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Date: 20021210

Dossier: 2001-674-IT-I

ENTRE :

RÉJEAN VILLENEUVE,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

La juge Lamarre Proulx, C.C.I.

[1]            Il s'agit d'appels par voie de la procédure informelle concernant les années d'imposition 1988 à 1992.

[2]            Les questions en litige concernent la période normale de cotisation sous le paragraphe 152(4) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ) et les pénalités imposées en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi.

[3]            Le 6 janvier 1995, l'appelant a obtenu une somme de 12 364,15 $, à titre de remboursement d'impôt, à l'égard des années d'imposition 1988 à 1992, sur la base de faits erronés.

[4]            Pour établir les nouvelles cotisations, en date du 14 juillet 2000, le ministre du Revenu national (le « Ministre » ) s'est fondé sur les faits décrits au paragraphe 8 de la Réponse à l'avis d'appel (la « Réponse » ), comme suit :

a)              le dossier origine d'une enquête interne concernant certains employés du Centre fiscal de Jonquière qui avaient mis sur pied un stratagème qui consistait à faire bénéficier, à certaines personnes, de remboursements d'impôt frauduleux en contrepartie d'une commission fondée sur un pourcentage des dits remboursements;

b)             le 6 janvier 1995, l'appelant déposa à la Banque de Montréal, rue Racine à Chicoutimi, une somme de 12 364,15 $, au titre de remboursement d'impôt total, à l'égard des années d'imposition 1988, 1989, 1990, 1991 et 1992, suite à des nouvelles cotisations datées du 28 décembre 1994;

c)              les avis de nouvelle cotisation datés du 28 décembre 1994, à l'égard des années d'imposition 1988, 1989, 1990, 1991 et 1992, établissaient que l'appelant avait deux enfants à sa charge, et accordait, entre autres, dans le calcul des crédits d'impôt non remboursables, un crédit d'impôt, au titre de l'équivalent de personne mariée, et celui, au titre pour personnes à charge pour les années 1988, 1989, 1990 et 1991;

d)             les avis de nouvelle cotisation datés du 28 décembre 1994, à l'égard des années d'imposition 1988, 1989, 1990, 1991 et 1992, établissaient que l'appelant avait deux enfants à sa charge, et accordait, entre autres, dans le calcul des crédits fédéraux, un crédit d'impôt pour enfants;

e)              l'appelant, aux enquêteurs du Ministre, a allégué, par déclaration solennelle, que monsieur Mario Boucher était un client de son employeur « les Automobiles Jacques Bouchard & fils ltée » ;

f)              l'appelant, aux enquêteurs du Ministre, a avoué, par déclaration solennelle, que monsieur Mario Boucher lui avait offert, à l'automne 1994, de réviser ses déclarations de revenus, qu'il avait donné son accord et avait signé un document à cet effet;

g)             l'appelant, aux enquêteurs du Ministre, a soutenu, par déclaration solennelle, qu'il n'avait jamais eu d'enfant à sa charge, à l'égard des années d'imposition en litige;

h)             à l'égard du remboursement total découlant des nouvelles cotisations, datées du 28 décembre 1994, pour les années d'imposition 1988, 1989, 1990, 1991 et 1992, l'appelant, aux enquêteurs du Ministre, a reconnu, par déclaration solennelle, qu'il avait remis à monsieur Mario Boucher, selon ses directives, une somme de 8 000 $, en argent liquide;

i)               le Ministre est d'avis que l'appelant a fait montre dans cette affaire de collusion, de connivence et de complicité;

j)               à l'égard des années d'imposition 1988, 1989, 1990, 1991 et 1992, l'appelant a fait une présentation erronée des faits, par négligence, inattention ou omission volontaire ou a commis quelque fraude ou en fournissant quelque renseignement sous le régime de la Loi.

k)              la réclamation de crédits d'impôt non remboursables, au titre de l'équivalent de personne mariée, ainsi que celle de crédits fédéraux, au titre de crédit d'impôt pour enfants, à l'égard des années d'imposition 1988, 1989, 1990, 1991 et 1992, et également la réclamation d'un crédit d'impôt non remboursable, au titre de personnes à charge, à l'égard des années d'imposition 1988, 1989, 1990 et 1991 porte le Ministre à croire que l'appelant a fait sciemment, ou dans les circonstances qui justifient l'imputation d'une faute lourde, un faux énoncé ou une omission dans les déclarations de revenus produites pour les années d'imposition 1988, 1989, 1990, 1991 et 1992, ou a participé, consenti ou acquiescé à ce faux énoncé ou cette omission, d'où il résulte que l'impôt qu'il aurait été tenu de payer d'après les renseignements fournis dans les déclarations de revenus déposées pour ces années-là était inférieur au montant d'impôt à payer pour ces années-là.

[5]            L'avis d'appel de l'appelant a été rédigé par les comptables du garage pour lequel l'appelant travaille à titre de mécanicien. On y lit que l'appelant est né le 12 août 1966. Il a une conjointe de fait depuis 1987 et ils ont eu un enfant en 1991. L'appelant a commencé à travailler à titre de mécanicien au garage « Les Automobiles Jacques Bouchard et fils Ltée » en 1992, et c'est là où il a connu monsieur Mario Jacques Boucher. Lors d'une discussion, l'appelant a demandé à monsieur Boucher pourquoi la plupart de ses amis recevaient des remboursements d'impôt à la fin de l'année et que lui, ne recevait rien. Monsieur Boucher lui a alors proposé de réviser les années 1988 à 1992. Monsieur Boucher lui a obtenu un chèque approximatif de 12 000 $ et c'est à ce moment qu'il lui a mentionné qu'il garderait les deux tiers du montant.

[6]            L'appelant a admis les alinéas 8 b), 8 e), 8 f) et 8 h) de la Réponse. Lors de son témoignage l'appelant a repris les faits décrits à l'avis d'appel.

[7]            C'est monsieur Boucher qui lui a apporté un chèque de 12 000 $. L'appelant est allé lui porter le 8 000 $ qu'il lui devait dans un restaurant.

[8]            L'appelant, à une question de son représentant, confirme qu'il ne savait pas quels étaient les faits avancés par monsieur Boucher qui lui ont permis de recevoir le remboursement d'impôt en question et qu'il est une personne qui fait confiance aux professionnels.

[9]            Lors du contre-interrogatoire, l'avocate de l'intimée a déposé la déclaration solennelle de l'appelant comme pièce I-1. Comme les faits en ont tous été repris lors du témoignage, je trouve utile de la reproduire en totalité :

...

À l'automne 1994, Mario Boucher, un client du garage où je travaille soit « Automobile Jacques Bouchard » m'a offert de réviser mes déclarations d'impôt. J'ai accepté qu'il révise mon dossier et j'ai signé un document à cet effet. Quelques semaines plus tard, soit en décembre 1994, Mario Boucher m'a appelé pour me dire que le remboursement serait de 12 364,15 $. Je lui ai alors dit de laisser faire car ça n'avait pas d'allure. Peu de temps après, Mario Boucher m'a rappelé pour me dire qu'il avait le chèque et il m'a demandé d'aller le rencontrer chez lui. Lors de cette rencontre, j'ai constaté que l'adresse sur le chèque indiquait le 445 St-Philippe à Chicoutimi alors que mon adresse à ce moment était le 119 du Blizard à Canton Tremblay. J'en ai fait la remarque à Mario Boucher et ce dernier m'a dit de dire que je ne restais plus avec ma femme et que j'avais changé d'adresse. À ce moment Mario Boucher m'a dit que je devais changer le chèque et lui remettre 8 000 $ en argent et que je pourrais conserver la différence. J'ai finalement accepté de faire la transaction demandée. Je me suis rendue à la Banque de Montréal sur la rue Racine à Chicoutimi. La caissière a trouvé curieux que ce ne soit pas mon adresse sur le chèque, m'a demandé mon numéro d'assurance-sociale et a gelé les fonds pendant qu'elle effectuait les vérifications. Deux jours plus tard, elle m'appelait pour me dire que les fonds étaient disponibles. Je suis alors allé à la banque pour effectuer le retrait en argent de 8 000 $, argent que j'ai remis par la suite à Mario Boucher lors d'une rencontre au restaurant « Bouffe et plus » à Chicoutimi-nord.

Je n'ai jamais eu deux enfants à ma charge entre les années 1988 et 1992. Je n'ai eu que deux enfants, le premier né en 1991 et le deuxième en 1996.

Mario Boucher a complété mes déclarations d'impôt et celles de mon épouse concernant les années d'imposition 1997 et 1998.

Arguments

[10]          Le représentant de l'appelant fait valoir d'une part que le Ministre est en dehors de la période normale de cotisation prévue au paragraphe 152(4) de la Loi et que d'autre part, il n'y a pas matière à imposer les pénalités en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi. Le représentant de l'appelant demande donc l'annulation des cotisations sur la base qu'il n'y a pas eu omission volontaire, fraude ou irrégularité de la part de l'appelant. Ce n'est pas l'appelant qui est intervenu dans la préparation et dans l'exécution des corrections demandées. C'est quelqu'un en qui il avait confiance et qui, par surcroît, était un employé du ministère du Revenu fédéral.

[11]          L'avocate de l'intimée rappelle la surprise de l'appelant en apprenant le montant du remboursement et qu'il aurait demandé à monsieur Mario Boucher d'arrêter. Elle suggère que même avant d'avoir reçu le chèque l'appelant avait des doutes quant à légalité des actions posées par monsieur Boucher. Malgré ces doutes, l'appelant n'a fait aucun geste auprès de Revenu Canada pour se renseigner sur la légalité de ce qui se passait dans son dossier.

[12]          Selon l'avocate, l'appelant avait un intérêt économique très grand de rester dans l'ignorance puisqu'il allait recevoir en échange de cette ignorance 12 000 $.

[13]          L'avocate fait aussi valoir que pour que cette fraude réussisse, il devait y avoir les gens du centre fiscal qui émettaient des remboursements et les autres qui acceptaient de recevoir ces montants. Les agents de Revenu Canada, lorsqu'ils font une vérification, ne demandent pas à être remboursés par les contribuables pour les efforts qu'ils font; ils sont payés par le gouvernement et non pas par les contribuables. L'apport du contribuable dans cette fraude était essentiel. C'est ainsi qu'il s'agit de complicité.

[14]          L'avocate se rapporte à une décision que j'ai rendue dans Lévesque, succession c. Canada, [1995] A.C.I. no 469 (Q.L.), et plus particulièrement au paragraphe 14 :

L'ignorance ou le défaut de s'informer adéquatement pourrait, dans certaines circonstances, être un élément suffisant pour constituer une faute lourde, dans les cas surtout où il y a un intérêt économique à demeurer dans l'ignorance. Ici, l'élément qui fait pencher la balance en faveur de l'acceptation de la position du contribuable est qu'il n'y avait aucun intérêt économique à cette omission ou à ce défaut de s'informer adéquatement.

[15]          Elle se réfère à la décision de la juge Reed de la Cour fédérale de première instance dans Patricio c. Canada, [1984] A.C.F. no 540 (Q.L.) :

... À mon avis, son ignorance des exigences du système fiscal était directement fonction de son choix délibéré de porter des oeillères et ne procédait pas d'une simple négligence ou ni d'une insouciance. L'ignorance volontaire d'une personne qui est en mesure d'agir de façon responsable constitue à mon avis une faute lourde, compte tenu des circonstances de l'espèce. Pour en arriver à cette décision, j'ai examiné les jugements La Reine c. Columbia Entreprises, 83 O.T.C. 5247 et Venne c. La Reine, 84 DTC 6247 invoqués par les procureurs.

[16]          Elle se réfère également à une décision du juge Hamlyn anciennement de cette Cour dans Carlson c. Canada, [1997] A.C.I. no 1351 (Q.L.) et plus particulièrement au paragraphe 19 :

En outre, il a été jugé que la personne capable d'agir d'une façon responsable qui fait délibérément l'autruche ou qui se montre insouciante commet une faute lourde. Dans la décision Holley v. M.N.R., 89 DTC 366, le juge Kempo, de cette Cour, a statué que l'omission délibérée de se renseigner auprès du fisc constituait une faute lourde.

[17]          Ces décisions sont à l'effet que l'aveuglement volontaire constitue une faute lourde quand la personne en retire un avantage économique et qu'elle serait en mesure de se renseigner. L'avocate fait valoir que c'est la description du comportement de l'appelant. Il ne s'est pas renseigné auprès des autorités fiscales sur la légitimité du remboursement et du paiement en retour aux auteurs dudit remboursement.

[18]          Elle fait valoir que le degré de négligence exigé dans le paragraphe 152(4) de la Loi est moins élevé que celui exigé par le paragraphe 163(2) de la Loi et qu'il est sûrement rencontré pour les fins du pouvoir du Ministre de cotiser en dehors de la période normale de cotisation. Il est également plus que suffisant pour l'imposition de la pénalité, en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi.

Analyse et conclusion

[19]          Au terme de l'audience, j'avais demandé aux avocats de l'intimée de me faire parvenir un tableau schématique du calcul de l'impôt dû, des intérêts dus sur ces impôts, du montant des pénalités et des intérêts dus sur ces pénalités. J'ai reçu les documents informatisés établissant les montants en litige, environ une trentaine de pages. Malheureusement, ces informations sont trop détaillées pour m'être utiles. J'indiquerai seulement le total du solde dû au 12 septembre 2002, soit le montant de 43 084,98 $.

[20]          Toutefois, je considère utile un paragraphe de la lettre accompagnant ces relevés informatiques et je le reproduis :

Nous précisons que lors de l'émission des nouvelles cotisations annulant les remboursements frauduleux et imposant les pénalités prévues au paragraphe 163(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu, le ministre a calculé les intérêts sur la pénalité à partir de la date d'exigibilité pour chacune des années d'imposition en litige mais les intérêts sur le montant du faux remboursement ne commencent à courir qu'à partir de la date où le remboursement a été effectué.

[21]          En ce qui concerne les cotisations à l'extérieur de la période normale de cotisation, l'ignorance de l'appelant quant aux faits erronés avancés pour obtenir le remboursement ne peut lui servir d'excuse. Selon la théorie du mandat, le mandant accepte le geste posé par le mandataire lorsqu'il le ratifie. En acceptant le remboursement de l'impôt payé en trop et en en remettant la majeure partie à l'auteur du paiement, l'appelant a ratifié l'acte fautif de cet auteur. L'appelant a donc fait montre du degré de négligence suffisant pour les fins des cotisations en dehors de la période normale de cotisation.

[22]          L'appelant doit donc remettre le montant d'impôt qui lui a été payé en trop dans sa totalité et avec les intérêts.

[23]          En ce qui concerne la pénalité imposée en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi, dans la décision Jean-Marc Simard c. Canada, [2002] A.C.I. no 265 (Q.L.), j'avais conclu que la Cour avait discrétion pour doser le montant imposé en fonction de la capacité de payer du contribuable, du degré de son intention coupable et de sa conduite antérieure. Cette décision a été portée en appel par l'intimée.

[24]          En attendant la décision de la Cour d'appel fédérale, je crois plus prudent pour l'instant de suivre la route empruntée par cette Cour d'appel dans une décision récente, soit dans l'affaire Chabot c. Canada, [2001] A.C.F. no 1829 (Q.L.). Dans cette décision, elle n'a pas évalué le degré de l'intention coupable du contribuable, mais l'a complètement dégagé de toute application du paragraphe 163(2) de la Loi au motif que le contribuable avait été pris dans un guet-apens. Il s'agissait d'un contribuable qui avait réclamé des crédits d'impôt pour dons de bienfaisance. En 1992, il faisait état d'un don de charité au montant de 10 000 $, pour lequel il avait en fait payé 2 800 $, et en 1993 et 1994 de dons de 15 000 $ et 8 000 $ alors qu'il avait payé en tout 2 500 $.

[25]          Je cite les paragraphes 40 et 41 :

40.            Je note enfin que M. Denis Lemieux, enquêteur à Revenu Canada, a expliqué à la Cour que les fondations en cause n'avaient elles-mêmes fait l'objet d'aucune poursuite parce qu'aux yeux du Ministère,

... elles s'étaient fait prendre dans un guet-apens. Pour eux, ça l'avait pris des proportions incommensurables. Elles se sont réellement ... ce ne sont pas des spécialistes pour ce qui est des oeuvres d'art. Elles ont trouvé l'offre alléchante. ...

C'est des fondations, il n'y avait pas d'intention criminelle de ces personnes-là. Ils se sont aperçus eux autres mêmes qu'ils étaient dans l'erreur.

(annexe 6, pages 25 et 26)

M. Chabot s'est aussi, à sa façon, fait « prendre dans un guet-apens » et il a, lui aussi, à sa façon, « trouvé l'offre alléchante » .

41.            Dans ces circonstances, je m'explique mal que Revenu Canada impose des pénalités à ces petits contribuables qui, de bonne foi, ont cherché à tirer profit d'un crédit d'impôt que Revenu Canada lui-même faisait miroiter à leurs yeux et qui, selon le guide, paraissait si facile à obtenir.

                                                                                                                (L'accentué est de moi.)

[26]          Je crois que l'appelant est lui aussi tombé dans un guet-apens. Ce n'est pas lui qui a mûri le stratagème. La proposition lui est venue d'un employé d'une institution fédérale, qu'il respecte. On ne lui a pas parlé d'actes frauduleux. On lui a dit qu'il était possible qu'il n'ait pas réclamé tous les retours d'impôt auxquels il avait droit. C'est une prémisse à laquelle bien des gens de bonne foi sont tentés de croire. Il reçoit un montant d'argent substantiel qui le surprend. On lui dit qu'il doit en remettre les deux tiers aux auteurs du remboursement. Il accepte sans trop réfléchir. Par la suite, il est englué dans une situation dont il peut difficilement se sortir.

[27]          L'intimée fait valoir qu'il n'est pas allé s'en ouvrir aux autorités fiscales. C'est vrai et il n'y a pas vraiment eu de réponse de la part de l'appelant à ce questionnement de l'intimée. On peut penser cependant que l'appelant pouvait difficilement aller consulter les autorités fiscales. Il a trop remis d'argent à l'auteur. Il sent confusément qu'il ne pourra pas récupérer cette part et qu'il devra la remettre ainsi que sa propre part aux autorités fiscales. Il est devenu une proie et a le comportement d'une proie. Il attend dans l'anxiété. Ou encore, on peut penser que l'appelant osait croire à la légitimité de l'opération. C'est une situation confuse où les sentiments ne sont pas clairs.

[28]          Il y a toujours une part de responsabilité dans les gestes posés à moins qu'il ne s'agisse d'un geste purement accidentel. C'est un geste grave que de remettre de l'argent aux préposés de l'État quand ils sont dans l'exécution de leurs fonctions.

[29]          Le paragraphe 163(2) de la Loi exige toutefois que le faux énoncé ou l'omission aient été faits sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde. En d'autres termes ce paragraphe requiert l'intention coupable. Je suis d'avis que le Tribunal doit être d'autant plus certain de cette intention coupable lorsque la pénalité qui s'ensuit est d'un montant extrêmement élevé et d'un effet particulièrement onéreux pour le contribuable, comme c'est le cas ici.

[30]          L'appelant a un bon métier, mais il n'est ni comptable ni juriste. D'après ce qu'il a dit lors de son témoignage et dans son avis d'appel, il a toujours produit ses déclarations d'impôt chaque année et a toujours voulu être en conformité avec la Loi. Cette affirmation n'a pas été contredite par l'intimée.

[31]          Je suis d'avis qu'au départ, le geste que l'appelant a posé relève de l'irréflexion, de l'inconscience ou de l'erreur de jugement et non de l'intention coupable. L'action de l'appelant ressort beaucoup plus au guet-apens qu'à une décision délibérée de sa part de contrevenir à la Loi. Par la suite, il a été englué dans cette situation de guet-apens.

[32]          Plus une personne sera instruite plus ce sera difficile pour elle d'éviter l'application du paragraphe 163(2) de la Loi, au motif de l'erreur de jugement dans des circonstances comme celles de la présente affaire. Mais ici, je suis d'avis que l'appelant n'a pas formé l'intention coupable requise par le paragraphe 163(2) de la Loi.

[33]          En conséquence, les appels sont accordés pour radier les pénalités et les intérêts y afférents.

Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour de décembre 2002.

« Louise Lamarre Proulx »

J.C.C.I.

No DU DOSSIER DE LA COUR :        2001-674(IT)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :                                 Réjean Villeneuve et Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                      Chicoutimi (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                    le 29 août 2002

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :         l'honorable juge Louise Lamarre Proulx

DATE DU JUGEMENT :                      le 10 décembre 2002

COMPARUTIONS :

Représentant de l'appelant :                André Hébert

Avocate de l'intimée :                          Me Annick Provencher

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

Pour l'appelant :

Pour l'intimée :                                       Morris Rosenberg

                                                                                Sous-procureur général du Canada

                                                                                Ottawa, Canada

2001-674(IT)I

ENTRE :

RÉJEAN VILLENEUVE,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appels entendus le 29 août 2002 à Chicoutimi (Québec) par

l'honorable juge Louise Lamarre Proulx

Comparutions

Représentant de l'appelant :                               André Hébert

Avocate de l'intimée :                                          Me Annick Provencher

JUGEMENT

                Les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1988, 1989, 1990, 1991 et 1992 sont accordés pour radier les pénalités et les intérêts y afférents, selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour de décembre 2002.

« Louise Lamarre Proulx »

J.C.C.I.

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