Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Date: 20020903

Dossier: 2000-5118-IT-I

ENTRE :

CLÉMENT GIRARD,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Tardif, C.C.I.

[1]      Il s'agit d'un appel relatif aux années d'imposition 1998 et 1999.

[2]      La question en litige consiste à déterminer si le ministre du Revenu national (le « Ministre » ) était justifié de n'accorder à l'appelant que les sommes respectives de 1 507 $ et de 835 $ à titre de dons de bienfaisance dans le calcul de ses crédits d'impôt non remboursables pour les années d'imposition 1998 et 1999.

[3]      Pour établir et confirmer les cotisations en litige, le Ministre a tenu pour acquis les faits suivants :

a)          l'appelant est prêtre et, à titre de curé, est en charge de la paroisse de St-Jean-Vianney au Saguenay;

b)          dans cette paroisse, il y a un organisme de bienfaisance « la St-Vincent-de-Paul » qui relève de la Fabrique de la paroisse de Saint-Jean-Vianney;

c)          à titre de curé, l'appelant est la personne autorisée à signer les reçus de charité émis soit par la société St-Vincent-de-Paul, soit par la Fabrique de la paroisse de Saint-Jean-Vianney;

d)          l'appelant a fait des dons à des membres de sa famille, soit Claudette Tremblay et son conjoint, par l'intermédiaire de l'organisme de la St-Vincent-de-Paul;

e)          les dons étaient destinés à une famille précise, soit celle de la cousine de l'appelant;

f)           l'appelant a déposé des sommes d'argent directement dans le compte bancaire de sa cousine après les avoir retirées de son compte personnel et les avoir transférées au compte de la société de la St-Vincent-de-Paul;

g)          l'appelant a également employé ces fonds pour rembourser les dettes de Mme Tremblay et de son conjoint envers le Ministère du Revenu du Québec, et les chèques visés, payables à l'ordre du Ministère du Revenu du Québec, furent signés par l'appelant;

h)          un montant de 2 950 $ a été reporté en 1998 à titre de dons de bienfaisance de l'année 1997, et un montant de 7 497 $ a été reporté en 1999 à titre de dons de bienfaisance de l'année 1998;

i)           le Ministre a refusé d'inclure dans le calcul des crédits d'impôt non remboursables de l'appelant, le report de ces dons de bienfaisance des années antérieures car les montants en litige n'ont pas été justifiés;

j)           les dons de bienfaisance admissibles à un crédit d'impôt pour l'année d'imposition 1998, sont les suivants :

Prêtres du Sacré-Coeur                         100,00 $

Prêtres du Sacré-Coeur                         145,00 $

Prêtres du Sacré-Coeur                         145,00 $

Prêtres du Sacré-Coeur                         150,00 $

Prêtres du Sacré-Coeur                         380,00 $

Grand Séminaire                                    100,00 $

C.E.C.R. de Chicoutimi                         487,34 $

Total accepté                                     1 507,34 $

k)          les dons de bienfaisance admissibles à un crédit d'impôt pour l'année d'imposition 1999, sont les suivants :

Prêtres du Sacré-Coeur                         275,00 $

C.E.C.R. de Chicoutimi                         120,00 $

C.E.C.R. de Chicoutimi                         440,00 $

Total accepté                                         835,00 $

l)           presque la totalité des reçus de bienfaisance que le Ministre a refusé d'admettre comme étant admissibles à un crédit d'impôt furent signés par l'appelant au nom de la Fabrique de la paroisse de Saint-Jean-Vianney;

m)         des reçus de bienfaisance, établissant la valeur du logement de l'appelant à 4 500 $ pour 1998 et à 4 800 $ pour 1999, furent signés par une employée de la Fabrique de la paroisse de Saint-Jean-Vianney;

n)          l'appelant a ainsi inclus à deux endroits dans ses déclarations de revenus, les sommes de 4 500 $ et 4 800 $ puisque ces montants apparaissent sur le T4 de l'appelant pour chacune des années en litige, et ce dernier les a réclamés comme dépenses à la ligne 229 de ses déclarations de revenus en plus de les réclamer à titre de dons de bienfaisance dans le calcul de ses crédits d'impôt non remboursables pour les années d'imposition 1998 et 1999.

[4]      L'appelant a expliqué avoir aidé financièrement certains membres de sa famille. Avant de ce faire, il a témoigné à l'effet qu'il avait communiqué avec le Centre des données fiscales de Jonquière, pour vérifier si des suites d'une telle aide il pouvait émettre des reçus attestant les dons et obtenir ainsi, dans un deuxième temps, les bénéfices découlant de tels dons prévus par la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ). La personne à qui furent soumises les questions, ayant répondu par l'affirmative, l'appelant a procédé comme il se proposait de le faire, soit faire les dons et émettre les reçus correspondants.

[5]      Lors de la vérification de son dossier, la personne responsable de l'analyse a communiqué avec le presbytère; elle a fait des commentaires et observations tout à fait inappropriés voire même très cavaliers, mettant même en doute l'honnêteté de l'appelant.

[6]      Choqué, d'ailleurs avec raison, de l'attitude des représentants de l'intimée, l'appelant s'est, d'une part, interrogé sur la façon de faire pour obtenir des renseignements fiables et conformes aux dispositions de la Loi et d'autre part, fait valoir qu'il avait droit au respect et à la confidentialité de son dossier.

[7]      Au soutien de son appel, les représentations de l'appelant ont principalement porté sur la façon totalement inacceptable, dont il avait été traité et sur le fait d'avoir obtenu des renseignements inadéquats par les préposés de l'intimée.

[8]      À cet égard, l'appelant a tout à fait raison de prétendre avoir droit au respect et à la confidentialité. Il est tout aussi inadmissible que les citoyens ne puissent obtenir les bons renseignements lorsqu'ils prennent l'initiative de vérifier avant de faire une opération pouvant avoir des effets quant à leurs revenus imposables surtout lorsqu'il s'agit d'une question simple dans un champ d'activités courant. Il est tout aussi inacceptable que les préposés de l'intimée soient irrévérencieux ou insolents lors de leur analyse ou enquête.

[9]      La complexité de la Loi fait en sorte que de nombreux contribuables, pour s'y retrouver, doivent demander des renseignements. L'appelant a raison de protester quant à la qualité des renseignements fournis par les représentants de l'intimée. Par contre, le fait d'avoir obtenu des renseignements non conformes aux dispositions légales est-il suffisant pour justifier le bien-fondé de son appel ?

[10]     Les tribunaux ont été saisis, à plusieurs reprises, de situations semblables ou comparables. Il y a lieu de reproduire certains extraits tirés de la jurisprudence soumise par l'intimée. En premier lieu, dans l'affaire Donovan c. M.R.N., [1989] A.C.I. no 154 (Q.L.), l'honorable juge Labelle s'exprimait comme suit :

            ...

Malheureusement, l'avis qu'il a reçu était mal fondé, mais la Loi prime les erreurs des fonctionnaires de la Commission.

...

[11]     Dans l'affaire Video Adventures Ltd. c. Canada, [1994] A.C.I. no 751 (Q.L.), l'honorable juge Kempo, au paragraphe 10, s'exprimait comme suit :

            La Cour éprouve bien de la sympathie pour M. Naugler qui, semble-t-il, faisait tout ce qu'il pouvait pour se conformer à des dispositions législatives nouvelles et complexes. Cependant, il existe une jurisprudence bien établie et de longue date selon laquelle les erreurs que commettent des fonctionnaires de l'impôt ne guident pas la Loi, et qu'une préclusion est soumise à la règle générale qu'elle ne peut avoir préséance sur la loi du pays.

[12]     Dans l'affaire Beal c. Canada, [1995] A.C.I. no 1064 (Q.L.), le juge Rip, au paragraphe 16, s'exprimait comme suit :

            Le fait que l'appelant s'est fondé sur les conseils des représentants du ministre du Revenu national (le « Ministre » ) en demandant les crédits d'impôt ne l'aide pas. Le Ministre ne peut pas être lié par les conseils données par ses représentants lorsque les conditions prescrites par la Loi n'ont pas été remplies...

[13]     Finalement, dans l'affaire Chilton c. Canada, [1994], A.C.I. no 354 (Q.L.), l'honorable juge Beaubier, au paragraphe 7 de son jugement, affirmait :

            Malheureusement, notre Cour n'a pas le pouvoir de faire ce que l'appelant lui demande. Elle a uniquement le pouvoir d'examiner le bien-fondé de la cotisation.

[14]     En l'espèce, le tribunal comprend la déception et l'amertume de l'appelant et tout particulièrement quant aux propos désobligeants, inconvenants utilisés par le représentant de l'intimée lors des démarches ayant pour but de vérifier certaines données de son dossier. Il n'y a aucun doute dans mon esprit que l'appelant a toujours agi de façon fondamentalement honnête, transparente voire même très avisée en s'assurant, au préalable, qu'il pouvait faire les donations et bénéficier des avantages.

[15]     Bien que très sympathique, je ne peux retenir les arguments de l'appelant puisque la juridiction de la Cour canadienne de l'impôt est essentiellement de vérifier si les cotisations, qui font l'objet de l'appel, ont été émises légalement et correctement. Dans l'affirmative, ce Tribunal n'a aucune latitude de modifier ou d'annuler les cotisations qui font l'objet de l'appel.

[16]     En l'espèce, la preuve est à l'effet que les cotisations ont été émises conformément aux dispositions de la Loi; conséquemment, je dois rejeter l'appel.

Signé à Ottawa, Canada, ce 3e jour de septembre 2002.

« Alain Tardif »

J.C.C.I.


No DU DOSSIER DE LA COUR :       2000-5118(IT)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :               Clément Girard et Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                    Chicoutimi (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                  le 23 juillet 2002

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :        l'honorable juge Alain Tardif

DATE DU JUGEMENT :                    le 3 septembre 2002

COMPARUTIONS :

Pour l'appelant :                         L'appelant lui-même

Avocate de l'intimée :                 Me Marie-Aimée Cantin

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

Pour l'appelant :

Pour l'intimée :                          Morris Rosenberg

                                                Sous-procureur général du Canada

                                                Ottawa, Canada

2000-5118(IT)I

ENTRE :

CLÉMENT GIRARD,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 23 juillet 2002 à Chicoutimi (Québec) par

l'honorable juge Alain Tardif

Comparutions

Pour l'appelant :                                   L'appelant lui-même

Avocate de l'intimée :                          Me Marie-Aimée Cantin

JUGEMENT

          L'appel des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1998 et 1999 sont rejetés, selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 3e jour de septembre 2002.

« Alain Tardif »

J.C.C.I.


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