Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

97-2388(IT)I

ENTRE :

HAMID REZA TABATABAI,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 26 février 1998 à Vancouver (Colombie-Britannique) par

l'honorable juge T. E. Margeson

Comparutions

Pour l'appelant :                                   l'appelant lui-même

Avocat de l'intimée :                            Me Bill Basran

JUGEMENT

          L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1992 est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 4e jour de mars 1998.

___________ « T. E. Margeson » __________

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 10e jour d'avril 2003.

Philippe Ducharme, réviseur


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Date: 19980420

Dossier: 97-2388(IT)I

ENTRE :

HAMID REZA TABATABAI,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

___________________________________________________________________

MOTIFS DU JUGEMENT

(Rendus oralement à l'audience

à Vancouver (Colombie-Britannique), le 26 février 1998.)

Le juge Margeson, C.C.I.

[1]        L'affaire dont la Cour est saisie aujourd'hui concerne Hamid Reza Tabatabai, et la question à trancher est celle de savoir si l'appelant a omis ou non de déclarer des revenus d'entreprise gagnés lorsqu'il travaillait pour North Shore Taxi (N.S.T.) durant l'année d'imposition 1992.

[2]        Le ministre a établi une nouvelle cotisation en se fondant sur le paragraphe 3 de la réponse à l'avis d'appel (la réponse); il a ainsi augmenté le revenu d'entreprise net de 6 350 $ et a évalué le montant des pourboires à 1 985 $; il a aussi imposé des pénalités pour faute lourde en ce qui concerne le revenu d'entreprise net non déclaré.

[3]        Dans la réponse, le ministre a émis un certain nombre d'hypothèses, sur lesquelles il s'est fondé, et la majorité de ces hypothèses n'ont même pas été mentionnées. En ce qui concerne l'alinéa 4b), l'appelant a, dans son témoignage, nié qu'il avait occupé 50 p. 100 de son temps à conduire un taxi. Ce pourcentage ne s'appliquait pas à lui parce que le gérant lui causait des difficultés à cette époque. Le gérant lui a dit que le propriétaire n'était pas satisfait de l'argent qu'il rapportait comme chauffeur de taxi et que, par conséquent, il ne pouvait plus travailler pour la compagnie. On lui avait dit qu'il devrait louer la voiture et exploiter le taxi de cette façon.

[4]        À part cela, l'appelant n'a rien dit en ce qui a trait aux autres hypothèses de fait figurant dans la réponse à l'avis d'appel, et ainsi, bien sûr, elles n'ont pas été réfutées.

[5]        Les éléments de preuve présentés par le ministre en l'espèce constituaient des preuves solides. La Cour est convaincue que le fondement de la cotisation établie par le ministre à l'égard de l'appelant est le même que celui des jugements auxquels l'intimée a fait référence.

[6]        Dans l'affaire Farahani c. Canada, C.C.I., no 96-4047(IT)I, 1997, le juge Teskey, la compagnie de taxi était la même que celle dont il est question ici. Dans cette affaire, la Cour était convaincue que l'appelant avait gagné le revenu, qu'il avait volontairement omis de le déclarer et qu'on lui avait imposé les pénalités à bon droit.

[7]        En l'espèce, le témoignage de M. Marquis, en ce qui concerne la formule utilisée par Revenu Canada et le processus adopté afin de déterminer ce que le ministère appelle le « revenu non déclaré » de l'appelant, était aussi exact que ce à quoi on pourrait s'attendre dans les circonstances.

[8]        La Cour est convaincue, après l'interrogatoire et le contre-interrogatoire de M. Marquis, que Revenu Canada, afin de déterminer le fondement de la nouvelle cotisation, a tenu compte des variables, des différentes éventualités telles que la difficulté qu'ont les chauffeurs de taxi à obtenir la totalité de leur revenu, les créances douteuses, les cartes de crédit annulées, ainsi que les cas où l'on a utilisé des cartes de crédit et où le chauffeur n'a pourtant pas été payé. Son témoignage montrait clairement que Revenu Canada avait tenu compte de ces facteurs lorsqu'il avait choisi la formule appropriée pour estimer les pourboires.

[9]        Il est clair que l'avocat de l'intimée avait raison de citer les différents articles de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ) qui stipulent que le contribuable doit tenir des registres, établir et déclarer ses revenus à Revenu Canada pour l'année qui fait l'objet d'un appel. Dans la présente affaire, l'appelant n'a tenu aucun registre qu'il aurait pu présenter à Revenu Canada - ni présenté de document à la présente cour -, qui pourrait d'une façon ou d'une autre réfuter les hypothèses énoncées dans la réponse ou qui pourrait, de quelque manière, réfuter le témoignage de M. Marquis ou la preuve documentaire en ce qui concerne le revenu censément gagné par l'appelant au cours de l'année en cause.

[10]      L'avocat de l'intimée a indiqué, dans son argumentation, qu'il s'agit d'une affaire où des pénalités doivent être imposées. Il a encore une fois fait référence à l'affaire Farahani c. Canada, précitée, qui visait également N.S.T. Selon l'avocat de l'intimée, dans cette affaire, de même que dans l'affaire qui nous occupe, il est question d'une omission totale de déclarer le revenu. L'appelant n'a fourni aucune explication pour cette omission. Il a simplement affirmé qu'il ne l'avait pas déclaré.

[11]      L'appelant était celui qui devait déclarer ce revenu, et il ne l'a pas fait. Il a indiqué qu'il avait tenu des registres pendant deux ans seulement, et qu'il les avait ensuite détruits. Cela va vraiment à l'encontre de la Loi, qui exige que le contribuable conserve ces documents et les présente au besoin afin d'étayer sa déclaration de revenu.

[12]      Selon l'article 230 de la Loi, quiconque exploite une entreprise doit tenir des registres et des livres de comptes. C'était donc la responsabilité de l'appelant de le faire et, selon l'avocat de l'intimée, il ne l'a pas fait.

[13]      L'appelant a fourni ce que l'avocat a appelé un [TRADUCTION] « témoignage anecdotique » en ce qui concerne l'année 1992 dans le but d'expliquer les raisons pour lesquelles il n'aurait pas pu toucher le revenu qu'on lui attribuait, mais il n'avait aucun document pour appuyer ce témoignage, lequel, selon l'avocat de l'intimée, n'est pas suffisant pour réfuter la cotisation. L'avocat a signalé que, selon les registres, l'appelant avait effectué 184 quarts de travail en 1992. Il n'a déclaré aucun revenu provenant de la location du taxi. Selon l'intimée, 74 p. 100 de son revenu n'a pas été déclaré en 1992, et il n'a déclaré aucun revenu provenant de l'entreprise de taxi.

[14]      Les renseignements sur lesquels s'est fondé le ministre constituent les meilleurs renseignements accessibles. En fait, la Cour conclut que les renseignements sur lesquels s'est fondé le ministre étaient essentiellement des renseignements fournis par l'appelant lui-même. Ce sont ces mêmes renseignements qui ont été fournis à la compagnie de taxi et dont Revenu Canada s'est servi afin d'établir la cotisation. Il s'agissait des meilleurs renseignements accessibles.

[15]      Les seuls autres renseignements qui auraient pu être acceptables auraient été les renseignements fournis par le chauffeur de taxi lui-même, s'il avait tenu des registres appropriés. Toutefois, dans la présente affaire, il n'a pas tenu de registre. Il pourrait difficilement contester la cotisation établie à son égard dans la présente affaire.

[16]      Selon l'avocat de l'intimée, le témoignage portant que le total des pourboires était moins élevé que le montant établi par le ministre n'est pas suffisant pour réfuter la preuve présentée par le ministre selon laquelle on avait utilisé la meilleure formule qu'il était possible d'utiliser dans les circonstances. Cette preuve était fondée sur des conversations avec des chauffeurs de taxi, des propriétaires de taxi et des artisans du taxi, et l'on a également tenu compte de certaines éventualités auxquelles auraient à faire face les artisans du taxi dans le cours normal de leur travail.

[17]      M. Marquis a indiqué que le taux de pourboire ou le pourcentage des pourboires était juste compte tenu de toutes ces éventualités.

[18]      L'avocat a fait référence à l'affaire Cécile Cliche-Paquet v. The Minister of National Revenue, 80 DTC 1282, une affaire tranchée par R. St. Onge lorsqu'il était à la Commission d'appel de l'impôt. Dans cet arrêt, M. St. Onge, qui est maintenant juge de la Cour canadienne de l'impôt, indiquait que le ministre avait fait son travail et avait utilisé la meilleure méthode qu'il était possible d'utiliser pour établir le revenu de l'appelante. Dans l'affaire Larry Munn c. Sa Majesté la Reine, C.C.I., no 03-315(IT)G, 19 octobre 1994 (95 DTC 214), entendue par le juge Bonner de la Cour canadienne de l'impôt, il est clair qu'en raison de la nature de l'entreprise, il était difficile d'établir un revenu précis, parce que l'appelant avait choisi d'être rémunéré en argent et de ne tenir aucun registre afin de ne pas avoir à payer d'impôt.

[19]      En l'espèce, l'appelant a affirmé qu'il avait tenu des registres, mais il a choisi de s'en défaire, privant ainsi la présente cour de tout renseignement dont elle aurait pu bénéficier s'il avait pu fournir des documents. Étant donné que les registres n'ont pas été présentés à la Cour, ils peuvent difficilement servir de fondement pour réfuter la méthode utilisée par le ministre pour établir la cotisation.

[20]      Dans le jugement Munn, précité, le juge Bonner, de la C.C.I., a ajouté ceci en ce qui concerne l'année en cause :

          

     [TRADUCTION]

[...] je conclus qu'il n'existe aucun élément de preuve digne de foi qui permettrait de déterminer que le revenu de l'appelant est inférieur au montant indiqué dans la cotisation.

[21]      En l'espèce, la Cour conclut pareillement qu'il n'y a pas de preuve sur lesquelles la Cour pourrait se fonder afin de conclure que la cotisation du ministre était erronée.

[22]      Finalement, dans le jugement Munn, précité, à la page 216, le juge Bonner déclarait ceci :

        [TRADUCTION]

Dans un cas comme celui-ci [soit un cas où le contribuable a fraudé le gouvernement ou a omis d'indiquer ou de déclarer un revenu], il convient d'imposer des pénalités et, s'il y a lieu, d'intenter une poursuite.

La présente cour ne doit examiner que les pénalités prévues au paragraphe 163(2) de la Loi.

[23]      L'avocat a également fait référence à la décision 421229 Ontario Limited et al. v. Her Majesty The Queen, 95 DTC 5087, dans lequel on concluait pour l'essentiel que l'appelante n'avait pas prouvé que les nouvelles cotisations du ministre étaient incorrectes. Les circonstances entourant la non-déclaration de revenu indiquaient clairement qu'une faute lourde avait été commise au titre du paragraphe 163(2) de la Loi.

[24]      L'avocat de l'intimée a soutenu que l'appel devrait être rejeté.

[25]      Dans son argumentation, l'appelant a indiqué qu'on ne lui avait pas donné le choix entre être un employé ou louer le taxi, vu que le directeur général ou le gérant de la compagnie de taxi lui causait des difficultés. On l'a obligé à conduire le taxi à titre de locataire et non à titre d'employé. Il a essayé d'obtenir les feuilles jaunes de la compagnie, mais en vain. Toutefois, comme l'indique la preuve présentée, les feuilles jaunes dont il parlait constituent l'information même sur laquelle le ministre ainsi que les vérificateurs se sont fondés afin d'établir la cotisation comme ils l'ont fait. Il s'agirait de la copie des deux feuilles de la compagnie, dont l'une aurait été envoyée au propriétaire et l'autre, à la compagnie.

[26]      Cependant, encore une fois, cela n'enlève rien à l'obligation de l'appelant de tenir ses propres registres, lesquels auraient été accessibles si des questions étaient soulevées en ce qui concerne la pertinence des documents utilisés par le ministère. Cependant, nous n'avons pas cet élément de preuve ici.

[27]      L'appelant a déclaré que, n'ayant pas accès aux registres, [TRADUCTION] « je n'ai pas pu prouver ma cause » . Il a affirmé qu'il n'avait même pas réclamé de perte. Il était étudiant à temps plein et n'aurait pas pu gagner le montant retenu par le ministre dans sa cotisation.

[28]      Donc, dans une affaire de cette nature, dire [TRADUCTION] « je n'ai pas réclamé de dépenses auxquelles j'aurais pu avoir droit » n'est pas une réponse satisfaisante à une nouvelle cotisation ni la façon de réfuter le fondement de la cotisation établie par le ministre. Si des dépenses étaient associées au revenu de l'appelant et si celui-ci pouvait les déduire, il était en droit de les réclamer dans sa déclaration de revenu. Toutefois, comment pourrait-il réclamer des dépenses liées à un revenu qu'il n'a jamais déclaré?

[29]      En bout de ligne, la présente cour, tout comme dans les jugements auxquels on a fait référence, croit que le ministre, dans ce cas particulier, a utilisé la meilleure méthode qu'il était possible d'utiliser pour établir la cotisation et déterminer le montant approprié sur lequel fonder la cotisation à l'égard de l'appelant, au titre des revenus non déclarés, y compris les pourboires.

[30]      La Cour est convaincue que l'appelant n'a produit aucune preuve qui aurait pu, d'une quelconque façon, réfuter soit les hypothèses énoncées dans la réponse soit le fondement de la cotisation du ministre.

[31]      Par conséquent, la Cour doit conclure que l'appelant ne s'est pas acquitté de la charge qui lui incombait d'établir que la cotisation du ministre était erronée.

[32]      L'appel est rejeté et la cotisation du ministre est confirmée.

Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour d'avril 1998.

« T. E. Margeson »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 10e jour d'avril 2003.

Philippe Ducharme, réviseur

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.