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97-2016(IT)I

ENTRE :

VIATEUR CHÉNARD,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appels entendus le 2 mars 1998 à Québec (Québec) par

l'honorable juge Louise Lamarre Proulx

Comparutions

Pour l'appelant :                                            L'appelant lui-même

Avocate de l'intimée :                                    Me Anne-Marie Boutin

JUGEMENT

          Les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1992 et 1993 sont accordés, sans frais, pour permettre au Ministre de cotiser à nouveau l'appelant sur la base des admissions mentionnées au paragraphe 10 des motifs du jugement ci-joints. Pour l'année 1994, l'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 30e jour de juin 1998.

« Louise Lamarre Proulx »

J.C.C.I.


Date: 19980630

Dossier: 97-2016(IT)I

ENTRE :

VIATEUR CHÉNARD,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Lamarre Proulx, C.C.I.

[1]      Il s'agit d'appels par voie de la procédure informelle à l'encontre de nouvelles cotisations établies par le ministre du Revenu national (le « Ministre » ), pour les années d'imposition 1992, 1993 et 1994, en application de l'article 253 de la Loi sur la taxe d'accise (la « Loi » ).

[2]      Cet article prévoit que dans le cas où une taxe sur les produits et services est payable par un particulier, salarié d'un inscrit ou associé d'une société de personnes qui est un inscrit particulier, ce particulier, salarié ou associé, a droit à un remboursement de taxe calculé selon la formule prévue à l'article pour la taxe payée à l'égard de dépenses qui sont déductibles dans le calcul du revenu provenant de la société.

[3]      Le remboursement prévu à cet article est à l'égard de dépenses faites par le particulier pour tirer un revenu de son emploi ou de la société, dépenses qui ne lui ont pas été remboursées par l'employeur ou la société et qui sont déductibles dans le calcul de son revenu d'emploi ou de société en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu.

[4]      Lorsqu'un particulier présente une demande de remboursement en vertu de l'article 253 de la Loi, le paragraphe 253(5) de la Loi prévoit que les cotisations établies relativement au remboursement ainsi que les appels le cas échéant, sont faits selon les dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu.

[5]      Dans le présent appel, il s'agit d'un associé et je ne parlerai plus que d'un particulier qui est un associé. La question en litige est de savoir si les dépenses au sujet desquelles l'appelant réclame un remboursement de la taxe ont été engagées pour tirer un revenu de la société.

[6]      Les faits sur lesquels le Ministre s'est appuyé pour établir ses nouvelles cotisations sont décrits au paragraphe 5 de la Réponse à l'avis d'appel (la « Réponse » ) comme suit :

a.          au cours des années d'imposition en litige, l'appelant a réclamé le remboursement de la taxe sur les produits et services à l'intention des salariés et associés, en considérant les montants suivants :

                                                                  1992               1993                  1994     

            Dépenses nettes donnant

            droit au remboursement             21 088,38 $      22 292,73 $      22 463,62 $

            Remboursement réclamé            1 379,61 $      1 458,40 $      1 469,58 $

b.          au cours des années d'imposition en litige, l'appelant détenait une franchise dans une proportion de 50 % avec son épouse dans Phyto Centre de Lévis Enrg. (la « société » );

c.          au cours des années d'imposition en litige, l'appelant, par l'entremise de la société, a rendu des services à Titrex International Ltée pour lesquels il recevait des ristournes et ou des frais de gestion;

d.          au cours des années d'imposition en litige, la société n'était pas une entreprise enregistrée auprès de la TPS;

e.          de plus, les dépenses sur lesquelles la réclamation est basée appartiennent à la société;

f.           la taxe sur les produits et services à l'intention des salariés et associés a été révisé à néant selon l'article 240 et le paragraphe 253(1) de la Loi sur la taxe d'accise, pour les années d'imposition 1992, 1993 et 1994.

[7]      En ce qui concerne l'alinéa 5b) de la Réponse, l'avocate de l'intimée a fait savoir à la Cour qu'à la suite d'explications fournies par l'appelant, le matin de l'audition, il fallait lire dans une proportion de 25 à 50 % avec son épouse et ou d'autres associés.

[8]      En ce qui concerne l'alinéa 5d) de la Réponse, toujours à la suite d'explications reçues le matin même, l'avocate de l'intimée acceptait que la société eût changé de nom pour enlever l'abréviation Enrg. Il existait bien une société Phyto Centre de Lévis qui était un inscrit. Cette société a été un inscrit pour les années 1992 et 1993. En 1994, elle a été dissoute pour être transformée en corporation.

[9]      L'énoncé de l'alinéa 5e) de la Réponse a été expliqué par madame Thérèse Racine, vérificatrice à Revenu Canada. Elle a expliqué que selon une entente administrative avec les fonctionnaires de Douanes et Accise, le crédit de taxe sur les intrants sera accordé à la société sur les dépenses qui ont été engagées par cette dernière. Le remboursement des particuliers en vertu de l'article 253 se fera à l'égard de certaines dépenses qui sont engagées par l'associé lui-même comme les dépenses afférentes aux repas et à l'automobile. C'est dans ce sens qu'il faut lire l'énoncé de l'alinéa 5d) de la Réponse. Car en ce qui concerne l'application de l'article 253, il faut nécessairement que les dépenses dont on réclame le remboursement de la taxe soient des dépenses faites pour gagner un revenu d'associé.

[10]     Au début de l'audience, l'avocate de l'intimée a fait certaines admissions. Après avoir entendu le témoignage de l'appelant, elle se demandait si ces admissions étaient correctes vu que les dépenses engagées l'ont été pour gagner du revenu de commissions comme un travailleur indépendant et non comme un associé. De toute façon elle a mis par écrit ces admissions qui sont les suivantes :

L'intimée, à la lumière des faits dont elle avait eu connaissance avant l'audition, était prête à admettre que l'appelant pouvait réclamer un remboursement de la TPS à l'égard de certaines dépenses. Elle en a fait part à la Cour dès le début de l'audition.

L'intimée a donc admis que l'appelant pouvait réclamer un remboursement de la TPS à l'égard des dépenses suivantes :

1992

70% des dépenses d'huile et essence :                                        1 770,09 $

70% des dépenses Entretien et réparation :                                             1 486,10 $

70 % de la dépenses d'amortissement :                                       3 237,50 $

            Total des dépenses et

            amortissement donnant droit au

            remboursement de la TPS :                                                        6 493,69 $

1993

70% des dépenses d'essence:                                                                1 351,79 $

70% des dépenses Entretien et réparation :                                                977,95 $

70% de la dépense d'amortissement :                                                     3 481,84 $

            Total des dépenses et

            amortissement donnant droit au

            remboursement de la TPS :                                                        5 811,58 $

[11]     L'appelant est directeur-adjoint d'une école et en 1992 son revenu d'emploi était de 57 037,11 $. Il a expliqué à la Cour que la société Phyto Centre de Lévis avait acquis en 1990 une franchise au coût de 25 000 $ de Les Produits Naturels Titrex International Limitée ( « Titrex » ), pour distribuer des produits faits à base de plantes. Phyto Centre de Lévis aurait eu sur une courte période de temps en 1993 une réceptionniste. Autrement, c'était les sociétaires qui s'occupaient à tour de rôle de la réception. Le centre était ouvert trois jours par semaine entre 17 h et 22 h, aux fins de recrutement de vendeurs par les sociétaires et de la distribution des produits. Les vendeurs et les sociétaires venaient s'approvisionner au centre pour ensuite vendre les produits au public. Le centre n'était pas ouvert au public.

[12]     Les dépenses de la société en 1992 ont été au montant de 11 156 $. C'est ce qui paraît à la pièce I-1. C'était selon le témoignage de l'appelant à la page 36 des notes sténographiques les seules dépenses qui devaient être partagées par les sociétaires.

[13]     Ainsi que l'a expliqué l'appelant, chaque sociétaire pouvait personnellement, selon le degré de sa motivation, engager les dépenses qu'il jugeait utile dans le but de gagner des « royautés » qui étaient payées par Titrex. Ces « royautés » n'étaient pas partagées par les autres sociétaires et les dépenses n'étaient pas remboursées par la société. L'appelant touchait des commissions de 5 % sur les ventes faites par les vendeurs qu'il avait recrutés ainsi que sur ses propres ventes. Ces montants lui étaient versés mensuellement et n'avaient aucun rapport avec sa part dans la société.

[14]     L'appelant a gagné en « royautés » en 1992 des Titrex 14 969,37 $. Toutefois, les dépenses de l'appelant ont été au montant de 21 088,38 $. En plus de ces dépenses, pour la même année en 1992, il y a pour le Phyto Centre de Lévis des dépenses au montant de 11 156 $. Le profit de la société fut de 597,41 $. Il a été divisé entre les quatre sociétaires pour une part individuelle de 149,35 $. Le résultat final des entreprises de l'appelant en 1992 a été une perte de 7 052,53 $ qui a été déduite du revenu d'emploi.

[15]     Les dépenses de la société ont été partagées entre les associés ainsi que les revenus. Les dépenses faites par l'appelant n'ont pas été partagées entre les autres sociétaires et ces derniers n'ont pas partagé dans ses « royautés » .

[16]     L'appelant attire l'attention de la Cour sur l'article 5 de la Convention des sociétaires, qui se lit ainsi :

Art. 5 DEVOIR DU SOCIÉTAIRE

Chaque sociétaire, pour évoluer de plein droit dans la société, doit maintenir en tout temps un volume mensuel minimal de 500 points de vente. S'il est en défaut de cette obligation, la part des revenus normalement répartis également entre les sociétaires lui sera retirée et sera redistribuée entre les autres sociétaires tant et aussi longtemps qu'il est en défaut. Cet état ne le libère aucunement de sa responsabilité de payer les charges mensuelles du phyto-centre.

[17]     Il fait donc valoir que les dépenses qu'il a engagées personnellement étaient des dépenses faites pour maintenir son statut d'associé. Il prétend donc que les dépenses sont des dépenses faites pour gagner un revenu d'associé.

[18]     L'avocate de l'intimée fait valoir que les dépenses engagées l'ont été pour l'entreprise de vendeur à commissions et non pour celle d'un d'associé d'un inscrit.

[19]     Un travailleur indépendant en tant que fournisseur de services peut être un inscrit mais l'appelant ne l'était pas et il s'agit évidemment d'autres dispositions de la Loi que celle relative au remboursement de la taxe à l'associé d'une société inscrite, remboursement prévu à l'article 253 de la Loi ci-dessous.

[20]     L'article 253 de la Loi se lit comme suit :

253. (1) Sous réserve des paragraphes (2) et (3), le ministre rembourse un particulier - associé d'une société de personnes, laquelle est un inscrit, ou salarié d'un inscrit autre qu'une institution financière désignée - pour chaque année civile relativement à un bien ou à un service, si les conditions suivantes sont réunies :

a)          un instrument de musique, un véhicule à moteur, un aéronef ou un autre bien ou service est considéré comme ayant été acquis, importé ou transféré dans une province participante par le particulier, ou serait ainsi considéré si ce n'était le paragraphe 272.1(1);

a.1)       dans le cas d'un particulier qui est un associé d'une société de personnes, l'instrument, le véhicule, l'aéronef ou l'autre bien ou service acquis, importé ou transféré dans une province participante n'a pas été acquis ou importé par le particulier pour le compte de la société de personnes;

b)          le particulier a payé la taxe (appelée « taxe payée par le particulier » au présent paragraphe) relative à l'acquisition ou à l'importation du bien ou du service ou relative au transfert du bien dans une province participante, selon le cas;

c)          dans le cas de l'acquisition ou de l'importation d'un instrument de musique, ou de son transfert dans une province participante, le particulier n'a pas droit au crédit de taxe sur les intrants afférent.

Le montant remboursable correspond au résultat du calcul suivant :

A x (B - C)

où :

A         représente :

a)          dans le cas où la taxe payée par le particulier ne comprend que la taxe imposée par le paragraphe 165(1) ou les articles 212 ou 218, 7/107,

b)          dans le cas où la taxe payée par le particulier ne comprend aucune de ces taxes, 8/108,

c)          dans les autres cas, 15/115;

B           l'un des montants suivants, déduit en application de la Loi de l'impôt sur le revenu dans le calcul du revenu du particulier pour l'année tiré d'une charge ou d'un emploi ou provenant de la société et pour lequel le particulier n'a pas reçu d'allocation d'une personne, exception faite d'une allocation que celle-ci ne considère pas, selon l'attestation qu'elle a faite en la forme déterminée par le ministre et contenant les renseignements requis, comme étant, au moment de son versement, soit une allocation raisonnable pour l'application des sous-alinéas 6(1)b)(v), (vi), (vii) ou (vii.1) de cette loi, soit, si cette personne est une société dont le particulier est un associé, une allocation qui serait une allocation raisonnable pour l'application des sous-alinéas 6(1)b)(v), (vi), (vii) ou (vii.1) de cette loi si le particulier était un salarié de cette société à ce moment :

a)          la déduction pour amortissement applicable à l'instrument de musique, au véhicule ou à l'aéronef;

b)          le montant relatif à l'acquisition ou à l'importation de l'autre bien importé par le particulier, n'excédant pas le total de la valeur de ce bien, déterminée selon l'article 215, et de la taxe calculée sur cette valeur;

c)          le montant relatif à la fourniture par bail, licence ou accord semblable de l'instrument de musique, du véhicule ou de l'aéronef, à la fourniture du service ou à la fourniture au Canada de l'autre bien, selon le cas;

C          le total des montants que le particulier a reçus ou a le droit de recevoir de son employeur ou de la société de personnes, selon le cas, à titre de remboursement du montant déduit visé à l'élément B.

253(2) Restriction du remboursement à un associé - Le montant remboursable relativement à un bien ou à un service qui est payable pour une année civile au particulier qui est un associé d'une société de personnes ne peut dépasser le montant qui correspondrait au crédit de taxe sur les intrants de la société relativement au bien ou au service pour la dernière période de déclaration de son dernier exercice se terminant au cours de l'année civile, si, à la fois :

            ...

253(3) Demande de remboursement - Le remboursement pour une année civile est accordé si le particulier, dans les quatre ans suivant la fin de l'année, présente une demande au ministre, en la forme déterminée par celui-ci et contenant les renseignements requis, avec la déclaration de revenu qu'il produit en application de la partie I de la Loi de l'impôt sur le revenu.

253(5) Dispositions applicables de la Loi de l'impôt sur le revenu - Lorsqu'un particulier présente une demande de remboursement en vertu du présent article :

a)          les paragraphes 160.1(1), 164(3), (3.1) et (4) de la Loi de l'impôt sur le revenu s'appliquent, avec les adaptations nécessaires, aux fins du calcul des intérêts sur le montant remboursable ou d'un montant remboursé en trop comme si ces montants étaient, selon le cas, un remboursement d'impôt payé en vertu de la partie I de cette loi ou un paiement en trop d'un tel remboursement; toutefois, le paragraphe 280(1) ne s'applique pas aux fins du calcul relativement au remboursement;

b)          les articles 165 à 167 et la section J de la partie I de la Loi de l'impôt sur le revenu s'appliquent, avec les adaptations nécessaires, aux oppositions et aux appels portant sur une cotisation établie relativement au remboursement comme s'il s'agissait d'une cotisation d'impôt payable en vertu de la partie I de cette loi; toutefois, les articles 301 à 311 ne s'appliquent pas relativement à la cotisation.

                                                                             (Le souligné est de moi.)

[21]     Le paragraphe 253(1) de la Loi demande que la contrepartie de la fourniture du bien ou du service soit susceptible d'être déduite dans le calcul du revenu du particulier tiré de la société. En d'autres termes, la dépense doit pouvoir être déduite par le particulier dans le calcul de son revenu provenant de la société. Or ici, la preuve a clairement révélé que les dépenses n'étaient pas des dépenses faites pour gagner un revenu de la société, mais pour gagner un revenu de travailleur autonome. Ceci ressort clairement du fait que les dépenses et les revenus substantiels relativement aux « royautés » n'étaient pas partageables entre les sociétaires. L'article 5 de la Convention des sociétaires à laquelle l'appelant s'est référé, s'il a la signification que l'appelant lui donne, ne change pas la nature des dépenses. Les dépenses ne sont pas relatives à l'entreprise de la société mais à celle de l'appelant. En ce qui concerne l'année 1994, il y a la raison additionnelle que l'appelant n'était pas un associé d'une société inscrite mais un actionnaire, la société ayant été abandonnée et la corporation constituée.

[22]     Pour les années 1992 et 1993, les appels sont accordés pour permettre au Ministre de cotiser à nouveau l'appelant sur la base des admissions mentionnées au paragraphe 10 de ces motifs. Pour l'année 1994, l'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 30e jour de juin, 1998.

« Louise Lamarre Proulx »

J.C.C.I.


No DU DOSSIER DE LA COUR :       97-2016(IT)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :               Viateur Chénard et La Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                    Québec (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                  2 mars 1998

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :        l'honorable juge Louise Lamarre Proulx

DATE DU JUGEMENT :                    le 30 juin 1998

COMPARUTIONS :

Pour l'appelant :                        l'appelant lui-même

Pour l'intimée :                          Me Anne-Marie Boutin

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER :

Pour l'appelant :

                   Nom :          

                   Étude :                  

Pour l'intimée :                          George Thomson

                                                Sous-procureur général du Canada

                                                Ottawa, Canada

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