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Dossier : 2004-2248(IT)I

ENTRE :

CLAIRE LISTER,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Appel entendu le 24 janvier 2004 à Kelowna (Colombie-Britannique)

Devant : L'honorable juge D.W. Beaubier

Comparutions :

Représentant de l'appelante :

M. Dewey Lotoski

Avocate de l'intimée :

Me Pavanjit Mahil

JUGEMENT

          Les appels des nouvelles cotisations établies en application de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 2001, 2002 et 2003 sont accueillis, et les nouvelles cotisations sont renvoyées au ministre du Revenu national pour que celui-ci procède à un nouvel examen et établisse de nouvelles cotisations conformément aux motifs du jugement ci-joints selon lesquels, pour chacune des années en cause :

1.        Le crédit d'impôt pour personnes handicapées est refusé.

2.        Les frais médicaux déduits sont admis pour les montants suivants :

2001            21 270 $

2002            20 912 $

2003            28 055 $

L'appelante se voit accorder ses dépens et ses débours taxables dans le présent appel.

Signé à Calgary (Alberta), ce 10e jour de février 2005.

« D.W. Beaubier »

Juge Beaubier

Traduction certifiée conforme

ce 9e jour de février 2006.

Hélène Tremblay, traductrice


Référence : 2005CCI113

Date : 20050210

Dossier : 2004-2248(IT)I

ENTRE :

CLAIRE LISTER,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Beaubier

[1]      Cet appel concernant les années d'imposition 2001 à 2003, interjeté sous le régime de la procédure informelle, a été entendu à Kelowna (Colombie-Britannique), le 24 janvier 2005.

[2]      Le représentant de l'appelante a appelé les personnes suivantes à témoigner : le gendre de l'appelante, David Thomson; son médecin, le Dr Ronald Schriemer, M.D.; Barbara Goertzen, inf. aut.; le gestionnaire des services aux résidents de Hawthorn Park, un « village-retraite » situé à Kelowna, en Colombie-Britannique, où résidait l'appelante pendant les années en question. De son côté, l'intimée a appelé Gary Buckburry, le directeur général de Hawthorn Park, et Joanne Siemens, l'agente des appels de l'intimée chargée de l'affaire.

[3]      Les paragraphes 4 à 10 inclusivement de la réponse modifiée à l'avis d'appel modifié établissent les questions en litige :

[traduction]

4.          Dans le calcul de ses impôts payables pour les années d'imposition 2001, et 2002 et 2003, l'appelante a déduit des frais médicaux de 21 270 $, et 20 912 $ et 28 055 $ respectivement.

5.          Au départ, le ministre du Revenu national (le « ministre » ) avait établi les cotisations de l'appelante pour les années d'imposition 2001, et 2002 et 2003 le 29 avril 2002, et le 29 avril 2003, et le 14 septembre 2004respectivement, en fonction des déclarations de l'appelante.

6.          Le ministre a établi de nouvelles cotisations à l'égard de l'appelante pour les années d'imposition 2001, et 2002 et 2003 le 21 février 2003, et le 5 septembre 2003, et le 6 décembre 2004 respectivement, et a réduit les frais médicaux à 515 $, et 470 $ et 2 293 $ respectivement, ce qui fait en sorte qu'il a refusé les montants de 20 755 $, et20 442 $ et25 762 $respectivement.

7.          En réponse à l'avis d'opposition présenté par l'appelante, le ministre a établi de nouvelles cotisations pour les années d'imposition 2001, et 2002 et 2003 afin d'admettre des frais médicaux de 10 000 $ pour chaque année relativement à des soins auxiliaires, en application de l'alinéa 118.2(2)b.1) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ), et afin d'admettre des crédits d'impôt pour personnes handicapées de 6 000 $, et de 6 180 $ et de 6 279 $ respectivement (les « crédits » ), en application des articles 118.3 et 118.4 de la Loi. Dans les nouvelles cotisations, le ministre a refusé des frais médicaux de 10 755 $ pour 2001, et de 10 442 $ pour 2002 et de 15 762 $ pour 2003 ( « les montants » ).

8.          Lorsqu'il a établi les nouvelles cotisations à l'égard de l'appelante pour les années d'imposition 2001, et 2002 et 2003, le ministre s'est appuyé sur les hypothèses de fait suivantes :

a)       l'appelante a de nombreux problèmes de santé qui touchent de multiples organes, et elle a de la difficulté concernant ses fonctions exécutives;

b)       l'appelante a continuellement besoin d'aide pour prendre ses médicaments, prévoir et préparer ses repas, prendre soin d'elle-même et se déplacer;

c)       le médecin de l'appelante a recommandé qu'elle habite un logement avec assistance;

d)       l'appelante est allée habiter à la Hawthorn Park Retirement Community ( « Hawthorn » ), qui est exploitée par Diversicare Incorporated ( « Diversicare » );

e)       à Hawthorn, il y a trois niveaux de soins : soins intermédiaires autorisés, aide à la vie autonome et vie autonome;

f)         l'appelante habitait un appartement de Hawthorn dans la section d'aide à la vie autonome;

g)       l'appelant avait accès à des soins infirmiers, au besoin, à une intervention d'urgence 24 heures, à un suivi de ses besoins en soins de santé et à un programme complet de loisirs, le tout pour une somme de 950 $ par mois;

h)       de plus, elle recevait de l'aide pour prendre ses médicaments et elle bénéficiait de services d'entretien ménager et de préparation de repas, ce qui lui coûtait un montant additionnel chaque mois;

i)         l'appelante a déduit des frais médicaux de 20 755 $ en 2001, et de 20 422 $ en 2002 et de 25 762 $ en 2003 relativement aux montants versés à Diversicare;

j)         les montants n'ont pas été versés relativement à des frais médicaux, selon ce qui est prévu au paragraphe 118.2(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu Loi (la « Loi » ).

B.         LES QUESTIONS EN LITIGE

9.          La question ici est de savoir si l'appelante a le droit de déduire les montants comme frais médicaux pour les années d'imposition 2001, et 2002 et 2003.

C.         LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES INVOQUÉES

10.        Il s'appuie sur les articles 118.2, 118.3 et 118.4 de la Loi et sur l'article 5700 du Règlement de l'impôt sur le revenu (le « Règlement » ), dans leur version en vigueur au cours des années d'imposition 2001, et 2002 et 2003.

[4]      Aucune des hypothèses n'a été réfutée, mais l'hypothèse 8g) devrait être modifiée pour ajouter que Hawthorn offre des programmes de loisirs supplémentaires, moyennant des frais supplémentaires.

[5]      La question en litige entre les parties repose sur l'alinéa 118.2(2)e) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ) pour les années en cause. La version anglaise de l'alinéa se lit comme suit :

118.2(2) For the purposes of subsection (1), a medical expense of an individual is an amount paid ...

(e)     for the care, or the care and training, at a school, institution or other place of the patient, who has been certified by an appropriately qualified person to be a person who, by reason of a physical or mental handicap, requires the equipment, facilities or personnel specially provided by that school, institution or other place for the care, or the care and training, of individuals suffering from the handicap suffered by the patient.

Dans le cas des attestations faites après le 20 décembre 2002, l'attestation doit être faite par écrit.

La version française de l'alinéa 118.2(2)e) se lit comme suit :

118.2(2) Pour l'application du paragraphe (1), les frais médicaux d'un particulier sont les frais payés ...

e)    pour le soin dans une école, une institution ou un autre endroit -- ou le soin et la formation -- du particulier, de son époux ou conjoint de fait ou d'une personne à charge visée à l'alinéa a), qu'une personne habilitée à cette fin atteste être quelqu'un qui, en raison d'un handicap physique ou mental, a besoin d'équipement, d'installations ou de personnel spécialisés fournis par cette école ou institution ou à cet autre endroit pour le soin -- ou le soin et la formation -- de particuliers ayant un handicap semblable au sien;

[6]      Le Dr Schriemer a attesté des soins fournis à l'appelante dans une lettre datée du 15 novembre 2002 (pièce R-2), et son prédécesseur, le Dr J. Ervine, avait signé la pièce R-1, soit le formulaire T2201, Certificat pour le crédit d'impôt pour personnes handicapées, le 15 avril 1997. Dans son témoignage, le Dr Schriemer a donné son adhésion à la pièce R-1. Dans ce document, il était attesté que Claire Lister était incapable de (3) penser, percevoir et se souvenir, et qu'elle était (2) incapable de marcher, recourant au besoin à de l'aide. Dans la pièce R-2, on mentionne que Claire Lister souffre de nombreux troubles médicaux et que [traduction] « ses fonctions exécutives lui posent de grandes difficultés » . Pendant la période en cause, l'appelante devait prendre 19 médicaments différents, on devait superviser sa prise de médicaments et elle ne pouvait pas marcher avec son déambulateur sur une distance de plus de 30 pieds à la fois. On avait enlevé tout l'équipement de cuisine de son appartement à Hawthorn parce qu'il pouvait représenter un danger pour elle. Aussi, son appartement était muni d'un système permettant à l'appelante d'alerter le personnel si elle était en difficulté. De plus, elle porte un pendentif d'alerte. Elle a fait quelques chutes, elle a subi quelques accidents cérébraux vasculaires, elle a des troubles cardiaques, elle prend des anticoagulants et, en tout temps, elle n'était pas capable de lire l'heure et devait être supervisée à toute heure du jour et de la nuit. Elle ne pouvait pas fonctionner de façon autonome sans l'aide et les conditions fournies. En raison des problèmes cités ci-dessus, la fille de l'appelante, Mme Thomson, avait fait venir sa mère de Toronto pour qu'elle vive avec la famille Thomson à Kelowna, mais les problèmes, qui pouvaient se présenter à toute heure du jour ou de la nuit, étaient tels qu'on a dû placer Mme Lister à Hawthorn, où elle est demeurée pendant les années en cause.

[7]      La Cour admet les pièces R-1 et R-2 comme attestation, de même que la confirmation additionnelle fournie par le Dr Schriemer dans son témoignage, et ce, en tant qu'attestation supplémentaire conformément à l'alinéa 118.2(2)e). La question ici est de savoir si Mme Lister est « quelqu'un qui [...] a besoin [...] d'installations ou de personnel spécialisés fournis par [Hawthorn] [...] pour le soin [...] de particuliers ayant un handicap semblable au sien » , selon l'alinéa e).

[8]      La 6e édition du Black's Law Dictionnary définit le terme « spécial » comme suit :

[traduction]

« Qui concerne une espèce, un type, un individu, une chose ou un genre; qui est conçu pour une fin précise; qui est restreint à une fin, à un objet, à une personne ou à une catégorie en particulier. Inhabituel, extraordinaire. »

[9]      Mme Lister a signé un contrat afin de recevoir des [traduction] « soins de base » de la section [traduction] « aide à la vie autonome » pour les années en question, et c'est ce qu'elle a reçu. Cependant, au cours de l'année 2004, ses soins ont été augmentés aux niveaux 1 et 2 pendant un certain temps. Les « soins de base » du contrat de Mme Lister consistent en un appartement, deux repas par jour à la salle à manger, des services d'entretien ménager, y compris un service de buanderie, un système d'appel d'urgence 24 heures et une surveillance médicale avec un service personnel de pendentif d'alerte. Son contrat prévoit d'autres [traduction] « services auxiliaires » pour lesquels elle paie des frais supplémentaires. Pendant toute la période en cause, elle recevait des [traduction] « services d'aide à la vie autonome » de Hawthorn ou bien de Kelowna Personal Care Services, moyennant des frais supplémentaires de 135 $ par mois. Ces services comprennent une supervision pour la prise de médicaments, quatre fois par jour, une [traduction] « aide pour l'aérosol-doseur » , ainsi que des services d'entretien ménager.

[10]     Est-ce que Hawthorn fournit le personnel, et s'agit-il d'un endroit qui assure spécialement des soins aux personnes atteintes d'un handicap semblable à celui de Mme Lister? Son handicap comporte notamment une incapacité de marcher sur une quelconque distance, un handicap mental, y compris la difficulté à prendre des décisions, ainsi que la combinaison d'un certain nombre d'accidents cérébraux vasculaires, de problèmes cardiaques et de la nécessité de prendre 19 médicaments différents, y compris des anticoagulants. Si elle fait une chute, ceci pourrait entraîner des problèmes médicaux.

[11]     Le Shorter Oxford Dictionary décrit l'adverbe « specially » comme suit : [traduction] « à un certain degré ou dans une certaine mesure au-delà de ce qui est régulier ou courant; particulièrement; essentiellement » . La version anglaise de l'alinéa e) mentionne le soin « of individuals » au pluriel, et non « to individuals » . Sur cet aspect, la version française de l'alinéa e) parle de « spécialisés fournis » et « de particuliers » . Les deux versions sont donc semblables à cet égard.

[12]     En effet, Hawthorn assure spécialement des soins pour le handicap dont est atteinte Mme Lister. Son handicap est de nature générale : elle a besoin qu'on la supervise, qu'on lui fournisse différents types d'aide médicale, qu'on lui prépare et qu'on lui fournisse ses repas, et qu'on la surveille 24 heures par jour. Tout ceci doit être fait sous supervision médicale, pour des raisons médicales. Tous les soins sont conçus spécialement pour le niveau de handicap de Mme Lister et ses besoins en fonction de son handicap, lequel est le résultat de multiples problèmes médicaux qui, de façon cumulative, ont rendu Mme Lister invalide.

[13]     Par conséquent, l'appel est accueilli et l'affaire est renvoyée au ministre pour que celui-ci procède à un nouvel examen et établisse de nouvelles cotisations en fonction du fait que, pour chacune des années en cause :

1.        Le crédit d'impôt pour personnes handicapées est refusé.

2.        Les frais médicaux déduits sont admis pour les montants suivants :

2001            21 270 $

2002           20 912 $

2003            28 055 $

[14]     L'appelante se voit accorder ses dépens et ses débours taxables dans le présent appel.

Signé à Calgary (Alberta), ce 10e jour de février 2005.

« D.W. Beaubier »

Juge Beaubier

Traduction certifiée conforme

ce 9e jour de février 2006.

Hélène Tremblay, traductrice


RÉFÉRENCE :

2005CCI113

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2004-2248(IT)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Claire Lister c. La Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :

Kelowna (Colombie-Britannique)

DATE DE L'AUDIENCE :

Le 24 janvier 2005

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :

L'honorable juge D.W Beaubier

DATE DU JUGEMENT :

Le 10 février 2005

COMPARUTIONS :

Représentant de l'appelante :

M. Dewey Lotoski

Avocate de l'intimée :

Me Pavanjit Mahil

AVOCAT(S) INSCRIT(S) AU DOSSIER :

Pour l'appelante :

Nom :

Cabinet :

Pour l'intimée :

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

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