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Dossier : 2002-2708(EI)

ENTRE :

GIOVANNI GROPPINI,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

intimé,

et

3477126 CANADA INC.,

intervenante.

____________________________________________________________________

Appel entendu le 26 février 2003 à Montréal (Québec)

Devant : L'honorable juge suppléant J.F. Somers

Comparutions :

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

Agent de l'intimé :

Avocat de l'intervenante :

Emmanuelle Faulkner (stagiaire)

Me Marc Benoît

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JUGEMENT

          L'appel est admis et la décision rendue par le ministre est annulée selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 17e jour d'avril 2003.

« J.F. Somers »

J.S.C.C.I.


Référence : 2003CCI137

Date : 20030417

Dossier : 2002-2708(EI)

ENTRE :

GIOVANNI GROPPINI,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

intimé,

et

3477126 CANADA INC.,

intervenante.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge suppléant Somers, C.C.I.

[1]      Cet appel a été entendu, à Montréal (Québec), le 26 février 2003.

[2]      L'appelant interjette appel de la décision du ministre du Revenu national (le « Ministre » ) selon laquelle l'emploi exercé au cours de la période en litige, soit du 5 mai 2001 au 4 octobre 2001, auprès de Assen International, le payeur, n'était pas assurable pour le motif qu'il n'existait pas de relation employeur-employé entre lui et le payeur.

[3]      Le paragraphe 5(1) de la Loi sur l'assurance-emploi (la « Loi » ) se lit en partie comme suit :

            5.(1) Sous réserve du paragraphe (2), est un emploi assurable :

a)     un emploi exercé au Canada pour un ou plusieurs employeurs, aux termes d'un contrat de louage de services ou d'apprentissage exprès ou tacite, écrit ou verbal, que l'employé reçoive sa rémunération de l'employeur ou d'une autre personne et que la rémunération soit calculée soit au temps ou aux pièces, soit en partie au temps et en partie aux pièces, soit de toute autre manière;

[...]

[4]      Le fardeau de la preuve incombe à l'appelant. Ce dernier se doit d'établir, selon la prépondérance de la preuve, que la décision du Ministre est mal fondée en fait et en droit. Chaque cas est un cas d'espèce.

[5]      En rendant sa décision, le Ministre s'est fondé sur les présomptions de fait suivantes énoncées au paragraphe 21 de la Réponse à l'avis d'appel, lesquelles ont été admises ou niées par l'appelant :

a)          Les actionnaires du payeur étaient Johanne Vallée, France Vallée et Hughette Bastien avec chacune 30% des actions et Yves Martel et Jocelyn Caron avec chacun 5% des actions; (admis)

b)          Le payeur exploitait une entreprise de distribution d'un produit chimique nettoyant pour usage industriel; (nié)

c)          Au cours de la période en litige, l'appelant travaillait comme vendeur à commission pour le payeur; (nié)

d)          La rémunération de l'appelant s'élevait à 10% des ventes réalisées; (nié)

e)          Le payeur versait à l'appelant des avances sur les commissions à venir; (nié)

f)           L'appelant était remboursé pour les dépenses encourues dans le cadre de son travail; (admis)

g)          L'appelant n'était pas tenu de rendre ses services uniquement au payeur et pouvait promouvoir la vente d'autres produits auprès de sa clientèle; (nié)

h)          Au cours de la période en litige, l'appelant a reçu la somme de 9 610 $ du payeur; (nié)

i)           L'appelant n'avait pas d'horaire de travail à respecter, ni de territoire établi; (nié)

j)           L'appelant travaillait à partir de sa résidence, il n'avait pas de bureau à la place d'affaires du payeur; (nié)

k)          L'appelant n'était pas contrôlé par le payeur dans l'exécution de son travail. (nié)

[6]      Le payeur exploitait une entreprise de distribution d'un produit chimique nettoyant pour usage industriel. Les actionnaires, principalement les membres d'une même famille, étaient Johanne Vallée, France Vallée et Huguette Bastien qui détenaient chacune 30 % des actions et Yves Martel et Jocelyn Caron avec 5 % des actions chacun.

[7]      Au cours de la période en litige des relations d'affaires se sont établies entre l'appelant et le payeur. L'appelant affirme qu'il était un employé alors que les témoins du payeur affirment qu'il était un travailleur autonome.

[8]      Lors de son témoignage, Brigitte Cailloux, l'épouse de l'appelant, a déclaré qu'il recevait un salaire en plus d'une commission sur les ventes. Elle a affirmé que l'appelant ne travaillait pas à partir de sa résidence puisque celle-ci est située dans un quartier résidentiel et que selon un règlement municipal, un propriétaire n'avait pas le droit d'y exercer une profession ou un commerce.

[9]      L'appelant, selon ce témoin, quittait la résidence familiale tous les matins et allait chercher Johanne Vallée pour se rendre à la place d'affaires du payeur.

[10]     Brigitte Cailloux a affirmé qu'elle téléphonait à l'appelant deux ou trois fois par jour à la place d'affaires du payeur. Elle allait déposer des chèques à la banque à toutes les semaines. À l'endos de certains des chèques déposés en preuve sous la cote A-1 et datés entre 17 mai et le 21 septembre 2001 apparaît la signature de l'épouse de l'appelant. Sur ces chèques émis par le payeur et dont les montants varient, on y retrouve les mentions « commissions » , « avances » , « frais de déplacement » , « avances/voyages » et « frais de ventes » .

[11]     Seize de ces chèques portant les mentions « frais de vente » et « avance » sont au montant de 700 $; sur les autres, dont les montants varient entre 40,25 $ et 1 400 $, on y retrouve les mentions « frais de ventes » , « dépenses cellulaire » et « frais de déplacements et représentations » .

[12]     L'épouse de l'appelant a témoigné que Johanne Vallée lui avait déclaré que l'appelant recevait un salaire de 700 $ par semaine plus 5% de commission sur les ventes. Elle a ajouté, de plus, que l'appelant travaillait exclusivement pour le payeur.

[13]     En contre-interrogatoire, l'épouse de l'appelant a admis que l'appelant était un travailleur autonome en 2000. Dans la déclaration de revenu de l'appelant pour l'année 2000, on y retrouve la mention « travailleur autonome » .

[14]     L'appelant a témoigné qu'il a travaillé pour le payeur pendant la période en litige. Il a déclaré que selon une entente entre lui et le payeur, sa rémunération était 700 $ par semaine plus 5% de commission sur les ventes mais, selon lui, il n'a jamais reçu de commission. Il a admis que selon la première entente conclue entre lui et le payeur, il oeuvrait à titre de travailleur autonome et ce jusqu'en décembre 2000, ce qui est confirmé par sa déclaration de revenu préparée par Jocelyn Caron, actionnaire du payeur, dans laquelle il y est inscrit comme travailleur autonome.

[15]     Selon l'explication de l'appelant concernant la mention « avance » sur la majorité des chèques (pièce A-1), ainsi que la mention « salaire » sur certains autres, il a déclaré qu'il avait fait un emprunt de 300 $ du payeur et que ce dernier lui avait fait une déduction sur son salaire de 700 $. Il a également déclaré que l'inscription « avance » avait été ajoutée par le payeur sur les chèques lorsque ceux-ci lui ont été retournés.

[16]     Selon une deuxième entente verbale, l'appelant était payé 700 $ par semaine. À compter de janvier 2001, il a reçu du payeur des chèques dont les montants variaient, soit 200 $, 500 $, 300 $, 900 $ et 1 050 $.

[17]     L'appelant reconnaît que les clients dont les noms apparaissent aux pages 8 et 9 d'une lettre qu'il a fait parvenir au Développement des ressources humaines Canada en date du 26 juin 2002 n'étaient pas ceux du payeur et ajoute qu'il avait le droit, à titre de vendeur, de contacter des clients.

[18]     L'appelant admet qu'il est allé à Orlando, Floride, du 15 au 20 octobre 2001 aux frais du payeur, soit après la période en litige.

[19]     Richard Blouin, témoin pour la partie appelante, affirme qu'il a fait des livraisons à la place d'affaires du payeur durant l'année 2001 et qu'il y a vu l'appelant à au moins 13 occasions. Il a déclaré que l'appelant l'avait appelé pour faire des livraisons et que le payeur payait pour les services. Le payeur a eu sa place d'affaires à trois endroits différents : le premier bureau était situé sur la rue St-Denis, il a déménagé sur la rue Christophe Colomb pour finalement s'installer sur le boulevard Tricentenaire à Montréal.

[20]     Johanne Vallée témoigne qu'elle était vice-présidente chez le payeur. Elle dit qu'elle était employée avec sa mère et sa soeur chez le payeur.

[21]     Selon ce témoin le payeur a pris contact avec l'appelant en tant que vendeur; ce dernier avait ses propres clients.

[22]     Selon l'entente, l'appelant aurait demandé des avances car, d'après ce témoin, l'appelant était payé à commission. Le payeur n'avait pas de contrôle sur l'appelant. L'appelant n'avait pas d'horaire fixe et n'était pas surveillé.

[23]     Des avances ont été octroyées à l'appelant à sa demande car il avait des difficultés financières.

[24]     L'appelant était considéré comme agent manufacturier et, selon Johanne Vallée, il fixait lui-même les prix des produits.

[25]     En contre-interrogatoire, Johanne Vallée a reconnu que des chèques de 700 $ avaient été émis au nom de l'appelant et ce à la demande de celui-ci. Elle a admis que la notation « avance » a été inscrite sur les chèques après que ceux-ci aient été retournés au payeur pour des raisons de comptabilité.

[26]     Elle a déclaré qu'il n'y avait pas d'autres employés que les actionnaires. Ce témoin a déclaré que le payeur avait conclu une entente avec l'appelant en août 2000 à l'effet qu'il serait payé à commission. Elle a ajouté qu'il n'y a pas eu d'autre entente par la suite.

[27]     France Vallée, actionnaire de la compagnie, s'occupait de la comptabilité de l'entreprise. Selon elle, l'entente conclue entre le payeur et l'appelant lors de l'embauche de ce dernier était qu'il recevrait 10% des ventes réalisées. Elle a ajouté que cette entente avait été conclue à la suggestion de l'appelant. France Vallée a admis qu'il y a eu des avances octroyées à l'appelant et que les ventes ne couvraient pas le montant de celles-ci.

[28]     En contre-interrogatoire, France Vallée a mentionné que les produits étaient en « stock » en avril 2000 mais que ceux-ci avaient été mis sur le marché en juin 2001 après que la compagnie eut reçu des subventions.

[29]     Madame France Vallée savait que l'appelant était président de sa propre compagnie et qu'il était un agent manufacturier. Le payeur a fait des avances à l'appelant basées sur la confiance; ces avances ont été faites, selon France Vallée, à la demande de l'appelant.

[30]     Madame France Vallée reconnaît le projet de plan d'affaires de l'entreprise qui a été déposée en preuve sous la cote A-9. À la page 3 de ce document, sous la rubrique « Présentation des intervenants du projet » , apparaît le nom de l'appelant, Giovanni Groppini, ainsi que les noms de France Vallée, Johanne Vallée, Huguette Bastien, Yves Martel et Jocelyn Caron. À la page 4 de ce même document, sous la rubrique « Répartition des tâches » , l'appelant y est indiqué à titre de « Représentant des comptes majeurs » . Aux pages 14 et 15, il est mentionné que le payeur a établi le prix de vente des produits « par unidose » . Malgré ce qui est indiqué dans ce document quant aux prix, France Vallée affirme que l'appelant fixait les prix avec les clients, ce qui a été nié par l'appelant.

[31]     Le témoin a admis que la carte d'affaire déposée en preuve sous la cote A-10 a été émise par le payeur et que les noms de Johnny Groppini et Assen International, Montréal (Québec) y apparaissent, mais ajoute que celle-ci a été imprimée à la demande de l'appelant.

[32]     Elle a reconnu sa signature sur la lettre en date du 12 novembre 2001 adressée à tous les clients d'Assen International (pièce A-6) les avisant ce qui suit : « Soyez avisés que monsieur Johnny Groppini n'est pas à l'emploi de notre compagnie depuis le 22 octobre dernier... » .

[33]     Dans la cause 671122 Ontario Ltd. c. Sagaz Industries Canada Inc., [2001] A.C.S. No. 61, 2001 CSC 59, le juge Major de la Cour suprême du Canada s'exprime ainsi aux paragraphes 46, 47 et 48 de sa décision :

46         À mon avis, aucun critère universel ne permet de déterminer, de façon concluante, si une personne est un employé ou un entrepreneur indépendant. ... Je partage en outre l'opinion du juge MacGuigan lorsqu'il affirme - en citant Atiyah, op. cit., p. 38, dans l'arrêt Wiebe Door, p. 563 - qu'il faut toujours déterminer quelle relation globale les parties entretiennemt entre elles :

            [TRADUCTION] [N]ous doutons fortement qu'il soit encore utile de chercher à établir un critère unique permettant d'identifier les contrats de louage de services [...] La meilleure chose à faire est d'étudier tous les facteurs qui ont été considérés dans ces causes comme des facteurs influant sur la nature du lien unissant les parties. De toute évidence, ces facteurs ne s'appliquent pas dans tous les cas et n'ont pas toujours la même importance. De la même façon, il n'est pas possible de trouver une formule magique permettant de déterminer quels facteurs devraient être tenus pour déterminants dans une situation donnée.

47         Bien qu'aucun critère universel ne permette de déterminer si une personne est un employé ou un entrepreneur indépendant, je conviens avec le juge MacGuigan que la démarche suivie par le juge Cooke dans la décision Market Investigation, ..., est convaincante. La question centrale est de savoir si la personne qui a été engagée pour fournir les services les fournit en tant que personne travaillant à son compte. Pour répondre à cette question, il faut toujours prendre en considération le degré de contrôle que l'employeur exerce sur les activités du travailleur. Cependant, il faut aussi se demander, notamment, si le travailleur fournit son propre outillage, s'il engage lui-même ses assistants, quelle est l'étendue de ses risques financiers, jusqu'à quel point il est responsable des mises de fonds et de la gestion et jusqu'à quel point il peut tirer profit de l'exécution de ses tâches.

48.        Ces facteurs, il est bon de le répéter, ne sont pas exhaustifs et il n'y a pas de manière préétablie de les appliquer. Leur importance relative respective dépend des circonstances et des faits particuliers de l'affaire.

[34]     Dans la cause sous-étude, la preuve a bien établi qu'il existait une relation contractuelle entre l'appelant et le payeur.

[35]     Il s'agit donc de déterminer si l'appelant était un travailleur autonome ou un employé du payeur pendant la période en litige.

[36]     L'appelant et son épouse ont admis bien honnêtement que l'appelant était un travailleur autonome lors de sa prestation de services chez le payeur durant l'année 2000 et ajoutent qu'antérieurement il était en affaires pour lui-même.

[37]     Les parties étaient liées par une entente verbale. L'appelant affirme qu'il était un employé durant l'année 2001, alors que le payeur affirme qu'il était un travailleur autonome; il y donc une preuve contradictoire.

[38]     L'appelant avait le fardeau de la preuve; il devait établir, selon la prépondérance, de la preuve que la décision du Ministre était mal fondée en fait et en droit.

[39]     Puisqu'il y avait une entente verbale liant les parties il est plus difficile d'établir la nature des relations entre l'appelant et le payeur.

[40]     L'appelant a nié toutes allégations apparaissant à la Réponse à l'avis d'appel, sauf les sous paragraphes 21 a) et f).

[41]     La preuve n'a pas été faite de façon bien cohérente ou complète; cependant on pouvait déceler la position des parties, bien qu'elle soit contradictoire.

[42]     L'appelant et son épouse ont affirmé que l'appelant ne travaillait pas à la maison mais bien à la place d'affaires du payeur.

[43]     Selon l'appelant, il reconduisait Johanne Vallée au bureau à tous les matins, ce qui a nié par cette dernière, déclarant plutôt que l'appelant l'avait reconduite au bureau seulement à deux occasions.

[44]     Richard Blouin, témoin de l'appelant, affirme qu'il a fait des livraisons à la place d'affaires du payeur à plusieurs occasions et qu'il a vu l'appelant à un bureau situé à la place d'affaires du payeur au moins à 13 occasions. Son témoignage sur cet aspect de la preuve corrobore les témoignages de l'appelant et de son épouse.

[45]     Les témoins du payeur n'ont pas corroboré l'affirmation voulant que l'appelant travaillait à partir de sa résidence.

[46]     Puisqu'il existe une preuve contradictoire quant à la nature de l'entente, il faut s'en remettre à la preuve documentaire.

[47]     Des chèques ont été émis au nom de l'appelant au montant de 700 $ chacun sur une base régulière pendant la période en litige. France Vallée qui s'occupait de la comptabilité a admis ce fait mais a déclaré qu'il s'agissait d'avances.

[48]     Des chèques pour différents montants et portant la mention « frais de déplacement » ou « frais de vente » ont également été émis. Le 16 août 2001 un chèque au montant de 700 $ a été émis au nom de l'appelant avec la notation salaire/avance et le chèque du 31 août 2001 au même montant portait la notation « salaire/avance commissions » .

[49]     Ces notations sur les chèques corroborent les témoignages de l'appelant et son épouse à l'effet que les revenus de l'appelant étaient sur la base de salaire et commission.

[50]     Les témoins du payeur ont nié les prétentions de l'appelant quant à la base de ses revenus. Le payeur n'a produit aucun document comptable ou autre pour établir les sources de revenu ou de dépenses de l'entreprise. Ces témoins ont affirmé que seulement les actionnaires étaient des employés. La liste de paie n'a pas été déposée en preuve.

[51]     Dans le plan d'affaires préparé par le payeur et déposé en preuve sous la cote A-9, sous la rubrique « Présentation des intervenants » on peut y lire ce qui suit :

L'équipe Assen est représentée par les intervenants suivants : France Vallée, Johanne Vallé, Huguette Bastien, Yves Martel, Jocelyn Caron et [Johny] Giovanni Groppini.

(Il est à noter que dans ce document le nom Johny est rayé et remplacé par Giovanni.)

[52]     À la page 4 de ce même projet sous la rubrique « Répartition des tâches » , le nom de Johnny Groppini y est inscrit comme représentant des comptes majeurs. Les tâches des actionnaires y sont également décrites.

[53]     Le payeur a fait parvenir à tous ses clients un avis en date du 19 novembre 2001 (pièce A-6) qui se lit en partie comme suit :

SOYEZ AVISÉS QUE MONSIEUR JOHNNY GROPPINI N'EST PLUS À L'EMPLOI DE NOTRE COMPAGNIE DEPUIS LE 22 OCTOBRE DERNIER ET N'A AUCUNE AUTORISATION DE SE PRÉSENTER COMME TEL...

Il est à noter que cet avis est adressé aux clients du payeur et non aux clients de l'appelant.

[54]     Des cartes d'affaires préparées par le payeur ont été déposées en preuve, sous les cotes A-7 et A-10, identifiant l'appelant aux opérations du payeur.

[55]     Il est possible que l'appelant avait ses clients puisqu'il était en affaires avant l'année 2001, mais le payeur avait les siens, tel qu'en fait foi la lettre qu'il leur a envoyée (pièce A-6). Il n'y a aucune preuve que l'appelant travaillait pour un autre employeur que le payeur pendant la période en litige.

[56]     La propriété des outils était la propriété du payeur et non de l'appelant. Par le témoignage d'un témoin indépendant, il a été établi que l'appelant était présent à la place d'affaire du payeur. Il n'existe aucune preuve que l'appelant travaillait à partir de sa résidence. Madame Johanne Vallée a admis que l'appelant l'a conduite à la place d'affaires du payeur à au moins deux occasions.

[57]     Il n'existe aucune preuve que l'appelant avait un horaire à respecter ou un territoire à couvrir, ce qui pourrait expliquer le fait que l'appelant, en tant que vendeur, devait se déplacer. D'ailleurs des frais de déplacement ont été payés par le payeur.

[58]     La preuve ne nous permet pas de conclure que l'appelant avait des chances de profit ou risques de perte; il a reçu sur une base régulière un chèque de 700 $ à titre d'avance ou de salaire.

[59]     L'appelant était intégré aux opérations du payeur; il s'agissait de l'entreprise du payeur et non celle de l'appelant. L'appelant, reconnu pour ses aptitudes de vendeur, avait des clients mais le payeur a admis qu'il avait aussi ses propres clients tels qu'en fait foi l'avis envoyé à ses clients annonçant que l'appelant n'était plus à son emploi.

[60]     La preuve a démontré que le payeur avait un certain contrôle sur les activités de l'appelant. En tant que vendeur il était normal que l'appelant s'absente du bureau fréquemment et qu'il n'avait pas d'horaire fixe. Le payeur déterminait le prix des produits tel qu'indiqué aux pages 14 et 15 du projet (pièce A-). En déterminant le prix des produits, le payeur exerçait un certain contrôle sur l'appelant. Les tâches de l'appelant ont été établies dans ledit projet préparé par le payeur (pièce A-9).

[61]     Afin de distinguer le contrat de louage de services du contrat d'entreprise, il faut examiner l'ensemble des divers éléments qui composent la relation entre les parties, soit a) le degré de contrôle; b) la propriété des outils; c) les chances de profit ou les risques de perte; et d) le degré d'intégration (Wiebe Door Services Ltd. c. M.R.N., [1986] 3 C.F. 553).

[62]     D'après l'ensemble de la preuve, dont les éléments qui la composent, nous pouvons conclure qu'il existait entre les parties une relation employeur-employé.

[63]     Tenant compte de toutes les circonstances, la Cour conclut que l'emploi de l'appelant était assurable au sens de la Loi pendant cette période, puisque l'appelant était lié au payeur par un contrat de louage de services en vertu de l'alinéa 5(1)a) de la Loi.

[64]     L'appel est admis et la décision du Ministre est annulée.

Signé à Ottawa, Canada, ce 17e jour d'avril 2003.

« J.F. Somers »

J.S.C.C.I.


RÉFÉRENCE :

2003CCI137

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2002-2708(EI)

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Giovanni Groppini et M.R.N. et

3477126 Canada Inc.

LIEU DE L'AUDIENCE :

Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE

Le 26 février 2003

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :

L'honorable juge suppléant

J.F. Somers

DATE DU JUGEMENT :

le 17 avril 2003

COMPARUTIONS :

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

Pour l'intimé :

Emmanuelle Faulkner (stagiaire)

Pour l'intervenante :

Me Marc Benoît

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER:

Pour l'appelant :

Nom :

Étude :

Pour l'intimé :

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

Pour l'intervenante :

Nom :

Me Marc Benoît

Étude :

McCarthy Tétrault

Montréal (Québec)

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