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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

2002-201(GST)I

ENTRE :

NELSON CONSULTING SERVICES LIMITED,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 31 octobre 2002 à Halifax (Nouvelle-Écosse) par

l'honorable juge E. A. Bowie

Comparutions

Représentante de l'appelant :       Thelma Blinn

Avocate de l'intimée :                 Me Christa Mackinnon


JUGEMENT

          L'appel interjeté à l'encontre de lacotisation établie en vertu de la Loi surla taxe d'accise pour la période du 1er juin 1997 au 31 août 1999, dont l'avis est daté du 1er février 2000 et porte le numéro 01CB0304852, est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour de novembre 2002.

« E. A. Bowie »

J.C.C.I

Traduction certifiée conforme

ce 29e jour de septembre 2003.

Yves Bellefeuille, réviseur


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Date : 20021112

Dossier : 2002-201(GST)I

ENTRE :

NELSON CONSULTING SERVICES LIMITED,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Bowie, C.C.I.

[1]      Le présent appel porte sur une cotisation établie en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d'accise (la « Loi » ) relativement à la taxe de vente harmonisée ( « TVH » ). L'appelante est une petite entreprise familiale que M. et Mme Blinn de Lunenburg, en Nouvelle-Écosse, ont bâtie pendant environ vingt ans. En avril 2000, ils se sont trouvés confrontés à une cotisation relative à un montant de TVH impayé de 70 500 $, auquel des intérêts et des pénalités se sont ajoutés, ce qui en a fait une dette de plus de 75 000 $. Il n'est pas exagéré de dire que ce qui était une entreprise de retraite modestement prospère est devenu un cauchemar pour eux. Une grande partie de leur problème, bien que ce ne soit pas la seule cause, résulte d'une modification peu connue qui a été apportée à une vague définition se trouvant dans l'une des nombreuses annexes de la Loi. Celle-ci impose la TVH dans les Maritimes et la TPS dans le reste du pays.

[2]      Les faits ne sont pas contestés. M. Blinn a pris sa retraite vers 1980 après avoir occupé un poste où il avait acquis des connaissances et des compétences dans l'application des systèmes d'information. Il a lancé une petite entreprise de consultation dans ce domaine. Avec le temps, elle a fini par englober la vente de matériels et de logiciels informatiques ainsi que le service après-vente. Plus tard encore, elle incluait l'enseignement des aptitudes informatiques. Il est important de préciser, et cela n'est pas contesté par l'appelante, que l'enseignement n'était pas l'objectif initial de cette entreprise et qu'il n'est jamais devenu son activité principale. La plupart des étudiants qui se sont inscrits aux cours l'avaient fait dans le cadre d'un programme de recyclage professionnel établi et financé par le ministère du gouvernement fédéral connu sous le nom de Développement des ressources humaines Canada. Ce ministère payait leurs frais de scolarité soit directement à l'école, soit indirectement en remboursant aux étudiants les sommes qu'ils avaient versées à l'école. Il est également important de souligner, et ce n'est pas contesté, que l'école veillait à tout moment à ce qu'elle soit toujours reconnue par le ministre du Développement des ressources humaines aux fins du crédit d'impôt qui est accordé aux étudiants en vertu de l'article 118.5 de la Loi de l'impôt sur le revenu.

[3]      À ce moment, je dois me reporter aux dispositions applicables de la Loi qui régissent l'incidence de la TPS et de la TVH sur les frais de scolarité. L'article 165 prévoit l'imposition de l'impôt sur les transactions commerciales; c'est la règle générale. Toutefois, un grand nombre de produits et de services en sont exonérés. Il est bien connu que la plupart des programmes de formation tombent dans la catégorie des services exonérés. Cela est prévu par l'article 8, partie III, annexe V, qui porte :

La fourniture, sauf une fourniture détaxée, effectuée par une administration scolaire, une école de formation professionnelle, un collège public ou une université, d'un service consistant à donner à des particuliers des cours ou des examens qui mènent à quelque certificat, diplôme, permis ou acte semblable, ou à des classes ou des grades conférés par un permis, attestant la compétence de particuliers dans l'exercice d'un métier, si, selon le cas :

a)          l'acte, la classe ou le grade est visé par un règlement fédéral ou provincial;

b)          le fournisseurest soumis aux lois fédérales ou provinciales concernant les écoles de formation professionnelle;

c)          le fournisseur est un organisme sans but lucratif ou un organisme de bienfaisance.

Cette exemption doit être conjuguée à la définition de l'expression « école de formation professionnelle » qui figure dans l'article 1, partie III, annexe V.Voici cette définition telle qu'elle avait été adoptée à l'origine :

« école de formation professionnelle » Institution établie et administrée principalement pour donner des cours par correspondance ou des cours de formation qui permettent à l'étudiant de développer ou d'améliorer une compétence professionnelle. Y est assimilé l'établissement d'enseignement reconnu par le ministre de l'Emploi et de l'Immigration pour l'application du paragraphe 118.5(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu.

Elle est restée dans cette forme jusqu'à ce qu'elle soit modifiée par L.C. 1997, ch. 10, art. 97, notamment de façon à supprimer la partie suivante : « Y est assimilé l'établissement d'enseignement reconnu par le ministre de l'Emploi et de l'Immigration pour l'application du paragraphe 118.5(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu. » Bien que la loi modificative n'a reçu la sanction royale que le 20 mars 1997 et n'a été publiée dans la partie III de laGazette du Canada que le 9 mai 1997, elle a été rendue applicable aux fournitures faites après 1996. Par conséquent, à compter de janvier 1997, l'appelante n'était plus qualifiée en tant qu' « école de formation professionnelle » et la TVH devenait ainsi exigible relativement aux programmes de formation qu'elle offrait.

[4]      Mme Blinn occupait le poste d'administratrice de l'école à l'époque qui nous intéresse. Elle a déclaré qu'elle s'informait fréquemment, en fait au début de chaque cours, auprès du service d'information téléphonique de Revenu Canada (ou plus récemment l'Agence des douanes et du revenu du Canada) pour savoir si l'école devait exiger la TVH sur les frais de scolarité; on lui répondait toujours « non » . Revenu Canada a effectué une vérification en1995 et, bien entendu, aucun problème ne s'est posé en ce qui concerne la TPS (comme c'était alors le cas) puisque l'appelante était alors qualifiée en tant qu'école de formation professionnelle parce qu'elle était reconnue par le ministre du Développement des ressources humaines. Ce n'est que lorsqu'une autre vérification a été effectuée en2000 que M. et Mme Blinn ont appris qu'ils auraient dû percevoir et remettre la TVH au début de 1997. À ce moment, la responsabilité de l'appelante pour la TVH non perçue relativement aux frais de scolarité s'élevait à 24 417,40 $. Des pénalités et des intérêts ont été établis à l'origine en même temps que la taxe non perçue; l'intimée y a renoncé depuis et ils ne sont pas en litige à ce moment. Les autres aspects de l'évaluation ne sont pas contestés non plus.

[5]      Naturellement, M. et Mme Blinn estiment qu'ils ont fait tout ce qui était en leur pouvoir pour se conformer à la loi. Ce cas démontre certainement les risques inhérents à l'exploitation d'une entreprise même modeste dans ce pays sans le recours à des conseils professionnels réguliers. Je ne doute nullement que les Blinn avaient bien l'intention de se conformer à la Loi et pensaient qu'ils veillaient soigneusement à cela. Malheureusement, les demandes de renseignements fréquentes qu'ils ont faites auprès de Revenu Canada ne sont d'aucun secours; je suis lié par la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Inland Industries,[1] selon laquelle le fait de s'être fié aux mauvais conseils des agents du ministre ne peut soustraire un contribuable à l'application de la loi. La loi ne comporte aucune ambiguïté à ce sujet; la TVH était exigible et l'appelant ne l'a ni perçue ni remise. Je dois donc rejeter l'appel.

[6]      Le ministre a déjà reconnu qu'il s'agit d'une situation particulièrement dure pour les contribuables; en mai 2000, il a exercé son pouvoir en vertu de l'article 281.1 de la Loi pour renoncer aux pénalités et aux intérêts qui découlaient de la taxe sur les frais de scolarité. Étant donné que les Blinn ont consulté les fonctionnaires de Revenu Canada et que 34 des 39 étudiants dont les frais sont touchés par la taxe non perçue fréquentaient l'école aux frais du gouvernement du Canada, j'estime qu'il s'agit d'un cas où le ministre devrait songer à recommander au gouverneur en conseil de faire remise de la TVH sur les frais, ou du moins la partie qui est attribuable aux frais payés par le gouvernement du Canada, en vertu de l'article 23 de la Loi sur la gestion des finances publiques. L'article 224 de la Loi sur la taxe d'accise[2] autorise le fournisseur, dans certaines circonstances, à intenter une action en justice pour la taxe qu'il n'a pas perçue, mais il est peu probable que l'appelante en l'espèce puisse satisfaire aux conditions préalables de cet article. Même si cela était possible, elle ne devrait pas avoir à poursuivre l'État pour récupérer la taxe qu'elle devait percevoir de l'État afin de la remettre au même État. Il n'est pas tout à fait hors de propos de constater que si l'appelante avait perçu la taxe sur les frais de scolarité, alors, dans la mesure où ils avaient été payés par un ministère du gouvernement fédéral, la taxe aurait été remise, au profit du budget de fonctionnement de ce ministère, en vertu du Décret de remise concernant la TPS accordée aux ministères fédéraux, C.P. 1990-2854, qui porte ce qui suit :

Sur recommandation du Conseil du Trésor et en vertu de l'article 23 de la Loi sur la gestion des finances publiques, il plaît à Son Excellence le Gouverneur général en conseil, le jugeant d'intérêt public, de faire remise de la taxe payée ou payable par les ministères en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d'accise.

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour de novembre 2002.

« E. A. Bowie »

J.C.C.I

Traduction certifiée conforme

ce 29e jour de septembre 2003.

Yves Bellefeuille, réviseur



[1]          M.R.N. c. Inland Industries Ltd., [1974] R.C.S. 514, 23 D.L.R. (3d) 677, 72 D.T.C. 6013 à la page 6017.

[2]          art. 224             Le fournisseur, ayant effectué une fourniture taxable au profit d'un acquéreur et tenu par la présente partie de percevoir la taxe de celui-ci relativement à la fourniture, qui s'est conformé au paragraphe 223(1) en ce qui concerne la fourniture et qui a rendu compte au receveur général de la taxe payable relativement à la fourniture, ou la lui a versée, sans la percevoir de l'acquéreur peut intenter, devant un tribunal compétent, une action en recouvrement de la taxe de l'acquéreur comme s'il s'agissait d'un montant que celui-ci lui doit.

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