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97-146(GST)I

ENTRE :

GESTION 69691 INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu sur preuve commune avec les appels de Gestion 69692 Inc. (97-141(GST)I), Claudette Ruest (97-147(GST)I) et Club Immobilier International Inc. (97-148(GST)I) les 28, 29 et 30 janvier 1998 à Montréal (Québec) par

l'honorable juge Alain Tardif

Comparutions

Représentant de l'appelante :                Marcel Thiffault

Avocate de l'intimée :                          Me Maryse Lord

JUGEMENT

          L'appel de la cotisation établie en vertu de l'alinéa 296(1)(b) de la Loi sur la taxe d'accise, dont l'avis est daté du 25 septembre 1995 et porte le numéro 22213, est rejeté et la cotisation est confirmée selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 11e jour de septembre 1998.

« Alain Tardif »

J.C.C.I.


Date: 19980911

Dossier: 97-146(GST)I

ENTRE :

GESTION 69691 INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Tardif, C.C.I.

[1]      L'appelante a enregistré son appel au moyen d'un avis d'appel dont le contenu est le suivant :

AVIS D'APPEL

L'appelante en appelle de la décision de l'intimée, en date du 24 octobre 1996, de ratifier la cotisation émise le 25 septembre 1995 et portant sur la période du 1er janvier 1991 au 31 octobre 1994.

1.          Le 25 septembre 1995, l'intimée a émise un avis de cotisation portant le numéro 22213 en vertu de la Loi sur la taxe d'accise, pour la période du 1er janvier 1991 au 31 octobre 1994.

2.          L'appelante a produit un avis d'opposition à l'encontre de la cotisation mentionnée au paragraphe précédent.

3.          Par décision rendue le 24 octobre 1996, l'intimée a ratifié l'avis de cotisation portant le numéro 22213 émis en vertu de la Loi sur la taxe d'accise.

4.          L'appelante en appelle de la décision du Ministre du Revenu ayant confirmé la cotisation portant le numéro 22213.

5.          Suite à une vérification, l'intimée a effectué les rajustements suivants :

                TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES      52 329,87 $

                CRÉDIT SUR INTRANTS                                   (34 407,30 $)

6.          L'intimée prétend notamment que l'appelante a omis d'appliquer la règle de fourniture à soi-même à l'occasion de la location d'un condominium situé au 991 terrasse des promenades.

7.          La cotisation émise par l'intimée en ce qui concerne le condominium sis au 991 terrasse des promenades est mal fondée puisqu'il n'y a pas eu de transfert de possession du condominium aux termes d'un bail mais simplement un hébergement à titre temporaire.

8.          L'intimée prétend également que l'appelante a omis de remettre la taxe sur les produits et services sur des revenus générés par l'exploitation de buanderies. De plus pour les loyers commerciaux le vérificateur a ajusté ces loyers en tenant compte à tord du pourcentage d'augmentation mentionné aux baux.

9.          Les cotisations émises par l'intimée en vertu de la Loi sur la taxe d'accise sont mal fondées puisque le vérificateur du Ministère a surestimé les revenus tirés de l'exploitation des laveuses sans tenir compte des normes de l'industrie quant au ratio entre les revenus des laveuses et des sécheuses et de plus sans tenir compte du fait que les utilisateurs des machines sont issus d'un milieu défavorisé.

10         L'appelante a fourni à l'intimée toutes les factures pour lesquelles elle a réclamé des remboursements de taxes sur intrants et toutes ces factures résultent des activités commerciales de l'inscrit.

11.        En tout temps pertinent aux présentes, l'appelante s'est conformée aux prescriptions de la Loi sur la taxe d'accise, en ce qui concerne les exigences documentaires prévues par la loi.

12.        Le présent appel est bien fondé en fait et en droit.

            PAR CES MOTIFS, PLAISE AU TRIBUNAL:

            ACCUEILLIR le présent appel;

ANNULER l'avis de cotisation numéro 22213 émis le 25 septembre 1995 en vertu de la Loi sur la taxe d'accise;

DÉFÉRER le tout à l'intimée pour qu'elle émette un nouvel avis de cotisation conformément au jugement à intervenir dans le présent dossier;

            LE TOUT avec dépens.

                                                Montréal, le 20 janvier 1997

                                                                                    

                                                NORMAND BÉRUBÉ

                                                10422, rue de Martigny

                                                Montréal (Québec) H2B 2M6

                                                (514) 389-6339

                                                Procureur de l'appelante

[2]      L'intimée a justifié le bien fondé de la cotisation, au moyen de la Réponse à l'avis d'appel dont le contenu est le suivant :

RÉPONSE À L'AVIS D'APPEL

En réponse à l'avis d'appel transmis à l'intimée le 29 janvier 1997, lequel concerne l'avis de cotisation portant le numéro 22213 et la date du 25 septembre 1995, émis pour la période du 1er janvier 1991 au 31 octobre 1994, le sous-procureur général du Canada, pour et au nom de l'intimée, Sa Majesté la Reine, expose ce qui suit :

A.         EXPOSÉ DES FAITS

1.          Il admet les faits allégués aux paragraphes 1, 2 et 3 de l'avis d'appel, sans admission cependant quant au contenu de l'avis d'opposition;

2.          Il prend acte du paragraphe 4 de l'avis d'appel;

3.          Il admet les faits allégués aux paragraphes 5 et 6 de l'avis d'appel;

4.          Il nie les faits allégués au paragraphe 7 de l'avis d'appel;

5.          Il admet au paragraphe 8 de l'avis d'appel qu'il a cotisé la taxe sur les produits et services que l'appelante a omis de remettre relativement à des fournitures taxables effectuées dans des buanderies opérées par l'appelante et il nie le reste dudit paragraphe 8;

6.          Il nie les faits allégués aux paragraphes 9, 10, 11 et 12 de l'avis d'appel;

7.          Le 25 septembre 1995, par l'avis de cotisation numéro 22213, l'appelante a été cotisée pour un montant de 23 736,67 $ représentant la pénalité, les intérêts et la taxe nette qu'elle avait omis de percevoir ou de remettre sur des fournitures taxables effectuées durant la période du 1er janvier 1991 au 31 octobre 1994;

            T.P.S.:                           52 329,87 $

            C.T.I. additionnels:                    (34 407,30 $)

            Pénalité:                                        2 892,12 $

            Intérêts:                                         2 921,98 $

                        TOTAL                        23 736,67 $

le détail des montants cotisés par périodes de déclaration étant joint à l'annexe A de la présente réponse;

8.          L'appelante s'est opposée à l'avis de cotisation numéro 22213 par avis d'opposition daté du 16 novembre 1995;

9.          Le 24 octobre 1996, le ministre a notifié l'appelante de sa décision de maintenir l'avis de cotisation portant le numéro 22213;

10         Le 21 janvier 1997, l'appelante a déposé au greffe de cette Cour un avis d'appel à l'encontre de la cotisation portant le numéro 22213;

11.        Afin d'établir ladite cotisation, le ministre s'est fondé sur les faits suivants, révélés lors de la vérification effectuée en 1994 et 1995:

a)          l'appelante est une personne inscrite aux fins de la taxe sur les produits et services;

b)          au cours de la période en litige, l'appelante exerçait les activités suivantes :

-            exploitation d'une buanderie sise au 476, St-Jean, à Drummondville, à compter du30 juin 1994, date à laquelle l'immeuble a été acheté et la buanderie opérée par l'appelante;

-            location de locaux commerciaux dans les immeubles sis au 466-480, St-Jean;

-            construction et ventes de condominiums résidentiels;

-            location d'un condominium à des fins résidentiels;

c)          l'administrateur de toutes ces activités était Marcel Thiffault, conjoint de Claudette Ruest, présidente et actionnaire de l'appelante;

d)          Monsieur Marcel Thiffault administrait également durant la même période deux autres corporations, soit Club Immobilier International Inc. et Gestion 69692 Inc., compagnies dont il est président et actionnaire, ainsi que de nombreuses activités exercées par Claudette Ruest, propriétaire d'immeubles locatifs et de commerces;

e)          au cours de la période en litige, l'administrateur Marcel Thiffault n'utilisait qu'un seul compte bancaire qui servait pour toutes les activités des quatre inscrits (l'appelante, les deux compagnies nommées au sous-paragraphe d) ainsi que Claudette Ruest) et pour payer ses dépenses personnelles;

f)           les déclarations trimestrielles de l'appelante étaient faites par le comptable à partir des chèques, mais sans que ce dernier ait en sa possession les factures d'achat et de vente;

g)          de plus, le comptable n'ayant pas en main les contrats de vente ou de location ni les factures, les revenus étaient déclarés selon les dépôts et rajustés en fin d'année lorsque ces documents lui étaient fournis;

h)          les revenus devaient également être ajustés en fin d'année pour tenir compte des montants qui n'avaient pas été déposés au compte, puis ventilés pour chaque activité et chacun des quatre inscrits sur la base des renseignements fournis par Monsieur Marcel Thiffault;

i)           ainsi, les sommes perçues des loyers résidentiels n'ont pu être retracées dans les dépôts et l'intimée a été incapable de confirmer que les revenus déclarés pour ces locations résidentielles provenaient effectivement de ces locations ou des buanderies qui sont mises à la disposition des locataires;

j)           il découle de ce qui précède que l'appelante avait une comptabilité déficiente, les livres comptables étant inadéquats dans certains cas et inexistants dans d'autres, que les revenus n'ont pas tous été déclarés, que les C.T.I. étaient réclamés sans tenir compte du nom de l'inscrit auquel la facture était faite et que des C.T.I. ont été demandés pour des activités non taxables ou ont été réclamés en double;

k)          les inscriptions effectuées au grand livre de l'appelante n'étaient donc pas conformes aux factures d'achat et de vente;

l)           en ce qui concerne la buanderie exploitée au 476, St-Jean, l'intimée a estimé ses revenus annuels de la façon suivante :

-            il a d'abord établi la consommation d'électricité et de gaz naturel pour la buanderie en tenant compte que, selon les constatations faites sur place, l'éclairage principal était fermé en dehors des heures d'ouverture, seuls quelques fluorescents restant allumés, que le ventilateur ne fonctionnait pas 24 heures par jour mais plutôt 4 heures par jour et ce, 182 jours par année, et que la période de chauffage était elle aussi de 182 jours par année;

-            à partir de cette consommation et du nombre de kilowatts requis pour le fonctionnement des laveuses et sécheuses, il a calculé le temps d'utilisation d'une laveuse et d'une sécheuse en heures par jour;

-            il a ensuite estimé les revenus des buanderies en tenant compte du nombre de laveuses et de sécheuses de la buanderie et du prix fixé par l'appelante pour les utilisateurs;

-            il a enfin établi les revenus annuels de la buanderie sur la base d'une utilisation des laveuses pendant une durée de 1.5424 heures par jour alors que l'utilisation des sécheuses était fixée à .4046 heure par jour;

-            les revenus provenant des buanderies ont ainsi été établis comme suit :

                                                                                    1994

                                    Revenus déclarés:                            0,00 $

                                    Revenus révisés:                        6 631,43 $

                                    Écart:                                        6 631,43 $

m)         le montant de T.P.S. que la requérante a omis de remettre relativement à ces fournitures taxables de 6 965,69, soit 279,47 $, a donc fait l'objet de l'avis de cotisation en litige;

n)          en ce qui concerne les revenus provenant des logements commerciaux provenant des immeubles sis au 466-480, St-Jean, l'intimée les a établis selon les baux fournis par l'appelante, à l'exception du loyer de la brasserie qui a été fixé selon les montants déclarés par l'appelante lors de la conciliation de ses revenus de location;

o)          l'appelante a omis de percevoir et de remettre la totalité de T.P.S. payable sur ces loyers et l'intimée l'a en conséquence cotisée par un montant de 682,67 $ en 1994;

p)          l'appelante a de plus loué à des fins résidentielles, avec option d'achat, un condominium sis au 991, Terrasse des Promenades, à Drummondville, et dont elle avait effectué la construction;

q)          la juste valeur marchande de ce condo était de 40 000,00 $ taxes incluses;

r)           le montant de la T.P.S. que l'appelante a ainsi omis de remettre relativement à cette fourniture réputée être faite à elle-même est donc de 2 457,11 $;

s)          en effet, en vertu de la loi, l'appelante est réputée s'être fournir à elle-même;

t)           enfin, après étude de toutes les factures soumises par l'appelante des C.T.I. ont été refusées pour un montant global de 3 958,93 $, et ce pour les motifs suivants ;

-            des factures d'achat étaient manquantes;

-            des montants ont été réclamés en double, soit à la fois par l'appelante et par l'un des trois autres inscrits dont les activités étaient aussi administrées par Monsieur Marcel Thiffault;

-            des achats étaient inadmissibles, notamment parce que de nature personnelle ou parce que relatifs à des biens non acquis dans le cadre des activités commerciales, et ne donnaient donc pas droit à un C.T.I.;

l'intimée allouant par ailleurs des C.T.I. supplémentaires pour un montant total net de 34 407,30 $;

B.         QUESTION EN LITIGE

12.        Il s'agit de déterminer si l'appelante est redevable du montant de 17 922,57 $ cotisé à titre de taxe nette non remise (pénalité et intérêts exclus);

[3]      Tout comme au niveau des autres dossiers, l'appelante n'a soumis aucune preuve valable pour soutenir le bien fondé de ses prétentions. Elle a essentiellement critiqué, blâmé et reproché à l'intimée l'arbitraire de la méthode utilisée pour établir la cotisation.

[4]      L'intimée a effectivement dû recourir à certains procédés pouvant conduire à une ou des conclusions n'ayant pas la rigueur absolue découlant d'une vérification où toute la documentation appropriée est disponible. L'appelante ne pouvait pas reprocher à l'intimée de ne pas avoir pris en considération les vrais chiffres, les vraies informations, elle ne les avait tout simplement pas; s'ils étaient disponibles, la preuve n'en a pas été faite.

[5]      Comment ce tribunal peut-il décider du montant exact d'une cotisation à défaut d'une preuve étoffée qui permet de tirer des conclusions intelligentes?

[6]      J'ai indiqué dès le début des auditions et, à plusieurs reprises par la suite, qu'il était absolument nécessaire à l'appelante de faire la preuve du bien fondé de ses prétentions et que de vagues critiques souvent dirigées à l'endroit des vérificateurs personnellement n'étaient pas une façon de relever le fardeau de la preuve qui lui incombait.

[7]      Comment pourrais-je décider que la cotisation est en totalité ou en partie injustifiée à défaut d'un minimum de preuve démontrant que la vérification a été entachée d'une faute lourde ou de mauvaise foi?

[8]      La preuve a largement démontré que l'appelante avait été peu collaboratrice voire même agressive à l'endroit des responsables de la vérification. D'autre part, l'appelante n'avait pas les informations documentaires appropriées ou si elle les avait, ne les a pas utilisées pour soutenir le bien fondé de ses prétentions.

[9]      Dans de telles circonstances, comme je l'ai d'ailleurs indiqué en cours d'instance, je n'ai pas d'autre choix que de souscrire aux conclusions retenues par l'intimée. Pour en être autrement, il eût fallu que l'appelante démontre d'une manière prépondérante que l'intimée avait établi la cotisation par le biais d'un procédé tendancieux mais aussi et surtout par la preuve qu'elle avait en sa possession toutes les informations et documentations nécessaires pour l'établissement d'une cotisation autre que celle contestée.

[10]     Non seulement la preuve n'a pas démontré la mauvaise foi de l'intimée, la prépondérance de la preuve a clairement établi que l'intimée avait agi selon des procédés raisonnables, crédibles et dignes de foi en termes de résultats.

[11]     Je reconnais que la meilleure méthode eut été celle répondant aux règles de l'art de la comptabilité. Par contre, pour ce faire, il eût fallu que l'appelante dispose et fournisse une comptabilité adéquate complétée par la preuve documentaire pertinente.

[12]     Les nombreuses mises en garde de ce tribunal à l'appelante aux fins qu'elle corrige son tir pour s'attaquer à sa véritable obligation de relever le fardeau de preuve qui lui incombait n'ont strictement rien donné; ne pouvant de toute évidence pas reconstituer les faits au moyen d'une preuve documentaire adéquate et sensée, l'appelante, par le biais de Charles Thiffault, a plutôt choisi d'exprimer sa colère et sa rancoeur à l'endroit de l'intimée.

[13]     Ce tribunal est lié par la preuve soumise; en l'espèce, cette preuve a été tout à fait insatisfaisante.

[14]     En contrepartie, l'intimée a largement démontré, en dépit des contraintes et difficultés à reconstituer les faits, qu'elle avait agi d'une façon judicieuse et crédible. Intervenir aurait pour effet de statuer d'une façon totalement arbitraire et non justifiée eu égard à la preuve disponible.

[15]     Pour ces motifs, l'appel est rejeté et la cotisation confirmée, le tout avec dépens si applicables.

Signé à Ottawa, Canada, ce 11e jour de septembre 1998.

« Alain Tardif »

J.C.C.I.


No DU DOSSIER DE LA COUR :       97-146(GST)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :               GESTION 69691 INC. et Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                    Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                  le 28, 29 et 30 janvier 1998

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :        l'honorable juge Alain Tardif

DATE DU JUGEMENT :                    le 11 septembre 1998

COMPARUTIONS :

Représentant de l'appelante :      Marcel Thiffault

Avocate de l'intimée :                 Me Maryse Lord

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER :

Pour l'appelant(e) :

                   Nom :          

                   Étude :                  

Pour l'intimé(e) :                        Morris Rosenberg

                                                Sous-procureur général du Canada

                                                Ottawa, Canada

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