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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Date: 20030409

Dossiers: 2002-3147(EI)

ENTRE :

PROBED MEDICAL TECHNOLOGIES INC.,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

ROGER JOHN MAWDSLEY,

intervenant.

____________________________________________________________________

Appel entendu sur preuve commune avec l'appel de Probed Medical

Technologies Inc., (2002-3145(CPP)) le 14 janvier 2003

à Vancouver (Colombie-Britannique).

Devant : l'honorable juge T. E. Margeson

Comparutions :

Représentant de l'appelante :                Peter W. Short

Représentante de l'intimé :                   Selena Sit (stagiaire)

Pour l'intervenant :                     l'intervenant lui-même

____________________________________________________________________


JUGEMENT

          L'appel interjeté conformément au paragraphe 103(1) de la Loi sur l'assurance-emploi est accueilli et la décision du ministre du Revenu national rendue en appel en vertu de l'article 91 de la Loi est modifiée en tenant compte du fait que le travailleur, Roger Mawdsley, exerçait un emploi assurable en vertu du contrat de louage de services du 15 janvier 2001 au 14 septembre 2001, qu'il a touché des gains assurables, que le ministre devra calculer sur la base d'un montant de 3 000$ par mois pour les trois premiers mois et de 5 000$ par mois pour les cinq mois suivants et auxquels s'ajoute une paie de vacances de six semaines, devant être versés en vertu de l'article 2 du Règlement sur la rémunération assurable et la perception des cotisations.

Signé à Ottawa, Canada, le 21 janvier 2003.

« T. E. Margeson »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 4e jour de mars 2005.

Mario Lagacé, réviseur


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Référence: 2003CCI107

Date: 20030409

Dossiers: 2002-3147(EI)

2002-3145(CPP)

ENTRE :

PROBED MEDICAL TECHNOLOGIES INC.,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

ROGER JOHN MAWDSLEY,

intervenant.

____________________________________________________________________

          Comparutions :

Représentant de l'appelante :                          Peter W. Short

Représentante de l'intimé :                             Selena Sit (stagiaire)

Pour l'intervenant :                              l'intervenant lui-même

____________________________________________________________________

MOTIFS DU JUGEMENT

(Rendus oralement à l'audience à Vancouver (Colombie-Britannique)

le 14 janvier 2003 et révisés à

Ottawa (Ontario) le 9 avril 2003.)

Le juge Margeson, C.C.I.

[1]      L'affaire dans laquelle la Cour doit rendre une décision aujourd'hui est celle de Probed Medical Technologies Inc. et le ministre du Revenu national (le « ministre » ). Les questions que la Cour doit trancher en l'espèce sont de savoir si le prétendu travailleur, Roger John Mawdsley, avait un emploi assurable en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi (la « Loi » ), s'il avait un emploi ouvrant droit à pension en vertu du Régime de pensions du Canada (le « Régime » ), et quel était le montant de ses gains ouvrant droit à pension au cours de la période du 15 janvier 2001 au 14 septembre 2001 (la « période » ).

[2]      L'appelante soutient que le travailleur était bénévole. L'intimé et le travailleur soutiennent que celui-ci n'était pas bénévole mais un employé engagé en vertu d'un contrat de louage de services pendant la période pertinente moyennant un salaire mensuel de 3 000 $ pendant les trois premiers mois débutant le 15 janvier 2001 et de 5 000 $ pendant les cinq mois suivants jusqu'au 14 septembre 2001, soit la période en question.

[3]      La question la plus importante en l'espèce est celle de la crédibilité. La crédibilité occupe une place importante dans toutes les causes, mais elle est particulièrement importante en l'espèce, car le témoignage offert par le témoin principal de l'appelante et celui du travailleur sont complètement opposés. Si l'on accepte le témoignage de l'un, nous devons rejeter le témoignage de l'autre sur le point essentiel, celui de savoir s'il y avait contrat de louage de services. Le travailleur a affirmé qu'il était employé en vertu d'un contrat de louage de services et l'appelante soutient qu'il était un travailleur bénévole et qu'il ne serait rémunéré que s'il réussissait à obtenir du financement pour l'appelante, ce qui n'a pas eu lieu.

[4]      L'appelante et le prétendu travailleur étaient également en désaccord sur la question de savoir si un financement avait été obtenu. Le travailleur soutient qu'un financement a été obtenu et que, même si l'entente prévoyait qu'il ne serait rémunéré que s'il obtenait ce financement, la société a effectivement obtenu un financement et que, par conséquent, il devrait être payé.

[5]      Dans la réponse à l'avis d'appel (la « réponse » ), le ministre s'est fondé sur certains faits avec lesquels l'appelante était d'accord, sauf en ce qui concerne certains points qui sont énumérés ci-après.

[6]      En ce qui a trait à l'alinéa 4(c) de la réponse, l'appelante n'était pas tout à fait d'accord avec l'énoncé suivant : [traduction] « le ou vers le 14 décembre 2000, l'appelante a offert à M. Mawdsley d'occuper le poste de chef de la direction à compter du 15 janvier 2001 » . Le représentant de l'appelante a affirmé que quelque chose de cette nature a peut-être été offert.

[7]      En ce qui a trait à l'alinéa (d), [traduction] « l'offre présentée par l'appelante à M. Mawdsley prévoyait un salaire mensuel de 3 000,00 $ pendant les trois premiers mois et de 5 000,00 $ par la suite. » L'appelante a totalement nié cet énoncé.

[8]      En ce qui concerne l'alinéa (e), le seul changement proposé par le témoin aux faits allégués par le ministre était de remplacer le mot [traduction] « activités » par [traduction] « tâches » .

[9]      Ce témoin était d'accord avec toutes les autres allégations sauf le paragraphe (l), dans lequel le ministre allègue qu'au cours de la période, l'appelante a versé la somme de 7 943,17 $ à M. Mawdsley à titre de salaire. Il a affirmé que cette somme devrait plutôt être portée aux [traduction] « dépenses différées » .

[10]     Il était d'accord avec l'alinéa (n), dans lequel il est indiqué qu'une certaine décision a été rendue par un autre organisme que cette cour, mais cela n'est pas pertinent en l'espèce.

[11]     Pour que l'action de l'appelante puisse réussir, elle doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, que le ministre, en établissant que le travailleur avait un emploi assurable et ouvrant droit à pension au cours de la période en question, avait rendu une décision erronée. C'est l'appelante qui a le fardeau de prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu'il ne s'agissait pas d'un emploi assurable, compte tenu de la preuve déposée et des présomptions énoncées par le ministre dans la réponse.

[12]     Cependant, il ne s'agit, malgré tout, que d'une question de crédibilité. Si la Cour retient le témoignage offert par le témoin de l'appelante, alors il n'y avait ni entente ni contrat de louage de services. Le représentant de l'appelante argue que la société avait préparé une proposition (pièce R-5), mais qu'il ne s'agissait que d'un projet qui n'a jamais été signé ni exécuté. Si le projet de proposition avait été mis en oeuvre, les conditions y prévues auraient été les mêmes que celles d'une proposition finale. Le représentant de l'appelante a affirmé que le projet de proposition n'a jamais été mis en oeuvre, car il dépendait de l'obtention par le travailleur du financement qui permettrait à la société, qui de toute évidence connaissait de grandes difficultés financières, de recevoir des fonds. C'est ce qu'il a affirmé.

[13]     Il a déclaré que l'appelante n'a jamais reçu de salaire. Lorsqu'il a témoigné, la Cour lui a posé des questions à ce sujet et elle lui a demandé d'expliquer, vu sa thèse, le contenu de la pièce R-3 et de la pièce R-4. La pièce R-3 est l'annexe où divers montants d'argent sont inscrits, lesquels montants ont été versés au travailleur sous forme de chèques au cours de la période du 8 février au 24 août. Les chèques sont également joints. Si le sommaire est exact, alors son contenu est très informatif et très significatif. Il est significatif, car, comme la représentante de l'intimé l'a souligné, les paiements semblent couvrir des périodes fixes de deux semaines : 8 février, 23 février, 2 mars et ainsi de suite. Cela semble correspondre au témoignage du travailleur, M. Mawdsley, qu'il s'attendait à être payé toutes les deux semaines. Ce serait la façon normale de recevoir une paie même s'il a affirmé qu'il devait être payé selon un salaire mensuel de 3 000 $ pendant les cinq premiers mois et de 5 000 $ par la suite. Au cours de son témoignage, il a affirmé qu'il s'attendait à être rémunéré toutes les deux semaines.

[14]     De toute façon, même s'il ne s'attendait pas à être rémunéré, nous devons en déduire quelque chose sur la manière dont les paiements ont été effectués. Ils semblent avoir été faits sur une base périodique. Les paiements ne semblent pas avoir été effectués en vue de rembourser les dépenses de quelqu'un, car tous les montants sont similaires, soit de 500 $ et 1 000 $.

[15]     Seul le montant de quelques paiements différait et ces montants pourraient raisonnablement être considérés comme des remboursements de dépenses. L'un d'eux était de 605 $, mais il s'agissait du montant du loyer. On peut se demander pourquoi une société paierait le loyer de quelqu'un. Cela peut difficilement être considéré comme une dépense pour la société. De toute évidence, il s'agissait d'une dépense personnelle. On doit donc se demander : si le travailleur n'était pas un employé, la société paierait-elle son loyer? La seule raison pour laquelle la société agirait ainsi serait d'effectuer un paiement en son nom, comme partie de son salaire, afin de payer une de ses dépenses personnelles et non une dépense de la société.

[16]     L'appelante demande à cette cour de croire que tous les montants indiqués dans la pièce R-3 étaient des sommes versées en remboursement de dépenses engagées par le travailleur pour le compte de la société. Toutefois, cela est tout à fait déraisonnable puisque les chèques eux-mêmes et le sommaire indiquent ce que les montants représentaient. Le chèque numéro 0340 daté du 8 février porte la mention [traduction] « 500 $ avance sur la paie » . Le chèque numéro 0360 daté du 23 février porte la mention [traduction] « 500 $ avance de salaire » , qui représente justement une partie du montant que le travailleur devait recevoir sur une base mensuelle, soit 3 000 $ et 5 000 $, mais il a affirmé qu'il était disposé à attendre, car il savait que la société connaissait des difficultés financières. La liste se poursuit et les seuls montants différents, les seuls montants qui ne sont pas des multiples de 500 $ au cours des périodes sont les montants susmentionnés, soit 395 $ le 29 juin et 605 $ le 29 juin, montants qui ont été versés au propriétaire du travailleur pour payer son loyer.

[17]     Le représentant de l'appelante aimerait que la Cour conclût que ces montants correspondaient à des dépenses, mais il a été incapable de présenter un seul élément de preuve à la Cour sur le montant total des dépenses engagées par ce travailleur au cours de cette période. Il ne disposait d'aucun registre indiquant que les montants versés à M. Mawdsley l'étaient en remboursement de dépenses engagées pour le compte de la société au cours de la période. La seule preuve à cet égard a été déposée par le travailleur lui-même. Cette preuve est insuffisante, mais c'est la meilleure preuve qui ait été présentée.

[18]     Le travailleur a déposé des documents qui étaient des exemples de rapport de dépenses qu'il a soumis à la société. Il a témoigné que les paiements en remboursement de dépenses ne totalisaient pas 10 607,27 $, le montant qui lui a été versé au cours de la période en question, mais plutôt une petite portion de ce montant, soit environ 2 500 $. Le reliquat, d'environ 7 500 $, aurait été son salaire.

[19]     Je le répète, ce qui est le plus déterminant est que, lorsqu'on examine les documents, et on ne peut en faire abstraction, ceux-ci portent les mentions, [traduction] « avance sur la paie » , [traduction] « avance de salaire » , [traduction] « retrait salaire » , [traduction] « retrait » , [traduction] « retrait » , [traduction] « retrait » . Le seul qui indique qu'il s'agit d'une dépense est le dernier sur la liste et il porte la mention [traduction] « dépenses pour voyage à Prince George et Calgary » . Tous les autres paiements qui sont censés être liés à des dépenses n'indiquent pas qu'il s'agit de dépenses ni ne spécifient à quel voyage ils ont reliés, sauf le montant du 12 avril.

[20]     La Cour lui a directement demandé : [traduction] « Pourquoi avez-vous indiqué [traduction] « avance sur la paie » , [traduction] « avance de salaire » , [traduction] « retrait salaire » , [traduction] « retrait » , [traduction] « retrait » , [traduction] « retrait » et [traduction] « dépenses » sur celui de 607,27 $ pour ensuite spécifier, sur celui de 605 $, que le paiement visait le loyer du travailleur? » Il a répondu : « Eh bien, j'ai indiqué la première chose qui m'est venue à l'esprit. » En toute déférence, la Cour ne peut accepter cette explication; elle ne tient pas la route. Une personne possédant l'expérience et le sens des affaires aigu de ce témoin n'indiquerait pas qu'il s'agissait d'une avance sur la paie ou d'un retrait s'il s'agissait réellement d'un remboursement de dépenses.

[21]     Ce témoin devait posséder au moins une certaine connaissance de la Loi de l'impôt sur le revenu, laquelle exige qu'une personne doive indiquer le motif d'un paiement. La représentante de l'intimé a soutenu que, si les dépenses ne sont pas spécifiques et adéquatement identifiées, alors tous les montants reçus sont considérés par les normes comptables comme un revenu.

[22]     La Cour cherche un élément de preuve pour corroborer la preuve présentée par l'une ou l'autre des parties. La pièce I-5 était une lettre envoyée par M. Mawdsley à M. W.T. (Terry) Plummer par télécopieur le 19 septembre 2001, peu après que M. Mawdsley a démissionné ou a cessé de travailler pour la société. Cette lettre corrobore l'argument de M. Mawdsley qu'il était un employé engagé en vertu d'un contrat de louage de services au cours de la période pertinente, que la société lui devait une partie de son salaire et qu'il s'attendait à être payé, parce qu'il y affirmait ce qui suit :

                    [traduction]

Comme vous le savez peut-être déjà, je ne suis plus à l'emploi de ProBed Medical Technologies Inc. depuis le 15 septembre 2001. Je ne peux tout simplement pas continuer à travailler sans recevoir de chèque de paie. Par conséquent, veuillez considérer la présente lettre comme ma démission immédiate en tant qu'administrateur de la société.

Je vous rappelle qu'en date du 15 septembre 2001, le salaire net que me doit la société s'élève à 18 265,74 $. Si vous disposez des fonds nécessaires, j'apprécierais recevoir paiement dès que possible. Dans le cas contraire, je devrai prendre les moyens nécessaires afin de recouvrer cette somme. De plus, ProBed doit présentement la somme de 14 053,75 $ pour les déductions à la source qu'elle aurait dû prélever sur mon salaire et verser au Receveur général du Canada. J'attire votre attention sur cette question car, à titre d'administrateurs de ProBed, vous et les autres membres du conseil d'administration pourriez être tenus personnellement responsables de ces montants.

[23]     M. Mawdsley a témoigné à l'instance que cette lettre était demeurée sans réponse. Personne n'a contesté le contenu de cette lettre et personne dans la société n'a déclaré que la lettre était erronée jusqu'à ce qu'une plainte ait été déposée à cet égard. Ce n'est qu'après qu'une plainte a été déposée et qu'il a décidé de prendre des mesures à cet égard qu'on a soutenu que M. Mawdsley était un travailleur bénévole.

[24]     Premièrement, la lettre corrobore au moins le témoignage du travailleur, car elle correspond à la position qu'il a défendue ici aujourd'hui. Le fait qu'aucun membre de la société n'ait contesté l'exactitude du contenu de sa lettre datée du 19 septembre 2001 est significatif, car une telle contestation tendrait à confirmer la position défendue par l'appelante, soit que le travailleur n'était pas un employé, mais seulement un travailleur bénévole.

[25]     Ces éléments de preuve, surtout la pièce R-3, la preuve générale présentée par le travailleur, M. Mawdsley, ainsi que la déclaration de faits contenue dans la réponse qui, dans une large mesure, n'a pas été réfutée, sont significatifs. La Cour examine cette preuve et se demande : « L'appelante a-t-elle démontré selon la prépondérance des probabilités que le travailleur était un travailleur bénévole et qu'il n'était pas un employé? » Il est raisonnable de conclure que, selon la prépondérance des probabilités, le témoignage du travailleur était probablement plus fiable que celui de la personne qui a témoigné au nom de la société.

[26]     À propos de la question de crédibilité, qui est importante en l'espèce, la Cour doit décider lequel des témoignages elle doit retenir lorsqu'ils se contredisent sur les points les plus essentiels. En l'espèce, la Cour retient le témoignage du travailleur, M. Mawdsley, et rejette celui du témoin qui a témoigné pour la société.

[27]     Au surplus, il serait déraisonnable pour la Cour de conclure sur le fondement de la preuve présentée que M. Mawdsley est venu d'Ontario jusqu'à Vancouver, peu importe le nombre de fois qu'il est venu, mais il est finalement venu ici et s'y est installé, et qu'il a travaillé en espérant que les 100 000 actions qu'il devait recevoir constitueraient sa récompense dans le cas où elles en viendraient à s'apprécier. À cette époque, les actions n'avaient aucune valeur. Il est également déraisonnable de conclure qu'il ne serait rémunéré que s'il réussissait à obtenir du financement pour la société.

[28]     La Cour ne peut raisonnablement conclure que quelqu'un ferait une telle chose. En l'espèce, ce serait particulièrement déraisonnable, puisque le travailleur a déclaré qu'il se trouvait lui-même dans une situation financière difficile. Il venait de quitter un autre emploi et il travaillait énormément. De plus, il est peu probable qu'une société accorderait les pouvoirs dont il disposait à un travailleur bénévole et permettrait à un tel travailleur d'accomplir ce type de travail ou d'exercer ce type de fonctions.

[29]     L'argument de M. Mawdsley voulant qu'on n'agisse pas ainsi envers un travailleur bénévole, mais plutôt envers quelqu'un qui deviendra chef de la direction a un certain poids. De plus, il est très improbable que l'on offre le poste de chef de la direction d'une société à un travailleur bénévole et que l'on s'attende ensuite à ce qu'il travaille gratuitement si le financement n'est pas obtenu. La Cour a beaucoup de difficultés à accepter la position de l'appelante en l'espèce.

[30]     Au cours de sa plaidoirie, la représentante de l'intimé a affirmé que trois questions se posaient : 1) M. Mawdsley était-il un employé ou un travailleur bénévole? (S'il n'était pas employé, il n'est pas nécessaire de déterminer son statut.) 2) Quel est son revenu net d'emploi? 3) Quels sont ses gains ouvrant droit à pension?

[31]     La représentante de l'intimé a traité de quelques articles de la Loi, dont la Cour a tenu compte, et il ne fait aucun doute que, en vertu de l'alinéa 5(1)a), le contrat peut être écrit ou verbal. Pour le Régime, la disposition applicable est le paragraphe 6(1) de la Loi.

[32]     En ce qui concerne la question de savoir si le travailleur était un employé, il a été soutenu qu'il existait une preuve que le contrat écrit n'a jamais été signé. M. Mawdsley a affirmé qu'il a tenté à plusieurs reprises d'obtenir la signature de la société sur le contrat écrit, mais que la société ne voulait pas le signer, qu'elle ne l'avait pas signé, et qu'elle remettait toujours à plus tard cette signature. Toutefois, la seule conclusion raisonnable à laquelle nous pouvons arriver est qu'ils ne cessaient de repousser la signature du contrat non pas parce qu'ils ne croyaient pas qu'il était un employé, mais parce qu'ils étaient trop occupés ou qu'ils avaient d'autres préoccupations. C'est la conclusion à laquelle arrive la Cour sur le fondement du témoignage de M. Mawdsley.

[33]     La représentante de l'intimé a soutenu qu'il y avait une entente, une entente verbale, mais que certaines des conditions prévues au contrat écrit avaient été remplacées par une entente verbale. Cette entente est intervenue plus tard entre les parties. Elle est entrée en vigueur lorsque le travailleur est venu en Colombie-Britannique pour travailler et qu'il a effectivement travaillé pendant la période en question. Ce contrat prévoyait que le travailleur devait recevoir un salaire mensuel de 3 000 $ pour les trois premiers mois et de 5 000 $ pendant les cinq mois subséquents, et que, s'il ne recevait pas la totalité de son salaire au cours de la période où il travaillerait, cela lui serait remboursé lorsqu'un financement serait obtenu.

[34]     La représentante de l'intimé a mentionné la relation entre la société et le prétendu employé et a déclaré qu'il avait travaillé à temps plein pendant la période. On lui a remboursé les dépenses qu'il avait engagées. La société a fourni tous les outils, les locaux de travail, le bureau, l'ordinateur et le téléphone. Il s'est acquitté de ses fonctions principalement dans les locaux de la société, bien que certaines de ses tâches aient été accomplies à l'extérieur. Il avait un horaire de travail régulier, de huit heures par jour, du lundi au vendredi. On lui a remis les clés de l'immeuble. Il était un signataire autorisé. La société lui avait fourni une adresse courriel. Il a reçu un certain salaire, comme l'indiquent les chèques. Il a reçu plus de 7 000 $ en salaire et seulement environ 2 500 $ pour rembourser des dépenses.

[35]     Il a reçu 125 000 actions. Il devait recevoir une partie de son argent après réception par la société d'éventuelles entrées de fonds en cours d'année. C'est de cette façon qu'il devait être payé. Il avait effectivement un revenu régulier qui constituait une partie de son salaire. Il a reçu 10 607,27 $ au total. Des chèques étaient émis environ toutes les deux semaines. Les montants étaient constants et ne ressemblaient pas à des remboursements de dépenses. Il a fourni des documents indiquant qu'il a présenté des demandes de remboursement de dépenses de façon régulière en remettant des rapports de dépenses standard, et que ces montants étaient distincts de la paie.

[36]     La Cour conclut qu'il y a une faiblesse dans la preuve présentée par la société. Elle aurait dû être en mesure d'indiquer quelles dépenses étaient remboursées. La société aurait certainement été capable de trouver certains documents qui auraient démontré que les montants que le travailleur a reçus étaient des remboursements de dépenses et non pas des revenus, nonobstant les mentions sur les chèques eux-mêmes. Cela aurait été raisonnable.

[37]     Aucune preuve autre que le témoignage du seul témoin n'a été présentée. D'autres dirigeants ou membres du conseil auraient dû être en mesure de corroborer le témoignage de la personne qui a témoigné au nom de la société aujourd'hui, mais aucun n'était présent. La Cour ne sait pas ce qu'ils auraient dit. Dans un cas comme l'espèce, où les mentions sur les chèques contredisent la position de la société, on s'attendrait à ce qu'une preuve appuyant ou corroborant le témoignage du témoin principal de la société soit présentée, mais cela ne s'est pas produit.

[38]     La représentante de l'intimé a déclaré que le travailleur était un employé pendant toute la période pertinente. Elle a cité les diverses dispositions relatives aux gains assurables. L'article applicable indique effectivement que les gains assurables comprennent les montants impayés et que les gains ouvrant droit à pension n'incluent pas les montants impayés. Cependant, le montant des gains assurables peut être calculé pour la période en question. Selon la preuve, le montant de 2 500 $ correspond au remboursement des dépenses. Le reste du montant, soit 7 500 $, représente son salaire.

[39]     Une entente verbale avait été conclue et le travailleur devait recevoir la rémunération qu'il a mentionnée dans son témoignage. Il devait également recevoir une paie de vacances de six semaines.

[40]     En ce qui a trait aux gains ouvrant droit à pension, la représentante de l'intimé a soutenu que le travailleur a reçu 7 500 $ en salaire et que, par conséquent, ses gains ouvrant droit à pension devraient être fondés sur ce montant de 7 500 $. Il a reçu des gains assurables qui devraient être calculés en tenant compte de la période au cours de laquelle il était employé, soit un montant de 3 000 $ par mois pendant les cinq premiers mois et de 5 000 $ par mois pendant les trois mois subséquents.

[41]     La question devrait être déférée au ministre pour modification. La modification devrait être effectuée en tenant compte du fait que le travailleur était employé en vertu d'un contrat de louage de services, que ses gains assurables devraient être fondés sur le montant de revenu qu'il a gagné au cours de la période pertinente, soit 3 000 $ par mois pendant les cinq premiers mois et 5 000 $ par mois pour les trois mois subséquents. La Cour devrait ordonner au ministre de calculer les gains assurables du travailleur sur ce fondement.

[42]     Nous devons conclure que le travailleur a occupé un emploi ouvrant droit à pension. L'emploi ouvrant droit à pension ne devrait être fondé que sur le montant de revenu qu'il a reçu, soit 7 500 $. Le ministre devrait ainsi calculer les gains ouvrant droit à pension. Ses gains assurables devraient correspondre à ce qu'il a reçu, en plus d'une paie de vacances de six semaines. La Cour devrait modifier la décision à cet égard.

[43]     L'appelante a soutenu que le travailleur était un homme d'affaires très compétent. Lorsqu'il est venu travailler pour la société, il connaissait toutes les conditions et a décidé de se joindre à la société à ces conditions. Il n'est pas venu en Colombie-Britannique une ou deux fois, mais bien à trois reprises. Il savait dans quoi il s'engageait et il est venu à titre de bénévole. Il n'y a jamais eu d'entente verbale prévoyant qu'il recevrait un salaire, sauf dans l'éventualité où un financement serait obtenu. Ce financement, qui constituait le fondement du contrat, n'a pas été obtenu.

[44]     Le travailleur a considéré qu'il s'agissait d'une occasion de faire de l'argent et peut-être même un coup de bourse si les 100 000 actions qu'on devait lui émettre prenaient éventuellement beaucoup de valeur. Cela aurait pu se produire. Mais il prenait tout simplement un risque. Il venait de quitter un autre emploi et il pensait qu'il pourrait bâtir quelque chose pour lui-même après quelque temps. Il connaissait les problèmes de la société, qui n'avait pas les moyens de le payer. Il savait que la société ne pouvait pas lui verser un salaire régulier et il a décidé de se joindre à la société à titre de travailleur bénévole.

[45]     Ce n'est qu'après qu'il se soit fâché et ait quitté son emploi pour des raisons personnelles, pour chercher un autre emploi selon le témoin, qu'il a décidé de déposer une plainte, car il était amer. Il n'y avait pas de contrat de louage de services, et l'appel devrait être accueilli.

[46]     L'intervenant était, en substance, d'accord avec les arguments soumis par la représentante de l'intimé selon lesquels le contrat verbal remplaçait toutes les dispositions relatives à l'obligation d'obtenir le financement du Community Futures Program. Les travailleurs bénévoles ne font pas ce genre de choses. À titre de travailleur, il a accepté que certains paiements soient retardés, mais s'attendait à recevoir ultérieurement les arriérés de paie. Toutefois, il a soutenu que, si la Cour concluait que l'embauche, le salaire et l'emploi étaient conditionnels à l'obtention d'un financement pour la société, ce financement a été obtenu et que, par conséquent, il a respecté cette condition et de toute façon devrait être payé.

[47]     Les chèques devraient être acceptés tels quels. Tenter d'y lire autre chose que ce qui y est réellement indiqué est tout simplement déraisonnable et constituerait de la fabrication. De plus, la question de son prétendu statut de travailleur bénévole n'a été soulevée que lorsqu'il a déposé une plainte. Voilà ce qu'il a soutenu. L'appel devrait être rejeté.

[48]     Voilà la preuve et les arguments des parties. Sur la foi de la preuve présentée et sur le fondement de la crédibilité des témoins devant la Cour, celle-ci conclut que l'appelante ne s'est pas acquittée du fardeau de prouver que le travailleur n'occupait pas un emploi assurable. La Cour conclut que la preuve démontre que le travailleur était engagé en vertu d'un contrat de louage de services au cours de la période pertinente, soit du 15 janvier 2001 au 14 septembre 2001. C'est là la période en question. Il était engagé en vertu d'un contrat de louage de services conformément à l'alinéa 5(1)a) de la Loi.

[49]     La Cour conclut de plus que l'appelante avait des gains assurables que la Cour ordonne au ministre de calculer conformément à la période d'emploi, soit du 15 janvier 2001 au 14 septembre 2001, au taux de 3 000 $ par mois pendant trois mois et de 5 000 $ pendant cinq mois, en plus de la paie de vacances de six semaines convenue pour cette période.

[50]     En ce qui a trait à l'emploi ouvrant droit à pension, la Cour conclut que l'appelante occupait un emploi ouvrant droit à pension au cours de la période et que cet emploi ouvrant droit à pension devrait être calculé en fonction du salaire que l'appelante a reçu au cours de la période, soit 7 500 $.


[51]     L'appel est accueilli et la décision du ministre est modifiée selon les motifs qui précèdent.

Signé à Ottawa, Canada ce 9e jour d'avril 2003.

« T. E. Margeson »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 4e jour de mars 2005.

Mario Lagacé, réviseur

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