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Date: 19990825

Dossier: 98-1359-GST-I

ENTRE :

D & P HOLDINGS LIMITED,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Hamlyn, C.C.I.

[1] L'appelante, qui est inscrite aux fins de la Loi sur la taxe d'accise (la “ Loi ”), interjette appel d'un avis de cotisation selon lequel elle aurait déclaré un montant inférieur à celui de la taxe sur les produits et services (la “ TPS ”) percevable, et exagéré le montant des crédits de taxe sur les intrants (les “ CTI ”) auxquels elle avait droit.

[2] Dans l'avis de cotisation numéro 01BA0201256 daté du 11 décembre 1996, le ministre du Revenu national (le “ ministre ”) a informé l'appelante qu'elle devait payer, au titre de la TPS pour la période du 1er juin 1991 au 31 août 1996, le montant calculé comme suit :

TPS percevable non versée 35 133,84 $

Plus : Réduction des crédits de taxe sur les intrants 7 999,96 $

Total des rajustements de taxe nette 43 133,80 $

Pénalité 5 911,07 $

Intérêts 4 859,40 $

Total de la cotisation 53 904,27 $

THÈSE DE L'APPELANTE

[3] L'appelante soutient qu'elle était inscrite aux fins de la Loi et que sa principale activité consistait à effectuer la fourniture de loyers commerciaux et à exploiter un service des pièces dans une compagnie de meubles.

[4] L'appelante a expliqué que les erreurs relevées dans le calcul de la TPS et des CTI déclarés étaient attribuables en partie au fait que ses registres avaient été involontairement détruits. L'appelante a fait valoir également que l'obligation de payer la TPS relativement au transfert d'un bien n'avait pas été établie et, enfin, que son créancier hypothécaire (Trust Royal) devait payer la TPS au cours des périodes où il avait effectué des saisies-arrêts sur les loyers ou lorsqu'il avait assumé le contrôle du bien de l'appelante par suite d'une saisie ou d'une reprise de possession.

THÈSE DE L'INTIMÉE

[5] Pour établir la cotisation à l'égard de l'appelante pour la période du 1er juin 1991 au 31 août 1996, le ministre s'est fondé sur les hypothèses de fait suivantes :

[TRADUCTION]

[...]

pendant toutes les périodes pertinentes, l'appelante était inscrite aux termes de la partie IX de la Loi sur la taxe d'accise (la “ Loi ”);

l'activité principale de l'appelante consistait à effectuer la fourniture de loyers commerciaux;

les registres de l'appelante pour la période en cause étaient incomplets;

dans ses déclarations de TPS trimestrielles pour la période du 1er juin 1991 au 31 août 1996, l'appelante a déclaré la TPS percevable et les crédits de taxe sur les intrants (les “ CTI ”) suivants :

TPS percevable 26 588,57 $

Moins : CTI (44 538,15 $)

Total de la taxe nette (crédit) (17 949,58 $)

la TPS percevable déclarée par l'appelante était inférieure de 35 133,84 $ au montant qui aurait dû être déclaré pour la période du 1er juin 1991 au 31 août 1996;

l'appelante a exagéré de 7 999,96 $ les CTI auxquels elle avait droit pour la période du 1er juin 1991 au 31 août 1996;

la TPS percevable de 35 133,84 $ non déclarée se rapporte à des fournitures taxables, au sens du paragraphe 123(1) de la Loi, effectuées par l'appelante au cours de la période du 1er juin 1991 au 31 août 1996; le montant en question peut être réparti de la façon suivante :

Source/Fourniture taxable      TPS percevable

Écarts : Registres 23 180,59 $

Frais pour droit d'usage d'une automobile 2 129,30 $

Frais d'utilisation d'une automobile 396,13 $

Disposition d'un bien immeuble 7 640,70 $

Revenu au titre des loyers commerciaux 378,80 $

Recouvrement de loyers commerciaux 1 408,32 $

Total 35 133,84 $

l'automobile de l'appelante a été utilisée à des fins commerciales dans une proportion de 60 p. 100 et à des fins personnelles dans une proportion de 40 p. 100;

au mois d'août 1992, en contrepartie d'un montant de 109 152,80 $, l'appelante a effectué la fourniture taxable d'un bien immeuble à un acquéreur qui n'était pas inscrit aux termes de la partie IX de la Loi;

l'appelante devait percevoir la TPS de 7 p. 100 sur la contrepartie mentionnée à l'alinéa précédent;

au mois de décembre 1995, en contrepartie d'un montant de 5 411,50 $, l'appelante a effectué la fourniture taxable d'un bien immeuble par voie de location;

l'appelante devait percevoir la TPS de 7 p. 100 sur la contrepartie mentionnée à l'alinéa précédent;

n) au cours de la période du 1er juin 1991 au 31 août 1996, l'appelante a omis de verser au titre de la TPS un montant totalisant 1 408,32 $ sur des recouvrements et des comptes clients se rapportant à la fourniture de loyers commerciaux qu'elle avait effectuée;

o) l'appelante n'a pas tenu les documents requis pour appuyer sa demande de CTI mentionnée à l'alinéa g) ci-dessus.

QUESTIONS EN LITIGE

[6] Les questions à trancher sont les suivantes :

le ministre a-t-il établi correctement l'obligation de l'appelante concernant la TPS à payer?

l'appelante doit-elle payer la pénalité et les intérêts déterminés en vertu du paragraphe 280(1) de la Loi?

ANALYSE

CARACTÈRE ADÉQUAT DES REGISTRES DE L'APPELANTE

[7] L'avis d'appel qui a été produit dans le cadre du témoignage oral du représentant de l'appelante est ci-après reproduit en partie :

[TRADUCTION]

[...] Renseignements généraux concernant mes deux compagnies : la première est une compagnie de meubles (Ropewalk Enterprises Limited) et la deuxième (D & P Holdings Limited) est propriétaire de deux immeubles de vente au détail, à St. John's et à Grand Falls (Terre-Neuve). Au début des années 1990, la compagnie de meubles éprouvait de graves difficultés.

[...]

Ces graves difficultés financières se sont poursuivies en 1991, 1992, 1993, 1994 et 1995 et, en 1993-1994, la compagnie de meubles a fermé ses portes. [...] En 1991-1992, j'ai transféré le service des pièces à D & P Holdings Limited, mais, par inadvertance, j'ai continué à déclarer les ventes du service des pièces aux fins de la TVD et de la TPS comme s'il faisait toujours partie de ma compagnie de meubles. Pour compliquer les choses encore davantage, lorsque le Trust Royal a repris possession de l'immeuble et que j'ai dû quitter mon bureau et l'immeuble, tous les registres comptables de la compagnie de meubles, qui avaient été entreposés, ont été détruits ou jetés à la poubelle. [...]

[...] Au cours de cette période caractérisée par des difficultés financières, le Trust Royal a, par l'entremise de son procureur, saisi les loyers de mes locataires, y compris la TPS. Les chèques des loyers ont été libellés non pas à l'ordre de D & P Holdings, mais à l'ordre du Trust Royal.

[8] Au début de l'audition, dans le cadre de la présentation de la preuve, le même témoin a lu une déclaration préparée, dont voici des extraits :

[TRADUCTION]

Le sous-procureur général affirme que mes registres de la période en cause étaient incomplets. Permettez-moi de dire ici que mes registres n'étaient pas du tout incomplets. Mes déclarations de TPS étaient parfaitement exactes, et les montants étaient calculés de la façon suivante :

La compagnie de portefeuille n'ayant pas de numéro aux fins de la TVD, la taxe de vente au détail et la TPS payable par le service des pièces, ainsi que les recettes et les CTI, ont été déclarés relativement à la compagnie active (Great Eastern Furniture, exploitée par Ropewalk Enterprises Ltd.). Les écarts qui, d'après Revenu Canada, correspondent à la différence entre mes registres et mes déclarations, n'étaient que le résultat du transfert du service des pièces de ma compagnie active à ma compagnie de portefeuille. Naturellement, les déclarations de TPS de la compagnie de portefeuille ne concordaient pas avec mes états financiers.

[...] Les états financiers ont été dressés quelque cinq ans plus tard. À ce moment-là, à mon insu ou sans mon approbation, le Trust Royal a détruit toute la documentation se rapportant à la compagnie active. Celle-ci avait classé tous ses registres au rez-de-chaussée de l'immeuble, tandis que la compagnie de portefeuille avait classé ses registres dans mon bureau privé, au premier étage du même immeuble. Comme les registres entreposés au rez-de-chaussée ont été détruits à mon insu ou sans mon approbation, ainsi que je l'ai déjà mentionné, je n'ai pu fournir de preuve documentaire pour réfuter la prétention de Revenu Canada selon laquelle il existe des écarts.

[9] L'appelante a également appelé à témoigner une ancienne employée de la compagnie de meubles, qui a déclaré qu'elle avait été caissière et qu'elle avait effectué certaines tâches de bureau, y compris la consignation de la taxe de vente au détail la (la “ TVD ”) et de la TPS. Elle a déclaré également que les calculs de la TVD et de la TPS étaient effectués une fois par mois. Le témoin a déclaré que certains des registres étaient conservés au rez-de-chaussée, dans le magasin de meubles, et d'autres, à l'étage, dans le bureau du représentant de l'appelante.

[10] L'obligation de tenir des registres aux fins de la TPS est prévue au paragraphe 286(1), dont voici le libellé :

Toute personne qui exploite une entreprise au Canada ou y exerce une activité commerciale, toute personne qui est tenue, en application de la présente partie, de produire une déclaration ainsi que toute personne qui présente une demande de remboursement doit tenir des registres en anglais ou en français au Canada ou à tout autre endroit, selon les modalités que le ministre précise par écrit, en la forme et avec les renseignements permettant d'établir ses obligations et responsabilités aux termes de la présente partie ou de déterminer le remboursement auquel elle a droit.

[11] Au terme d'une vérification des affaires de l'appelante, le vérificateur du ministre a conclu, en analysant les états financiers, que l'appelante avait sous-évalué la TPS de 23 180,59 $. Le vérificateur a conclu que cette déclaration sous-évaluée était attribuable aux écarts relevés dans les registres et, en particulier, au fait que les registres étaient incomplets. Le reste de la TPS percevable non déclarée se rapportait à des frais pour droit d'utilisation d'une automobile, à des frais d'utilisation d'une automobile, à la disposition d'un bien immobilier, à des revenus au titre de loyers commerciaux et à des recouvrements de loyers commerciaux.

[12] Le vérificateur a conclu également qu'il y avait eu exagération des CTI et que cette exagération ne pouvait être appuyée par des documents satisfaisants.

[13] Le paragraphe 169(4) de la Loi est libellé dans les termes suivants :

169(4) Documents — L'inscrit peut demander le crédit de taxe sur les intrants relativement à la fourniture d'un bien ou d'un service pour une période de déclaration si, avant de produire la déclaration à cette fin :

a) il obtient les renseignements suffisants pour établir le montant du crédit, y compris les renseignements visés par règlement;

b) dans le cas d'un immeuble fourni par vente dans des circonstances où le paragraphe 221(2) s'applique, il produit la déclaration prévue au paragraphe 228(4) relativement à la fourniture.

[14] Le CTI est un crédit qui est remis à l'inscrit en compensation de la taxe payée ou payable sur les intrants qu'il achète en vue de les utiliser dans le cadre d'une activité commerciale. Le paragraphe 169(1) prévoit le mode de calcul des CTI et le paragraphe 225(1) indique que ces crédits doivent être déduits de la TPS payable avant que celle-ci soit versée au receveur général.

[15] Le paragraphe 169(4) précise la nature de l'obligation de fournir les documents nécessaires aux fins des CTI. Aux termes de cette disposition, l'inscrit doit fournir les renseignements suffisants pour établir le montant des CTI, y compris les renseignements visés par règlement. Ces renseignements sont énumérés à l'article 3 du Règlement sur les renseignements nécessaires à une demande de crédit de taxe sur les intrants (le “ Règlement ”).

[16] Suivant le Règlement, l'expression “ pièce justificative ”, telle qu'elle est utilisée à l'article 3, vise notamment une facture, un reçu, un bordereau de carte de crédit, une note de débit, un livre ou registre de comptabilité, une convention ou un contrat écrits, tout registre faisant partie d'un système de recherche documentaire informatisé ou électronique ou d'une banque de données, et tout autre document signé ou délivré en bonne et due forme par un inscrit pour une fourniture qu'il a effectuée et à l'égard de laquelle il y a une taxe payée ou payable. L'appelante a été incapable de fournir quelque pièce justificative que ce soit pour les CTI exagérés.

[17] L'appelante a choisi de n'assigner ou de n'appeler à témoigner aucun représentant du Trust Royal, qui, manifestement, a joué un rôle actif et de premier plan dans la présumée destruction des registres de l'appelante et de la compagnie de meubles.

[18] L'appelante a choisi également de n'assigner ou de n'appeler à témoigner aucun représentant de Deloitte & Touche. Le cabinet en question a dressé, semble-t-il, les états financiers de l'appelante et a agi comme conseiller lors du transfert du service des pièces à l'appelante. Le représentant de l'appelante a simplement déclaré qu'il tenait “ [traduction] des registres complets et que les écarts au niveau de la TPS et des CTI s'expliquaient par le transfert du service des pièces de la compagnie de meubles à la société de l'appelante ”. Aucun autre élément de preuve de fond n'a été produit pour étayer cette prétention.

[19] Je conclus également que la période visée par l'appel semblait être pour l'appelante une période de difficultés financières et de confusion, comme on l'a déjà dit. Les finances représentaient une préoccupation constante. Les registres n'étaient pas tous conservés dans un seul bureau.

[20] Du fait de sa situation financière, l'appelante avait eu et continuait d'avoir des relations difficiles avec le Trust Royal. Elle savait que, en cas de non-paiement de l'emprunt hypothécaire, le Trust Royal avait des droits de saisie-gagerie aux termes de l'hypothèque et que ces droits mettaient ses biens à risque.

[21] L'obligation de tenir des registres suppose nécessairement leur mise en lieu sûr et leur protection.

[22] Je ne suis pas convaincu, étant donné la preuve produite en l'espèce, que la présumée destruction des registres de la compagnie de meubles peut expliquer les écarts relatifs à la TPS et aux CTI.

[23] Il n'a pas été satisfait aux obligations prévues aux paragraphes 169(4) et 286(1) de la Loi.

RECOURS DU CRÉANCIER HYPOTHÉCAIRE EN CAS DE DÉFAUT, ET CONSÉQUENCES DE CELUI-CI

[24] Le témoin de l'appelante a indiqué que le Trust Royal avait à deux reprises pris possession des loyers et que, par conséquent, c'était lui qui devait verser la TPS.

[25] La première fois, le Trust Royal a effectué une saisie-arrêt sur les loyers.

[26] La deuxième fois, soit en 1995, il a effectué une saisie ou une reprise de possession.

I) SAISIE-ARRÊT SUR LES LOYERS - PREMIÈRE PÉRIODE (AVANT 1995)

[27] En cas de défaut de paiement d'un emprunt hypothécaire, le créancier hypothécaire peut, comme mesure provisoire en attendant le paiement, la saisie en réalisation de la garantie hypothécaire ou la vente, prendre possession du bien concerné et contraindre tout locataire du débiteur hypothécaire à lui remettre le montant du loyer. Le créancier hypothécaire peut continuer à détenir le bien et saisir tout loyer jusqu'au remboursement complet de l'emprunt hypothécaire[1]. Lorsque le créancier hypothécaire saisit les loyers provenant d'un bien du débiteur, ce dernier demeure le fournisseur du bien[2].

[28] Je conclus que, avant 1995, l'appelante est restée le fournisseur du bien même après que les loyers eurent été saisis. L'appelante était tenue de verser la taxe sur les loyers commerciaux au cours de la période où les loyers ont été saisis.

II) SAISIE OU REPRISE DE POSSESSION - DEUXIÈME PÉRIODE (1995)

[29] La saisie ou la reprise de possession qui a lieu au cours d'une procédure d'exécution aux termes des clauses relatives au défaut prévues dans l'hypothèque prive l'appelante du contrôle de son bien. Au cours de la période en question, le Trust Royal avait le contrôle du bien en cause. D'après la preuve, aucune cotisation n'a été établie à l'égard de l'appelante pour cette période.

FOURNITURE DE LOCATION DE BIENS IMMEUBLES

EN DÉCEMBRE 1995

[30] Le ministre s'est fondé sur l'hypothèse selon laquelle, le 1er décembre 1995, l'appelante avait effectué une fourniture taxable en louant un bien immeuble en contrepartie d'un montant de 5 411,50 $, et elle était tenue de percevoir la TPS sur la contrepartie reçue.

[31] D'après la preuve de l'appelante, avant décembre 1995, les loyers étaient perçus par le Trust Royal.

[32] Jusqu'au 28 novembre 1995, le Trust Royal avait, à titre de créancier hypothécaire dont le débiteur était en défaut, le contrôle du bien en cause, et il en assurait la gestion.

[33] La pièce A-1 fait état du règlement intervenu entre les locataires et le Trust Royal pour les loyers de décembre. Les loyers devaient inclure la taxe.

[34] Le 28 novembre 1995, l'appelante a de nouveau repris possession du bien immeuble en même temps qu'elle en a récupéré le contrôle et la gestion.

[35] D'après le représentant de l'appelante, le Trust Royal n'était pas disposé à accepter quelque rajustement que ce soit dans le cadre de la reprise de possession du bien par l'appelante. Le Trust Royal n'a rendu aucun compte à l'appelante aux fins de la TPS qu'il a perçue sur les loyers prépayés. L'appelante a accepté ce fait et a repris possession du bien, comme on l'a dit précédemment, le 28 novembre 1995.

[36] Compte tenu de la preuve, je conclus que, le 1er décembre 1995, l'appelante a effectué une fourniture taxable et devait percevoir et verser la TPS payable par l'acquéreur de la fourniture taxable.

DISPOSITION D'UN BIEN IMMEUBLE

[37] Le ministre s'est fondé sur l'hypothèse selon laquelle, au mois d'août 1992, l'appelante a effectué la fourniture taxable d'un bien immeuble à un acquéreur qui n'était pas inscrit aux fins de la partie IX de la Loi, en contrepartie du montant de 109 152,80 $, taxe en sus.

[38] Le témoin principal de l'appelante a déclaré que, au début des années 1990, au moment où la compagnie de meubles éprouvait des difficultés, le magasin de Grand Falls (Terre-Neuve) avait été fermé et l'immeuble avait été mis en vente.

[39] L'immeuble a été vendu à un particulier conformément à une entente conclue entre le Trust Royal (le créancier hypothécaire), l'appelante et l'acheteur, aux termes de laquelle, en contrepartie totale de l'immeuble, l'acheteur prenait à sa charge l'obligation hypothécaire de l'appelante.

[40] L'acheteur avait apparemment l'intention d'ouvrir un magasin de meubles d'occasion dans l'immeuble. Il n'était pas inscrit aux fins de la TPS au moment de la vente.

[41] L'appelante n'a pas perçu la TPS payable par l'acquéreur en application de la section II relativement à l'achat.

[42] Aux termes du paragraphe 165(1), l'acquéreur d'une fourniture taxable doit payer une taxe égale à 7 p. 100 de la valeur de la contrepartie versée pour la fourniture. Aux termes de l'article 221, le fournisseur d'une fourniture taxable doit percevoir la taxe payable par l'acquéreur de la fourniture. Les dispositions pertinentes de l'article 221 sont libellées dans les termes suivants :

La personne qui effectue une fourniture taxable doit, à titre de mandataire de Sa Majesté du chef du Canada, percevoir la taxe payable par l'acquéreur en vertu de la section II.

(2) Le fournisseur, sauf un fournisseur visé par règlement, qui effectue la fourniture taxable d'un immeuble par vente n'est pas tenu de percevoir la taxe payable par l'acquéreur en vertu de la section II si, selon le cas :

le fournisseur ne réside pas au Canada ou n'y réside que par application du paragraphe 132(2);

l'acquéreur est inscrit aux termes de la sous-section d, et il ne s'agit pas de la fourniture d'un immeuble d'habitation au profit d'un particulier;

c) l'acquéreur est un acquéreur visé par règlement.

[43] L'appelante a effectué, en août 1992, la fourniture taxable d'un bien immeuble à un acquéreur (l'acheteur) qui n'était pas inscrit aux fins de la TPS. Elle était tenue de percevoir la TPS sur la contrepartie. Elle a déclaré au titre de la TPS percevable 7 640,70 $ de moins que le montant qu'elle aurait dû déclarer pour la fourniture de l'immeuble de Grand Falls (Terre-Neuve).

RÉSUMÉ

[44] La vérification effectuée par l'intimée permet de conclure que l'appelante a déclaré au titre de la TPS percevable 35 133,84 $ de moins que le montant qu'elle aurait dû déclarer et exagéré les CTI de 7 999,96 $ pour la période du 1er juin 1991 au 31 août 1996.

[45] L'appelante n'a pas tenu les registres qu'elle avait l'obligation de tenir aux termes du paragraphe 286(1).

[46] L'appelante n'a pas obtenu les renseignements suffisants pour appuyer sa demande de CTI (paragraphe 169(4)).

[47] Au mois de décembre 1995, l'appelante a effectué une fourniture taxable par location d'un bien immeuble en contrepartie du montant de 5 411,50 $.

[48] L'appelante a effectué la fourniture taxable d'un bien immeuble (transfert du bien de Grand Falls au mois d'août 1992) à un acquéreur qui n'était pas inscrit aux fins de la TPS, en contrepartie du montant de 109 152,80 $ (taxe en sus).

[49] L'appelante n'a pas contesté le reste de la cotisation, dont il est fait état à l'alinéa h) des hypothèses du ministre.

PÉNALITÉS ET INTÉRÊT

[50] Le représentant de l'appelante a fait valoir ce qui suit :

[TRADUCTION]

[...] Du fait des circonstances exposées et de façon tout à fait involontaire puisque la cour [le droit] a donné au Trust Royal l'autorisation de faire ce qu'il a fait, certaines parties des déclarations ne peuvent être appuyées par quelque document que ce soit. Lorsque les tribunaux [le droit] donnent une telle autorisation, comment le contribuable peut-il être tenu responsable?

Compte tenu de ce qui précède, je [...] me demande comment la compagnie peut être tenue responsable du paiement des pénalités et de l'intérêt dus aux termes [...] du paragraphe 280(1) de la Loi.

[51] Compte tenu du témoignage du vérificateur de l'intimée et après examen de la preuve ci-dessus mentionnée, je ne peux conclure que la tenue de livres de l'appelante était soignée. La période en question semblait être pour l'appelante une période de difficultés financières et, comme je l'ai conclu, de confusion.

[52] Compte tenu de la situation financière difficile qui persistait, l'appelante savait ou aurait dû savoir que le bien était susceptible d'être saisi, c'est-à-dire que les registres étaient en péril. Je ne peux conclure que l'appelante a exercé le degré de soin raisonnable nécessaire pour protéger ses registres.

[53] À mon avis, l'appelante a eu tort de consigner ses difficultés relatives à la TPS et aux CTI dans des registres qui étaient à la portée du Royal Trust ou de ses représentants.

[54] Pour ce qui est des pénalités et de l'intérêt, je ne peux conclure que les actions de l'appelante satisfont au critère de la diligence raisonnable.

DÉCISION

[55] L'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 25e jour d'août 1999.

“ D. Hamlyn ”

J.C.C.I.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Traduction certifiée conforme ce 20e jour de juin 2000.

Philippe Ducharme, réviseur



[1]               Frank Bennett, Bennett on Creditors' and Debtors' Rights and Remedies, 4e éd., Carswell, à la page 357.

[2]               David Schlesinger, GST in Hard Times, Canadian Tax Foundation, Rapport de la conférence de 1992, pages 44:1 et 44:2. Voir aussi Joseph v. Newman, (1927) 31 O.W.N. 400 (H.C.), conf. par 31 O.W.N. 429 (D.A.).

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