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Dossiers : 2002‑901(IT)I

2002‑1482(IT)I

ENTRE :

BEVERLEY E. HOWARD,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

et

 

JAMES ALTON,

mis en cause.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

La preuve et l’argumentation relatives à la question posée en vertu de l’article 174 de la Loi de l’impôt sur le revenu ont été entendues le 28 août 2003 à Charlottetown (Île‑du‑Prince‑Édouard)

 

Par : L’honorable juge M. A. Mogan

 

Comparutions :

 

Avocate de l’appelante :

Me Jennifer S. McPherson

Avocat de l’intimée :

Pour le mis en cause :

Me John Shipley

Le mis en cause lui‑même

____________________________________________________________________


JUGEMENT SUR LA DÉTERMINATION D’UNE QUESTION

EN VERTU DE L’ARTICLE 174 DE LA LOI DE L’IMPÔT SUR LE REVENU

 

          Dans une ordonnance rendue le 20 août 2002, James Dalton a été joint à titre de mis en cause aux appels interjetés par Beverley E. Howard en vue de déterminer la question suivante en vertu de l’article 174 de la Loi de l’impôt sur le revenu :

 

6.       À savoir si l’appelante et James Dalton avaient fait un choix conjoint selon lequel l’appelante n’inclurait pas les versements de pension alimentaire pour enfants dans le calcul de son revenu et que James Dalton ne déduirait pas les versements de pension alimentaire pour enfants dans le calcul de son revenu pour les années d’imposition 1998, 1999 et 2000 respectivement.

 

          Après avoir entendu les témoignages de l’appelante, du mis en cause et des autres témoins;

 

Et après avoir entendu les représentations des trois parties;

 

         

La question est tranchée de la façon suivante :

 

Le 13 juin 1998, Beverley Howard et James Dalton ont fait un choix conjoint (au sens du sous‑alinéa b)(ii) de la définition de « date d’exécution » prévue au paragraphe 56.1(4) de la Loi de l’impôt sur le revenu) selon lequel les versements de pension alimentaire pour enfants reçus depuis le 1er janvier 1998 ne sont pas inclus dans le calcul du revenu de Beverley Howard et que les versements de pension alimentaire pour enfants versés depuis le 1er janvier 1998 ne sont pas déductibles dans le calcul du revenu de James Dalton.

 


La Cour recevra des observations écrites relativement aux dépens.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour de septembre 2003.

 

 

 

 

« M. A. Mogan »

J.C.C.I.

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 3jour de mai 2004.

 

 

 

Crystal Lefebvre, traductrice


 

 

 

 

Référence : 2004CCI69

Date : 20040120

Dossiers : 2002‑901(IT)I

2002‑1482(IT)I

ENTRE :

BEVERLEY E. HOWARD,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

et

 

JAMES DALTON,

mis en cause.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

____________________________________________________________________

 

Avocate de l’appelante : Me Jennifer S. McPherson

Avocat de l’intimée : Me John Shipley

Pour le mis en cause : Le mis en cause lui‑même

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MOTIFS DU JUGEMENT

 

(Rendus oralement à l’audience

à Charlottetown (Île‑du‑Prince‑Édouard), le 28 août 2003.)

 

Le juge Mogan

 

[1]     La présente instance a débuté lorsque l’appelante a déposé un Avis d’appel à l’égard de son année d’imposition 1999 qui porte le numéro du dossier de la Cour 2002‑901. Elle a ensuite déposé un Avis d’appel distinct à l’égard de ses années d’imposition 1998 et 2000 qui portent le dossier de la Cour 2002‑1482. La Cour est saisie par les deux présents appels qui visent les trois années, soit 1998, 1999 et 2000. Dans chacune de ces années, elle a reçu certains montants à titre de pension alimentaire pour enfants de son ancien époux. Dans ses Avis d’appel, elle a soulevé la question à savoir si elle devait inclure les montants qu’elle a reçus à titre de pension alimentaire pour enfants dans le calcul de son revenu. Ces montants avaient été inclus par Revenu Canada dans le calcul de son revenu dans les cotisations établies à l’égard de l’appelante, et cette dernière interjette appel à l’encontre de ces cotisations. Elle a choisi la procédure informelle.

 

[2]     Après l’introduction des appels, le ministre du Revenu national a présenté une demande en vertu de l’article 174 de la Loi de l’impôt sur le revenu demandant à la Cour de répondre à la question suivante. L’appelante et son ancien époux, James Dalton, avaient‑ils fait un choix prévu au formulaire T1157 en signant ce dernier en vue de modifier les versements de pension alimentaire pour enfants et avaient‑ils fait un choix conjoint selon lequel l’appelante n’inclurait pas les versements de pension alimentaire pour enfants dans le calcul de son revenu et que James Dalton ne déduirait pas les versements de pension alimentaire pour enfants dans le calcul de son revenu? La demande du ministre a été accordée. Par conséquent, James Dalton a été joint à titre de mis en cause aux appels interjetés par Beverley Howard visant les années d’imposition 1998, 1999 et 2000. Les appels ont été fixés pour audition aujourd’hui. L’appelante et l’intimée ont été représentées par des avocats. James Dalton s’est représenté. Il a été produit en l'espèce une quantité considérable d'éléments de preuve. L’appelante a témoigné pour son compte. David, son fils, et Sharon Fortier, agente de mise en application du Programme d’application des pensions alimentaires et des ordonnances de garde de l’Île‑du‑Prince‑Édouard, ont également témoigné. Enfin, James Dalton a témoigné.

 

[3]     L’appelante et James Dalton se sont mariés en 1977. Ils ont adopté deux enfants, David qui est né en août 1980 et Leigh qui est née en avril 1986. Chacun des enfants a été adopté lorsqu’il était un bébé âgé d’environ 10 mois et demi. Vers 1993, des problèmes conjugaux sont survenus au sein du mariage et une action en divorce a été introduite par M. Dalton en janvier 1994. Le divorce a été accordé, et l’appelante et M. Dalton sont donc des ex‑époux. Ils avaient conclu un accord de séparation antérieur au divorce. Bien que l’accord de séparation ou le jugement de divorce n’aient pas été présentés à la Cour, il semble que les trois parties ont convenu que, en vertu de l’accord de séparation et du jugement de divorce, il existait une disposition selon laquelle M. Dalton verserait à l’appelante une pension alimentaire pour enfants à un taux de 200 $ par enfant chaque mois durant la période où ces derniers seraient des dépendants à la maison et peut‑être aux études à plein temps.

 

[4]     Quoi qu’il en soit, M. Dalton avait une obligation juridique de payer une pension alimentaire pour enfants au taux de 400 $ par mois, et cette obligation existait toujours pendant l’année civile 1998. Des modifications importantes ont été apportées à la Loi de l’impôt sur le revenu qui entraient en vigueur le 1er mai 1997 relativement aux versements de pension alimentaire pour enfants. Avant cette date, les versements de pension alimentaire pour enfants étaient déductibles pour le payeur et étaient inclus dans le revenu du bénéficiaire. Le payeur était habituellement l’époux ou le père et la bénéficiaire était habituellement l’épouse ou la mère.

 

[5]     Par suite de la modification de la loi, l’ancien régime s’appliquait toujours à l’égard des séparations et des divorces qui ont eu lieu avant le 1er mai 1997 à moins qu’un événement particulier ne crée une « date d’exécution » après le 30 avril 1997. Dans les circonstances des présents appels, l’ancien régime s’appliquait toujours à l’appelante et à M. Dalton sous réserve d’un événement qui est peut‑être survenu en juin 1998 et qui est au cœur des présents appels. En ce qui concerne les séparations et les divorces qui ont eu lieu après le 30 avril 1997, le nouveau régime est entré en vigueur. Bien que cela soit complexe et exige des ajustements, l’essentiel consiste en ce que les versements indiqués comme des versements de pension alimentaire pour enfants ne sont pas déductibles pour le payeur et qu’ils ne sont pas inclus dans le revenu du bénéficiaire.

 

[6]     Dans les circonstances de la présente affaire, le divorce a eu lieu sous l’ancien régime, mais les versements de pension alimentaire pour enfants ont continué après la date prévue par la loi, soit le 1er mai 1997. La définition de date d’exécution prévoit une disposition qui s’applique à cette situation qui vise à permettre aux parties de choisir que le nouveau régime s’applique à eux, mais elles doivent déposer un choix conjoint. Si un époux et une épouse se sont divorcés en 1994 et un des deux versait une pension alimentaire pour enfants à l’autre, ils pouvaient produire un choix après le 1er mai 1997 visant l’application du nouveau régime, et ces montants indiqués comme pension alimentaire pour enfants ne seraient pas déductibles pour le payeur et ne seraient pas inclus dans le revenu de la bénéficiaire.

 

[7]     L’appelante a appris l’existence de cette disposition parce qu’elle a reçu un dépliant par la poste au cours de l’année 1997. Selon son témoignage, elle a décidé de prendre des mesures à cet égard. Elle avait rempli, de sa main, un formulaire qui a été présenté en preuve sous la cote A‑2. Il s’agit du formulaire T1157 de Revenu Canada intitulé Choix à l’égard de la pension alimentaire pour enfants. Il comprend le nom de la bénéficiaire, soit Beverley Howard Dalton et le nom du payeur, soit James Dalton. Le numéro de téléphone et le numéro d’assurance sociale de chacun sont indiqués. Il comprend certaines cases qui doivent être remplis qui peuvent être ou ne pas être pertinents en l’espèce, et les parties doivent signer à l’endroit indiqué au bas de la page. L’appelante doit avoir prévu qu’un tel document serait signé à un moment donné puisque au mois d’août 1997, elle a fourni de sa main certains des renseignements exigés dans le formulaire, tels que leurs noms ainsi que ses numéros de téléphone et d’assurance sociale. Elle n’a pas fourni le numéro de téléphone ni le numéro d’assurance sociale de son ancien époux puisqu’elle ne les connaissait pas. Elle a signé le formulaire et l’a daté du 15 août 1997, et elle a reconnu lors de son témoignage qu’elle l’a en fait signé à cette date. Il semble que le document a demeuré inactif pendant un nombre de mois.

 

[8]     Selon son témoignage, son ancien époux lui a demandé au printemps 1998 de réduire le montant des versements de pension alimentaire pour enfants. Il semble qu’il avait été professeur à temps plein mais qu’il devait recevoir un type de prestations d’invalidité qui aurait réduit considérablement son revenu. De plus, on a fait des références en Cour au fait qu’à l’été 1998, le plus vieux, David, ne fréquentait pas l’école à temps plein et qu’à cette époque, Leigh ne vivait peut être pas avec sa mère. Je les mentionne uniquement à titre de ce que j’appellerais des références indirectes faites à la Cour. Elles ne constituent pas le type de faits qui ont fait l’objet d’une enquête ou qui ont été établi comme avoir été fermement prouvés, mais elles font ressortir le fait qu’au printemps 1998 et à l’été 1998, M. Dalton cherchait peut‑être à réduire le montant des versements de pension alimentaire pour enfants.

 

[9]     L’appelante a dit à James Dalton qu’elle serait disposée à réduire les versements s’il était disposé à signer le formulaire de Revenu Canada qu’elle avait rempli ayant trait au choix. Il n’existe aucun élément de preuve selon lequel il a accepté sa condition ou qu’ils ont eu une longue discussion portant sur cette question. La pièce A‑2 constitue un document important en l’espèce parce que l’issue de la présente affaire repose entièrement sur ce dernier.

 

[10]    Le 13 juin 1998, M. Dalton s’est rendu à la résidence de l’appelante dans un véhicule de marque Bronco pour chercher sa fille Leigh. En raison de la garde conjointe ou des droits de visite des parties, il avait droit de visiter sa fille et son fils et, il semble, il existait une entente selon laquelle Leigh passerait la soirée avec son père. Selon le témoignage de l’appelante, M. Dalton a attendu dans le véhicule de marque Bronco. Elle savait qu’il était là parce qu’il était venu chercher Leigh. Elle savait également qu’il avait eu des discussions ou avait communiqué avec la direction générale de l’Exécution des ordonnances alimentaires de Charlottetown à l’égard de son désir de réduire les versements de pension alimentaire pour enfants. Elle lui a emmené le document au véhicule où il était assis et lui a demandé de le signer. Leur fils David s’était rendu au véhicule en vue de visiter son père et était assis dans le véhicule sur le côté du passager ou il se penchait vers la fenêtre du côté du passager mais, quoi qu’il en soit, il discutait avec son père. Elle a demandé à M. Dalton de signer le formulaire et elle lui a donné ce dernier ainsi qu’un stylo. Elle a déclaré qu’il l’a signé lorsqu’il était encore assis derrière le volant du véhicule de marque Bronco en le plaçant sur ses genoux afin de le stabiliser. Elle a également déclaré qu’il a inscrit son numéro de téléphone et son numéro d’assurance sociale parce qu’elle ne les connaissait pas. À ce moment, avant ou immédiatement après qu’il l’a signé, elle a rempli les deux autres cases dans le formulaire. La case C indique « Ce choix s’appliquera à la pension alimentaire pour enfants versée à partir du : » et elle a inscrit le 2 janvier 1998. La case D indique « Inscrivez le montant annuel de pension alimentaire pour enfants à payer selon l’ordonnance ou l’accord écrit » et elle a inscrit 4 800 $. Cela constitue essentiellement le témoignage de l’appelante relativement à la signature de la pièce A‑2 par elle et son ancien époux.

 

[11]    L’avocate de l’appelante a produit en Cour ce qu’elle a dit était l’original de la pièce A‑2, mais aucune des parties n’a demandé qu’on lui accorde une cote. Je l’ai examiné et il semblait certes être l’original de la pièce A‑2. La seule différence qui existe entre la photocopie (pièce A‑2) et l’original était la différente couleur de stylos utilisés pour certaines écritures sur l’original. Cette différence a tendance de corroborer l’énoncé de l’appelante selon lequel M. Dalton a signé l’original de la pièce A‑2 puisque son numéro de téléphone, son numéro d’assurance sociale et sa signature figurent en écriture d’un stylo bleu alors que les renseignements figurant aux cases C et D, de la date d’exécution et du montant semblent être inscrits par le même stylo bleu mais par une autre main qui semble être celle de l’appelante.

 

[12]    Le témoignage de l’appelante est corroboré par David qui a témoigné et a déclaré qu’il se souvient d’avoir été dans le véhicule avec son père ce soir‑là. Il se rappelle que sa mère a apporté un document à son père afin de lui demander de le signer. Selon son témoignage, il a vu un document mais il n’a pas lu son contenu. Ses parents discutaient du document, et sa mère a donné ce dernier à son père afin qu’il le signe et il l’a signé. Par la suite, lorsqu’on a demandé à David ce qui s’est passé à cette époque ou tout juste après, il a répondu que le locateur est passé et a signifié un avis d’expulsion à sa mère. Cela revêtait une importance significative pour David puisqu’ils avaient habité à la même résidence pendant de nombreuses années, depuis que lui et sa sœur étaient des enfants. L’appelante et M. Dalton se souviennent également de la visite du locateur et du fait qu’il lui a signifié un avis d’expulsion qui a été présenté en preuve sous la cote A‑3. Selon cet avis, l’appelante devait quitter les lieux dans un délai de un mois parce que ce dernier indique qu’elle devait quitter les lieux au plus tard le 13 juillet, ce qui correspond à 30 jours exactement de la date de la rencontre près du véhicule de marque Bronco. Par conséquent, l’arrivée du locateur pour signifier l’avis d’expulsion était à l’esprit de l’appelante, de David et de M. Dalton, et il semble coïncider avec le fait que les trois étaient près du véhicule de marque Bronco au même moment au début de la soirée du 13 juin 1998. À mon avis, cette preuve constitue un élément important.

 

[13]    En ce qui concerne la pièce A‑2, M. Dalton a témoigné qu’il ne se souvient pas de l’avoir signé. Il se souvient d’avoir demandé de réduire les versements de la pension alimentaire au printemps et à l’été 1998 ainsi que d’avoir été présent lorsque l’avis d’expulsion a été signifié. Il se souvient d’avoir été là pour chercher sa fille Leigh et d’avoir parlé avec David. Mais il dit ne pas se souvenir d’avoir discuté à ce moment avec l’appelante relativement à la réduction des versements de pension alimentaire. L’avocate de l’appelante l’a contre‑interrogé relativement à la pièce A‑2, et elle lui a demandé s’il se souvenait de l’avoir signé. Il a affirmé ce qui suit : [traduction] « Écoutez, je ne m’en souviens pas et c’est tout. Il s’agit d’une question de souvenir. »

 

[14]    L’avocate de l’appelante l’a également interrogé concernant un Avis à l’intimée de l’action en divorce dans le cadre de laquelle il était le demandeur et l’appelante était l’intimée. Cet avis a été présenté en preuve sous la cote A‑12. Elle a apporté à son attention à l’endroit où il semble avoir signé à la page 15 le 20 janvier 1994. Il a affirmé ceci : [traduction] « Je ne me souviens pas d’avoir signé cela. » Il n’a pas nié que c’était sa signature. Il a simplement affirmé [traduction] « Je ne me souviens pas de cela. » Elle l’a également interrogé concernant deux lettres qu’il a écrites à Revenu Canada relativement à la présente affaire, une datée du 29 septembre 2002 et l’autre du 22 novembre 2002. Il en a signé une « James J. Dalton » et l’autre « James Dalton ». Il a reconnu ses signatures mais cela n’a aucune pertinence sauf pour indiquer qu’il signait parfois son nom avec son initiale du milieu et que d’autres fois avec uniquement son premier nom et son nom de famille. Je n’accorde pas beaucoup d’importance à ce témoignage, mais je soulignerai qu’en l’absence de toute preuve d’expert d’un expert en écriture courante qui pourrait témoigner relativement à la question à savoir si un document particulier a été rédigé par la main d’une personne précise, les signatures de l’appelante et de M. Dalton semblent être relativement constantes dans tous les documents. Notamment, aux yeux d’une personne ordinaire, les numéros de téléphone et d’assurance sociale de l’appelante et de James Dalton figurant à la pièce A‑2 ne sont clairement pas écrits par la même main.

 

[15]    La question cruciale est de savoir si James Dalton a signé la pièce A‑2. La preuve étaye fortement la conclusion selon laquelle il l’a signée. Il existe trois énoncés qui sont particulièrement importants. Le premier consiste en un énoncé non équivoque de l’appelante selon lequel il l’a signé. Elle n’a pas été contre‑interrogé quant à sa présence là, à sa présentation à M. Dalton du document et à sa simple affirmation qu’elle l’a vu le signer, en stabilisant le document sur ses genoux. S’il existait une preuve qui pourrait être présentée contre la véracité de ces énoncés, on aurait dû lui poser plusieurs questions précises à leur égard. On ne lui a posé aucune question.

 

[16]    Le deuxième consiste en la preuve non équivoque de David concernant la signature. Il a affirmé qu’il ne savait pas en quoi consistait le document, qu’il ne savait rien quant à sa signification, mais qu’il a en fait vu sa mère aller sur le côté du conducteur du véhicule et donner un document à son père. Ils ont échangé des déclarations, et il a affirmé que son père a signé un document.

 

[17]    En dernier lieu, M. Dalton a déclaré qu’il ne se souvenait pas d’avoir signé la pièce A‑2. Il l’a répété à plusieurs reprises. Il existe une différence énorme dans les tribunaux entre un témoin affirmant « Je ne me souviens pas d’avoir signé ce document » et le même témoin affirmant « Je n’ai pas signé ce document. Je ne l’aurais pas signé. Ce n’est pas ma signature. » Ces derniers énoncés sont parfois entendus dans les tribunaux, et tout juge doit leur accorder un énorme poids parce qu’ils sont plus forts qu’une déclaration terne de ne pas se souvenir d’un événement. Aujourd’hui, ces derniers énoncés n’ont pas été affirmés. Tout ce que M. Dalton a affirmé est le suivant : [traduction] « Je ne me souviens pas de l’avoir signé. » Je crois qu’il ne se souvient pas de l’avoir signé le 13 juin 1998, mais je conclus qu’il a signé la pièce A‑2.

 

[18]    Peut‑être M. Dalton croyait‑il que le document visait à réduire ses versements de pension alimentaire. Il n’a peut‑être pas apprécié l’importance du document. Il était peut‑être préoccupé par sa conversation avec David avec qui il avait une relation quelque peu difficile. M. Dalton ressentait peut‑être un stress. Il perdait son emploi à temps plein et devait recevoir des prestations d’invalidité. Il croyait peut‑être qu’il était harcelé par les employés de l’Exécution des ordonnances alimentaires. Il existe de nombreuses raisons pour lesquelles une personne peut regarder un document daté il y a cinq ans et affirmé ce qui suit : [traduction] « Cela ressemble à ma signature mais je ne me souviens pas de l’avoir signé. » Il a fait la même déclaration quant à l’action en divorce, mais je dirai qu’il a signé le document de divorce qui a entamé l’action en divorce contre l’appelante. Il a simplement déclaré ce qui suit : [traduction] « Cela pourrait être ma signature mais je ne me souviens pas de l’avoir signé. »

 

[19]    Une personne comme M. Dalton peut affirmer [traduction] « Je ne me souviens pas de l’avoir signé » parce qu’au moment, cela ne lui disait pas grand‑chose. Cela disait clairement quelque chose à l’appelante. Cela est évident parce qu’elle avait signé la partie du document qui la concernait environ huit ou neuf mois auparavant, soit en août 1997. Elle retenait ce document en attendant un moment opportun pour que son ancien époux le signe, et elle a indiqué qu’ils n’avaient pas une bonne relation. Elle ne connaissait même pas son numéro de téléphone. Elle a également déclaré que lorsqu’il l’avait appelé une fois alors qu’il était sous l’influence de l’alcool, elle lui avait dit ce qui suit [traduction] « Ne m’appelle pas si tu as bu ». Ils n’avaient pas un bon système de communication.

 

[20]    Par conséquent, si elle a signé la partie qui la concernait en août 1997, elle était pour attendre le moment opportun de lui demander de le signer. Compte tenu de l’ensemble des circonstances, le mois de juin 1998 semble avoir été le moment opportun en raison de la communication entre lui et les employés de l’Exécution des ordonnances alimentaires, soit les lettres présentées en preuve sous la cote A‑6 expédiées par l’Exécution des ordonnances alimentaires, précisément celle datée du 11 mai 1998 expédiée à M. Dalton le poussant à prendre des mesures relativement à ses arriérés. Il existe une autre lettre datée du 5 juin de Mme Fortier de l’ADRC à M. Dalton (seulement huit jours avant le 13 juin) et, par conséquent, il ressentait des pressions. Il existe une autre lettre datée du 6 juillet de Mme Fortier et une autre datée du 10 juillet de M. Dalton selon laquelle il promet de rattraper les versements. Lorsqu’il a versé les sommes de 1 600 $ le 7 août, de 1 000 $ le 28 août et de 600 $ le 31 août pour un total de 3 200 $ qui représente huit mois de versements de pension alimentaire pour enfants à un taux de 400 $ par mois, M. Dalton a en fait rattrapé les arriérés de paiement. Il ressentait évidemment la pression, et il a mis à jour ses versements pour l’année 1998 au cours du mois d’août.

 

[21]    À mon avis, il existe suffisamment d’éléments de preuve pour indiquer que M. Dalton a signé le document ayant trait au choix conjoint, soit la pièce A‑2. Je ne dirai pas abondant, mais suffisant. Lorsqu’une personne dit [traduction] « Je ne me souviens pas de l’avoir signé » mais ne nie pas que c’est sa signature ni qu’elle ne l’aurait jamais signé, et que nous avons entendu les témoignages non équivoques et non contredits de l’appelante et de David selon lesquels il l’a signé, je n’ai d’autre choix que de conclure qu’il a signé le document. Je suis convaincu que l’appelante a signé le document ayant trait au choix (pièce A‑2) en août 1997 et que James Dalton l’a signé le 13 juin 1998.

 

[22]    Par conséquent, j’ai répondu à la question qui fait l’objet du renvoi déposé devant la Cour. Je n’ai pas à prendre d’autres décisions puisque certaines conséquences fiscales découleront de cela vis à vis de l’appelante et de James Dalton. Cela conclut la détermination de la question dont la Cour est saisie.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour de janvier 2004.

 

 

 

« M. A. Mogan »

Juge Mogan

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 3jour de mai 2004.

 

 

 

Crystal Lefebvre, traductrice

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