Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 

 

 

Dossier : 2004-3272(EI)

ENTRE :

MARTHA SIMMS,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 2 juin 2005, à Corner Brook (Terre‑Neuve‑et‑Labrador),

 

devant l’honorable juge Campbell J. Miller

 

Comparutions :

 

Pour l’appelante :

L’appelante elle‑même

Avocat de l’intimé :

Me Edward Sawa

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

            L’appel interjeté en vertu du paragraphe 103(1) de la Loi sur l’assurance‑emploi est rejeté, et la décision du ministre du Revenu national concernant l’appel interjeté en vertu de l’article 91 de cette loi est confirmée.

 

Signé à Ottawa (Ontario) ce 9e jour de juin 2005.

 

 

« Campbell J. Miller »

Le juge Miller

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 4e jour d’avril 2006.

 

Marie-Christine Gervais, traductrice

 


 

 

 

 

Référence : 2005CCI378

Date : 20050609

Dossier : 2004-3272(EI)

ENTRE :

MARTHA SIMMS,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Miller

 

[1]     Pendant une certaine période en 2003, Mme Martha Simms a travaillé pour la société Coastal Glass Inc. (la « société Coastal »), une société dont son époux, Gary, et son fils, Scott, étaient propriétaires. Le ministre du Revenu national (le « ministre ») a déterminé que l’emploi de Mme Simms ne constituait pas un emploi assurable selon la Loi sur l’assurance‑emploi, car il n’était pas convaincu que le contrat de travail conclu entre Mme Simms et la société Coastal aurait été à peu près semblable si les deux parties n’avaient pas eu de lien de dépendance.

 

[2]     En avril 2003, Mme Simms a terminé une formation de deux ans dans le cadre d’un programme d’études communautaires. Elle a étudié une grande variété de sujets, de la tenue de livres à la publicité en passant par la psychologie et les premiers soins. Au début mai, son époux, Gary, l’a engagée pour travailler pour la société Coastal afin d’acquérir de l’expérience, comme l’a dit Mme Simms. Elle était payée 7 $ l’heure, [TRADUCTION] « comme une stagiaire ».

 

[3]     La société Coastal avait des locaux à Stephensville, qu’elle partageait avec la compagnie Hyundai. Les locaux comportaient une aire d’accueil, deux bureaux, un pour Gary et un pour Scott, et une aire de travail où Gary et Scott travaillaient sur des produits en verre. La société Coastal s’occupait de la réparation et de l’installation de vitres, fabriquait des unités hermétiques et vendait des produits, y compris des miroirs, des vitrages de sécurité, des vitrages comportant des grillages métalliques, du verre feuilleté et toutes les sortes de vitres de voiture. Gary et Scott effectuaient la plupart des travaux de verrerie eux‑mêmes, ce qui constituait du travail spécialisé. Gary engageait parfois l’ancien propriétaire de l’entreprise, Michael Gouga, quand il avait besoin d’aide.

 

[4]     En 2003, à part Gary et Scott, et parfois M. Gouga, la société Coastal employait aussi une secrétaire-réceptionniste, Mme Lutetia Jessoe, et Mme Simms. Mme Simms a dit que son travail consistait à aider son mari quand il se déplaçait pour son travail et quand il travaillait à l’atelier. Elle faisait du ménage et apprenait à faire le travail de secrétaire de Mme Jessoe. Elle a donné des précisions concernant ses fonctions en disant que lorsque son mari se déplaçait pour son travail, elle l’aidait à prendre les mesures et à installer les produits. Elle nettoyait et entretenait l’aire de travail à l’atelier, ce qui comprenait passer l’aspirateur dans les véhicules dont les vitres devaient être réparées ou changées. Elle produisait aussi des dépliants publicitaires et les distribuait dans les quartiers où elle et son mari allaient. Elle a résumé ses responsabilités en disant que si elle voyait qu’il y avait quelque chose à faire, elle le faisait tout simplement. Elle a admis que même quand elle ne figurait pas dans le registre de paie, elle aidait son mari au travail, étant donné que cela leur permettait d’être ensemble.

 

[5]     Du 9 juin au 15 août 2003, Mme Simms n’a pas travaillé parce qu’elle a dû subir une opération d’urgence. Personne n’a été engagé pour la remplacer pendant cette période. Elle a été mise à pied le 10 octobre 2003, parce que les affaires avaient ralenti. Elle a dit que l’été était la période de pointe.

 

[6]     Elle a été réengagée pour la période allant de janvier à juin 2004, car les affaires avaient repris. Elle a été engagée de nouveau au printemps 2005 pour s’occuper du travail de bureau, parce que Mme Jessoe s’en allait. Mme Jessoe a passé quelques semaines à former davantage Mme Simms pour ce remplacement.

 

[7]     Selon la méthode énoncée par la Cour d’appel fédérale dans les affaires Légaré c. M.R.N.[1] et Pérusse c. Canada (Ministre du Revenu national),[2] la question est de savoir si, maintenant que j’ai entendu tous les témoignages concernant l’entente entre Mme Simms et la société Coastal, je considère raisonnable la conclusion du ministre selon laquelle la société Coastal et une personne avec qui elle n’a pas de lien de dépendance n’auraient pas conclu un contrat de travail à peu près semblable. Dans l’affaire Birkland c. M.R.N.[3], le juge Bowie a laissé entendre que, dans ces cas‑là, les parties peuvent présenter des éléments de preuve concernant les modalités d’emploi d’une personne n’ayant pas de lien de dépendance avec l’employeur et qui effectue un travail semblable pour le même employeur, ainsi que des éléments de preuve relatifs aux conditions d’emploi en vigueur dans l’industrie pour le même genre de travail au même moment et au même endroit. Comme il fallait s’y attendre, aucune preuve de ce genre n’a été présentée à l’audience. Il en a été ainsi, premièrement, parce qu’il n’y avait pas de travail semblable effectué par des personnes n’ayant pas de lien de dépendance avec l’employeur (tous les autres travailleurs occupaient des emplois spécialisés) et, deuxièmement, parce qu’il n’y aurait tout simplement pas de normes dans l’industrie pour ce genre de travail. Mme Simms était, comme on dit couramment, une femme à tout faire. Qui plus est, elle était une stagiaire, un membre de la famille qui s’était instruite et qui apprenait maintenant le fonctionnement de l’entreprise familiale au cas où l’entreprise aurait un jour besoin de son aide à temps plein. Et, en effet, un tel besoin s’est fait sentir récemment avec le départ de Mme Jessoe. Mme Simms vient de combler le vide créé par le départ de Mme Jessoe, après une brève période de formation, pour faire le travail de bureau pour la société Coastal.

 

[8]     Je ne mets pas en doute ce que Mme Simms a affirmé quand elle a dit qu’elle a travaillé fort pour la société Coastal en 2003. Elle ne pouvait pas comprendre pourquoi, après avoir travaillé si fort, elle n’avait pas le droit de demander des prestations d’assurance‑emploi. Elle n’y a pas droit parce que l’alinéa 5(2)i) de la Loi sur l’assurance‑emploi prévoit qu’un emploi où l'employeur et l'employé ont entre eux un lien de dépendance n’est pas un emploi assurable, et la société Coastal et Mme Simms avaient entre eux un lien de dépendance. Toutefois, l’alinéa 5(3)b) indique ce qui suit à cet égard :

 

b)         l'employeur et l'employé, lorsqu'ils sont des personnes liées au sens de cette loi, sont réputés ne pas avoir de lien de dépendance si le ministre du Revenu national est convaincu qu'il est raisonnable de conclure, compte tenu de toutes les circonstances, notamment la rétribution versée, les modalités d'emploi ainsi que la durée, la nature et l'importance du travail accompli, qu'ils auraient conclu entre eux un contrat de travail à peu près semblable s'ils n'avaient pas eu de lien de dépendance.

 

[9]     Le ministre n’était pas convaincu qu’il était raisonnable de conclure que la société Coastal et Mme Simms auraient conclu un contrat à peu près semblable s’ils n’avaient pas eu de lien de dépendance. Selon le témoignage de Mme Simms et de l’agent de participation (anciennement l’agent des appels), je conclus que le ministre s’est fondé sur les mêmes faits qui m’ont été présentés; c’est‑à‑dire qu’aucun fait nouveau ou sensiblement différent n’a été présenté lors de l’audience. Je dois dire que Mme Simms a été très cohérente dans son histoire, ce qui est tout à son honneur.

 

[10]    Malheureusement pour Mme Simms, je conclus que, selon ces faits, la décision du ministre demeure raisonnable. Voici les faits qui appuient plus particulièrement cette conclusion :

 

(i)      Mme Simms n’avait pas de description de travail définie; elle ne faisait qu’apporter son aide lorsque c’était nécessaire;

 

(ii)      la nature de son travail était telle que son travail n’était pas aussi important que celui des travailleurs spécialisés;

 

(iii)     Mme Simms était là pour apprendre le fonctionnement de l’entreprise familiale au cas où elle serait amenée à jouer un rôle un jour dans l’entreprise;

 

(iv)     Mme Simms n’a pas été remplacée pendant son arrêt de travail pour des raisons médicales, durant la période de pointe; en effet, personne d’autre n’a jamais été engagé pour faire ce que Mme Simms faisait;

 

(v)     même si elle accompagnait son mari lorsqu’il se déplaçait pour son travail et qu’elle l’aidait un peu, Mme Simms a admis que le simple fait d’être avec son mari était un facteur de motivation pour elle. Même si c’est compréhensible, cela montre clairement la vraie nature de l’entente, soit une entente avec lien de dépendance;

 

(vi)     Mme Simms effectuait un travail semblable pour l’entreprise, soit donner un coup de main quand on avait besoin d’elle, alors qu’elle ne figurait pas dans le registre de paie.

 

[11]    Pour ces motifs, l’appel est rejeté.

 

Signé à Ottawa (Ontario) ce 9e jour de juin 2005.

 

« Campbell J. Miller »

Le juge Miller

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 4e jour d’avril 2006.

 

Marie-Christine Gervais, traductrice

 


RÉFÉRENCE :                                  2005CCI378

 

NO DU DOSSIER DE LA COUR :     2004-3272(EI)

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              Martha Simms c.

                                                          Ministre du Revenu national

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Corner Brook (Terre‑Neuve‑et‑Labrador)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 2 juin 2005

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L’honorable juge Campbell J. Miller

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 9 juin 2005

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelante :

L’appelante elle‑même

Avocat de l’intimé :

Me Edward Sawa

 

AVOCAT(S) INSCRIT(S) AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                   Nom :                             S/O

 

                   Étude :                            S/O

 

       Pour l’intimé :                             John H. Sims, c.r.

                                                          Sous‑procureur général du Canada

                                                          Ottawa (Ontario)



[1]           1999 CanLII 8105 (C.A.F.).

[2]           [2000] A.C.F. no 310.

[3]           2005 CCI 291.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.