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Dossier : 2003-1806(IT)G

ENTRE :

RANDALL H. SHOEMAN,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 11 mars 2004 à Regina (Saskatchewan).

 

Devant : L’honorable juge D.W. Beaubier

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelant :

MRalph Ottenbreit, c.r.

 

Avocat de l’intimée :

MRobert Gosman

____________________________________________________________________

JUGEMENT

 

          L’appel interjeté à l’égard de la nouvelle cotisation établie sous le régime de la Loi de l’impôt sur le revenu relativement à l’année d’imposition 2000 est accueilli, et la nouvelle cotisation est renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

          L’appelant a droit aux dépens partie‑partie.

 

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique), ce 26jour de mars 2004.

 

« D.W. Beaubier »

Juge Beaubier

 

Traduction certifiée conforme

ce 31e jour de mars 2009.

 

D. Laberge, LL.L.


 

 

 

Référence : 2004CCI215

Date : 20040326

Dossier : 2003-1806(IT)G

ENTRE :

RANDALL H. SHOEMAN,

appelant,

Et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Beaubier

 

[1]     Avec le consentement des parties, le présent appel interjeté dans le cadre de la procédure générale a été entendu sur preuve commune à Regina (Saskatchewan), les 11 et 12 mars 2004, avec l’appel du père de Randall, Harry. Randall, Harry Shoeman et le frère de Randall, Russell Shoeman, ont témoigné pour le compte de l’appelant.

 

[2]     Les paragraphes 17 à 31 de la réponse à l’avis d’appel de Randall font état des questions en litige :

 

[traduction]

 

17.       Lorsqu’il a calculé son revenu pour 2000, l’appelant a déclaré les sommes suivantes (sommes arrondies) :

 

revenu en intérêts

52,00

gains en capital

638,00

revenu au titre d’un REER

19 168,00

autres revenus

1,00

revenu d’entreprise net

(32 469,00)

revenu de commissions net

19 816,00

revenu imposable

7 206,00

 

18.       Le ministre du Revenu national (le « ministre ») a initialement établi à l’égard de l’appelant une cotisation conforme à la déclaration produite relativement à 2000. L’avis de cotisation était daté du 3 mai 2001.

 

19.       Le ministre a établi à l’égard de l’appelant une nouvelle cotisation relative à 2000 dans laquelle il a refusé la perte d’entreprise nette demandée par l’appelant. L’avis de nouvelle cotisation était daté du 30 mai 2002.

 

20.       L’appelant s’est opposé à l’avis de nouvelle cotisation par un avis d’opposition reçu le 26 juin 2002.

 

21.       Par un avis de nouvelle cotisation du 19 février 2003, le ministre a admis l’opposition en partie et a établi à l’égard de l’appelant une nouvelle cotisation faisant droit à une perte déductible au titre d’un placement d’entreprise de 15 670,24 $.

 

22.       Le ministre a initialement établi à l’égard de l’appelant une cotisation relative à 2001 par un avis de cotisation daté du 9 mai 2002. L’appelant n’a pas produit d’opposition concernant cette cotisation.

 

23.       Lorsqu’il a établi cette cotisation, le ministre s’est appuyé sur les hypothèses de fait suivantes :

 

a)         à tous les moments pertinents, l’appelant était un vendeur à la commission;

 

b)         l’appelant a déduit une perte d’entreprise nette de 32 469,97 $ dans sa déclaration de revenus relative à 2000;

 

c)         la perte d’entreprise nette déduite par l’appelant dans sa déclaration de revenus relative à 2000 avait été calculée de la façon suivante :

 

revenu

0,00

dépenses

 

assurance

24,00

intérêt

1 616,79

frais de bureau

5 915,68

fournitures

559,51

frais juridiques, etc.

80,00

déplacement

2 092,48

téléphone, services publics

1 663,42

Ken Newman, imprimeur de livres

20 518,09

total partiel

32 469,97

revenu d’entreprise net*

(32 469,97)

 

d)         Ken Newman, aussi connu sous le nom de Kenneth Eugene Newman, a prêté de l’argent à la société de Russell;

 

e)         le père de l’appelant, Harry Shoeman, et non l’appelant, a garanti le prêt que Ken Newman a consenti à la société de Russell;

 

f)          ce n’est pas l’appelant qui a payé la somme de 20 518,09 $ qu’il a incluse dans le calcul de la perte d’entreprise nette qu’il a demandée dans sa déclaration de revenus relative à 2000;

 

g)         les dépenses déduites par l’appelant dans le calcul de la perte d’entreprise nette qu’il a demandée dans sa déclaration de revenus relative à 2000 se rapportaient à l’entreprise exploitée par Russell, et non à une entreprise exploitée par l’appelant;

 

h)         Russell est le frère de l’appelant;

 

i)          Russell a écrit un livre intitulé « The Nature of Golf »;

 

j)          le premier tirage du livre de Russell a débuté en 1995;

 

k)         en 1999, on a procédé à un tirage limité à 5 000 exemplaires du livre de Russell;

 

l)          afin de commercialiser son livre, Russell a constitué la société 610807 Saskatchewan Ltd.;

 

m)        à tous les moments pertinents, Russell était le seul dirigeant de 610807 Saskatchewan Ltd.;

 

n)         à tous les moments pertinents, Russell détenait 100 pour 100 des actions émises et en circulation de 610807 Saskatchewan Ltd.;

 

o)         la société de Russell a été constituée vers le 29 mars 1995;

 

p)         ni Russell ni sa société n’ont tiré un quelconque revenu du livre de Russell;

 

q)         ni Russell ni sa société n’ont vendu un seul exemplaire du livre de Russell;

 

r)          la société de Russell n’a produit aucune déclaration de revenus;

 

s)         la société de Russell a fait faillite le 20 décembre 2001;

 

t)          vers le 1er juillet 1999, l’appelant a conclu une entente avec la société de Russell (l’« entente »);

 

u)         selon les conditions de l’entente, l’appelant s’engageait à payer les dépenses d’entreprise de la société de Russell;

 

v)         l’entente ne prévoyait aucune modalité de remboursement pour l’une ou l’autre des sommes payées par l’appelant dans le cadre de l’entente;

 

w)        l’entente ne précisait pas que de l’intérêt courait sur toutes les sommes que l’appelant payait dans le cadre de l’entente;

 

x)         l’appelant n’a tiré aucun revenu dans le cadre de l’entente;

 

y)         toutes les autres ententes de financement conclues par la société de Russell prévoyaient des modalités de remboursement et un intérêt de 10 pour 100 par année;

 

z)         l’appelant et la société de Russell avaient entre eux un lien de dépendance;

 

aa)       l’appelant n’a pas annoncé ni fait la promotion d’une société;

 

bb)       le seul « client » de l’appelant était la société de Russell;

 

cc)       l’appelant n’a pris aucune mesure pour établir une clientèle;

 

dd)       les activités précisées dans l’entente n’étaient pas exercées en vue de réaliser un profit ou d’une manière commerciale;

 

ee)       sous réserve du fait qu’il était vendeur à la commission, l’appelant ne participait pas à une entreprise;

 

ff)         l’appelant a payé certaines des dépenses engagées par la société de Russell;

 

gg)       l’appelant est un investisseur dans la société de Russell, et non une société de financement;

 

hh)       les sommes que l’appelant a payées à Russell ou à la société de ce dernier, ou pour le compte de Russell ou de la société de ce dernier, ne l’ont pas été en vue de tirer un revenu d’une entreprise ou d’un bien;

 

ii)         les sommes que l’appelant a avancées à Russell ou à la société de ce dernier l’ont été pour aider un parent qui se trouvait en difficulté financière;

 

jj)         l’appelant n’avait pas l’intention d’exercer les activités précisées dans l’entente en vue de réaliser un profit;

 

kk)       par une entente conclue le 16 août 1999 et une entente subséquente conclue le 26 février 2001, l’appelant a garanti le remboursement de la somme que Wayne Leibel et Robert Pyne ont prêtée à la société de Russell;

 

ll)         exception faite de Wayne Leibel et de Robert Pyne, aucun des créanciers de la société de Russell ne pouvait prendre contre l’appelant des mesures visant à garantir qu’il soit remboursé;

 

mm)     en 2000, l’appelant a fait à Wayne Leibel et à Robert Pyne les quatre versements suivants totalisant 33 000,00 $ :

 

payé à Rob Pyne, 19 septembre 2000

25 000,00

payé à Wayne Leibel, 28 septembre 2000

3 000,00

payé à Wayne Leibel, 3 novembre 2000

3 500,00

payé à Rob Pyne, 3 novembre 2000

1 500,00

total partiel

33 000,00

 

nn)       à l’exception des sommes susmentionnées, l’appelant n’a payé aucune somme aux termes de la garantie personnelle mentionnée à l’alinéa 23kk) en 2000;

 

oo)       l’appelant n’a subi aucune perte au titre d’un placement d’entreprise supérieure à 33 000 $ en 2000;

 

pp)       l’appelant n’a pas subi une perte déductible au titre d’un placement d’entreprise supérieure à 15 670,24 $ en 2000, laquelle a été calculée de la façon suivante :

 

payé à Wayne Leibel, 28 septembre 2000

3 000,00

payé à Wayne Leibel, 3 novembre 2000

3 500,00

payé à Rob Pyne, 3 novembre 2000

1 500,00

total partiel

33 000,00

moins le gain en capital déclaré antérieurement

 

8 541,00

perte au titre d’un placement d’entreprise

24 459,00

perte déductible au titre d’un placement d’entreprise

 

15 670,24

 

B.        QUESTIONS EN LITIGE

 

24.       La Cour doit trancher les questions suivantes dans le cadre du présent appel :

 

a)         Exception faite de ses activités comme vendeur à la commission, l’appelant exploitait‑il une entreprise en 2000? Dans l’affirmative, quel était le montant du revenu d’entreprise net ou de la perte d’entreprise nette se rapportant à cette entreprise en 2000?

 

b)         L’appelant peut‑il déduire une perte déductible au titre d’un placement d’entreprise supérieure à la somme acceptée par le ministre en 2000?

 

C.        DISPOSITIONS LÉGISLATIVES, MOYEN INVOQUÉ ET RÉPARATION DEMANDÉE

 

25.       L’appelant invoque les articles 3, 38, 111, 165 et 169, les paragraphes 18(1), 39(9), 39(12), 50(1), 125(7), 152(8) et 248(1) ainsi que les alinéas 39(1)c) et 40(2)g) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »), L.R.C. (1985), ch. 1 (5e suppl.), et ses modifications relatives à l’année d’imposition 2000.

 

26.       En réponse aux alinéas 3o) et 9b) et aux paragraphes 5 et 8 de l’avis d’appel, on soutient que, comme l’appelant n’a pas produit un avis d’opposition à la cotisation établie relativement à l’année d’imposition 2001, il ne peut, selon le paragraphe 169(1) de la Loi, interjeter à la Cour canadienne de l’impôt appel de la cotisation visant cette année d’imposition et la Cour ne peut, en conséquence, accorder la réparation demandée à l’alinéa 9b) de l’avis d’appel.

 

27.       On soutient que Russell, et non sa société, a écrit le livre « The Nature of Golf ». On avance donc que les dépenses engagées pour écrire cet ouvrage sont celles de Russell, et non celles de l’appelant ou de la société de Russell.

 

28.       On fait valoir que, comme le frère de l’appelant détenait 100 pour 100 des actions et était le seul administrateur de 610807 Saskatchewan Ltd., l’appelant et la société de Russell avaient un lien de dépendance.

 

29.       On affirme aussi que l’entente ne fixait aucune modalité de remboursement ni aucun intérêt pour l’une ou l’autre des sommes payées par l’appelant dans le cadre de l’entente, tandis que toutes les autres ententes de financement conclues par la société de Russell en prévoyaient.

 

30.       On allègue en outre que le seul « client » de l’appelant était la société de Russell et que l’appelant n’a pris aucune mesure – publicitaire, par exemple – pour établir une clientèle.

 

31.       On avance également que les sommes que l’appelant a payées à Russell ou à la société de celui‑ci l’ont été pour aider Russell alors qu’il se trouvait en difficulté financière, ce qui constitue une activité d’ordre entièrement personnel et non commercial. De plus, on affirme que l’appelant n’a reçu aucun revenu ni de Russell ni de la société de ce dernier au titre de l’une ou l’autre des sommes qu’il a versées dans le cadre de l’entente. On soutient donc que l’appelant n’avait aucune source de revenu provenant des sommes qu’il a avancées à Russell ou à la société de celui‑ci, et que l’appelant ne peut déduire une quelconque perte d’entreprise dans le calcul de son revenu en application de l’article 3 de la Loi.

 

[3]     Dès le départ, l’avocat de l’intimée a fait état des précisions données au paragraphe 26 de la réponse et la Cour a décidé qu’elle n’entendrait pas d’éléments de preuve relatifs à l’opposition visant l’année d’imposition 2001 de l’appelant puisqu’elle n’a fait l’objet d’aucun autre acte de procédure.

 

[4]     La preuve n’a pas permis de réfuter les hypothèses 23b), c), d), e), h), i), l), m), n), o), r), s), t), u), v), w), x), y), z), aa), bb), cc), ff), kk), ll) et mm).

 

[5]     En ce qui touche les autres hypothèses énoncées au paragraphe 23, la Cour conclut ce qui suit relativement aux alinéas indiqués :

 

a)       L’appelant était aussi un « conseiller en affaires » aux moments pertinents, selon son témoignage. Cependant, la preuve n’établit pas qu’il a exercé de quelconques activités dans ce domaine, à l’exception du fait qu’il a travaillé pour une entreprise de camionnage à un titre non précisé jusqu’à la fin de 1999 environ, qu’il a effectué des travaux dans le cadre des contrats en question et qu’il a aidé à placer l’argent de son père, Harry Shoemaker. (Tous les placements allégués de Harry pendant cette période paraissent constituer les sommes en cause dans son appel.)

 

f), mm) et nn) Randall n’a jamais versé de somme pour quoi que ce soit à Ken Newman. Randall a remboursé certaines sommes à M. Pyne et à M. Leibel en 2000 au titre de prêts que ces derniers ont consentis à Russell. Il a produit à cet égard des éléments de preuve consistant en des chèques datés de 2000 totalisant 38 000 $ (pièce A‑30, onglet A). Ce paiement a été fait par suite de la garantie qu’il a donnée le 16 août 1999 et qui est mentionnée à l’hypothèse kk) (pièce A‑16). Il convient de signaler que le premier de ces chèques, qui s’élevait à 25 000 $, a été fait à l’ordre de Rob Pyne le 19 septembre 2000 et renvoie à deux éléments – « Lifesaver (Cherry) NOG Loan ». Le chèque de 5 000 $, qui n’est pas décrit à l’hypothèse mm), a été mis en preuve au moyen d’une photocopie d’un chèque du 11 octobre 2000 fait à l’ordre de Rob Pyne.

 

g)       Voir les alinéas gg) et hh).

 

j) et k) La seule « production » faite du livre de Russell consiste en un tirage de 5 000 exemplaires en novembre 1999.

 

l) et r) Ces alinéas nécessitent des observations additionnelles importantes. Dans son témoignage, Russell a déclaré que 610807 Saskatchewan Ltd. (« 610 ») avait été constituée en société pour des raisons fiscales. Les seules déclarations de taxe produites par 610 consistent en des déclarations de TPS relatives à des crédits de taxe sur les intrants (pièce A‑11) débutant en avril 1995. Les seuls autres documents relatifs à l’entreprise signés par 610 sont des déclarations annuelles la concernant. Selon le témoignage de Russell, les autres documents, quels qu’ils soient, qui ont été signés au nom de 610 ont été versés comme pièce au dossier. Or, au début de 1996, 610 a ouvert un compte bancaire au Sherwood Credit Union, à Regina. Néanmoins, une grande partie de l’argent que Randall et Harry allèguent avoir avancé à 610 a été payé soit à Russell ou à divers créanciers qui faisaient affaire avec ce dernier ou qui lui avaient envoyé des factures, soit, dans le cas des factures téléphoniques et des cartes de crédit, à Randall ou à Harry.

 

p) et q) Le livre de Russell a fait l’objet de ventes. Certains exemplaires ont été vendus aux États‑Unis pour des sommes en espèces et aucune partie de ce revenu n’a été déclarée ou consignée. Certains ont été vendus au Canada et Russell a dressé la liste de ceux‑ci dans la pièce A‑33. En tout, jusqu’à présent, on estime avoir vendu environ 1 300 ou 1 400 exemplaires, à 50 $ chacun. Il semble s’agir du prix de gros. Le livre (pièce A‑1) fait état d’un prix de détail de 100 $ l’exemplaire.

 

t), u), v), w), x) L’entente du 1er juillet 1999 conclue entre Randall (pièce A‑17) et 610 prévoyait une contrepartie de 5,00 $ pour chaque exemplaire vendu après la vente des 5 000 premiers exemplaires. Dans son témoignage, Randall a affirmé qu’avant cette date, il avait conclu avec Russell une entente verbale selon laquelle 1,00 $ était versé pour chaque exemplaire vendu, entente qui a été remplacée par celle produite comme pièce A‑17. Celle‑ci ne fixe aucun délai. Le paragraphe 1 précise les futurs services et engagement financier offerts par Randall. En voici le texte :

 

[traduction]

 

1.         Mission

La société engage le conseiller pour qu’il lui fournisse les services énoncés ci‑dessous, et le conseiller accepte cette mission :

 

1) Conseiller la société sur les questions d’affaires, comme les questions comptables, juridiques, financières et administratives, la commercialisation et la technologie.

 

2) Payer les dépenses relatives à l’entreprise de la société, y compris les frais comptables, juridiques, financiers, administratifs, les frais de commercialisation et ceux liés à la technologie.

 

dd) et ee) Malgré le témoignage de Russell voulant que des ventes aient été réalisées au Canada (A‑33) et aux États‑Unis, on n’a pas réussi à vendre 5 000 exemplaires et Randall n’a rien reçu. L’avocat de l’intimée a suggéré à Harry et à Russell que, au 1er juillet 1999, le livre était un désastre financier et que cette situation était entièrement connue à cette date lorsque, selon le témoignage de Russell, seuls 700 exemplaires du livre avaient été vendus. Tous les témoins membres de la famille Shoemaker ont nié ce fait. En particulier, ils estimaient que l’arrivée de Randall au sein de l’équipe offrirait l’élan nécessaire au regard de la commercialisation. Randall a effectivement contribué au financement, à l’administration et à la commercialisation. En ce qui a trait à la commercialisation, Randall et Russell ont rencontré à Orlando, en Floride, à la fin de janvier 2001, des représentants d’un conseiller en commercialisation et d’un commanditaire caritatif éventuels mais, comme il s’est révélé impossible d’arriver à une entente avec eux, aucune opération n’a eu lieu.

 

gg) et hh) Il ressort de la pièce A‑17 que Randall n’a pas investi dans 610. Cette pièce fait état d’une entreprise lancée par Russell pour gagner 5,00 $ par exemplaire vendu, comme il est énoncé dans ce document. Les sommes qu’il a payées et le temps qu’il a consacré l’ont été à cette fin. Il était coentrepreneur avec 610. L’avocat de l’intimée a soutenu avec raison que cette entreprise visait à aider le frère et le père de Randall, et que le marché conclu reposait justement sur ce facteur, à savoir l’affection personnelle. Or, si je me fie à l’apparence de Randall, il était à la fin de la trentaine ou au début de la quarantaine en 1999; il avait de l’expérience dans le domaine des affaires et, même si les trois hommes habitaient tous au 23, croissant Cowburn, à Regina, Randall avait ses obligations personnelles et il a décidé, indépendamment de son père et de son frère tout aussi mature que lui, de conclure le contrat du 1er juillet 1999. Il a restreint le temps prévu dans l’entente et la durée de celle‑ci à une moyenne de dix heures par semaine du 1er juillet 1999 au 31 décembre 2001. Néanmoins, la somme de 5,00 $ par exemplaire continuerait d’être versée pendant tout le tirage du livre, lequel, selon leurs prévisions, atteindrait au moins 100 000 exemplaires.

 

ii), jj), kk), ll), mm) et nn) C’est sur le fondement de la pièce A‑17 que Randall a signé les garanties du 16 août 1999 et du 26 février 2001 en faveur de M. Leibel et de M. Pyne. La Cour accepte la pièce A‑30, onglet A, voulant que la somme en cause s’élève à 38 000 $ en 2000 (et non à la somme de 20 518,09 $ qui, selon l’hypothèse formulée à l’alinéa 23c), aurait été versée à Ken Newman). La pièce A‑17 montre que les autres dépenses figurant dans l’hypothèse formulée à l’alinéa 23c) constituent également des dépenses d’entreprise engagées dans le cadre d’un projet comportant un risque de caractère commercial. La Cour estime que c’est en raison de la pièce A‑17 que Randall a tout naturellement fourni à M. Pyne et à M. Leibel les garanties constatées dans les pièces A‑16 et A‑18 lorsque ces derniers ont accepté de prêter à 610 la somme en souffrance que Russell et 610 devaient au titre du prêt consenti par M. Newman, de l’intérêt couru pour l’impression et des frais de distribution nécessaires. Cet argent servirait à financer les mesures de distribution essentielles pour permettre le succès du livre et rembourser M. Newman.

 

oo) et pp) Pour les motifs énoncés, la Cour conclut que les dépenses d’entreprise exposées dans ces alinéas et déjà examinées aux alinéas précédents ii), jj), kk), ll), mm) et nn) constituent des dépenses d’entreprise et une perte d’entreprise que Randall a subies dans le cadre d’un projet comportant un risque de caractère commercial au cours de l’année 2000.

 

[6]     L’appel est accueilli et l’affaire est renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation conformément aux présents motifs. L’appelant a droit aux dépens partie‑partie.

 

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique), ce 26jour de mars 2004.

 

 

« D.W. Beaubier »

Juge Beaubier

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 31e jour de mars 2009.

 

D. Laberge, LL.L.


 

 

RÉFÉRENCE :

2004CCI215

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2003-1806(IT)G

 

INTITULÉ :

Randall H. Shoeman c. La Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Regina (Saskatchewan)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 11 mars 2004

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge D.W. Beaubier

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 26 mars 2004

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l’appelant :

MRalph Ottenbreit, c.r.

 

Avocat de l’intimée :

MRobert Gosman

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Pour l’appelant :

 

Nom :

MRalph Ottenbriet, c.r.

 

Cabinet :

Robertson Stromberg

Regina (Saskatchewan)

 

Pour l’intimée :

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

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