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Date: 20020404

Dossier: 2000-5219-IT-I

ENTRE :

DENISE GAOUETTE,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifsdu jugement

La juge Lamarre Proulx, C.C.I.

[1]            Il s'agit d'appels par voie de la procédure informelle concernant les années d'imposition 1995 à 1997.

[2]            Les questions en litige sont : 1) de savoir si des revenus nets d'entreprise aux montants respectifs de 30 495 $, 20 622 $ et 21 257 $ devaient être ajoutés au revenu de l'appelante pour les années d'imposition en cause; 2) si le ministre du Revenu national (le « Ministre » ) était autorisé à établir une nouvelle cotisation après l'expiration de la période normale d'une nouvelle cotisation pour l'année d'imposition 1995; et 3) si le Ministre a eu raison d'imposer des pénalités en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ).

[3]            Les témoins ont été pour la partie appelante, madame Johanne Tremblay, l'appelante, et madame Chii Lean Lee Bélanger, et pour la partie intimée, madame Diane Grenier.

[4]            Madame Johanne Tremblay est éditrice pour les Éditions de Renouveau Pédagogique Inc. (le « ERPI » ). Elle voit à l'édition des travaux littéraires de l'appelante depuis 1989. Elle a aussi agi comme éditrice à l'égard du conjoint de l'appelante, monsieur Conrad Huard. Ce dernier rédigeait des livres scolaires pour l'enseignement des mathématiques pour tous les niveaux du primaire.

[5]            Madame Tremblay a expliqué que l'appelante était l'auteur de la collection « En Tête » , une collection qui vise l'enseignement du français au niveau de la première et deuxième année. Il s'agit d'une collection qui obtient plus de 50 p. 100 du marché du Québec, du Nouveau-Brunswick et de l'Ontario français.

[6]            Le témoin a expliqué que bien que l'appelante ait travaillé seule, des rencontres étaient nécessaires avec elle et avec les graphistes. Ces rencontres pouvaient se tenir à Sherbrooke, mais habituellement dans le but de faire économiser du temps à l'auteur, elles avaient lieu à la maison de l'appelante. Il arrivait aussi qu'il y ait eu des rencontres dans d'autres villes comme par exemple Drummondville ou à Québec, rencontres auxquelles l'appelante en tant qu'auteur devait participer. Madame Tremblay pouvait aller avec l'appelante rencontrer les élèves ou l'appelante les rencontrait seule. Pour les élèves, selon madame Tremblay, l'appelante est une vedette. Elle reçoit du courrier de ces derniers. Elle est près des enseignants et des enfants. Madame Tremblay sait que l'appelante donne également des conférences pour les parents d'élèves et participe à des entrevues télévisées.

[7]            Madame Tremblay a expliqué que l'appelante et son mari Conrad Huard avaient leur propre bureau. La salle à manger servait de salle de conférence. Elle a expliqué qu'elle pouvait parler à l'appelante à peu près en tout temps de la journée, soit à 7 h du matin ou à 22 h du soir.

[8]            La présentation des livres se fait au printemps, mais madame Tremblay explique qu'elle ne joue par le rôle de représentante. Elle relate aussi que Mélissa, la fille de madame Gaouette a travaillé sur un des guides alors qu'elle était étudiante. Ce n'est pas madame Tremblay qui rembourse les dépenses de l'appelante.

[9]            Lors de son témoignage, l'appelante a expliqué qu'elle était auteur de matériel pédagogique et conférencière. Elle a une maîtrise en enseignement. Elle a enseigné cinq à six ans puis elle est devenue conseillère pédagogique en français jusqu'en 1986 où elle a commencé à se consacrer exclusivement à l'écriture et à l'animation.

[10]          L'appelante a produit les pièces A-2 et A-3 qui reprennent le même ordre que le rapport de la vérificatrice du Ministre (pièce I-4) et la Réponse à l'avis d'appel (la « Réponse » ). De la vérification faite par le Ministre, l'appelante a accepté certains points et en a contesté d'autres. À chaque point, je ferai état de la preuve, le cas échéant des arguments et de la décision.

[11]          En ce qui concerne les paragraphes h), i) et j) de la Réponse, intitulés « revenus non-déclarés » soit, des remboursements de dépenses par ERPI à l'appelante et qui n'ont pas été déclarés dans ses déclarations de revenus, l'appelante les admet. Ces montants avaient été bien inscrits dans les livres de l'appelante, mais pour quelque raison, n'avaient pas été pris en considération par le comptable. L'appelante a admis que les montants pour les années se terminant le 30 septembre 1995 et le 31 décembre 1995 au 31 décembre 1997, de 2 935 $, 674 $, 3 457 $ et 2 254 $, devaient être inclus dans son revenu. Elle a expliqué les raisons pour lesquelles ils ne l'avaient pas été. À ce sujet, l'avocate de l'intimée a informé la Cour que les pénalités qui avaient été imposées sur ces montants ne le sont plus par le Ministre.

[12]          Les montants réclamés à titre de frais d'animation mentionnés au paragraphe k) de la Réponse consistent en des dépenses relatives au salon de coiffure, à l'esthétique, aux manucures et au nettoyage de vêtements. L'appelante avait réclamé 50 p. 100 de ces dépenses au motif qu'elles sont nécessaires à son apparence quand elle agit à titre de conférencière-animatrice. La vérificatrice du Ministre a indiqué que si elle avait pu relier les dépenses de coiffure directement aux conférences, elle aurait peut-être accordé les dépenses, mais ce n'était pas le cas.

[13]          J'ai déjà, dans Rouillard c. Canada, [1999] A.C.I. no 650, fait l'analyse de la nature de dépenses personnelles. Il s'agissait d'un militaire qui demandait une déduction pour le coût des coupes de cheveux requises par son statut. J'avais considéré l'analyse faite par le juge Iacobucci dans Symes c. Canada, [1993] 4 R.C.S. 695. Mes conclusions ont été les suivantes aux paragraphes 7 et 8 :

(7)            À la lecture de cette analyse on se rend compte que le critère - toute dépense qui ne serait pas engagée s'il n'y avait l'entreprise est une dépense d'entreprise et non de nature personnelle - est un critère qui peut avoir son utilité mais qui est presque impossible d'application, vu la variété des choix que peuvent faire les individus. Je crois que le critère qui est indiqué comme le critère traditionnel est celui qui mérite d'être retenu par son application égale à l'égard de tous. Ce critère, si je l'interprète bien, est que sera considérée comme dépense personnelle toute dépense qui doit être faite par une personne pour se présenter à son travail. Certaines fonctions exigent un habillement recherché. Chaque personne détermine le montant d'argent qu'elle veut bien investir sur son habillement. Certaines fonctions exigent une apparence très soignée. Quelques personnes peuvent voir elles-mêmes à ces soins. D'autres ont besoin de l'aide de personnes spécialisées en cette matière. Certaines personnes habitent loin de leur lieu de travail. D'autres habitent plus près mais le logement peut être plus cher. Ainsi que le dit le baron Pollock dans l'arrêt Bowers c. Harding, (1891) 3 Tax Cas. 22 (Q.B.), déjà cité au paragraphe 6 de ces Motifs :

[Traduction] Lorsqu'un homme et son épouse acceptent un poste, cela entraîne certains inconvénients et certains bénéfices, mais il ne s'agit pas d'une dépense qui leur permet de gagner un revenu au sens où l'argent aurait servi à l'achat de biens ou au paiement de commis, pour que le négociant ou le marchand puisse gagner un revenu [. . .]. S'il fallait examiner ces questions avec grande précision, on devrait, avant d'arriver à une conclusion, examiner où vit la personne, le prix de la viande, et le type de vêtements dont elle a besoin, dans de nombreux cas la nature des services et le salaire payé certains serviteurs ainsi que le style de vie de la personne.

(8)            Je crois qu'il faut conclure que toutes les dépenses faites pour se présenter au lieu normal de son travail et à ses fonctions normales sont des dépenses de nature personnelle qui sont engagées en contrepartie de la rémunération. Pour les militaires, leur entente d'emploi exige qu'ils se rendent disponibles pour leurs activités de travail avec les coupes de cheveux réglementaires et les vêtements bien entretenus. Le salaire qu'ils reçoivent est la contrepartie accordée pour cette disponibilité d'être en conformité du règlement. Donc, s'il s'agissait d'un revenu d'entreprise, il paraît certain que l'appelant n'aurait pas droit à la déduction parce qu'il s'agirait d'une dépense de nature personnelle.

[14]          Pour les mêmes raisons, je suis d'avis que les dépenses de coiffure, de manucure et de nettoyage de vêtements sont des dépenses personnelles. Selon l'alinéa 18(1)h) de la Loi, elles ne sont pas déductibles. Il y a un bulletin d'interprétation pour les artistes de la scène, soit le Bulletin IT525R. Il m'est difficile de considérer l'appelante comme une artiste de la scène, mais si elle se considère ainsi à certaines occasions, le bulletin décrit les circonstances dans lesquelles certaines déductions peuvent être admises, circonstances qui ne se retrouvent pas ici.

[15]          La partie des frais refusés au poste « Comptabilité et Gestion » mentionnée au paragraphe l) de la Réponse est acceptée par l'appelante.

[16]          Au sujet des frais concernant la documentation et abonnement décrits au paragraphe m) de la Réponse, une somme de 510 $ est en litige pour la période se terminant le 30 septembre 1995 et la somme de 291 $ pour celle se terminant le 31 décembre 1995. Selon la pièce I-5, rien à ce poste n'a été réclamé les autres années. Selon la pièce I-4, le rapport de la vérificatrice, cette dernière lui a accordé 128,42 $ au 30 septembre 1995 et 17,95 $ au 31 décembre 1995. L'appelante a fait valoir que tout le matériel qui était inclus dans ces frais lui était des sources de renseignements pour ses livres. Je n'ai pas eu de preuve contraire. Les montants sont admissibles.

[17]          Les fournitures de bureau sont décrites aux paragraphes n) et o) de la Réponse. L'appelante a proposé des déductions substantielles par sa pièce A-2. Après avoir entendu les explications de l'appelante, je suis d'avis que ce qu'elle a proposé dans cette pièce A-2 est raisonnable.

[18]          Les frais de bureau sont décrits au paragraphe p) de la Réponse. Après avoir entendu les explications de l'appelante, il s'agissait d'articles utiles à son bureau pour les fins de son travail d'auteur. La réclamation des frais tels que corrigés à la pièce A-2 peut être acceptée.

[19]          En ce qui concerne les dépenses pour la publicité et la promotion décrites aux paragraphe q) de la Réponse, les corrections apportées par l'appelante à la pièce A-2 paraissent raisonnables dans l'ensemble et doivent être acceptées.

[20]          L'avocat de l'appelante a soulevé l'aspect du calcul de l'amortissement qui a remonté à des périodes antérieures à la période normale de cotisation. La vérificatrice du Ministre a rebâti les cédules d'amortissement à partir de l'année 1989 et a accepté ou refusé certaines dépenses en capital. Elle a refusé certaines dépenses en capital parce qu'elles n'étaient pas supportées par des factures ou qu'elles n'avaient pas été engagées pour les fins de l'entreprise.

[21]          L'avocat de l'appelante fait valoir que la vérificatrice ne peut pas refaire les cédules en ce qui concerne les années qui sont antérieures à la période normale de cotisation : les dépenses en capital ont déjà été acceptées par le Ministre et ne peuvent plus être rejetées.

[22]          Je suis d'avis que les principes qui s'appliquent dans le calcul des pertes relatives aux années antérieures à la période normale de cotisation s'appliquent aussi dans le cas du calcul des biens amortissables. Dans le cas du calcul des pertes, la jurisprudence a déterminé que le Ministre ne peut cotiser dans ces années antérieures mais peut refaire les calculs pour ces années : New St.James Limited v. M.N.R., 64 DTC 121 et Coastal Construction and Excavating Ltd. v. Canada, [1996] A.C.I. no 1102. En conclusion, les coûts en capital des biens amortissables ainsi que le but de leur acquisition peuvent être révisés même si ces biens ont été acquis à des périodes antérieures à la période normale de cotisation.

[23]          L'avocat de l'appelante a soulevé le point des charges locatives. Les montants demandés sont pour les années 1995 à 1997, 2 345 $, 2 110 $ et 3 519 $. La vérificatrice a établi le pourcentage d'affaires à 100 p. 100. Toutefois, elle n'a accepté que le bureau où l'appelante avait son principal lieu d'affaires et n'a accepté aucun pourcentage pour les autres pièces de la maison comme les toilettes, les lieux d'entreposage, la bibliothèque et le lieu de rencontre avec les clients au motif que ces lieux n'étaient pas exclusivement utilisés pour rencontrer des clients sur une base régulière et continue. Au début, elle avait accepté les proportions du comptable mais par la suite, quand elle a relu le Bulletin d'interprétation IT-514, intitulé « Frais de local de travail à domicile » , elle a cru qu'elle ne pouvait pas le faire.

[24]          Je crois qu'il s'agit là d'une mauvaise interprétation de l'alinéa 18(12)a) de la Loi et du bulletin lui-même. Cet alinéa de la Loi prévoit deux situations différentes, soit que dans son établissement domestique, un particulier ait (i) son principal lieu d'affaires ou (ii), un lieu qui lui sert exclusivement à tirer un revenu d'une entreprise et à rencontrer des clients sur une base régulière et continue dans le cadre de son entreprise.

[25]          Dans le deuxième cas, il s'agit d'un lieu qui n'est pas le principal lieu d'affaires parce que le particulier a, présumément, un lieu principal d'affaires ailleurs que dans l'établissement domestique autonome où il réside.

[26]          Ici, il s'agit de l'application du sous-alinéa 18(12)a)(i) et non (ii). Même le Bulletin d'interprétation IT-514 prévoit qu'en ce qui concerne le principal lieu d'affaires situé dans une résidence il peut être utilisé pour des fins personnelles sans enfreindre l'exigence de l'alinéa 18(12)a). Je cite la partie pertinente du paragraphe 2 de ce bulletin :

... Il convient de noter que l'entrepreneur et l'agriculteur peuvent aussi utiliser leur local de travail à des fins personnelles sans pour autant enfreindre l'exigence mentionnée au numéro 1a) ci-dessus.

[27]          Aussi, il est possible pour un particulier qui a son principal lieu d'affaires dans sa maison de fixer la proportion des dépenses entre l'usage pour affaires et l'usage pour fins personnelles des autres pièces qui ne sont pas utilisées exclusivement à titre de bureau principal mais qui sont utiles à cet usage dans le cadre de l'entreprise. Je cite la partie pertinente du paragraphe 4 de ce bulletin à cet égard :

... On doit aussi tenir compte de l'usage à des fins personnelles, s'il y a lieu, du local de travail servant de principal lieu d'affaires de l'entreprise (voir au numéro 2 ci-dessus). ...

[28]          Vu l'interprétation qu'à mon avis on doive accorder au sous-alinéa 18(12)a)(i) de la Loi, les pertes locatives réclamées doivent être accordées.

[29]          Un autre point concerne le kilométrage. L'appelante réclame 85 p. 100 du kilométrage fait par sa voiture. La vérificatrice lui accorde 60 p. 100. La voiture a été achetée le 28 novembre 1994 neuve; elle a été vendue le 10 octobre 1997 et elle avait parcouru 46 600 kilomètres. Le kilométrage total qui a été remboursé lors des activités d'affaires de l'appelante était de 26 474, ce qui donne une proportion de 57 p. 100 affaires qui a été arrondie à 60 p. 100 par la vérificatrice.

[30]          Madame Lee Bélanger, une comptable du bureau des comptables de l'appelante, a fait une analyse du kilométrage possiblement parcouru par l'appelante dans les cas où ce kilométrage n'était pas remboursé. Elle a considéré les endroits où il y a eu des achats pour les fins de l'entreprise, comme les librairies et les voyages d'affaires faits par l'appelante où le kilométrage n'a pas été remboursé; elle a calculé ce kilométrage comme étant 6 708 et en l'additionnant au kilométrage ci-dessus soit 26 474, cela donne un total en kilométrage de 33 182 et une proportion de 71,2 p. 100.

[31]          La preuve a révélé que l'appelante a fait plusieurs voyages pour fins d'affaires qui n'étaient pas remboursés, soit pour des voyages de promotion ou d'animation ou encore, pour faire l'acquisition des matériaux qui lui étaient nécessaires pour la rédaction de ses livres. Elle devait faire des rencontres avec les enseignantes, faire des recherches en bibliothèque, aller voir des comptables, aller dans des librairies. Je dois, par ailleurs, prendre en compte que l'appelante n'a pas conservé ses agendas. Je crois que dans les circonstances une moyenne de 70 p. 100 serait acceptable.

[32]          L'avocat de l'appelante fait valoir que le document de renonciation n'est pas valide pour l'année 1995 parce que le projet de cotisation n'était pas attaché au formulaire qui a été signé par l'appelante. La renonciation se lit comme suit (onglet 5 de la pièce A-1) :

...

RENONCIATION

La période normale de nouvelle cotisation prévue au paragraphe 152(4) de la Loi de l'impôt sur le revenu pendant laquelle la Ministre peut établir une nouvelle cotisation ou des cotisations supplémentaires ou fixer des impôts, intérêts ou pénalités, en vertu de la Partie I de la Loi est, par la présente, renoncée pour l'année d'imposition susmentionnée, à l'égard de :

Tous les points et changements inclus dans notre projet de cotisation daté du 30 novembre 1998 ainsi que toutes modifications ultérieures qui devront être apportées aux cédules d'allocation du coût en capital.

...

[33]          L'avocat de l'appelante fait valoir qu'il aurait fallu que le projet de cotisation soit annexé à la renonciation pour que cette renonciation soit valide. Il fait valoir que l'alinéa 152(4)a)(ii) de la Loi exige que la renonciation soit présentée selon le formulaire prescrit. Ce formulaire est la formule T2029. Cette formule requiert pour que la renonciation soit valide que le ou les points qui font l'objet de la renonciation doivent être mentionnés dans l'espace prévu.

[34]          L'avocate de l'intimée fait valoir que l'appelante avait déjà annoté à fond le projet de cotisation, ainsi qu'en fait foi la pièce I-2, que la signature de la renonciation s'est faite au bureau du comptable et que l'appelante savait exactement ce qu'elle signait, c'est-à-dire la renonciation à la prescription de l'année 1995 à l'égard du projet de cotisation.

[35]          Je me réfère aux motifs de la juge Reed dans Solberg c. La Reine, 92 DTC 6448, à la page 6452, où elle dit que pour interpréter une renonciation, il convient de vérifier l'intention des parties en tenant compte des circonstances pertinentes. Je suis d'avis, après avoir entendu l'appelante et dans les circonstances de faits décrits par l'avocate de l'intimée, que l'appelante savait qu'elle signait une renonciation concernant le projet de cotisation en date du 30 novembre 1998, un projet qu'elle connaissait déjà fort bien. De plus, je suis d'avis qu'il n'était pas essentiel que le projet soit joint au document de renonciation pour que ce dernier soit valide, parce qu'il était spécifiquement mentionné dans le texte de la renonciation et que les parties en avaient déjà pris connaissance.

[36]          L'autre point soulevé a été celui concernant les voyages. Il s'agit de voyages à Acapulco et à Ogonquit. Les billets pour Acapulco ont été achetés les 21 et 28 novembre 1994, au prix de 1 420,80 $ pour un séjour en date du 2 mars 1995. Dans sa déclaration originale, l'appelante en réclamait 50 p. 100, elle réclame maintenant 100 p. 100. Les frais de séjours à l'hôtel sont de 545 $. Le voyage à Ogonquit est en date du 19 mai 1995. L'appelante a résidé au Sea Castle Resort à Ogonquit. Le montant réclamé est de 245 $. L'appelante soutient qu'elle a travaillé sur ses textes durant ces voyages et qu'elle avait besoin de s'isoler pour le faire.

[37]          L'avocat de l'appelante s'appuie sur la décision de la Cour d'appel fédérale dans Lowe c. La Reine, [1996] A.C.F. no 319, et plus particulièrement au passage suivant :

... En l'espèce, il me semble que la question fondamentale est de savoir s'il s'agissait principalement, d'après les faits, d'un voyage d'affaires ou d'agrément. En l'espèce, il a été conclu qu'il s'agissait d'un voyage d'affaires. A mon avis, le côté agrément pour l'appelant doit, à mon avis, être considéré comme simplement accessoire aux buts d'affaires puisqu'il a consacré aux affaires une importante partie de son temps à La Nouvelle-Orléans.

[38]          Le but du voyage est déterminatif. Il doit principalement être pour affaires. Dans cette affaire Lowe (supra), le but était d'établir et de maintenir des relations d'affaires avec les clients de l'entreprise.

[39]          Ici, il ne s'agissait pas d'un voyage pour rencontrer des clients ni pour cueillir de l'information nécessaire à l'écriture d'un livre. Il ne s'agissait pas d'un voyage pour assister à une conférence ou participer à un colloque. Il s'agissait d'un lieu provisoire pour écrire ou réviser des textes. Ce sont des dépenses relatives à un lieu de travail.

[40]          D'une part, le but du voyage à Acapulco est à mon sens incertain. Ce voyage avait été prévu deux mois à l'avance. Il est donc douteux qu'il ait été prévu pour travailler sur des textes. Ce qui peut s'être produit, c'est que l'appelante n'a pas pu se décharger de sa charge de travail avant de partir et a été obligée de travailler sur les lieux du voyage. À Ogonquit, il est possible que l'appelante y soit allée pour changer le cadre du lieu de travail

[41]          Mais d'autre part, même en prenant pour acquis que le but des voyages était vraiment pour avoir un lieu de travail isolé qui facilite la révision des textes, je ne crois pas qu'il y ait des dispositions législatives qui permettent la déduction de tels voyages et tels séjours. Les dépenses concernant les lieux de travail comme celles des voyages sont régies par des dispositions législatives particulières.

[42]          En ce qui concerne celles relatives aux lieux de travail, nous avons vu précédemment celles qui régissaient le principal lieu d'affaires et le lieu qui sert exclusivement à tirer un revenu d'une entreprise quand ils sont situés dans l'établissement domestique autonome du particulier. Cette expression est ainsi définie au paragraphe 248(1) de la Loi :

« établissement domestique autonome » Habitation, appartement ou autre logement de ce genre dans lequel, en règle générale, une personne prend ses repas et couche.

[43]          Cette définition ne s'applique pas aux lieux d'habitation provisoires en question. En conclusion, les dépenses de voyage et de séjour relatives aux lieux de travail isolés ou différents situés dans une habitation provisoire, ne peuvent pas être déduites.

[44]          En ce qui concerne l'imposition des pénalités en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi, la preuve a révélé que l'appelante tenait ses livres plutôt bien, qu'en général, elle conservait bien ses documents, qu'elle agissait après avoir pris conseil auprès de ses comptables et qu'elle déclarait tous ses revenus bruts. Je ne crois que les erreurs qu'elle peut avoir commises dans l'appréciation de certaines dépenses soient de la nature de la faute lourde.

[45]          Les appels sont accueillis, sans frais, dans la mesure de ce qui a été exprimé à chaque point ci-dessus.

Signé à Ottawa, Canada, ce 4e jour d'avril 2002.

« Louise Lamarre Proulx »

J.C.C.I.

No DU DOSSIER DE LA COUR :        2000-5219(IT)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :                                 Denise Gaouette et Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                      Québec (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                    les 18 et 19 septembre 2001

et le 28 novembre 2001

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :         l'honorable juge Louise Lamarre Proulx

DATE DU JUGEMENT :                      le 4 avril 2002

COMPARUTIONS :

Avocat de l'appelante :                        Me Richard Généreux

Avocate de l'intimée :                          Me Pascale O'Bomsawin

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

Pour l'appelante :

                                Nom :                       Me Richard Généreux

                                Étude :                     Généreux Côté, Avocats

                                                                                Drummondville (Québec)

Pour l'intimé(e) :                                    Morris Rosenberg

                                                                                Sous-procureur général du Canada

                                                                                Ottawa, Canada

2000-5219(IT)I

ENTRE :

DENISE GAOUETTE,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appels entendus les 18 et 19 septembre 2001

et 28 novembre 2001 à Québec (Québec) par

l'honorable juge Louise Lamarre Proulx

Comparutions

Avocat de l'appelante :                                  Me Richard Généreux

Avocate de l'intimée :                                    Me Pascale O'Bomsawin

JUGEMENT

          Les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1995, 1996 et 1997 sont admis, sans frais, dans la mesure de ce qui a été exprimé dans les motifs de jugement ci-joints.

          L'appelante n'a droit à aucun autre redressement.

Signé à Ottawa, Canada, ce 4e jour d'avril 2002.

« Louise Lamarre Proulx »

J.C.C.I.

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