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Dossier : 2002-2173(GST)G

ENTRE :

JILLY CREATIONS INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

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Appel entendu le 4 novembre 2004 à Montréal (Québec)

Devant : L'honorable juge Louise Lamarre Proulx

Comparutions :

Avocats de l'appelante :

Me Louis-Frédérick Côté

Me Josée Massicotte

Avocat de l'intimée :

Me Gérald Danis

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JUGEMENT

L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d'accise dont l'avis porte le numéro 03110197 et est daté du 10 mai 2002, est rejeté, avec frais, selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 8e jour de février 2005.

« Louise Lamarre Proulx »

Juge Lamarre Proulx


Référence : 2005CCI77

Date : 20050208

Dossier : 2002-2173(GST)G

ENTRE :

JILLY CREATIONS INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

La juge Lamarre Proulx

[1]      Il s'agit d'un appel relatif à une cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d'accise (la « Loi » ) pour la période du 1er au 30 novembre 1999. La cotisation est en date du 10 mai 2002 et son avis porte le numéro 03110197 (onglet 8 de la pièce I-1).

[2]      Le litige concerne une déduction dans le calcul de la taxe nette au montant de 59 786,62 $, au motif de créances irrécouvrables supportées par l'appelante. Cette réclamation est faite en vertu de l'article 231 de la Loi.

[3]      Une nouvelle cotisation en date du 26 janvier 2001 avait refusé une demande de déduction au montant de 88 194,73 $ (onglet 2 de la pièce I-1). Au stade de l'opposition, une déduction au montant de 20 150,92 $ a été accordée par la cotisation du 10 mai 2002. À la suite de cette cotisation, une déduction supplémentaire de 8 257,19 $ a été accordée (pièce A-3), ce qui explique le montant actuel en litige.

[4]      L'appelante soutient que les créances sont devenues irrécouvrables parce que l'appelante a été victime d'une fraude de la part d'une employée.

[5]      Selon l'intimée, l'appelante n'a pas démontré par des pièces justificatives le quantum et l'identité des mauvaises créances, conformément à l'article 231 de la Loi.

[6]      Monsieur Berny Fersten, le président de l'appelante a expliqué que cette dernière faisait partie d'un groupe de neuf sociétés oeuvrant dans le domaine du textile. L'appelante manufacture des vêtements d'enfants et de femmes. Chaque société a ses propres registres. Le Groupe Fersten a commencé à faire affaires vers 1967. En 1990, le groupe avait un chiffre d'affaires annuel d'environ 40 millions de dollars. Le chiffre d'affaires de l'appelante était d'environ de six à huit millions. L'appelante employait plus de 200 employés mais la plupart de ces employés travaillaient aussi pour les autres sociétés. Il y avait des charges inter sociétés.

[7]      Pour la partie administrative, il y avait environ neuf à dix personnes dont le contrôleur, les commis aux comptes recevables et aux comptes payables, celui de la paye et le technicien en informatique.

[8]      Monsieur Fersten relate qu'en 1999, il a reçu un téléphone de son banquier, qui exprimait un certain malaise relativement aux comptes recevables. La banque posait des questions à savoir pourquoi des sociétés comme Zellers, KMart et Eaton, qui habituellement paient dans les 30 ou 40 jours, étaient toujours débitrices après deux ou trois mois.

[9]      Monsieur Fersten a d'abord demandé à son comptable externe de tenter de trouver une explication à cet état des choses, ce qu'il n'a pu faire.

[10]     Sur l'insistance de la banque à ce que l'appelante fasse appel à un expert dans la vérification légale des registres, monsieur Fersten a communiqué avec la société Bessner Gallay Schapira Kreisman. Ce sont messieurs Philip Levi et Brian Kreisman qui ont fait l'enquête.

[11]     Ce rapport a été produit comme septième document de la pièce A-1. Il est en date de décembre 1999. Le rapport conclut ainsi :

On the basis of the evidence examined by us and the confession made by Louise Bennett, we are of the opinion that a total amount embezzled by the Bennetts amounted to the total purchased by them which we have calculated to be $496,924.69.

[12]     À ce rapport est jointe une confession signée par madame Louise Bennett. Elle admet avoir détourné des fonds provenant de paiements faits par des clients à l'avantage de son compte et de celui de son mari pour un montant approximatif de 250 000 $. Madame Bennett était responsable des comptes recevables.

[13]     Monsieur Fersten a relaté que madame Bennett était supervisée par le contrôleur, monsieur Irving Zwirek. Il se serait retiré un an avant que la fraude ne soit découverte. Il a été remplacé par un monsieur Gold. Monsieur Fersten a aussi fait état que monsieur Pace qui avait rencontré la vérificatrice de Revenu Québec était uniquement en charge de l'informatique. Il n'était nullement en charge des comptes recevables.

[14]     L'avocat de l'appelante se réfère au document no 8 de la pièce A-1, intitulé : « Jilly Originals Receivables as at October 31st, 1999 over 180 days to be written off » . Il s'agit d'un document de 137 pages qui aurait été compilé par monsieur Levi et c'est à partir de ce document que se fait la présente réclamation.

[15]     Selon monsieur Fersten, ce document montre les montants qui n'ont pas été payés. Le total de ces montants, que l'on trouve à la page 137, est de 1 259 422,28 $. Ce montant a été déduit dans le calcul du revenu de l'appelante à titre de mauvaises dettes. Monsieur Fersten dit que c'est sur le conseil de leurs comptables et à la demande de la banque que l'appelante a demandé cette déduction.

[16]     Selon le témoin, il s'agit de créances irrécouvrables car si l'appelante en demande le paiement aux sociétés mentionnées en regard des montants dus, ces sociétés répondent qu'elles ont déjà payé ces montants et elles le prouvent. Le montant de taxe sur le montant de 1 259 422,28 $ était 82 392,11 $.

[17]     Le document no 9 est une lettre du bureau des substituts du Procureur général du Québec à laquelle sont joints un procès-verbal d'une décision d'un juge et un acte d'accusation. La lettre est en date du 23 septembre 2004, l'acte d'accusation et le plaidoyer sont en date du 3 mai 2004. L'acte d'accusation est à l'encontre de madame Louise Bennett. L'acte d'accusation mentionne notamment qu'entre le 4 décembre 1992 et le 21 juin 1999, elle s'est emparée frauduleusement d'une somme excédant 5 000 $. Elle a plaidé coupable à cette offense.

[18]     En ce qui concerne l'appelante, Jilly Originals Inc., madame Bennett était accusée d'avoir volé la somme de 5 000 $. Elle a plaidé coupable à cette accusation.

[19]     En contre-interrogatoire, le témoin a admis qu'il recevait à titre de président des rapports mensuels du contrôleur des sociétés du groupe, monsieur Zwirek. L'avocat de l'intimée lui a demandé de se reporter au rapport de la vérificatrice produit à l'onglet 6 de la pièce I-1 et plus particulièrement au passage où cette dernière rapporte les propos de monsieur Richard Pace, qui est la personne qui l'a accueillie au bureau de l'appelante :

Nous mentionnons à M. Pace qu'il y a des créances radiées pour lesquelles de la TPS est réclamée alors que la LTA n'était même pas encore en vigueur à ce moment. Ce montant net représenterait environ 753,06 $ de TPS réclamée à refuser. Pour le reste, nous lui faisons remarquer que les compagnies citées sur le document sont de grosses chaînes de magasins qui sont pour la plupart encore en opération. Nous lui demandons quelles sont les mesures employées par Créations Jilly Inc. pour récupérer ses comptes recevables datant de plusieurs semaines. Il nous dit qu'il n'existe aucune mesure de collection des comptes en retard. Personne n'est affecté à cette tâche, et au plus, un téléphone peut avoir été fait au client retardataire mais aucun suivi n'est fait par la suite. Pour les questions relatives au document présenté, il nous réfère à sa firme externe car il n'est pas en mesure de nous répondre à ce sujet.

[20]     Monsieur Fersten répète que monsieur Pace n'était pas la personne compétente pour répondre sur les procédures internes de perception. L'avocat lui demande s'il a des exemples de tentatives de perception des créances irrécouvrables. Monsieur Fersten se rapporte à la pièce A-2. Il s'agit d'une copie de l'affidavit de monsieur Fersten à l'appui d'une demande de prolongation de délai pour produire une réclamation dans le cadre d'une proposition d'arrangement concernant la société Eaton. Cette demande a été faite par un bureau d'avocats. Le paragraphe 5 de cet affidavit se lit comme suit :

5.          Jilly sold and delivered children's clothing to Eaton's from time to time. Eaton's is indebted to Jilly for the children's clothes in the amount of $30,682.65. Attached hereto to this my Affidavit and marked collectively as Exhibit "B" are true copies of the invoices rendered by Jilly to Eaton's, which remain unpaid.

[21]     Ce paragraphe mentionne qu'il joint à sa demande des copies de factures au montant de 30 682,65 $ qui ne sont pas payées. Ces factures n'étaient pas jointes à la pièce A-2. L'appelant ou son avocat ont mentionné qu'ils les feraient parvenir à la Cour. Ce qui n'a pas été fait.

[22]     Monsieur Kreisman est un comptable agréé. Il a relaté qu'en 1999, monsieur Philip Levi a reçu une demande de la part de monsieur Fersten au sujet d'un problème concernant les comptes recevables. Monsieur Levi lui a demandé de participer à l'enquête avec lui. Tous les deux sont les auteurs du rapport qui a été produit comme le document no 7 de la pièce A-1, intitulé : « The Fersten Group - Special Report » .

[23]     Ils en sont venus à la conclusion que l'employée responsable des comptes recevables a réussi à frauder la société pendant plusieurs années pour une somme totale d'environ 500 000 $. Elle aurait pris des sommes reçues d'autres clients pour les appliquer à l'encontre de son compte personnel et de celui de son mari. Personne n'avait jamais vu de chèques faits par elle ou son mari pour payer leurs comptes et ces comptes montaient jusqu'à 500 000 $. Eux-mêmes n'en n'ont pas retracé non plus.

[24]     Ils ont établi à la page 11 du rapport qu'elle avait sûrement détourné un montant de 43 855,14 $. À partir de cette preuve de détournement et comme il n'y avait aucun indice de paiements personnels, il était logique de conclure que les comptes de madame et monsieur Bennett avaient été payés par de l'argent, détourné par l'employée Bennett. Tel qu'indiqué à la page 9 de ce rapport, ce montant est de 496 924,69 $. C'est ce montant de fraude qu'ils ont réussi, dans une certaine mesure, à justifier. De ce montant 446 058,46 $ relève de l'appelante, 34 509,15 $ à Tops "R" Us Inc. et 16 357,08 $ à Fersten Headwear Inc. Elle a utilisé une technique de fraude qui porte le nom de « kiting » , qui consisterait à prendre l'argent d'un compte pour le mettre dans un autre compte. Elle n'a pas pris d'argent mais elle a obtenu des produits sans avoir à les payer.

[25]     Les états financiers pour l'année se terminant le 30 novembre 1999 ont été produits comme document no 10 de la pièce A-1. À la page 4, il y a une mention de déduction pour créances irrécouvrables au montant de 740 004 $ pour l'année 1999 et au montant de 403 444 $ pour l'année 1998. Le témoin dit qu'il n'était pas impliqué dans la préparation des états financiers, toutefois ceux-ci ont été constitués par leur firme. Monsieur Kreisman a eu la possibilité d'examiner les dossiers pertinents à son bureau la veille de l'audience. Le montant de 740 004 $ inclut une déduction de 645 000 $ relative à la présente allégation de créances irrécouvrables. En 1998, le montant de 403 444 $ inclut une déduction de 330 000 $. Ainsi le montant de 1 300 000 $ a été divisé sur une base de deux ans en 1998 et 1999 et il y a une autre charge quelque part dans les états financiers de l'année 1998.

[26]     En ce qui concerne le document no 8 de la pièce A-1 sur lequel repose la présente réclamation, le témoin dit clairement que personne ne peut trouver un semblant de logique à ce document. Il ne peut pas l'expliquer.

[27]     Madame Sylvie Dontigny, vérificatrice, dont le rapport est à l'onglet 6 de la pièce I-1, a expliqué que la période de vérification était du 1er novembre 1999 au 30 novembre 1999, parce que la demande de déduction en litige était à l'intérieur de cette période. Sa vérification a commencé le 4 avril 2000.

[28]     Elle a téléphoné chez l'appelante pour prendre un rendez-vous avec la personne qui s'occupe de la comptabilité et qui peut la renseigner relativement à la déclaration de l'appelante pour le mois de novembre. C'est monsieur Richard Pace qui l'a reçue.

[29]     La déduction demandée à la suite d'une radiation de mauvaises créances était au montant de 88 000 $. Elle a demandé à voir la justification de ces mauvaises créances. Monsieur Pace lui a remis le document no 8 de la pièce A-1, le document de 137 pages. Il lui a dit que pour les réponses à ses questions, elle devait appeler les comptables externes qui avaient produit le document.

[30]     À la face même du document, elle a été surprise du fait que les sociétés dont on demandait la radiation des créances étaient des sociétés toujours en affaires, à part Eaton. Même en ce qui concerne la société Eaton, il n'y avait aucune réclamation inscrite à la liste des créanciers. Elle se demandait comment on pouvait réclamer des mauvaises créances pour des sociétés qui sont toujours en existence et réputées être de bons payeurs. De plus, dans ce document, il y avait des sommes qui étaient avant l'entrée en vigueur de la TPS. Il y avait aussi plusieurs sommes qui étaient prescrites au niveau des dates de demande.

[31]     La vérificatrice a quand même tenté de comprendre le document. Elle a demandé aux comptables de lui fournir les pièces qui étaient à l'origine des inscriptions. Elle a procédé par échantillonnage. Ce qu'on lui a fourni n'était la preuve de rien. Les factures avaient été payées. Elle a demandé d'avoir l'historique des comptes clients. On ne les a pas retrouvés ou on ne les lui a pas fournis.

[32]La vérificatrice n'a eu de preuve d'aucune mesure de perception prise à l'égard de ces dettes, supposément en souffrance.

[33]     Au stade de l'opposition, le ministre a accepté le rapport produit comme document no 7 de la pièce A-1. Il a considéré comme des créances irrécouvrables, les créances à l'encontre de madame Louise Bennett et celles de son mari, telles que déterminées par le rapport.

Analyse et conclusion

[34]     Le document no 8 de la pièce A-1 est à la base de la présente demande de déduction dans le calcul de la taxe nette au motif de créances irrécouvrables. Or, monsieur Kreisman, qui est comptable agréé, a dit au sujet du document no 8 de la pièce A-1 qu'il n'avait aucun sens et a refusé de le commenter. Il n'est pas celui qui l'a complété. Toutefois dans le cas des états financiers pour les années 1998 et 1999, bien qu'il ne soit pas celui qui les ait préparés, il était en mesure d'expliquer leur contenu, s'en étant informé la veille auprès de son bureau. Il n'y a non plus aucun document écrit de la part de celui qui l'aurait complété qui en explique la nature de la manière proposée par l'appelante. Le document s'est également révélé incompréhensible pour la vérificatrice, malgré les efforts qu'elle a faits.

[35]     Il est à noter aussi dans cette affaire divers faits étranges. Monsieur Fersten affirme que monsieur Pace qui a reçu la vérificatrice n'était pas au courant de la comptabilité de l'appelante. Pourquoi le contrôleur ne s'est-t-il pas présenté à la vérificatrice? Il est à noter aussi qu'aucun des deux contrôleurs n'est venu témoigner et expliquer l'absence des comptes clients. Il n'y a aucune preuve d'effort de percevoir lesdites créances irrécouvrables. La demande pour prolonger le délai pour produire une réclamation dans l'affaire Eaton, pièce A-2, est en date du 9 février 2001, soit deux ans après la réclamation de la déduction en litige.

[36]     Le paragraphe 231(1) de la Loi se lit ainsi :

231(1) Créances irrécouvrables - La personne qui effectue une fourniture taxable, sauf une fourniture détaxée, pour une contrepartie au profit d'un acquéreur avec lequel elle n'a aucun lien de dépendance peut, dans la mesure où il est établi que tout ou partie de la contrepartie et de la taxe payable relativement à la fourniture est devenu une créance irrécouvrable, déduire, dans le calcul de la taxe nette pour sa période de déclaration où elle radie la créance de ses livres comptables ou pour une période de déclaration postérieure, le résultat du calcul suivant, à condition qu'elle indique la taxe percevable relativement à la fourniture dans la déclaration qu'elle produit aux termes de la présente section pour la période de déclaration au cours de laquelle la taxe est devenue percevable et verse la totalité de la taxe nette qui est à verser selon cette déclaration :

A x B/C

où :

A          représente la taxe payable relativement à la fourniture;

B           le total de la contrepartie, de la taxe et d'un montant qu'il est raisonnable d'attribuer à une taxe imposée en vertu d'une loi provinciale qui constitue une taxe visée par règlement pour l'application de l'article 154 (appelée « taxe provinciale applicable » au présent article), qui demeure impayé relativement à la fourniture et qui a été radié à titre de créance irrécouvrable;

C          le total de la contrepartie, de la taxe et de la taxe provinciale applicable payables relativement à la fourniture.

[37]     Le paragraphe 231(1) de la Loi prévoit qu'une personne qui effectue une fourniture taxable pour une contrepartie peut dans la mesure où il est établi que tout ou partie de la contrepartie et de la taxe payable est devenu une créance irrécouvrable, déduire dans le calcul de la taxe nette la taxe payable et non payée. Ce paragraphe de la Loi décrit les conditions applicables à une telle demande.

[38]     Le fournisseur de produits et services doit en premier lieu référer le Ministre à une facture ou à toute preuve satisfaisante établissant qu'un montant de taxe facturé à un acquéreur n'a pas été payé par ce dernier. La preuve a révélé que cette première étape n'a pas été franchie par l'appelante.

[39]     Deuxièmement, la déduction peut être demandée pour la période de déclaration où le fournisseur radie la créance de ses livres au motif qu'elle est irrécouvrable. La preuve que la créance était irrécouvrable peut être exigée par le Ministre.

[40]     Une troisième condition est que le fournisseur ait indiqué la taxe percevable dans une déclaration qu'il a produite pour la période de déclaration au cours de laquelle la taxe était devenue percevable et qu'il ait versé la totalité de la taxe nette relative à cette déclaration.

[41]     Dans l'affaire Equinox Realty Ltd. c. Canada, [1997] A.C.I. no 1210 (Q.L.), le juge Mogan de cette Cour s'exprimait ainsi :

7           À mon avis, l'appelante ne peut avoir gain de cause dans l'appel en instance parce qu'elle n'a pas satisfait à la condition de base énoncée au paragraphe 231(1), qui, par ailleurs, pourrait permettre la déduction. Cette condition de base est énoncée comme suit, dans les quelques lignes qui précèdent immédiatement la formule :

... à condition qu'elle indique la taxe percevable relativement à la fourniture dans la déclaration qu'elle produit aux termes de la présente section pour la période de déclaration au cours de laquelle la taxe est devenue percevable et verse la totalité de la taxe nette qui est à verser selon cette déclaration ...

[42]     Dans l'affaire Ciriello c. Canada, [2000] A.C.I. no 829 (Q.L.), le juge Rip de cette Cour s'exprimait ainsi :

3           M. Ciriello soutient également que le ministre n'a pas accordé de crédit à R & V pour les créances irrécouvrables. Aucune preuve n'a été présentée par l'appelant à l'égard des créances irrécouvrables. Pour que R & V reçoive un remboursement ou se voie accorder un redressement de la taxe, le paragraphe 231(1) de la Loi exige non seulement que le contribuable ait effectué une fourniture taxable dans le cadre d'une activité commerciale et pour une contrepartie, mais également qu'il ait produit une déclaration justifiant la taxe et par laquelle il la verse aux termes de la section II relativement à cette fourniture. Enfin, la contrepartie et la taxe doivent être devenues une créance irrécouvrable. Aucun élément de preuve n'a satisfait aux conditions de la loi en vue de justifier un redressement de la taxe.

[43]     Tel que déjà mentionné, le paragraphe 231(1) de la Loi permet de recouvrer des montants de taxe qui ont été chargés à un acquéreur et que ce dernier n'a pas payés. Il faut toutefois établir ces montants. Ici, non seulement, il n'y a pas les factures pertinentes mais il n'y a pas non plus de comptes clients. On ne connaît ni les débiteurs ni les montants de leurs créances irrécouvrables respectives. Le président de l'appelante a mentionné qu'il y avait eu des demandes de perception auprès des acquéreurs mais que ces derniers répondaient qu'ils avaient payé. Il s'est plaint d'un système de fraude institué par une employée.

[44]     Malheureusement, il faut comprendre que l'article 231 de la Loi n'a pas pour but de rembourser le fournisseur de produits et services des montants de taxe payés par les acquéreurs au fournisseur et qui auraient été volés chez ce dernier.

[45]     Il faut aussi se référer à l'article 286 de la Loi qui exige de toute personne qui est tenue de produire une déclaration ainsi que toute personne qui demande un remboursement de tenir des registres en la forme et avec les renseignements permettant d'établir et de déterminer ses obligations ainsi que le remboursement auquel elle peut avoir droit.

[46]     Pour toutes ces raisons, l'appel doit être rejeté avec frais.

Signé à Ottawa, Canada, ce 8e jour de février 2005.

« Louise Lamarre Proulx »

Juge Lamarre Proulx


RÉFÉRENCE :

2005CCI77

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2002-2173(GST)G

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Jilly Créations Inc. et La Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :

Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :

4 novembre 2004

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :

l'hon. juge Louise Lamarre Proulx

DATE DU JUGEMENT :

le 8 février 2005

COMPARUTIONS :

Pour l'appelante :

Me Louis-Frédérick Côté

Me Josée Massicotte

Pour l'intimée :

Me Gérald Danis

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER:

Pour l'appelante :

Nom :

Me Louis-Frédérick Côté

Étude :

Mendelsohn Rosentzveig Shacter

Montréal (Québec)

Pour l'intimée :

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

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