Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Dossier : 2005-13(IT)I

ENTRE :

MYRON ROZUMIAK,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 16 décembre 2005

à Vancouver (Colombie-Britannique)

Devant : L'honorable juge D. W. Beaubier

Comparutions :

Représentant de l'appelant :

M. Stuart Crown

Avocats de l'intimée :

Me John Gibb-Carsley accompagné de

M. Kevin MacGillvary, stagiaire en droit

____________________________________________________________________

JUGEMENT

L'appel de la nouvelle cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 2002 est accueilli, et la nouvelle cotisation est renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation conformément aux motifs du jugement ci-joints.

Les dépens taxables sont adjugés à l'appelant en ce qui concerne l'appel.

Signé à Saskatoon (Saskatchewan), ce 28e jour de décembre 2005.

« D. W. Beaubier »

Juge Beaubier

Traduction certifiée conforme

ce 21e jour de février 2007.

Mario Lagacé, jurilinguiste


Référence : 2005CCI811

Date : 20051228

Dossier : 2005-13(IT)I

ENTRE :

MYRON ROZUMIAK,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Beaubier

                                                                          

[1]      Cet appel interjeté sous le régime de la procédure informelle a été entendu à Vancouver (Colombie-Britannique) le 16 décembre 2005. L'appelant a témoigné et a appelé à témoigner son ancien superviseur, Scott Galloway, sa fille, Tanya Carter, et sa femme, Dianne.

[2]      La cotisation découle de l'emploi de l'appelant aux termes d'un contrat avec l'Administration portuaire de Vancouver (l' « APV » ) à compter de 2002. Les points en litige sont exposés aux paragraphes 12 à 19 de la réponse à l'avis d'appel. Ces paragraphes se lisent comme suit :

                   [TRADUCTION]

12.        Dans l'avis d'opposition, l'appelant a demandé le droit d'inclure des primes d'assurance-maladie de 9 585 $, payées pour son compte par l'APV, dans le calcul de ses crédits d'impôt non remboursables pour l'année d'imposition 2002.

13.        En réponse à l'avis d'opposition, le ministre a établi une nouvelle cotisation à l'égard de l'appelant et a délivré un avis de nouvelle cotisation, daté du 12 octobre 2004, dans lequel il accordait à l'appelant des déductions de 3 165 $ en ce qui concerne des frais afférents à un véhicule, et incluait dans le calcul des crédits d'impôt non remboursables bruts 9 585 $ pour les primes d'assurance-maladie payées pour le compte de l'appelant par l'APV.

14.        Pour établir cette nouvelle cotisation à l'égard de l'appelant, le 12 octobre 2004, le ministre s'est fondé sur les hypothèses suivantes :

a)          En 2002, l'appelant a reçu de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada un revenu d'emploi de 288 $;

b)          En 2002, l'appelant a reçu de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada d'autres revenus d'emploi de 288 $ au titre de primes d'assurance-maladie;

c)          En 2002, l'appelant a reçu de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada d'autres revenus d'emploi de 105,84 $ au titre de primes d'assurance-vie;

d)          Le 1er novembre 2001, l'appelant et l'APV ont signé un contrat (le « contrat » ) selon lequel l'appelant allait exercer les fonctions de directeur pour le Trade and Development (U.S.) Midwest Office (le « bureau de Chicago » ) de l'APV;

e)          Le contrat visait la période commençant le 12 novembre 2001 et se terminant le 11 novembre 2004;

f)           L'appelant a commencé à exercer ses fonctions au bureau de Chicago en avril 2002;

g)          Aux termes du contrat, l'APV s'attendait à ce que l'appelant demeure et vive à Chicago à partir d'avril 2002, et ce, jusqu'à novembre 2004;

h)          L'appelant a reçu de l'APV 120 898 $ pour son année d'imposition 2002;

Frais afférents à un véhicule

i)           Pendant l'année d'imposition 2002, l'appelant a reçu une allocation de 4 572 $ pour frais afférents à un véhicule;

j)           Pour l'année d'imposition 2002, l'appelant pouvait demander des déductions de 3 165,31 $ pour les frais afférents à l'utilisation du véhicule dans le cadre de son emploi;

Primes d'assurance-maladie

k)          Pour l'année d'imposition 2002, l'APV a payé 9 585 $ en primes d'assurance-maladie pour le compte de l'appelant;

l)           Ces 9 585 $ sont déductibles dans le calcul des crédits d'impôt non remboursables de l'appelant pour l'année d'imposition 2002;

Autres montants

m)         Les frais de location de 20 410 $ payés par l'APV pour le compte de l'appelant en 2002 se rapportaient à des dépenses personnelles engagées par ce dernier;

n)          Les frais de services publics, de stationnement et de téléphone d'une somme de 9 414 $ payés par l'APV pour le compte de l'appelant en 2002 se rapportaient à des dépenses personnelles engagées par ce dernier.

B.         QUESTIONS EN LITIGE

15.        Les questions en litige sont les suivantes :

a)          Est-ce que l'appelant a droit à des déductions en ce qui concerne les frais de location de 24 100 $ en vertu des dispositions du paragraphe 6(6) de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. (1985), ch.1 (5e suppl.), dans sa version modifiée (la « Loi » )?

b)          Est-ce que l'appelant a droit à des déductions en ce qui concerne les frais de services publics, de stationnement et de téléphone de 9 414 $ en vertu des dispositions du paragraphe 6(6) de la Loi?

C.         DISPOSITIONS LÉGISLATIVES INVOQUÉES

16.        Il invoque les articles 3, 5, 6, 8 et 248, et l'alinéa 18(1)h) de la Loi.

D.         MOYENS INVOQUÉS ET CONCLUSIONS RECHERCHÉES

17.        Il soutient respectueusement que l'appelant n'a pas le droit de déduire du revenu qu'il a reçu de l'APV pour l'année 2002 des frais de location de 24 100 $ ni des frais de services publics, de stationnement et de téléphone de 9 414 $ qui avaient été déboursés par l'APV pour le compte de l'appelant, et ce, parce que le travail que l'appelant accomplissait pour l'APV au bureau de Chicago n'était pas de nature temporaire au sens du paragraphe 6(6) de la Loi.

18.        Il soutient aussi que le ministre a eu raison d'inclure dans le revenu de l'appelant les frais de location de 24 100 $ et les frais de services publics, de stationnement et de téléphone de 9 414 $ payés par l'APV pour le compte de l'appelant en application des articles 3, 5 et 6 de la Loi.

19.        Il soutient aussi que le ministre a eu raison d'inclure dans le revenu de l'appelant les frais de location de 24 100 $ et les frais de services publics, de stationnement et de téléphone de 9 414 $ payés par l'APV pour le compte de l'appelant, et que ces dépenses étaient des dépenses personnelles et ne sont pas déductibles en vertu des dispositions de l'article 8 de la Loi.

[3]      Les hypothèses 14 a) à l) inclusivement n'ont pas été réfutées. Les hypothèses 14 m) et n) sont en litige.

[4]      La question est de savoir si les montants décrits aux hypothèses 14 m) et n) sont exclus du calcul du revenu de l'appelant en application du paragraphe 6(6) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ), qui se lit comme suit :

(6) Malgré le paragraphe (1), un contribuable n'inclut, dans le calcul de son revenu tiré, pour une année d'imposition, d'une charge ou d'un emploi, aucun montant qu'il a reçu, ou dont il a joui, au titre, dans l'occupation ou en vertu de sa charge ou de son emploi et qui représente la valeur des frais -- ou une allocation (n'excédant pas un montant raisonnable) se rapportant aux frais -- qu'il a supportés pour :

a) sa pension et son logement, pendant une période donnée :

(i) soit sur un chantier particulier qui est un endroit où le travail accompli par lui était un travail de nature temporaire, alors qu'il tenait ailleurs et comme lieu principal de résidence, un établissement domestique autonome :

(A) d'une part, qui est resté à sa disposition pendant toute la période et qu'il n'a pas loué à une autre personne,

(B) d'autre part, où on ne pouvait raisonnablement s'attendre à ce qu'il retourne quotidiennement étant donné la distance entre l'établissement et le chantier [...]

[5]      M. Galloway a témoigné que l'appelant avait été embauché puis envoyé à Chicago par l'APV parce que l'APV voulait qu'un Canadien ouvre un bureau pour elle où il consacrerait tout son temps à mener des recherches et à solliciter des contrats pour l'APV dans le but d'amener des activités au port de Vancouver et de faire transporter la marchandise par voie ferrée de Vancouver à Chicago, qui est un point de passage vers un important marché aux États-Unis. Selon M. Galloway, il s'agissait d'un essai dans le but de sonder le terrain. Au moment de l'embauche, M. Rozumiak avait 29 ans d'expérience du transport des marchandises un peu partout au Canada et dans la région du port de Vancouver, et ce, principalement avec la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada

[6]      Pour que l'appelant se rende aux États-Unis, l'APV a obtenu pour l'appelant un visa américain délivré pour des périodes de trois ans à la fois. L'APV a payé les frais de location de l'appartement et d'assurance médicale de l'appelant, sans toutefois payer sa nourriture quotidienne ou ses repas, sauf dans les cas des repas d'affaires

[7]      L'appelant a conservé son domicile à Richmond et a continué de payer les frais y afférents. La fille et la petite-fille de l'appelant ont emménagé dans une partie du domicile. La femme de l'appelant a accompagné ce dernier à Chicago. Les affirmations suivantes s'appliquent au séjour de l'appelant aux États-Unis :

1.        Il n'a pas annulé son compte avec la Banque Royale, mais a fait remplacer son adresse postale par son adresse à Chicago;

2.        Il a obtenu un permis de conduire de l'Illinois;

3.        Il a emporté sa voiture avec lui et l'a fait immatriculer et assurer aux États-Unis;

4.        Il a emmené sa femme avec lui aux États-Unis;

5.        Il a loué un appartement aux frais de l'APV. Au début, il s'agissait d'un appartement meublé puis, lorsque cette entente a été annulée, l'appelant a emménagé avec sa femme dans un appartement non meublé, toujours aux frais de l'APV, le tout au cours de l'année 2002;

6.        Il a changé son abonnement à un club de golf en Colombie-Britannique pour devenir membre non résident, mais ne s'est pas abonné à aucun club de golf ni autre club aux États-Unis;

7.        Il n'a fait faire aucun autre changement d'adresse en ce qui concerne son adresse postale au Canada et n'a pas fait changer son numéro de téléphone;

8.        Sa femme et lui ne se sont pas fait de nouveaux amis pendant leur séjour à Chicago.

[8]      En 2002, l'appelant a passé 203 jours aux États-Unis et 162 jours au Canada.

[9]      La question, pour reprendre les termes du paragraphe 6(6), est de savoir si l'appelant a reçu un montant, lorsqu'il vivait à Chicago en 2002, pour sa pension et son logement sur un chantier particulier où le travail accompli par lui était de nature temporaire. L'avocat de l'intimée a accordé une attention particulière au fait que la « pension » quotidienne de l'appelant n'était pas payée par l'APV.

[10]     Le contrat entre l'appelant et l'APV n'avait pas été établi pour une période d'emploi d'une durée indéterminée. De plus, l'APV et M. Rozumiak voyaient tous deux le travail de M. Rozumiak comme étant temporaire, un essai dans le but de sonder le terrain. M. Rozumiak n'avait jamais signé un tel contrat auparavant, et l'APV n'avait pas de bureau aux États-Unis. Le contrat a été modifié, en 2004, pour qu'il puisse être en vigueur une année de plus, jusqu'à ce que le visa de M. Rozumiak soit périmé, et c'est à la fin de cette période que le bureau a fermé pour cause d'échec. Toutefois, en 2002, aucune des deux parties n'avait prévu que les choses se passeraient ainsi.

[11]     Pour ces motifs, la Cour conclut que le travail que l'appelant accomplissait était de nature temporaire lorsque le contrat initial a été signé. Son travail était de sonder le marché. Il était un homme d'expérience qui était originaire de Vancouver et qui avait le savoir nécessaire pour sonder le marché pour le compte de l'APV. Le contrat pouvait être résilié par l'une des deux parties moyennant un préavis de trois mois. Chicago n'était pas le lieu où l'APV exerçait habituellement ses activités, et le bureau que l'appelant avait loué pour l'APV ne l'était pas non plus. L'appelant était le seul employé qui travaillait à cet endroit, et il voyageait en dehors de la région de Chicago environ une semaine chaque mois. L'entreprise qui louait le bureau à l'appelant avait des établissements dans d'autres grandes villes américaines, et M. Rozumiak pouvait se servir de ces installations lorsqu'il était sur la route.


[12]     En 2002, l'appelant s'est conformé aux exigences du paragraphe 6(6). L'appel est accueilli. Les dépens taxables sont adjugés à l'appelant en ce qui concerne l'appel.

       Signé à Saskatoon (Saskatchewan), ce 28e jour de décembre 2005.

« D. W. Beaubier »

Juge Beaubier

Traduction certifiée conforme

ce 21e jour de février 2007.

Mario Lagacé, jurilinguiste


RÉFÉRENCE :                                   2005CCI811

N º DU DOSSIER DE LA COUR :       2005-13(IT)I

INTITULÉ :                                       Myron Rozumiak c. La Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                    Vancouver (Colombie-Britannique)

DATE DE L'AUDIENCE :                  Le 16 décembre 2005

MOTIFS DU JUGEMENT :               L'honorable juge D.W. Beaubier

DATE DU JUGEMENT :                    Le 28 décembre 2005

COMPARUTIONS :

Représentant de l'appelant :

M. Stuart Crown

Avocat de l'intimée :

Stagiaire en droit :

Me John Gibb-Carsley

M. Kevin MacGillvary

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

       Pour l'appelant :

                   Nom :                             

                   Cabinet :

       For the Respondent:                    John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

                                                        Ottawa, Canada

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.