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Référence : 2006CCI192

Date : 20060404

Dossier : 2005-1836(IT)I

ENTRE :

MOHAMED KARRAWAN,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

(Rendus oralement à l'audience à Toronto (Ontario),

le 24 février 2006.)

Le juge en chef Bowman

[1]       Les présents appels sont censément interjetés à l'encontre de cotisations pour les années d'imposition 1998 et 2001.

[2]       Pour les motifs qui suivent, je regrette de ne pas pouvoir aider M. Karrawan. J'ai essayé de trouver un moyen qui m'aurait permis de l'assister, mais j'ai bien peur que mon ingéniosité ne soit pas à la hauteur.

[3]       M. Karrawan s'est blessé avant 1998, j'ignore quand, et il était couvert par un régime d'assurance auquel lui et son employeur ont contribué. Il a dû retenir les services d'un avocat pour poursuivre la compagnie d'assurances, qui a fini par lui payer 46 000 $, soit une somme sensiblement inférieure à la somme à laquelle il avait droit en vertu de la police. Pour aboutir à ce résultat, il a payé des honoraires d'avocat d'environ 17 000 $.

[4]       La compagnie d'assurances a délivré à l'appelant un feuillet T4A indiquant que l'indemnité était un revenu imposable. M. Karrawan ne croyait pas que c'était le cas et c'est apparemment ce que son avocat lui a dit. Néanmoins, le 17 octobre 2000, l'Agence du revenu du Canada (l' « ARC » ) a établi une cotisation à l'égard de l'appelant en se fondant sur le montant de 48 000 $. L'appelant a déposé un avis d'opposition, et le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a établi une nouvelle cotisation à son endroit le 26 mars 2001 pour l'année d'imposition 1998.

[5]       Dans cette nouvelle cotisation, le ministre continuait d'inclure le montant de 46 000 $ dans le revenu de l'appelant, mais il lui accordait une déduction d'un montant de 17 862 $ au titre des honoraires d'avocat. Rien n'indique que l'appelant a déposé un avis d'opposition à cette nouvelle cotisation pour l'année 1998.

[6]       Cependant, l'appelant a effectivement reçu une cotisation pour l'année 2001 le 2 janvier 2003, et, bien que le montant de l'impôt à payer pour cette année-là fût relativement petit, environ 400 $, l'avis de nouvelle cotisation comprenait aussi une somme de 17 826,64 $ qui représentait le montant d'impôt que l'appelant devait payer conformément à la nouvelle cotisation antérieure pour l'année 1998. M. Karrawan croit qu'il ne doit pas cette somme, et qu'elle n'est pas imposable. Il interjette maintenant appel de cette nouvelle cotisation devant la Cour.

[7]       Pour le moment, je ne tiendrai pas compte du fait que l'avis d'opposition, qui est daté du 10 janvier 2003, se rapportait à la cotisation pour l'année 2001, et que l'avis d'appel déposé devant la Cour est en fait hors délai parce que la ratification de la cotisation à l'égard de l'appelant pour l'année 2001 à la suite de son opposition du 10 janvier 2003 est datée du 15 mai 2003, et que l'avis d'appel n'a été déposé devant la Cour que le 7 juin 2005.

[8]       Le problème concernant l'opposition à l'égard de l'année 1998 est qu'aucun avis d'opposition n'a été déposé à la suite de la nouvelle cotisation établie le 26 mars 2001. Par conséquent, la condition prévue par la loi pour pouvoir s'opposer à la cotisation visant l'année 1998 n'a pas été respectée. Il n'y a véritablement aucune autre opposition à la cotisation pour l'année 2001, mis à part le fait qu'elle comprenne un renvoi au montant d'impôt à payer selon la cotisation pour l'année 1998. Par conséquent, je serais obligé de rejeter l'appel de toute façon. Cependant, quoi qu'il en soit, je pense que M. Karrawan a au moins le droit de savoir pourquoi je juge que la cotisation est juste.

[9]       Son avocat antérieur, Me Wilton, a correspondu avec l'ARC et a finalement dit à M. Karrawan qu'il ne s'opposerait pas à la cotisation ou qu'il n'interjetterait pas appel devant la Cour sans une provision importante, à savoir 5 000 $. M. Karrawan a refusé de payer cette somme, mais, très franchement, je ne crois pas qu'il aurait été bien plus avancé si son avocat avait interjeté appel en temps opportun. En tout cas, je crois que la somme que l'appelant a reçue de la compagnie d'assurances est imposable en vertu de l'alinéa 6(1)f) de la Loi de l'impôt sur le revenu, qui dispose qu'est à inclure dans le calcul du revenu d'un contribuable le total des sommes qu'il a reçues au cours de l'année, à titre d'indemnité à payer périodiquement pour la perte totale ou partielle du revenu afférent à une charge ou à un emploi, en vertu d'un régime d'assurance contre la maladie ou les accidents, d'un régime d'assurance invalidité ou d'un régime d'assurance de sécurité du revenu dans le cadre duquel son employeur a contribué. M. Karrawan m'a informé que son employeur avait payé 50 % des primes.

[10]      Ceci étant dit, je continue, bien sûr, de croire que l'indemnité n'était pas à payer périodiquement parce qu'il s'agissait d'un règlement unique avec la compagnie d'assurances, opinion que j'ai formulée dans ma décision Tsiaprailis v. The Queen, 2002 DTC 1563, mais, malheureusement, la majorité des juges de la Cour d'appel fédérale et de la Cour suprême du Canada ont statué que le fait que l'indemnité n'était pas à payer périodiquement n'empêchait pas les sommes d'être imposables en vertu de l'alinéa 6(1)f).

[11]      La Cour suprême du Canada a rendu une décision dans laquelle elle a affirmé qu'une somme forfaitaire reçue conformément à un règlement conclu avec une compagnie d'assurances était imposable en vertu d'un principe décrit par l'expression latine surrogatum.

[12]      À vrai dire, mis à part le fait que M. Karrawan n'a pas déposé son avis d'opposition à la cotisation pour l'année 1998 en temps opportun ou qu'il ne l'a pas fait du tout, je pense que, même s'il l'avait fait, la Cour suprême du Canada aurait de toute façon considéré comme imposable la somme qu'il a reçue. Je ne souhaite pas arriver à cette conclusion, mais la loi m'y oblige.

[13]      Pour ces motifs, je dois rejeter l'appel.

[14]      Cependant, je demande aussi au ministre de s'efforcer de trouver des moyens pour permettre à M. Karrawan d'acquitter cette obligation d'une manière qu'il puisse supporter. Il est clair qu'il est dans une situation financière très précaire. Je demande au ministre de faire preuve de compassion quand viendra le temps de fixer la méthode de remboursement de sa dette. Le ministre peut aussi, bien sûr, appliquer les dispositions qu'on trouve dans le dossier Équité pour exonérer l'appelant de toute pénalité ou de tout intérêt à payer. Je n'ai pas le pouvoir de recommander ces mesures, mais je demande qu'elles soient prises.

Signé à Ottawa, Canada, ce 4e jour d'avril 2006.

« D. G. H. Bowman »

Juge en chef Bowman

Traduction certifiée conforme

ce 2e jour de février 2007.

Mario Lagacé, jurilinguiste


RÉFÉRENCE :

2006CCI192

N º DU DOSSIER DE LA COUR :

2005-1836(IT)I

INTITULÉ :

Mohamed Karrawan et

Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :

Le 24 février 2006

MOTIFS DU JUGEMENT :

L'honorable juge en chef D. G. H. Bowman

DATE DU JUGEMENT :

Le 2 mars 2006

DATE DES MOTIFS DU JUGEMENT :

Le 4 avril 2006

COMPARUTIONS :

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

Avocat de l'intimée :

Me Eric Sherbert

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l'appelant :

Nom :

--

Cabinet :

--

Pour l'intimée :

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

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