L'appel est accordé, avec frais.

Signé à Montréal, Québec, ce 3e jour d'octobre 2001.

" Louise Lamarre Proulx "

J.C.C.I.

No DU DOSSIER DE LA COUR :        2000-2281(GST)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :                                 Centre de la Cité Pointe Claire et La Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                      Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                    Le 27 juin 2001

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :         L'honorable juge Louise Lamarre Proulx

DATE DU JUGEMENT :                      Le 3 octobre 200l

COMPARUTIONS :

Avocat de l'appelante :                        Me Stéphane Eljarrat-Lambotin

Avocat de l'intimée :                            Me Benoit Denis

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

Pour l'appelante :

                                Nom :                       Me Stéphane Eljarrat-Lambotin

                                Étude :                     Ravinsky, Ryan, avocats

                                                                                Montréal (Québec)

Pour l'intimé(e) :                                    Morris Rosenberg

                                                                                Sous-procureur général du Canada

                                                                                Ottawa, Canada

2000-2281(GST)I

ENTRE :

CENTRE DE LA CITÉ POINTE CLAIRE,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 27 juin 2001 à Montréal (Québec) par

l'honorable juge Louise Lamarre Proulx

Comparutions

Avocat de l'appelante :                        Me Stéphane Eljarrat-Lambotin

Avocat de l'intimée :                            Me Benoît Denis

JUGEMENT

L'appel de la cotisation de la taxe sur les produits et services établie en vertu de la Loi sur la taxe d'accise, dont l'avis est daté du 10 mai 1999 et qui porte le numéro T99-G-0007, est accordé, avec frais, selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Montréal, Québec, ce 3e jour d'octobre, 200l.

" Louise Lamarre Proulx "

J.C.C.I.

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