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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

91-2631(IT)G

ENTRE :

RON S. SOURANI,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Requêtes entendues le 18 mars 2002 à Toronto (Ontario)

par l'honorable juge M. A. Mogan

Comparutions

Pour l'appelant :                                   L'appelant lui-même

Avocate de l'intimée :                          Me H. Annette Evans

ORDONNANCE

          Vu la requête présentée par l'intimée afin d'obtenir une ordonnance rejetant l'appel interjeté par l'appelant à l'encontre d'une cotisation d'impôt établie aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1983;

          Et vu les actes de procédure, les ententes écrites des avocats du 28 avril 1995 et du 25 mai 1995 et certains arrêts de la Cour d'appel fédérale;

          Et vu les allégations de l'appelant et de l'avocate de l'intimée;

          La Cour accueille la requête de l'intimée, avec des dépens de 300 $;

La Cour rejette l'appel interjeté à l'encontre d'une cotisation d'impôt établie en vertu de la Loi pour l'année d'imposition 1983.

          Vu la requête présentée par l'appelant afin d'obtenir une ordonnance enjoignant à Revenu Canada de produire certains documents et de fournir certains renseignements, de même qu'une ordonnance ajournant l'audition de la requête de l'intimée;

          Et vu l'affidavit de l'appelant;

          Et vu les allégations de l'appelant et de l'avocate de l'intimée;

          La Cour rejette la requête, sans dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 3e jour d'avril 2002.

« M. A. Mogan »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 10e jour de novembre 2003.

Yves Bellefeuille, réviseur


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Date : 20020403

Dossier : 91-2631(IT)G

ENTRE :

RON S. SOURANI,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

Le juge Mogan, C.C.I

[1]      Par avis de requête du 20 décembre 2001, l'intimée demande une ordonnance rejetant l'appel interjeté par l'appelant relativement à son année d'imposition 1983. Par avis de requête du 20 février 2002, l'appelant demande, premièrement, une ordonnance enjoignant à Revenu Canada de produire certains documents et de fournir certains renseignements et, deuxièmement, une ordonnance ajournant la requête de l'intimée jusqu'à ce que les documents soient produits. Les deux requêtes ont été inscrites au rôle pour audition à Toronto le lundi 18 mars 2002. L'appelant s'est représenté lui-même, tandis que Me Annette Evans était l'avocate de l'intimée. Après avoir entendu les deux parties sur la question de savoir laquelle des requêtes devrait être entendue en premier, j'ai décidé d'entendre la requête de l'intimée en premier et celle de l'appelant immédiatement après.

La requête de l'intimée

[2]      L'intimée demande une ordonnance rejetant l'appel interjeté par l'appelant relativement à son année d'imposition 1983. La requête est simple, mais l'historique du présent appel est complexe. L'appelant, M. Sourani, est l'un des quelque 300 contribuables qui figuraient au nombre des clients de J.K. Maguire & Associates ( « Maguire » ) de 1983 à 1987. Maguire avait élaboré pour ses clients une stratégie d'évitement fiscal. Revenu Canada a contesté la stratégie d'évitement fiscal de Maguire et a établi des cotisations à l'égard de quelque 300 contribuables, dont M. Sourani, ce qui a eu pour effet d'annuler l'avantage fiscal que Maguire avait espéré obtenir. En conséquence, environ 300 appels ont été interjetés devant notre cour; la plupart de ces appels traitaient de questions identiques. Les appels sont divisés en deux catégories générales : (i) la stratégie du club de placement; (ii) la stratégie d'opérations de couverture sur des valeurs convertibles. L'appel interjeté par M. Sourani concernait la stratégie du club de placement.

[3]      En fin de compte, la Cour a entendu à titre de cause type un appel interjeté par un mari et son épouse. Les appels interjetés par Thomas et Lois Schultz ont été tranchés par notre cour en 1993 (C.C.I., no 92-164(IT), 5 juillet 1993, 93 D.T.C. 953) et par la Cour d'appel fédérale en 1995 ([1996] 1 C.F. 423, 95 D.T.C. 5657). La Cour d'appel fédérale a rendu sa décision dans l'affaire Schultz le 2 novembre 1995. Me Donald Zaldin représentait tous les clients de Maguire (au nombre d'environ 300) ayant interjeté appel devant notre cour à l'encontre des cotisations pour les années d'imposition 1983 à 1987. Alors que les appels Schultz progressaient de notre cour à la Cour d'appel fédérale, Me Zaldin et l'avocat de l'intimée ont conclu deux ententes écrites concernant les autres appels (y compris celui de Ron Sourani). La première entente est datée du 28 avril 1995. En raison de sa brièveté, l'entente complète est reproduite ci-dessous :

          [TRADUCTION]

COUR CANADIENNE DE L'IMPÔT

E N T R E :

D. BRUCE RIVERS et les appelants énumérés à

l'annexe A ci-jointe,

appelants

- et -

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée

ENTENTE

            Les parties conviennent qu'à l'égard de tous les appelants, exception faite de ceux énumérés au paragraphe a) de l'ordonnance du juge Bonner du 18 août 1994, la question qui reste à trancher par la Cour canadienne de l'impôt est celle de savoir si le ministre du Revenu national s'est acquitté avec toute la diligence possible de l'obligation qui lui incombe aux termes du paragraphe 165(3) de la Loi de l'impôt sur le revenu et, dans la négative, de déterminer les conséquences juridiques qui en résulteraient.

            En ce qui concerne les appelants énumérés au paragraphe a) de l'ordonnance du juge Bonner, les appelants limitent le litige concernant la stratégie du club de placement à la question de savoir si le ministre du Revenu national s'est acquitté avec toute la diligence possible de l'obligation qui lui incombe aux termes du paragraphe 165(3) de la Loi de l'impôt sur le revenu et, dans la négative, de déterminer les conséquences juridiques qui en résulteraient.

            Pour plus de clarté, les appelants énumérés au paragraphe a) de l'ordonnance du juge Bonner ne peuvent soulever les arguments invoqués dans les avis d'appel qu'à l'égard de la stratégie d'opérations de couverture.

            FAIT À Toronto, ce 28e jour d'avril 1995.

[4]      Eu égard aux modalités de la première entente, je conclus que les appelants énumérés au paragraphe a) de l'ordonnance du juge Bonner étaient les contribuables s'étant servis de la stratégie d'opérations de couverture sur des valeurs convertibles et peut-être aussi de la stratégie du club de placement. Par ailleurs, l'entente ci-haut se passe de commentaire. La deuxième entente intervenue entre Me Zaldin et l'avocat de l'intimée est datée du 25 mai 1995. Puisqu'elle est plus longue que la première, elle est résumée au paragraphe 6 ci-dessous.

[5]      Je m'emploierai à énoncer ce qui, à mon avis, constitue le fond de la première entente. Les contribuables dont l'appel ne concernait que la stratégie du club de placement ont convenu de ne débattre que de la question de savoir si le ministre s'était acquitté « avec toute la diligence possible » de l'obligation qui lui incombait aux termes de l'alinéa 165(3)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu et, dans la négative, de déterminer les conséquences juridiques qui en résulteraient. Les autres contribuables (parfois appelés « appelants hybrides » , puisque leur appel portait à la fois sur la stratégie du club de placement et sur la stratégie d'opérations de couverture sur des valeurs convertibles) ont convenu de ce qui suit : (i) en ce qui concerne la stratégie du club de placement, ils ne débattraient que de la question de la « diligence » , à l'instar des contribuables dont l'appel ne concernait que la stratégie du club de placement; (ii) en ce qui concerne la stratégie d'opérations de couverturesur des valeurs convertibles, ils pourraient débattre de toutes les questions soulevées dans leurs avis d'appel.

[6]      Selon la deuxième entente, les parties ont convenu respectivement de ce qui suit, dans sept paragraphes numérotés :

1.        Les appelants dont l'appel concernait la stratégie du club de placement accepteraient la décision définitive rendue par la Cour d'appel fédérale (ou, le cas échéant, la Cour suprême du Canada) dans l'affaire Schultz à l'égard de la question de la « diligence » ; ainsi, leur entente précédente du 28 avril 1995 a été annulée en partie.

2.        Tous les appels concernant la stratégie du club de placement ont été ajournés jusqu'à ce qu'un tribunal d'appel rende une décision définitive dans l'affaire Schultz.

3.        Les appelants hybrides accepteraient la décision définitive rendue par la Cour d'appel fédérale (ou la Cour suprême du Canada) dans l'affaire Schultz à l'égard de la question de la « diligence » et de la question de la nullité pour cause d'imprécision visant le paragraphe 245(1).

4.        Les appelants hybrides ont renoncé à trois autres questions.

5.        Immédiatement après la décision définitive d'un tribunal d'appel dans l'affaire Schultz, les appelants hybrides examineraient le règlement de la question de la stratégie d'opérations de couverture sur des valeurs convertibles, après quoi ils aviseraient notre cour quant à la question de savoir si certains appelants hybrides consentiraient à un jugement à l'égard de cette question.

6.        Les avocats ont convenu de poursuivre l'appel de l'affaire Schultz dans les plus brefs délais.

7.        Des consentements au jugement conformes aux paragraphes 1 et 3 seraient déposés dans les 90 jours suivant la décision définitive d'un tribunal d'appel dans l'affaire Schultz.

[7]      Le 2 novembre 1995, dans l'affaire Schultz, [1996] 1 C.F. 423, 95 D.T.C. 5657, la Cour d'appel fédérale a prononcé des motifs de jugement détaillés traitant notamment de la stratégie du club de placement, de la stratégie d'opérations de couverture sur des valeurs convertibles, y compris la question de la société de personnes, ainsi que de la question de la « diligence » . Dans le dossier de requête de l'intimée, la liste de documents à utiliser à l'audience comprenait le document no 7, soit l'avis de requête de l'intimée du 5 juillet 1996, et le document no 8, soit l'affidavit de Nancy Arnold fait le 4 juillet 1996 à l'appui de l'avis de requête de l'intimée. Je me fonde sur l'affidavit de Nancy Arnold et la requête de l'intimée du 5 juillet 1996 pour établir les faits suivants :

1.        Dans l'affaire Schultz, la Cour suprême du Canada a refusé l'autorisation de pourvoi le 23 mai 1996.

2.        Me Zaldin, l'avocat de tous les clients dont l'appel concernait la stratégie du club de placement, n'a pas déposé d'avis de désistement auprès de notre cour.

3.        Le 5 juillet 1996, l'intimée a déposé auprès de notre cour un avis de requête demandant notamment des jugements rejetant tous les appels énumérés dans une annexe jointe à l'avis (y compris l'appel interjeté par Ron Sourani, numéro du greffe 91-2631(IT)G).

[8]      La requête de l'intimée déposée le 5 juillet 1996 a été entendue par le juge Rip de notre cour le 17 juillet 1996. Le 4 février 1997, le juge Rip a rendu son ordonnance relativement à la requête de l'intimée : voir Rivers c. La Reine, C.C.I., no 91-2517(IT)G, 4 février 1997, 97 D.T.C. 175. En résumé, le juge Rip a rejeté tous les appels concernant la stratégie du club de placement (y compris l'appel interjeté par Ron Sourani, numéro du greffe 91-2631(IT)G) et a ordonné à Me Zaldin de contribuer la somme de 10 279,64 $ au paiement des dépens totaux de l'intimée, lesquels se chiffraient à 98 479,64 $. Un certain nombre d'appels ont été interjetés devant la Cour d'appel fédérale à l'encontre de l'ordonnance du juge Rip.

[9]      Donald Zaldin a interjeté appel à l'encontre de la partie de l'ordonnance du juge Rip l'obligeant à contribuer 10 279,64 $ au paiement des dépens de l'intimée. Dans un jugement rendu oralement le 8 juin 2000, la Cour d'appel fédérale a accueilli l'appel de Me Zaldin (C.A.F., no A-162-97, 2000 D.T.C. 6403) et annulé le paragraphe 3b) de l'ordonnance du juge Rip. George Vasiga a interjeté appel à l'encontre du paragraphe 2 de l'ordonnance du juge Rip, laquelle prétendait accueillir les appels hybrides et les déférer au ministre pour nouvelle cotisation en tenant compte du fait que tous les montants admis par le ministre en vertu d'un mandat (et résultant d'opérations de couverture sur des valeurs convertibles) devraient être admis en vertu d'une société de personnes. Dans un jugement rendu oralement le 8 juin 2000, la Cour d'appel fédérale a accueilli l'appel de M. Vasiga (C.A.F., no A-185-97, 2000 D.T.C. 6405) et ordonné que les parties retrouvent la position qu'elles occupaient avant l'ordonnance du juge Rip afin d'en arriver à un règlement ou de procéder, s'il y avait lieu, à l'interrogatoire préalable et à l'instruction.

[10]     Ron Sourani (l'appelant dans la présente requête de l'intimée) a interjeté appel à l'encontre du paragraphe 1 de l'ordonnance du juge Rip, lequel prétendait rejeter tous les appels concernant la stratégie du club de placement. L'appel de M. Sourani a été entendu à la Cour d'appel fédérale par la même formation de juges que celle ayant entendu et tranché les appels Zaldin et Vasiga; cependant, il semblerait que l'appel Sourani ait été entendu plusieurs mois après les appels Zaldin et Vasiga. La Cour d'appel fédérale a accueilli l'appel interjeté par M. Sourani (C.A.F., no A-177-97, 4 juin 2001, 2001 D.T.C. 5393). Ayant examiné ce que la Cour d'appel fédérale a précisé au moment d'accueillir l'appel de M. Sourani, j'accorde une importance particulière aux paragraphes suivants :

[2]         Dans l'appel Vasiga, la présente formation collégiale a conclu qu'il y avait eu absence d'équité procédurale dans l'instance ayant conduit au jugement du 4 février 1997 de la Cour de l'impôt. Comme M. Sourani est visé par la même instance et par le même jugement, l'appel qu'il a interjeté en l'espèce devrait également être accueilli et l'affaire devrait être renvoyée devant un autre juge de la Cour canadienne de l'impôt pour réexamen et nouvelle décision.

[...]

[6] L'avocat de M. Sourani avait le pouvoir apparent et manifeste de signer les ententes du 28 avril 1995 et du 25 mai 1995. M. Sourani est par conséquent lié par ces ententes et la question du pouvoir de son avocat de les conclure n'est pas une question que la Cour de l'impôt doit réexaminer. Je ne formule aucun commentaire sur la question de savoir si M. Sourani peut exercer un autre type de recours contre son avocat.

[7] L'appel de M. Sourani concerne un « club de placement » . Le réexamen de la Cour de l'impôt se limitera aux questions soulevées par le ministre dans la requête en jugement qu'il lui a soumise le 5 juillet 1996 et qui ont trait aux appels relatifs au « club de placement » .

[11]     Le renvoi à l'appel Vasiga est important, puisque c'est dans cette affaire que la Cour d'appel fédérale a conclu à l'absence d'équité procédurale. Dans l'affaire Vasiga (C.A.F., no A-185-97, 8 juin 2000, 2000 D.T.C. 6405), la question en litige était celle de savoir si M. Vasiga, par l'entremise de son avocat, avait consenti au jugement et à l'ordonnance du juge Rip du 4 février 1997. La Cour d'appel fédérale a énuméré les documents qui lui ont été présentés dans l'affaire Vasiga et a conclu que les documents dans leur ensemble prêtaient à confusion et soulevaient des préoccupations quant à la nature du consentement de M. Vasiga au jugement et à la question de savoir si un tel consentement avait été donné. Toutefois, il faut se rappeler que M. Vasiga était un appelant hybride et que plusieurs appels hybrides allaient être accueillis afin que les sociétés de personnes soient reconnues. Il se peut que, dans le cadre de la requête de l'intimée devant le juge Rip, l'intimée ait tenu pour acquis que le seul recours dont disposait un appelant hybride était la reconnaissance de la société de personnes, plutôt que celle du mandat, à l'égard des opérations de couverture sur des valeurs convertibles. Dans de telles circonstances, la Cour d'appel fédérale a décidé que M. Vasiga [TRADUCTION] « avait le droit d'être entendu » .

[12]     Bien qu'il puisse y avoir eu absence d'équité procédurale lors de l'audience du 17 juillet 1996 devant le juge Rip, les conséquences d'une telle inéquité pour un appelant dont l'appel concernait la stratégie du club de placement (tel que M. Sourani) pourraient se distinguer considérablement des conséquences qu'elle a pour un appelant hybride (tel que M. Vasiga). La Cour d'appel fédérale semble avoir été très consciente d'une telle distinction. M. Vasiga a obtenu [TRADUCTION] « le droit d'être entendu » soit pour en arriver à un règlement, soit pour procéder à l'instruction. Le réexamen effectué par un autre juge de notre cour à l'égard de M. Sourani se limite aux « questions soulevées par le ministre dans la requête en jugement du 5 juillet 1996 et qui ont trait aux appels relatifs au « club de placement » » .

[13]     L'intimée a présenté la présente requête en décembre 2001, à la suite de la décision rendue par la Cour d'appel fédérale le 4 juin 2001 à l'égard de Ron Sourani (C.A.F., no A-177-97, 4 juin 2001, 2001 D.T.C. 5393). Pour la « gouverne » de notre cour (voir le paragraphe 3 des motifs, page 5394 du D.T.C.), la Cour d'appel fédérale a confirmé que M. Sourani était lié par les deux ententes des avocats du 28 avril 1995 et du 25 mai 1995. La première entente est énoncée au paragraphe 3 ci-haut, tandis que la deuxième est résumée au paragraphe 6 ci-dessus.

[14]     Le dossier de requête de l'intimée comprend les actes de procédure. L'avis d'appel du 3 décembre 1991 (le document no 3) porte sur une nouvelle cotisation établie pour l'année d'imposition 1983 et soulève les questions suivantes :

(i)       Le ministre a-t-il répondu à l'avis d'opposition de l'appelant « avec toute la diligence possible » aux termes de l'alinéa 165(3)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu, eu égard au fait que l'opposition a été signifiée en juin 1987 et que la confirmation a été donnée en octobre 1991 (52 mois)?

(ii)       Le ministre a-t-il commis un abus de procédure ou abusé des droits de l'appelant en délivrant l'avis de confirmation?

(iii)      Le ministre pouvait-il justifier l'augmentation du revenu de l'appelant par voie d'avis de nouvelle cotisation?

(iv)      Le paragraphe 245(1) de la Loi devrait-il être invalidé pour cause d'imprécision?

(v)      Le ministre a-t-il enfreint les droits de l'appelant en vertu des articles 7, 12 et 15 de la Charte canadienne des droits et libertés?

La réponse de l'intimée du 27 février 1992 a soulevé six questions supplémentaires ne faisant pas partie de l'avis d'appel; cependant, elles ne sont pas pertinentes aux fins de la requête de l'intimée et des présents motifs.

[15]     Dans sa requête, l'intimée demande une ordonnance rejetant l'appel interjeté par l'appelant à l'égard de son année d'imposition 1983. Je m'interroge principalement sur la question de savoir si la requête de l'intimée peut constituer le « réexamen » exigé par la Cour d'appel fédérale dans sa décision aux paragraphes 2 et 3 (D.T.C. : aux pages 5393 et 5394) :

[2]         [...] Comme M. Sourani est visé par la même instance et par le même jugement, l'appel qu'il a interjeté en l'espèce devrait également être accueilli et l'affaire devrait être renvoyée devant un autre juge de la Cour canadienne de l'impôt pour réexamen et nouvelle décision.

[3]         Pour la gouverne de la Cour de l'impôt, je tiens à formuler les observations suivantes.[...]

Au paragraphe 10 ci-haut, j'ai reproduit le texte complet des paragraphes 6 et 7 des motifs de la Cour d'appel fédérale, puisque ces paragraphes contiennent l'essentiel de la « gouverne » fournie par cette cour. Si l'intimée n'avait pas présenté la présente requête et si notre cour avait simplement inscrit le présent appel de nouveau au rôle pour réexamen, la position de l'intimée lors de cette audience aurait-elle été différente de sa position lors de la présente requête? À mon avis, il faut répondre à la question par la négative.

[16]     Tout juge de notre cour tentant d'effectuer un réexamen de l'appel de M. Sourani ou de la requête du ministre serait lié par les questions et documents suivants :

a)        les questions soulevées dans l'avis d'appel;

b)       les ententes écrites des avocats du 28 avril 1995 et du 25 mai 1995 et qui, selon la Cour d'appel fédérale, lient M. Sourani;

c)        les questions soulevées dans la requête de l'intimée du 5 juillet 1996 relativement aux appels concernant la stratégie du club de placement, conformément au paragraphe 7 des motifs de la Cour d'appel fédérale.

Les questions soulevées dans l'avis d'appel sont résumées au paragraphe 14 ci-haut. Les ententes écrites des avocats se rapportent directement à ces questions. Dans la première entente, celle d'avril 1995, les contribuables dont l'appel concernait la stratégie du club de placement ont convenu de ne débattre que de la question de savoir si le ministre s'était acquitté « avec toute la diligence possible » de l'obligation qui lui incombait aux termes de l'alinéa 165(3)a) de la Loi et, dans la négative, de déterminer les conséquences juridiques qui en résulteraient. Voir les paragraphes 3, 4 et 5 ci-dessus. Dans la deuxième entente, celle de mai 1995, les appelants dont l'appel concernait la stratégie du club de placement ont convenu qu'ils accepteraient la décision définitive rendue par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Schultz à l'égard de la question de la « diligence » .

[17]     Dans l'affaire Schultz, la Cour d'appel fédérale a clairement tranché la question de la « diligence » de façon défavorable aux contribuables. En prononçant le jugement au nom de la Cour, le juge Stone a précisé ce qui suit, aux paragraphes 36 et 37 :

À mon avis, les appelants n'ont pas démontré que le juge de la Cour de l'impôt a commis une erreur en concluant que, dans les circonstances, le ministre avait agi avec « diligence » . Ces opérations étaient en fait nombreuses et compliquées. [...] Je suis également d'avis que l'expression « avec diligence » n'imposait pas au ministre le respect de délais déterminés. En fait, il a été proposé que cette expression conférait un [traduction] « pouvoir discrétionnaire que le ministre doit exercer pour la bonne administration de la Loi conformément à la raison, à la justice et aux principes de droit » (le juge Fournier dans Jolicoeur, Joseph Baptiste Wilfrid v. Minister of National Revenue, [1961] R.C.É. 85, à la page 98). [...]

J'estime également que les appelants auraient pu interjeter appel des nouvelles cotisations en vertu de l'alinéa 169b) de la Loi qui dispose :

169 [...]

Les retards imputables au ministre en ce qui a trait à la confirmation de ses nouvelles cotisations n'empêchaient pas les appelants d'interjeter appel devant la Cour canadienne de l'impôt en vertu de cet alinéa. (Voir l'affaire Jolicoeur, précitée, aux pages 97 et 98.) Les appelants peuvent difficilement se plaindre de retards injustifiables de la part du ministre alors que, s'ils l'avaient voulu, ils auraient pu contester les nouvelles cotisations du ministre devant la Cour canadienne de l'impôt même s'ils n'avaient pas encore reçu de confirmation de sa part. [...]

[18]     La décision rendue par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Schultz à l'égard de la question de la « diligence » est compatible avec la décision qu'elle a rendue sur la même question dans l'affaire Bolton c. La Reine, C.A.F., no A-1-95, 11 juin 1996, 96 D.T.C. 6413, ainsi qu'avec la décision rendue par feu le juge en chef adjoint Christie de notre cour dans l'affaire Apfelbaum c. M.R.N., C.C.I., no 90-10(IT), 18 mars 1991, 91 D.T.C. 800.

[19]     Lors de sa plaidoirie, M. Sourani s'est appuyé sur l'énoncé suivant du juge Stone dans l'affaire Schultz au paragraphe 33 :

Je passe maintenant à la question de savoir si le ministre a agi avec « diligence » en confirmant les nouvelles cotisations pour les années d'imposition 1984, 1985, 1986 et 1987. S'il ne l'a pas fait, ces nouvelles cotisations doivent être annulées. [...]

L'énoncé n'est pas compatible avec ce qu'a déclaré le juge Stone par la suite aux paragraphes 36 et 37 (cités ci-haut) et contredit également la décision rendue par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Bolton (C.A.F., no A-1-95, 11 juin 1996, 96 D.T.C. 6413), où le juge Hugessen, s'exprimant au nom de la Cour, a précisé ce qui suit :

[...] le législateur n'entendait clairement pas que le défaut du ministre d'examiner de nouveau une cotisation avec toute la diligence possible ait pour effet d'annuler la cotisation. En cas d'inaction de la part du ministre, le contribuable a pour recours l'appel prévu à l'article 169 [...]

Lorsque le juge Rip de notre cour a prononcé ses motifs le 4 février 1997, il a qualifié de remarque incidente (obiter dicta) l'énoncé ci-haut du juge Stone au paragraphe 33. Je suis convaincu qu'il s'agissait soit d'une remarque incidente, soit d'un simple commentaire contredisant ce que le savant juge d'appel a déclaré par la suite au paragraphe 37 au sujet du recours du contribuable en vertu de l'article 169.

[20]     Dans la première entente écrite conclue entre les avocats en avril 1995, les parties ont convenu que les appelants dont l'appel concernait la stratégie du club de placement ne débattraient que de la question de la « diligence » . Dans la deuxième entente, celle de mai 1995, les parties ont convenu qu'elles consentiraient à un jugement conforme à la décision rendue par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Schultz à l'égard de la question de la « diligence » . La Cour d'appel fédérale a tranché la question de la « diligence » de façon concluante et à l'encontre de M. Schultz.

[21]     Le premier paragraphe de la deuxième entente se rapporte aux questions relatives à la « diligence » et aux conséquences qui pourraient survenir si le ministre n'agissait pas avec toute la diligence possible. Le paragraphe deux de la deuxième entente se lit comme suit :

[TRADUCTION]

2.          Puisque ce sont là les seules questions qu'il reste à trancher dans le cadre des appels concernant la stratégie du club de placement/associés commerciaux, en raison de l'entente du 28 avril 1995, les parties conviennent de faire ajourner l'audition de ces appels jusqu'à ce que les appels Schultz soient tranchés de façon définitive par la Cour d'appel fédérale (ou, le cas échéant, la Cour suprême du Canada).

Je suis convaincu que la question de la « diligence » était la seule question en litige opposant l'intimée et les appelants dont l'appel concernait la stratégie du club de placement après la première entente écrite des avocats. Je suis également convaincu que tous les appelants dont l'appel concernait la stratégie du club de placement étaient liés par la décision rendue par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Schultz à l'égard de la question de la « diligence » après la deuxième entente écrite des avocats. L'appel de M. Sourani concernait la stratégie du club de placement.

[22]     En conséquence, je ne constate aucune question qui reste en litige entre M. Sourani et l'intimée. Eu égard aux deux ententes écrites des avocats et à la décision rendue par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Schultz à l'égard de la question de la « diligence » , je conclus que la requête de l'intimée visant à obtenir le rejet de l'appel de M. Sourani est conforme aux directives de la Cour d'appel fédérale portant sur le réexamen de l'appel de M. Sourani ou à la requête du ministre du 5 juillet 1996 reconnaissant la validité des deux ententes écrites des avocats. Par conséquent, je rejetterai l'appel de M. Sourani pour l'année d'imposition 1983. L'intimée a droit à des dépens de 300 $.

La requête de l'appelant

[23]     En raison de ma décision d'accueillir la requête de l'intimée et de rejeter l'appel interjeté par l'appelant pour l'année 1983, il est inutile d'examiner le bien-fondé de la requête de l'appelant. Toutefois, j'aimerais apporter des commentaires au sujet de certains arguments soulevés en cour par l'appelant.

[24]     M. Sourani a insisté sur le fait qu'il était disposé à collaborer avec Revenu Canada lors de la vérification de son année d'imposition 1983. Il a décrit une certaine enveloppe qu'il avait livrée en mains propres à Revenu Canada le 15 juin 1983. Il tentait d'établir une distinction entre sa cause et l'affaire Schultz. Dans Schultz, la Cour d'appel fédérale a décrit, au paragraphe 34, la façon dont le ministre avait dû exiger la fourniture de renseignements et la production de documents en vertu de l'article 231.2 parce que le conseiller avait fait défaut de fournir les renseignements demandés. Je crois le témoignage de M. Sourani et je conclus sans difficulté qu'il a tenté de collaborer avec Revenu Canada.

[25]     L'un des problèmes de M. Sourani, c'est que sa collaboration avec Revenu Canada est sans pertinence. Après que son avocat, Me Zaldin, eut signé les deux ententes du 28 avril 1995 et du 25 mai 1995, le déroulement et le résultat de l'appel personnel de M. Sourani pour l'année 1983 échappaient à son contrôle et allaient être déterminés par la décision rendue par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Schultz à l'égard de la question de la « diligence » . Il n'existait aucune autre question litigieuse opposant M. Sourani et l'intimée. La requête de M. Sourani est rejetée, sans dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 3e jour d'avril 2002.

« M. A. Mogan »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 10e jour de novembre 2003.

Yves Bellefeuille, réviseur

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