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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

2001-478(EI)

ENTRE :

LARRY W. ELENIAK,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

COOL-IT AUTO SERVICES LTD.,

intervenante.

Appel entendu sur preuve commune avec l'appel de Larry W. Eleniak (2001-479(CPP)) le 17 août 2001 à Vancouver (Colombie-Britannique), par

l'honorable juge suppléant D. W. Rowe

Comparutions

Pour l'appelant :                                   L'appelant lui-même

         

Avocate de l'intimé :                            Me Isabelle Jackson

Représentante de l'intervenante : Joyce Bradford

JUGEMENT

          L'appel est rejeté et la décision du ministre est confirmée, conformément aux motifs du jugement ci-joints.

Signé à Sidney (Colombie-Britannique), ce 9e jour de novembre 2001.

« D. W. Rowe »

J.S.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 1er jour de mai 2003.

Mario Lagacé, réviseur


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

2001-479(CPP)

ENTRE :

LARRY W. ELENIAK,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

COOL-IT AUTO SERVICES LTD.,

intervenante.

Appel entendu sur preuve commune avec l'appel de Larry W. Eleniak (2001-478(EI)) le 17 août 2001 à Vancouver (Colombie-Britannique), par

l'honorable juge suppléant D. W. Rowe

Comparutions

Pour l'appelant :                                   L'appelant lui-même

         

Avocate de l'intimé :                            Me Isabelle Jackson

Représentante de l'intervenante : Joyce Bradford

JUGEMENT

          L'appel est rejeté, et la décision du ministre est confirmée, conformément aux motifs du jugement ci-joints.

Signé à Sidney (Colombie-Britannique), ce 9e jour de novembre 2001.

« D. W. Rowe »

J.S.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 1er jour de mai 2003.

Mario Lagacé, réviseur


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Date: 20011109

Dossiers: 2001-478(EI)

2001-479(CPP)

ENTRE :

LARRY W. ELENIAK,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

COOL-IT AUTO SERVICES LTD.,

intervenante.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Rowe, C.C.I.

[1]      L'appelant interjette appel de décisions dans lesquelles, le 18 janvier 2001, conformément au paragraphe 93(3) de la Loi sur l'assurance-emploi (la « Loi » ) et au paragraphe 27(1) du Régime de pensions du Canada (le « Régime » ) respectivement, le ministre du Revenu National (le « ministre » ) a déterminé que, au cours de la période du 22 octobre 1999 au 7 janvier 2000, l'appelant n'exerçait pas pour l'intervenante (Cool-It) un emploi assurable ouvrant droit à pension. L'appelant a déposé un appel distinct - 2001-479(CPP) - relativement au Régime, et toutes les parties en cause ont convenu que la décision rendue dans le présent appel s'y appliquerait.

[2]      Larry Eleniak a témoigné que son premier contact avec l'intervenante remonte au jour où il a fait réparer le système de conditionnement d'air de son automobile dans un garage Cool-It. Au cours d'une conversation avec le gérant de l'établissement, il a mentionné qu'il était un spécialiste chevronné du marketing. Le gérant lui a dit de communiquer avec Steve Zaeri, au siège social de Cool-It situé au centre-ville de Vancouver (Colombie-Britannique). L'appelant a déclaré qu'il avait communiqué avec M. Zaeri et l'avait par la suite rencontré avec quatre autres personnes dans un restaurant. À leurs propos, il a compris que M. Zaeri et ses partenaires souhaitaient former une coopérative d'achat puisque trois garages seulement utilisaient le nom commercial de Cool-It, les deux autres étant exploités sous une autre raison sociale. M. Eleniak a déclaré que, à l'issue de la réunion, il avait été engagé pour s'occuper du marketing de chaque garage ou point de vente, mais qu'il devait prendre des dispositions avec M. Zaeri, qui lui donnerait des directives et qui superviserait et contrôlerait son travail. Initialement, selon les discussions qu'il avait eues avec le groupe, l'appelant devait faire la tournée des entreprises dans le cadre de la mise en oeuvre de la stratégie de marketing. Cependant, au fil du temps, l'appelant en est venu, a-t-il affirmé, à travailler environ 70 % du temps à l'établissement de l'intervenante situé au centre-ville - où il avait un local avec bureau de travail, divan, ordinateur, télécopieur, téléphone et fournitures - et il consacrait le reste de son temps aux autres établissements de Burnaby et de Richmond. Sa principale tâche consistait à mettre en valeur l'entreprise des membres du groupe et à s'occuper des ventes à l'extérieur des établissements, mais il a déclaré qu'il prenait aussi livraison à divers endroits des radiateurs qui devaient être réparés par Cool-It. En outre, l'appelant a-t-il déclaré, il répondait au téléphone et faisait des prix à des clients. L'intervenante exploitait une entreprise de vente et d'entretien de systèmes de conditionnement d'air et de radiateurs de toutes sortes pour les véhicules à moteur. L'appelant a déclaré qu'on lui avait promis un salaire mensuel de 2 750 $ et le remboursement de ses frais d'automobile, ainsi qu'une commission sur les nouvelles affaires et un régime de soins médicaux pour lui-même et son épouse, ce qui était très important pour l'appelant puisqu'il avait joui d'un tel avantage dans le cadre de son emploi précédent. En plus de travailler au bureau du centre-ville de Cool-It, M. Eleniak a-t-il déclaré, il avait aussi travaillé chez lui pour aider le frère de M. Zaeri, qui se trouvait en Iran, à émigrer au Canada, ce qui avait nécessité plusieurs communications avec Téhéran. Les frais d'automobile étaient remboursés à l'appelant - en argent - toutes les deux semaines. Il a aussi reçu un chèque de paie daté du 9 novembre 1999 - de 1 000 $ - et a remarqué qu'aucune retenue à la source n'avait été effectuée; il n'a jamais vu quelque document ou bordereau de paie que ce soit se rapportant à ce chèque ou aux autres chèques qu'il a reçus dans le cadre de la relation de travail en cause. Avant d'accepter l'emploi chez Cool-It, M. Eleniak avait travaillé - à titre d'employé - chez Data Wave Computer Services pendant 19 mois. Chez lui, il avait un ordinateur ainsi qu'un poste de travail équipé d'un télécopieur et de l'accès à Internet. Il a déclaré qu'il avait décidé de quitter son emploi chez Data Wave pour gagner un revenu plus élevé chez Cool-It. M. Eleniak a aussi déclaré qu'une journée où il travaillait tard, il avait reçu la visite d'une agente d'assurance avec laquelle il avait parlé de primes d'assurance automobile et de la possibilité d'adhérer au régime de soins médicaux offert par Cool-It. Il a déclaré que l'agente avait quitté l'établissement de Cool-It quelques instants - probablement pour aller chercher des documents dans son véhicule - et qu'à son retour elle lui avait remis certains formulaires qu'il avait remplis en indiquant que son salaire s'élevait à 2 750 $ par mois et en inscrivant son nom et celui de son épouse à titre de bénéficiaires du régime. M. Eleniak a déclaré que M. Zaeri se trouvait dans le bureau à ce moment-là et qu'il savait que l'appelant souhaitait souscrire au régime de soins médicaux de l'intervenante, auquel souscrivaient déjà, d'après ce qu'il avait cru comprendre, six travailleurs de l'établissement du centre-ville, quatre employés de l'établissement de Burnaby et deux de l'établissement de Richmond. Par la suite, soit le 7 janvier 2000, M. Eleniak a dû se rendre d'urgence à l'hôpital pour des problèmes de santé. Il a subi un quadruple pontage, mais la jambe de laquelle on avait retiré une veine guérissait mal, ce qui l'a obligé à rester à l'hôpital jusqu'à la fin du mois. L'appelant a déclaré qu'en février il était allé avec un ami au bureau de l'intervenante situé au centre-ville. Joyce Bradford, la directrice du bureau, lui avait alors remis des factures qu'elle lui avait demandé de signer même s'il avait déjà reçu les montants qui y étaient indiqués. Mme Bradford lui a expliqué que le comptable de l'intervenante avait fait cette demande. L'appelant s'était rendu chez Cool-It pour demander le reste de l'argent qui, à son avis, lui était dû - compte tenu du salaire de 2 750 $ par mois. Cependant, Mme Bradford l'a informé que c'est lui qui devait de l'argent à Cool-It puisqu'il avait reçu une série d'avances. Pour revenir à la description des services que l'appelant a fournis à l'intervenante au cours de la période pertinente, l'appelant a convenu que la réponse à l'avis d'appel (réponse) décrivait les tâches qui lui avaient été confiées aux fins de l'élaboration d'un plan commun d'achats permettant de réduire le coût des pièces et de la mise en place d'une procédure commune de facturation et d'établissement de l'inventaire. En application d'un plan de marketing, l'appelant a déclaré qu'il avait préparé une disquette contenant une liste de prix des pièces selon les normes établies par la Insurance Corporation of British Columbia (ICBC) et qu'il lui avait remis un document de référence concernant les membres du groupe qui exploitaient chaque garage ainsi qu'une description de leur expérience dans le domaine de la vente et de la réparation de radiateurs et de systèmes de conditionnement de l'air. L'intervenante et les autres membres de la coopérative souhaitaient nouer des liens avec la ICBC et la Canadian Direct Insurance. Suivant le système de réparation établi, tous les ateliers de débosselage ont une liste de vendeurs contenant le nom des entreprises qui sont en mesure de fournir le produit requis à des prix approuvés par la ICBC et il est extrêmement important pour ces ateliers de réparation automobile de connaître l'existence d'une entreprise comme Cool-It et ses sociétés affiliées. En retour, l'intervenante et les autres membres du groupe devaient effectuer un travail satisfaisant à un prix égal ou inférieur à celui indiqué sur la liste approuvée de certaines pièces utilisées dans le cadre des travaux de débosselage. M. Eleniak a expliqué que le processus visant à obtenir l'approbation de la ICBC - en vue de figurer dans la liste des vendeurs - était long et que ses démarches n'avaient pas encore porté fruit au moment où il était tombé malade. Il avait préparé des annonces à faire publier dans les pages jaunes pour le groupe d'entreprises Cool-It et M. Zaeri avait pu acheter des pièces - en utilisant le point de vente de Burnaby - pour les cinq ateliers afin d'obtenir un rabais grâce au volume accru d'achats. En outre, l'appelant a déclaré qu'il avait eu des discussions avec le frère de Steve Zaeri - Maj - au sujet de l'exportation d'une peinture spéciale et des divers moyens à prendre pour étendre les activités commerciales de l'intervenante aux États-Unis et ailleurs au Canada. Pour s'acquitter de ses diverses tâches, M. Eleniak a déclaré qu'il se rendait au bureau du centre-ville à 8 h 30 et qu'il utilisait sa clé et son code d'accès pour entrer dans les locaux de l'intervenante. Il plaçait l'affiche appropriée sur le trottoir et commençait ensuite à répondre aux appels téléphoniques et à recevoir les clients. Il lui arrivait d'utiliser son propre véhicule pour aller chercher des radiateurs à faire réparer et pour livrer des articles réparés ou prendre livraison de pièces dans un entrepôt de l'endroit. Il avait son propre téléphone cellulaire et il recevait des appels de M. Zaeri ou de quelqu'un d'autre travaillant chez Cool-It, sinon il s'acquittait simplement des tâches indiquées sur la liste que lui remettait M. Zaeri. En février 2000, l'appelant a présenté une demande de prestations d'assurance-emploi et il a aussi reçu un chèque - équivalant à un mois d'indemnités - de l'assureur administrant le régime de soins médicaux de l'intervenante. Cependant, après ce premier chèque, l'assureur a refusé d'effectuer d'autres paiements à l'appelant. Incapable de travailler en raison de son état de santé - une situation qui a duré presque un an -, il s'est adressé à l'aide sociale et, par la suite, il a reçu des prestations d'assurance-emploi, dont il a attribué son admissibilité à l'emploi qu'il avait occupé chez Data Wave - pendant 18 mois - avant de travailler chez Cool-It.

[3]      Lors du contre-interrogatoire mené par l'avocate de l'intimé, Larry Eleniak a déclaré que Steve Zaeri lui avait remis une liste des tâches à accomplir et lui avait quelques fois demandé de vive voix d'aller chercher des articles à un endroit en particulier ou d'effectuer une livraison à une adresse précise. Il a déclaré qu'il n'avait pas prévu effectuer ces tâches banales, mais il avait constaté qu'il consacrait près de 60 % de sa journée de travail à ces tâches au lieu de travailler à l'ordinateur ou de mettre en oeuvre la stratégie de marketing. Au départ, il avait considéré que ses fonctions étaient celles d'un représentant commercial, mais il avait ensuite utilisé le titre de directeur général pour décrire son rôle, et avait fait imprimer des cartes professionnelles à cet effet. À l'intérieur du groupe d'entreprises, il avait considéré que son rôle consistait à dénicher de nouveaux marchés. L'appelant a expliqué qu'il avait les compétences pour jouer un rôle du genre puisqu'il avait été propriétaire de sa propre agence d'assurances pendant sept ans et qu'il avait travaillé pour une société de transport aérien en plus d'avoir participé à la commercialisation de certains produits à l'étranger. Il effectuait son travail dans un bureau - à l'étage, dans l'immeuble de Cool-It - qui avait antérieurement été occupé par M. Zaeri. Il n'avait pas d'horaire de travail particulier, mais il savait qu'il devait se présenter au bureau chaque matin du lundi au vendredi; il se rendait aussi au bureau le samedi pour quelques heures. Lorsqu'on lui a montré des copies de chèques qui lui avaient été payés par l'intervenante (pièce R-1), l'appelant a admis qu'il avait reçu trois chèques au cours du mois de novembre 1999, l'un de 1 000 $ et les deux autres, de 500 $ chacun. Au cours du mois de décembre 1999, il a reçu trois chèques de 500 $ chacun - pour un total de 1 500 $ - et il a reçu un chèque final de 250 $ daté du 6 janvier 2000. Tous les chèques en question ont été déposés dans son compte bancaire personnel et il ne se rappelle pas avoir relevé quelque inscription décrivant les paiements de diverses façons : « contrat de ventes » , « sous-contrat de ventes » , « sous-contrat de marketing » - sur les chèques qui lui étaient remis. La procédure consistait à obtenir, directement de M. Zaeri, normalement à la fin d'une journée de travail, un chèque sur lequel il inscrivait le montant approprié. On a aussi montré à l'appelant une série de factures - pièce R-2 - qu'il a admis avoir signées à la demande de Joyce Bradford, le jour où il s'était rendu aux locaux de Cool-It en février 2000. Il a réitéré avoir indiqué clairement à M. Zaeri qu'il bénéficiait d'un excellent régime de soins médicaux chez son employeur actuel et qu'il voulait obtenir un régime semblable s'il décidait de travailler pour Cool-It. Il a déclaré que M. Zaeri avait convenu que cela ne causerait aucune difficulté puisque l'entreprise offrait déjà un régime de soins médicaux par l'intermédiaire d'un assureur. M. Eleniak a reconnu le formulaire d'adhésion au régime en question - pièce R-3 - et a convenu qu'il y avait indiqué avoir commencé à travailler pour Cool-It le 1er octobre 1999. Il a reconnu la demande d'inscription de cinq garages dans l'annuaire téléphonique - pièce R-4 - dans laquelle il avait indiqué le nom de Charterhouse International Projects Inc. (Charterhouse) comme société chargée de préparer l'inscription en question, et son adresse personnelle, son numéro de téléphone ainsi que son numéro de télécopieur et de cellulaire. M. Eleniak a déclaré qu'il s'était auparavant servi de cette société pour faire la publicité de certains projets de construction, mais qu'elle avait été radiée du registre provincial des sociétés pour cause d'inactivité. On a montré à M. Eleniak deux factures - datées du 8 janvier 2000 - pièce R-5 - faites sur le papier à en-tête de Charterhouse et adressées à Cool-It pour différents services rendus du 28 au 31 décembre 1999, et pour certaines dépenses engagées entre le 31 décembre 1999 et le 6 janvier 2000. L'appelant a déclaré qu'il ne se rappelait pas avoir préparé ces factures et que c'était peut-être son épouse qui les avait établies vu qu'il était malade et qu'il avait commencé à éprouver des problèmes cardiaques la veille, ce qui l'avait amené à se rendre au Service d'urgence de l'hôpital d'Abbotsford.

[4]      Lors du contre-interrogatoire mené par Joyce Bradford - qui a représenté l'intervenante - M. Eleniak a déclaré qu'il ne se rappelait pas lui avoir dit qu'il était propriétaire de plusieurs compagnies et qu'il s'en était servi dans le cadre de ses activités pour obtenir certaines déductions fiscales. Il a déclaré également qu'il ne se rappelait pas que Mme Bradford lui avait dit qu'il devait figurer sur la feuille de paie de Cool-It pendant trois mois avant de pouvoir adhérer au régime de soins médicaux. Il a convenu que Mme Bradford avait refusé de lui remettre un relevé d'emploi le 18 février 2000, et qu'il lui avait alors dit que « les choses pourraient être difficiles » . Il a admis que Cool-It avait effectué certains travaux de réparation sur son automobile - sans frais - en reconnaissance du fait qu'il avait utilisé son automobile dans le cadre de son travail.

[5]      Steve Zaeri a témoigné qu'il était arrivé au Canada en 1991 et qu'il avait lancé sa propre entreprise l'année suivante. Désireux d'accroître ses activités, il avait rencontré l'appelant en compagnie de son frère, Maj, et de trois autres personnes, dans un restaurant de Vancouver, pour discuter d'expansion et de marketing. M. Zaeri a déclaré que, au cours de cette réunion, l'appelant avait informé le groupe qu'il avait exploité sa propre compagnie pendant des années et qu'il avait acquis une vaste expérience des affaires au Canada et à l'étranger. Comme ils travaillaient tous dans le domaine de la vente et de la réparation de radiateurs et de systèmes de conditionnement de l'air, les membres du groupe ont manifesté de l'intérêt pour le concept proposé par l'appelant. Cependant, ils n'étaient pas disposés à payer - collectivement - plus de 500 $ par semaine pour se prévaloir des services de l'appelant, qui avait demandé 2 750 $ par mois. La société, Cool-It, était propriétaire d'un point de vente à Vancouver et d'un autre à Burnaby. En revanche, le point de vente qui était exploité à Richmond sous le nom de Cool-It appartenait à Rick Easch - il n'y avait aucun lien financier entre cette entreprise et celles dont M. Zaeri était propriétaire - qui avait obtenu la permission d'utiliser le nom commercial. Les deux autres garages, l'un situé à Port Moody et l'autre, à Vancouver Nord, étaient exploités sous leurs propres raisons sociales. Cool-It exploitait un point de vente au centre-ville de Vancouver et M. Zaeri a déclaré que M. Eleniak aimait utiliser le bureau qui y était aménagé. M. Zaeri a déclaré que l'appelant ne s'était pas rendu au garage de Richmond et qu'il avait trouvé des excuses pour ne pas aller dans les autres points de vente, qui appartenaient aux autres personnes ayant participé à la réunion d'affaires. Quant à la question de savoir si l'appelant est allé chercher ou livrer des pièces ou des radiateurs, M. Zaeri a déclaré que, lorsque M. Eleniak s'adonnait à se rendre à un endroit en particulier pour une raison ou une autre, il lui offrait de faire une course pour Cool-It parce qu'il voulait profiter de l'occasion pour faire connaissance avec le propriétaire ou le gérant de l'établissement - une visite de représentant - dans le but de soutenir ses efforts pour accroître ses activités. M. Zaeri a déclaré que les seules personnes travaillant à l'établissement du centre-ville qui étaient autorisées à discuter de prix avec les clients étaient lui-même, son neveu, Pedro, et Dave, un mécanicien. Autrement, le travailleur qui répondait au téléphone devait mettre le client en attente pour que lui-même, Pedro ou Dave puissent ensuite lui répondre. M. Zaeri a déclaré que le concept visant à former un groupe - exploitant le même genre d'entreprise - pouvait se solder par des profits accrus pour les membres résultant des réductions découlant du volume accru d'achats. En ce qui concerne le remboursement par les autres membres du groupe à M. Zaeri du salaire que celui-ci a versé à M. Eleniak, M. Zaeri a déclaré qu'une seule personne avait payé sa part.

[6]      Au cours du contre-interrogatoire mené par l'avocate de l'intimé, Steve Zaeri a déclaré qu'il n'avait pas attribué de bureau à l'appelant, mais qu'il lui avait permis d'utiliser la chaise, le bureau de travail et l'ordinateur qui se trouvaient dans un bureau déjà existant parce que M. Eleniak lui avait dit que son ordinateur personnel ne fonctionnait pas. M. Zaeri a déclaré que les membres du groupe d'entreprises et lui-même se souciaient peu de savoir où le travail de marketing était effectué, mais que les cinq membres représentant des points de vente voulaient que M. Eleniak y consacre 40 heures par semaine. M. Zaeri a admis qu'il avait demandé à l'appelant de communiquer avec l'ambassade du Canada à Téhéran pour indiquer clairement que M. Zaeri exploitait une entreprise viable et bien établie à Vancouver, et non un simple garage personnel. M. Eleniak s'est servi de son téléphone résidentiel pour faire quelques appels et ses frais d'interurbain lui ont été remboursés. M. Eleniak a obtenu aussi une clé donnant accès aux locaux de Cool-It pour pouvoir y effectuer des appels en raison du décalage horaire - 12 heures - qui existe entre Vancouver et Téhéran. M. Zaeri a déclaré qu'il considérait M. Eleniak comme un ami. L'atelier de Cool-It a réparé l'automobile de l'appelant sans frais; à quelques occasions, M. Zaeri a amené M. Eleniak au travail et a pris le déjeuner avec lui. Au cours d'une conversation avec l'appelant, M. Zaeri a mentionné qu'il avait discuté avec le directeur des ventes d'un magasin de pièces automobiles d'une peinture réfléchissante. M. Zaeri a déclaré que M. Eleniak l'avait informé que l'un de ses amis pouvait fabriquer ce produit, mais il n'en avait plus entendu parler par la suite. M. Zaeri a constaté que le travail de marketing effectué par l'appelant semblait donner des résultats puisque la Canadian Direct Insurance a appelé Cool-It cinq ou six fois, ce qui a permis à l'entreprise d'obtenir de nouveaux contrats. M. Zaeri a déclaré qu'il n'allait pas être facile d'obtenir du travail des ateliers de débosselage approuvés par la ICBC et que ça pouvait prendre jusqu'à six mois pour faire partie de ce système commercial et devenir vendeur autorisé de pièces et de services d'entretien. À cette fin, M. Zaeri et les autres membres du groupe d'entreprises considéraient que l'unique responsabilité de M. Eleniak consistait à commercialiser leurs produits et services en vue d'augmenter leurs ventes. Par le passé, M. Zaeri avait effectué lui-même le travail de vente, mais il était disposé à laisser l'appelant communiquer avec la ICBC et d'autres assureurs parce qu'il n'était pas à l'aise pour traiter avec leurs cadres supérieurs et directeurs. M. Zaeri a expliqué que, en tant qu'employeur, il avait pour pratique - établie depuis longtemps - d'expliquer aux travailleurs exactement ce que l'on attendait d'eux. Il a demandé une seule chose à l'appelant, soit de s'occuper d'un territoire en particulier, où se trouvaient un nombre considérable d'ateliers de débosselage et de réparation, et il lui a conseillé d'éviter de se rendre chez certaines entreprises qui prenaient du temps à acquitter leurs comptes chez Cool-It. M. Zaeri s'attendait à ce que l'appelant acquière un minimum de connaissances au sujet des radiateurs et des systèmes de conditionnement de l'air pour mieux comprendre les clients potentiels. En outre, il souhaitait que M. Eleniak lui fournisse des renseignements sur les visites qu'il effectuait à titre de représentant et qu'il lui précise pourquoi certains clients potentiels décidaient de ne pas faire affaire avec Cool-It. M. Eleniak n'a cependant jamais fourni ces renseignements, alors que la compagnie de marketing qui s'occupe actuellement du dossier de Cool-It remet régulièrement à cette dernière des renseignements détaillés sur les démarches effectuées et les résultats obtenus dans le cadre de campagnes de marketing. L'appelant n'avait pas d'horaire de travail établi, mais M. Zaeri a déclaré qu'il voulait obtenir un bref compte rendu, deux fois par jour, du travail accompli. Bien qu'il n'y ait eu aucune discussion à cet égard avant l'entrée en fonctions de l'appelant à titre d'expert-conseil en marketing pour le groupe Cool-It, M. Zaeri a déclaré que l'appelant avait subséquemment demandé d'adhérer à un régime de soins médicaux complémentaire. Cependant, Joyce Bradford a expliqué à M. Eleniak qu'il devait être inscrit sur la liste de paie de Cool-It depuis trois mois avant d'être admissible à un tel régime. M. Eleniak a alors demandé à l'agente de l'assureur qui administre le régime de se présenter chez Cool-It. M. Zaeri a déclaré qu'il était présent lorsque l'agente et M. Eleniak avaient discuté de la question de l'assurance, mais qu'il avait dû partir après quelques minutes. M. Zaeri a déclaré qu'il croyait que M. Eleniak avait adhéré au régime d'assurance offert par Cool-It, mais qu'il avait plus tard été informé que l'assureur n'avait fait qu'un seul paiement de prestations d'invalidité à l'appelant et qu'elle avait par la suite refusé d'en effectuer d'autres. Initialement, M. Zaeri avait cru comprendre que l'appelant allait payer ses propres dépenses puisque, semble-t-il, il exploitait sa propre entreprise. M. Eleniak avait demandé à Cool-It de libeller les chèques à son nom puisqu'il figurait dans la raison sociale de sa compagnie et que, par conséquent, cela ne faisait aucune différence.

[7]      Lors du contre-interrogatoire mené par l'appelant, M. Zaeri a reconnu que 5 000 entrées avaient dû être faites dans un fichier informatique afin de préparer la proposition destinée à la ICBC. M. Zaeri a souligné que l'ordinateur de Cool-It avait été utilisé par l'appelant à des fins personnelles également, et il a nié l'allégation selon laquelle le groupe d'entreprises avait convenu de verser à l'appelant la somme de 2 750 $ par mois en échange de ses services en marketing.

[8]      Dorothy Van der Ree a témoigné qu'elle travaillait comme coordonnatrice du service des risques pour la Compagnie d'Assurance-Vie Federated de Canada (Federated), une société d'assurance multirisques qui offre un régime d'indemnités d'assurance aux employés. Le 24 novembre 1999, elle a rencontré l'appelant au bureau de Cool-It, après que M. Zaeri lui eut présenté ce dernier et lui eut dit qu'il s'occupait du marketing pour le groupe d'entreprises Cool-It. M. Zaeri a quitté le bureau et les discussions se sont poursuivies avec M. Eleniak, qui a alors informé la coordonnatrice qu'il était en fait le directeur général de Cool-It et qui lui a demandé un formulaire d'adhésion au régime de soins médicaux. Comme elle n'avait pas le document en question en mains, elle lui en a fait parvenir un par télécopieur le lendemain de son bureau. L'appelant l'a rempli et le lui a retourné le 26 novembre 1999. Puisque, sur le formulaire de souscription - pièce R-3 - , l'appelant avait indiqué être directeur général, elle a supposé qu'il était un employé de Cool-It. Elle a déclaré qu'elle n'aurait jamais, de son propre chef, dit à M. Eleniak que sa description de tâches chez Cool-It « correspondait davantage à celle d'un directeur général » , puisqu'il ne lui appartenait pas de formuler ce genre d'avis.

[9]      Lors du contre-interrogatoire mené par l'avocate de l'intimé, Dorothy Van der Ree a confirmé qu'elle avait reçu une copie de la lettre - pièce R-6 - datée du 23 février 2000 et informant l'appelant qu'aucune autre prestation d'invalidité de courte durée n'allait lui être versée car il n'était pas un employé admissible au sens de la police d'assurance en vigueur. La demande d'indemnité - pièce R-7 - datée du 12 janvier 2000, que l'appelant a présentée à la Federated, indique qu'il a éprouvé certains symptômes en novembre 1999. La coordonnatrice a déclaré que, pour que la police d'assurance en vigueur chez Cool-It soit applicable, il fallait que les primes soient déduites à la source, comme les retenues habituelles qui sont effectuées sur le salaire d'un employé.

[10]     Au cours du contre-interrogatoire mené par l'appelant, Dorothy Van der Ree a reconnu que le groupe de marketing de Cool-It aurait probablement droit à un léger rabais si les cinq entreprises participantes choisissaient de faire affaire avec la Federated pour tous leurs besoins en matière d'assurance. En réponse à une déclaration en ce sens de M. Eleniak, elle a indiqué qu'elle n'avait pas utilisé les termes « directeur général » en rapport avec les tâches dont l'appelant s'acquittait chez Cool-It. Cependant, elle avait ultérieurement accepté la description de l'appelant et avait ensuite examiné les polices avec l'appelant en tenant pour acquis qu'il était un employé de Cool-It et qu'il occupait effectivement le poste en question. Elle a déclaré qu'aucune prime n'avait été payée par l'appelant ou pour son compte au titre de son adhésion supposée au régime de soins médicaux. L'assureur a bien émis un chèque en faveur de M. Eleniak après réception de la demande d'indemnités, mais il a ensuite refusé d'assurer l'appelant, sans, cependant, prendre de mesures pour récupérer l'indemnité d'invalidité qu'il lui avait versée.

[11]     L'appelant a fait valoir qu'on lui avait offert un poste de spécialiste en marketing avec un salaire de 2 750 $ par mois, alors qu'il avait initialement demandé un montant supérieur, soit 3 300 $ par mois. Il a souligné que ses frais d'automobile lui avaient été remboursés en argent et a déclaré qu'il n'aurait jamais changé d'emploi s'il avait su qu'il ne serait pas considéré comme un employé de Cool-It et qu'il n'aurait pas droit aux avantages connexes, notamment au régime de soins médicaux.

[12]     L'avocate de l'intimé a fait valoir que le témoignage de l'appelant n'était pas crédible et qu'il visait à donner l'illusion de l'existence d'un emploi de façon que - pour des motifs inavoués - l'appelant puisse être considéré comme un employé de Cool-It - d'emblée - plutôt que comme un entrepreneur indépendant fournissant des services de marketing. L'avocate a fait valoir que M. Eleniak avait effectué des tâches ou des courses par amitié pour M. Zaeri, dans le but de lui rendre service, mais qu'il n'était pas dans ses attributions particulières de répondre aux appels téléphoniques ou de s'acquitter de certaines tâches répétitives au garage. En revanche, l'avocate a-t-elle fait valoir, il est clair que M. Zaeri et son groupe voulaient obtenir des résultats et s'attendaient à une augmentation des ventes et des profits du fait de leur alliance commerciale. L'avocate a indiqué que la preuve, dans l'appel en instance, établissait l'existence d'une relation d'entrepreneur indépendant qui a tourné au vinaigre quand l'appelant a éprouvé de graves problèmes de santé puisque, pendant toutes les périodes pertinentes, l'appelant s'était présenté comme un entrepreneur chevronné qui exploitait sa propre entreprise par l'intermédiaire d'une société.

[13]     Dans l'affaire Wiebe Door Services Ltd. c. M.R.N., [1986] 3 C.F. 563-564 ([1986] 2 C.T.C. 200), la Cour d'appel fédérale a approuvé l'assujettissement de la preuve aux critères suivants, en précisant bien qu'il s'agit en fait d'un seul critère qui est composé de quatre parties intégrantes et qu'il faut l'appliquer en insistant sur l'ensemble des éléments qui entraient dans le cadre des opérations. Ces critères sont les suivants :

          1. Le degré de contrôle

          2. La propriété des instruments de travail

          3. Les chances de bénéfice et les risques de perte

          4. L'intégration

Contrôle

[14]     Le témoignage de l'appelant selon lequel M. Zaeri lui avait demandé de répondre au téléphone, de sortir une affiche le matin et de faire des courses - cueillir et livrer certains articles - dans le cours normal des activités de l'entreprise de vente et de réparation de radiateurs et de systèmes de conditionnement de l'air n'est pas crédible. L'appelant ignorait tout de l'entreprise et ne pouvait certainement pas répondre au téléphone, donner des conseils et faire des prix à des clients potentiels concernant les problèmes de refroidissement et de chauffage de leur automobile. M. Zaeri et les autres membres du groupe souhaitaient étendre les activités de leur entreprise et accroître leur pouvoir d'achat de pièces. C'est pour ce seul motif qu'ils ont formé une alliance. À cette fin, ils ont retenu les services de l'appelant, qui était chargé d'élaborer un plan commun d'achat et d'instaurer un système commun de facturation et d'inventaire. Initialement, en conformité avec la stratégie de marketing arrêtée, l'appelant devait passer une semaine par mois à chaque point de vente et toucher 500 $ par semaine. M. Zaeri a donné des conseils et des directives à l'appelant au sujet des entreprises à contacter ou à ne pas contacter. Il souhaitait, en outre, que l'appelant l'informe régulièrement des visites qu'il avait effectuées et des résultats obtenus, le cas échéant. Il a conseillé également à M. Eleniak de se familiariser dans une certaine mesure avec l'entreprise de Cool-It pour être capable de parler aux clients potentiels des services offerts par le groupe d'entreprises. M. Zaeri savait que l'inscription sur la liste des vendeurs autorisés de la ICBC utilisée par les ateliers de débosselage était un long processus et il a laissé les coudées franches à l'appelant à cet égard. Le contrôle ou la supervision auquel l'appelant était prétendument assujetti existait seulement dans son imagination - tout comme le rôle de directeur général qu'il s'était attribué - et ne résultait d'aucune décision de M. Zaeri. Pour ce qui est de ce critère, la preuve indique que l'appelant était un entrepreneur indépendant.

Instruments de travail

[15]     L'appelant a utilisél'ordinateur et le bureau se trouvant dans les locaux du centre-ville de Cool-It, mais il s'est aussi servi de l'ordinateur personnel qui se trouvait dans le bureau qu'il avait aménagé chez lui. Il a utilisé son propre véhicule ainsi que son propre téléphone cellulaire. Il était supposé se rendre aux autres points de vente régulièrement, mais il a choisi de rester confortablement assis au bureau du centre-ville. Dans les circonstances, le critère n'est pas particulièrement significatif mais, tout bien considéré, on peut quand même conclure que l'appelant était un spécialiste en marketing autonome exploitant sa propre entreprise.

Les chances de bénéfice et les risques de perte

[16]     L'appelant a conclu une entente avec le groupe d'entreprises de Cool-It et c'est par la négociation que les parties ont fixé sa rétribution. Il demandait 2 750 $ par mois, mais M. Zaeri et les autres membres du groupe ont rejeté sa proposition. Ils lui ont ensuite offert 500 $ par semaine pour ses services de marketing et c'est sur ce fondement que les paiements qui ont été effectués en sa faveur du 8 novembre 1999 au 6 janvier 2000 ont été calculés. Rien n'indique que l'appelant devait consacrer tout son temps et toutes ses énergies à Cool-It et aux autres membres du groupe, qui, toutefois, s'attendaient de l'appelant à ce qu'il se dévoue 40 heures par semaine à la réalisation de leur projet. Ses propres factures - pièce R-5 - indiquent qu'il exploitait censément une entreprise par le truchement d'une société appelée Charterhouse, ce qui est compatible avec les déclarations qu'il a faites initialement au groupe d'entreprises - lorsqu'il s'employait à faire valoir son savoir-faire en marketing - , soit qu'il était un entrepreneur d'expérience habitué à exploiter sa propre entreprise par l'intermédiaire d'une société lui appartenant personnellement. On doit supposer que tout spécialiste qui s'engage à fournir un certain service contre honoraires a effectué des recherches et est raisonnablement convaincu que le revenu qu'il tirera de ce travail donnera en soi lieu à un bénéfice ou qu'il y gagnera au change dans le cadre plus général de l'exploitation de son entreprise à long terme. Il n'est pas inhabituel pour des personnes qui fournissent un service - qui n'est pas directement lié à la fonction première d'une entreprise - de demander le paiement d'une avance ou d'honoraires réguliers. L'appelant savait très bien qu'il était appelé à fournir des services à un groupe composé de cinq entreprises distinctes et que chaque membre de ce groupe devait assumer une partie de ses honoraires hebdomadaires afin de profiter de son savoir-faire en marketing. Pour ce qui est de ce critère, j'en arrive à la conclusion que l'appelant était un entrepreneur.

Intégration

[17]     Ce critère est l'un des plus difficiles à appliquer. Aux pages 563 et 564 (CTC : à la page 206) de ses motifs du jugement dans l'affaire Wiebe, précitée, le juge MacGuigan a déclaré ceci :

De toute évidence, le critère d'organisation énoncé par lord Denning et d'autres juristes donne des résultats tout à fait acceptables s'il est appliqué de la bonne manière, c'est-à-dire quand la question d'organisation ou d'intégration est envisagée du point de vue de l' « employé » et non de celui de l' « employeur » . En effet, il est toujours très facile, en examinant la question du point de vue dominant de la grande entreprise, de présumer que les activités concourantes sont organisées dans le seul but de favoriser l'activité la plus importante. Nous devons nous rappeler que c'est en tenant compte de l'entreprise de l'employé que lord Wright a posé la question « À qui appartient l'entreprise » .

C'est probablement le juge Cooke, dans Market Investigations, Ltd. v. Minister of Social Security, [1968] 3 All E.R. 732 (Q.B.D.), qui, parmi ceux qui ont examiné le problème, en a fait la meilleure synthèse (aux pages 738 et 739) :

Les remarques de LORD WRIGHT, du LORD JUGE DENNING et des juges de la Cour suprême des États-Unis laissent à entendre que le critère fondamental à appliquer est celui-ci : « La personne qui s'est engagée à accomplir ces tâches les accomplit-elle en tant que personne dans les affaires à son compte » . Si la réponse à cette question est affirmative, alors il s'agit d'un contrat d'entreprise. Si la réponse est négative, alors il s'agit d'un contrat de service personnel. Aucune liste exhaustive des éléments qui sont pertinents pour trancher cette question n'a été dressée, peut-être n'est-il pas possible de le faire; on ne peut non plus établir de règles rigides quant à l'importance relative qu'il faudrait attacher à ces divers éléments dans un cas particulier. Tout ce qu'on peut dire, c'est qu'il faudra toujours tenir compte du contrôle même s'il ne peut plus être considéré comme le seul facteur déterminant; et que des facteurs qui peuvent avoir une certaine importance sont des questions comme celles de savoir si celui qui accomplit la tâche fournit son propre outillage, s'il engage lui-même ses aides, quelle est l'étendue de ses risques financiers, jusqu'à quel point il est responsable des mises de fonds et de la gestion, et jusqu'à quel point il peut tirer profit d'une gestion saine dans l'accomplissement de sa tâche. L'utilisation du critère général peut être plus facile dans un cas où la personne qui s'engage à rendre le service le fait dans le cadre d'une affaire déjà établie; mais ce facteur n'est pas déterminant. Une personne qui s'engage à rendre des services à une autre personne peut bien être un entrepreneur indépendant même si elle n'a pas conclu de contrat dans le cadre d'une entreprise qu'elle dirige actuellement.

Quand il doit régler un tel problème, le juge de première instance ne peut se soustraire à l'obligation de peser avec soin tous les facteurs pertinents, comme l'a indiqué le juge Cooke.

[18]     La preuve a révélé que l'appelant connaissait bien peu de choses de l'entreprise de vente et de réparation de radiateurs et de systèmes de conditionnement de l'air pour les véhicules à moteur. Il n'aurait pu faire bénéficier Cool-It ou les autres membres du groupe d'entreprises de quelque compétence que ce soit à cet égard. Il s'est présenté comme un spécialiste compétent du marketing capable d'accroître la part de marché d'un groupe d'entreprises affiliées et de mettre sur pied un système central qui permettrait de réaliser des économies par l'accroissement du pouvoir d'achat ou par l'attribution des contrats d'assurance à une seule compagnie d'assurances. Personne n'avait effectué ce travail avant l'arrivée de l'appelant et, après son départ, une compagnie indépendante de services professionnels en marketing a pris en charge le dossier de Cool-It. La façon dont l'appelant s'est décrit et son comportement subséquent au travail sont tout à fait compatibles avec le comportement d'un entrepreneur indépendant qui accomplit une tâche donnée en vue d'atteindre un objectif précis dans le cadre d'efforts déployés au cours d'une période qui n'est pas limitée par une échéance. M. Zaeri, en sa qualité de représentant de Cool-It et de porte-parole des autres membres du groupe d'entreprises, n'avait aucune expérience en marketing même s'il avait antérieurement fait de son mieux pour accroître la part de marché de son entreprise en établissant des contrats avec des personnes travaillant dans le domaine du débosselage. Le service fourni par l'appelant était accessoire aux activités de Cool-It et de ses entreprises affiliées et devait permettre d'élargir leur sphère d'activité en vue d'accroître les revenus et, dans une certaine mesure, de réduire le coût d'achat en général des pièces et d'autres produits. L'appelant leur avait fait valoir son expérience dans le domaine du marketing et avait déclaré qu'il était en mesure de leur fournir le service. Son comportement subséquent concorde avec ses propos, et le fait qu'il était censé exploiter une entreprise par le truchement de sa propre société en fournit la confirmation. Nombre d'experts-conseils s'acquittent de leurs tâches dans les bureaux des clients et utilisent le matériel qui s'y trouve. Les factures - pièce R-2 - signées par l'appelant confirment qu'il a été payé pour avoir fourni des services de marketing. Le fait que les factures en question ont été préparées par Joyce Bradford de Cool-It ne revêt aucune importance puisque, à ce moment-là, la relation avait pris fin, et il était important qu'une facture se rapporte à chaque chèque qui avait déjà été émis en faveur de l'appelant par M. Zaeri. Ici encore, l'application du critère m'amène à conclure que l'appelant était un entrepreneur indépendant.

[19]     Je sais qu'il est important de prendre en considération ce que le travailleur a fait en réalité au cours de la période d'emploi plutôt que d'accepter l'intention initiale des parties. Cependant, le témoignage de l'appelant n'est pas crédible comparativement au témoignage des autres témoins. Lorsqu'il y a incompatibilité sur un point en particulier entre le témoignage de M. Eleniak et celui de M. Zaeri ou entre le témoignage de M. Eleniak et celui de Mme Van der Ree, je retiens la version de M. Zaeri ou de Mme Van der Ree. Il est manifeste que M. Eleniak souhaite que la Cour lui donne gain de cause et conclue qu'il était un employé au cours de la période d'emploi chez Cool-It, non pas dans le but de recevoir des prestations d'assurance-emploi - qu'il a déjà reçues parce qu'il y était admissible du fait de son emploi antérieur -, mais pour entreprendre des démarches en vue de récupérer les arriérés qui lui seraient dus par la Federated au titre des indemnités d'invalidité conformément à la police applicable aux employés de Cool-It. Par conséquent, le témoignage de l'appelant était destiné à laisser croire qu'il était un employé, ce qu'il n'était pas, même s'il s'est employé à démontrer que ses services étaient intégrés aux activités commerciales quotidiennes de Cool-It en racontant qu'il avait répondu aux appels téléphoniques, ouvert le garage et placé une affiche sur le trottoir tous les matins et qu'il avait été obligé de faire des courses suivant la liste que lui fournissait M. Zaeri. Le poste de directeur général n'existait que dans son imagination. La question qu'il faut se poser est la suivante : pourquoi le groupe d'entreprises aurait-il retenu les services de l'appelant comme spécialiste en marketing - à l'issue de la réunion tenue dans un restaurant de Vancouver - et lui aurait-il demandé d'assumer les fonctions de directeur général - des seules activités de Cool-It - trois ou quatre semaines plus tard? M. Zaeri a témoigné que M. Eleniak avait demandé la somme de 2 750 $ pour ses services, mais que le groupe d'entreprises avait fait une contre-offre de 500 $ par semaine. Avant de présenter son plaidoyer final, l'appelant a informé la Cour que sa demande salariale initiale avait été de 3 300 $ par mois, mais qu'il avait accepté la somme de 2 750 $. Pour être franc, l'appelant a des illusions de grandeur. D'entrée de jeu, il voulait être perçu comme un spécialiste en marketing - et il a agi en conséquence pendant toute la période en cause - fort d'une expérience acquise à l'étranger et capable d'accroître les revenus du groupe d'entreprises de Cool-It. Il avait déjà éprouvé des problèmes de santé, et ses tentatives pour adhérer au régime d'assurance-invalidité de Cool-It ont revêtu une grande importance dans son plan général. Pour atteindre son objectif à cet égard, il a trompé Mme Van der Ree en lui affirmant qu'il était le directeur général de Cool-It et - pire encore - il a indiqué sur le formulaire d'adhésion qu'il travaillait pour l'intervenante depuis le 1er octobre 1999 alors que, dans les faits, il avait commencé à fournir ses services en marketing le 27 octobre 1999 environ. Pendant toute la période où il a travaillé, il a accepté d'être payé pour ses services - à raison de 500 $ par semaine - sans qu'aucun montant ne soit retenu, et les chèques, tirés sur le compte de Cool-It et signés par M. Zaeri, ont été faits à l'ordre de Larry Eleniak personnellement à sa demande expresse, même s'il exploitait censément une société à responsabilité limitée. À cet égard, il a expliqué à M. Zaeri que son nom figurait dans le nom commercial officiellement enregistré et que, par conséquent, cela ne faisait aucune différence.

[20]     Si je prends en considération l'ensemble de la preuve et que je l'applique de la manière indiquée par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Wiebe, précitée, je conclus que le ministre était justifié de conclure que l'appelant n'occupait pas un emploi assurable ouvrant droit à pension chez Cool-It au cours de la période en cause.


[21]     L'appel en l'espèce est rejeté et, ainsi que les parties en ont convenu à l'ouverture de l'audience, l'appel portant le numéro 2001-479(CPP) est également rejeté.

Signé à Sidney (Colombie-Britannique), ce 9e jour de novembre 2001.

« D. W. Rowe »

J.S.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 1er jour de mai 2003.

Mario Lagacé, réviseur


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