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Date: 20020619

Dossier: 2001-3717-IT-I

ENTRE :

CAROLE BEAUDOIN,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifsdu jugement

La juge Lamarre Proulx, C.C.I.

[1]            Il s'agit d'un appel par voie de la procédure informelle concernant la prestation fiscale canadienne pour enfants pour la période de juillet 1999 à août 2000.

[2]            L'appelante et monsieur Jean-Marc Soutière, ont témoigné pour la partie appelante. L'ex-conjoint de l'appelante, monsieur Pierre Blondin, a témoigné à la demande de l'avocate de l'intimée.

[3]            Les faits sur lesquels le ministre du Revenu national (le « Ministre » ) s'est appuyé pour établir la détermination de la prestation fiscale sont décrits au paragraphe 11 de la Réponse à l'avis d'appel (la « Réponse » ) comme suit :

a)              conformément à l'article 122.6 de la Loi, l' « année de base » 1998 représente les mois de juillet 1999 à juin 2000 inclusivement;

b)             conformément à l'article 122.6 de la Loi, l' « année de base » 1999 représente les mois de juillet 2000 à juin 2001 inclusivement;

c)              l'appelante et Pierre Blondin (l' « Ancien Conjoint » ) ont cessé de cohabiter le 22 août 1997;

d)             pour la période sous appel, l'appelante et l'Ancien Conjoint ont deux enfants, Jean-François, né le 12 août 1992, et Marie-Andrée, née le 14 mars 1994 (les « Enfants » );

e)              pour la période sous appel, l'appelante et l'Ancien Conjoint étaient les parents des deux « personne à charge admissible » selon la définition à l'article 122.6 de la Loi;

f)              les Enfants ont résidé avec l'appelante du 22 août 1997 jusqu'au 1er mars 1998;

g)             les Enfants ont résidé avec l'Ancien Conjoint à compter du 1er mars 1998 jusqu'au 1er juillet 1998;

h)             l'appelante et l'Ancien Conjoint ont partagé la garde des Enfants à raison d'une semaine à la fois à compter du mois d'août 1998 jusqu'au mois de juin 1999;

i)               en vertu d'une entente écrite entre l'appelante et l'Ancien Conjoint datée du 9 juin 1999, l'appelante et l'Ancien Conjoint ont partagé la garde des Enfants à raison d'une semaine à la fois à compter du mois de juin 1999 jusqu'au mois de mars 2000;

j)               en vertu d'un Jugement de la Cour supérieure du Québec datée du 10 février 2000, les Enfants ont résidé avec l'Ancien Conjoint durant la semaine et avec l'appelante les fins de semaine; et

k)              l'appelante n'a pas démontré que, durant les périodes sous appel, elle était la personne qui a assumé principalement la responsabilité pour le soin et l'éducation des Enfants.

[4]            Les motifs d'appel selon l'Avis d'appel sont les suivants :

...

En date du 9 juin 1999 une entente est intervenue entre les parties, Pierre Blondin et moi-même laquelle entente a été entérinée par jugement rendu par l'Honorable Jean R. Dagenais.

En vertu de ladite entente nous nous sommes convenues à une garde partagée et alternée des enfants Marie-André et Jean-François Blondin a raison d'une semaine chaque parent.

Toujours en vertu de ladite entente, M. Blondin s'engageait d'assumer la totalité des frais de garderie incluant la proportion correspondant à ma semaine de garde au montant de $50.00.

M. Blondin a également convenu de verser à moi-même pour le bénéfice des enfants une pension alimentaire mensuelle au montant de $200.00.

Le montant de pension alimentaire payable pour le bénéfice des enfants a été fixé en dessous du montant prévu par la Loi et les règlements en vigueur. De plus ladite entente a été dûment signée par M. Blondin et confirme la renonciation de M. Blondin de réclamer les allocations familiales.

Suite à ce jugement, Monsieur a refusé de payer sa pension. Le ministère du Revenu des Pensions alimentaire ont dû venir percevoir le montant sur son salaire. Par la suite le climat s'est détérioré. À l'automne 1999 nous avons tous les deux présenté une requête en modification de garde d'enfants. L'audition a eu lieu en février 2000 où le Juge Orville Frenette ordonne la tenue d'une expertise psychosociale quant à la garde des enfants.

Dans ledit jugement, les enfants sont avec leur père la semaine et avec moi toutes les fins de semaine jusqu'au rapport d'expertise soit rendu. Dans le jugement de février 2000 le juge Frenette n'a fait aucune modification quant aux modalités prévues au jugement de juin 1999 qui doivent s'appliquer et ce jusqu'à l'audition du présent dossier au fond.

...

[5]            L'appelante a admis les alinéas 11a) à 11f) de la Réponse. Elle a nié l'alinéa 11g). Elle a affirmé que durant cette période, elle avait les enfants chaque fin de semaine et deux jours par semaine. Ce qui fait un total de quatre jours par semaine. En ce qui concerne l'alinéa 11h) de la Réponse, elle dit que la période en question a commencé en juillet 1998. Elle a admis l'alinéa 11i). En ce qui concerne l'alinéa 11j), l'appelante indique que cette période a commencé en mars 2000. L'audience a eu lieu en février mais les documents écrits n'ont été reçus qu'en mars.

[6]            Le jugement de la Cour supérieure du Québec en date du 11 juin 1999 entérinant la convention des parties a été déposé comme pièce A-1. Cette entente est mentionnée à l'alinéa 11i) de la Réponse et au premier paragraphe de l'Avis d'appel. Voici les dispositions de l'entente concernant les enfants, la pension alimentaire pour enfants et la prestation fiscale pour enfants :

...

10              Les parties assumeront conjointement la garde des enfants Marie-Andrée et Jean-François; les parties convenant de maintenir les enfants à l'école du quartier du père (Lac des Fées);

20              La garde s'exercera de façon alternative, par période d'une semaine complète chacune; l'échange s'effectuant le lundi 16:00. Toutefois, pendant la semaine de la mère, le jeudi soir le père s'occupera de prendre les enfants après la classe jusqu'à 8:30 p.m., retour chez la mère, et les vendredi, après la classe jusqu'à 6:30 p.m., retour chez la mère;

30              Le père assumera la totalité des frais de garderie, incluant la proportion correspondant à la semaine de garde de la mère; chaque partie verra à l'achat des vêtements nécessaires à sa période de garde;

40              Le père versera, à titre de pension alimentaire additionnelle pour les enfants, la somme de 200$ par mois payable le 1er jour de chaque mois à la résidence de la mère et ce, jusqu'à l'intervention du Ministère du Revenu et subséquemment, versera ladite pension conformément à la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires;

50              La pension alimentaire sera versée à compter du 1er juillet 1999 et sera indexée annuellement le 1er janvier de chaque année à compter du 1er janvier 2000;

60              La mère sera autorisée à percevoir les allocations familiales et prestations fiscales pour l'enfant Marie-Andrée, le tout sous réserve des dispositions applicables de la Loi et des règlements;

70              Quant aux déductions fiscales, le père pourra bénéficier des déductions fiscales pour l'enfant Marie-Andrée et la mère pourra bénéficier des déductions fiscales pour l'enfant Jean-François lorsque et si les dispositions de la Loi et des règlements le permettant.

...

[7]            Il s'agit d'une garde partagée. L'appelante fait valoir que l'entente voulait qu'elle ait accès aux prestations fiscales pour enfants et qu'elle accepte ainsi une pension alimentaire moindre pour ses enfants.

[8]            Pour des fins de stabilité dans l'éducation des enfants, l'appelante et son ex-mari ont décidé de mettre les enfants à l'école du Lac des Fées, en août 1999. Les parents de monsieur Blondin habitaient ce secteur et ce dernier résidait, à l'occasion, chez eux. De plus, il possédait un terrain situé à côté de celui de ses parents.

[9]            L'appelante a relaté qu'à l'été 1999 elle a fait beaucoup d'activités les soirées et les fins de semaine avec ses enfants. Durant cet été, ils ont fréquenté des camps de jour, car les deux parents des enfants ont un emploi. Vers la fin du mois d'août, les enfants ont commencé l'école. Malheureusement, ainsi que le relate l'appelante, la belle-famille et le père des enfants n'ont pas coopéré avec elle.

[10]          En octobre, monsieur Blondin a retiré les enfants de la garderie de l'école alors que selon l'entente, il lui revenait de payer les frais de la garderie. Ce qui a nui considérablement à l'appelante. Elle était obligée d'aller chercher les enfants chez ses beaux-parents qui étaient désagréables avec elle. Elle ne pouvait pas les inscrire à la garderie durant sa semaine de garde car les enfants devaient être à la garderie trois jours par semaine, chaque semaine.

[11]          En mars 2000, ainsi que le dit l'appelante, à sa grande peine et à son grand désarroi, la garde partagée a cessé. Du lundi soir au samedi matin, les enfants habitaient avec leur père. Elle les gardait du samedi matin au lundi matin et les jours de congé. Le jugement de la Cour supérieure, en date du 10 février 2000, a été déposé comme pièce A-2.

[12]          L'appelante relate qu'étrangement aussitôt que le jugement de cour de février 2000 a remis au père des enfants leur garde entière, ce dernier a recommencé à utiliser les services de la garderie.

[13]          Monsieur Jean-Marc Soutière directeur de l'école Lac des Fées a témoigné à la demande de l'appelante. Le directeur a expliqué que durant la garde partagée l'appelante était très présente à l'école. Quand elle a perdu cette garde, elle venait encore régulièrement à l'école, mais il a dû l'informer qu'elle ne pourrait pas avoir accès aux professeurs et à ses enfants de la même manière qu'avant. Il faudrait qu'elle vienne le voir et c'est lui qui l'informerait de ce qui se passait avec ses enfants. Il a dit qu'elle s'occupait bien de ses enfants. Il a relaté que le père aussi aimait et s'occupait bien de ses enfants. Toutefois, il a aussi dit que depuis que l'appelante avait la garde entière de ses enfants, ils allaient mieux.

[14]          Monsieur Blondin a témoigné. La séparation a eu lieu en août 1997. Il admet qu'en octobre 1999 jusqu'en février 2000 il a retiré les enfants de la garderie. Il soutient que durant la période en litige il s'est occupé plus des enfants que l'appelante et que cette dernière n'était pas fiable.

[15]          Un document intitulé : « Rapport pour le Tribunal - Chambre de la Jeunesse » a été déposé comme pièce A-4. Le rapport recommandait notamment que la mère ait la garde des enfants, que le père les reçoive un dimanche sur deux et que les parents communiquent entre eux par l'intermédiaire des travailleurs sociaux afin de protéger les enfants de cette guerre entre adultes et éviter l'aliénation parentale nuisible au bon développement des enfants. Depuis le 27 septembre 2001, c'est l'appelante qui a la garde des enfants.

Conclusion

[16]          Puisque le père avait, en conformité avec un jugement de cour, la garde entière des enfants à partir de mars 2000 et que ces derniers ont, en fait, résidé avec lui, il est celui qui avait la qualité de particulier admissible et c'est lui qui était en droit de recevoir les prestations fiscales pour enfants.

[17]          Avant cette date, pendant la période de la garde partagée, je suis d'avis que l'appelante avait cette qualité. J'ai lu les deux questionnaires qui ont été remplis par les parents des enfants, j'ai pris connaissance des rapports d'évaluation des relations familiales et j'ai entendu la preuve et à mon avis tous ces éléments révèlent l'importance du lien qui a existé pendant l'époque en litige entre la mère et ses enfants ainsi que le rôle assidu de surveillance et de conseil qu'elle a exercé auprès d'eux. Je ne veux pas par cette conclusion minimiser le rôle du père. Il a été important comme il l'est encore.

[18]          L'appel est accordé sur la base que l'appelante a été le particulier admissible de juillet 1999 à la fin février 2000.

Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de juin 2002.

« Louise Lamarre Proulx »

J.C.C.I.

No DU DOSSIER DE LA COUR :        2001-3717(IT)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :                                 Carole Beaudoin et Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                      Ottawa (Ontario)

DATES DE L'AUDIENCE :                                 les 12 mars et 2 mai 2002

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :         l'honorable juge Louise Lamarre Proulx

DATE DU JUGEMENT :                      le 19 juin 2002

COMPARUTIONS :

Pour l'appelante :                                  l'appelante elle-même

Avocate de l'intimée :                          Me Marlyse Dumel

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

Pour l'appelante :

                                Nom :                      

                                Étude :                    

Pour l'intimée :                                       Morris Rosenberg

                                                                                Sous-procureur général du Canada

                                                                                Ottawa, Canada

2001-3717(IT)I

ENTRE :

CAROLE BEAUDOIN,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 12 mars 2002 et le 2 mai 2002 à Ottawa (Canada) par

l'honorable juge Louise Lamarre Proulx

Comparutions

Pour l'appelante :                                          L'appelante elle-même

Avocate de l'intimée :                                    Me Marlyse Dumel

JUGEMENT

          L'appel de la détermination fiscale pour enfants pour la période de juillet 1999 à août 2000 est accordé et la détermination est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle détermination sur la base que l'appelante a été le particulier admissible pour la période de juillet 1999 à la fin février 2000, le tout selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de juin 2002.

« Louise Lamarre Proulx »

J.C.C.I.

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