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Dossier : 2002-2667(IT)I

ENTRE :

DANIEL LACASSE,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

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Appels entendus le 29 janvier 2003 et les 23 et 24 octobre 2003

à Montréal (Québec)

Devant : L'honorable juge P.R. Dussault

Comparutions :

Avocat de l'appelant :

Me Éric Morin

Avocat de l'intimée :

Me Yanick Houle

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JUGEMENT

Les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu ( « Loi » ) pour les années d'imposition 1996, 1997 et 1998 sont admis et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations en tenant pour acquis :

- que tous les calculs de l'état de l'avoir net pour les trois années doivent être rajustés en utilisant comme hypothèse de base les dépenses d'une famille comptant deux adultes seulement;

- que l'ajout du prêt de 20 000 $ dans les rajustements de l'année 1998 doit être éliminé;

- que les pénalités en vertu des paragraphes 162(1) et 163(2) de la Loi ainsi que les intérêts doivent être rajustés en conséquence.

           L'appel de la cotisation établie pour l'année d'imposition 1999 est rejeté.

           Le tout sans frais.

Signé à Ottawa, Canada ce 16e jour de septembre 2004.

« Pierre R. Dussault »

Juge Dussault


Référence : 2004CCI611

Date : 20040916

Dossiers : 2002-2667(IT)I

ENTRE :

DANIEL LACASSE,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Dussault

[1]      Ce dossier concerne des appels de cotisations pour les années d'imposition 1996, 1997, 1998 et 1999 établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le Revenu (la « Loi » ). Les appels ont été entendus selon la procédure informelle.

[2]      Les cotisations ont été établies le 31 mai 2001, suite à une vérification du ministre du Revenu national (le « Ministre » ) selon la méthode de l'avoir net au terme de laquelle le revenu de l'appelant, qui n'avait déclaré aucun revenu pour ces années, a été établi à 23 308 $, 45 508 $, 43 792 $ et 46 147 $ pour chacune des années 1996 à 1999 respectivement.

[3]      Une pénalité pour production tardive des déclarations de revenu ainsi qu'une pénalité pour faute lourde ont aussi été cotisées en vertu des paragraphes 162(1) et 163(2) de la Loi pour chacune des années.

[4]      Le dossier de monsieur Lacasse a été ouvert par madame Louise Laroche, vérificatrice aux enquêtes spéciales de l'Agence des douanes et du revenu du Canada ( « ADRC » ), suite à une information obtenue d'un corps policier. Constatant que monsieur Lacasse n'avait pas produit de déclaration de revenu, une première lettre de l'ADRC en date du 27 mai 1999, lui demandait de produire un état signé de son actif et de son passif au 31 décembre des années 1995 à 1998, une continuité du compte capital du 1er janvier 1996 au 31 décembre 1998 incluant le détail de ses dépenses personnelles au cours de cette période, ainsi qu'une déclaration de revenu pour chacune des années d'imposition 1996, 1997 et 1998 (pièce I-1, onglet 1).

[5]      Cette première demande étant demeurée sans réponse, des demandes péremptoires de production des mêmes documents furent signifiées à monsieur Lacasse en date du 3 septembre 1999 (pièce I-1, onglet 2).

[6]      Le 5 octobre 1999, l'appelant produisait ses déclarations de revenu pour les années 1996, 1997 et 1998 en ne déclarant aucun revenu. Les cotisations initiales pour ces années ont été établies le 8 novembre 1999.

[7]      Le 4 novembre 1999, monsieur Mario Leporé, le comptable de l'appelant, demandait un délai additionnel pour la production des autres documents requis. Un délai lui fut accordé jusqu'au 20 décembre 1999. Les bilans de l'appelant au 31 décembre des années 1995 à 1998 ainsi qu'un état de l'évolution de sa situation financière, incluant le détail de ses dépenses personnelles du 1er janvier 1996 au 31 décembre 1998, sous la forme d'un état de l'avoir net de l'appelant et sa conjointe, madame Edith Blais, furent produits par monsieur Leporé le 8 décembre 1999 (pièce I-1, onglet 8).

[8]      L'état de l'avoir net soumis par monsieur Leporé indique un écart non expliqué de 15 187 $ pour l'année d'imposition 1996, un écart non expliqué de 19 025 $ pour l'année d'imposition 1997 et un revenu de 9 000 $ pour l'année d'imposition 1998, alors que les déclarations de revenu précédemment produites pour ces années n'indiquent aucun revenu.

[9]      Le 10 juillet 2000, une nouvelle demande était adressée à l'appelant de produire cette fois sa déclaration de revenu pour l'année d'imposition 1999. La déclaration produite subséquemment, malgré la date du 28 avril 2000 qui y est inscrite, n'indique aucun revenu (pièce I-1, onglet 10).

[10]     Constatant entre autres les contradictions entre les déclarations de revenu et l'état de l'avoir net produit, madame Laroche a alors procédé à une vérification en utilisant la méthode de l'avoir net dont les résultats ont été traduits dans des nouvelles cotisations établies le 31 mai 2001 (pièce I-8, volume 1, onglet 1 et documents à l'appui, pièce I-8 volumes 1, 2 et 3, onglets 2 à 8). Les nouvelles cotisations ont fait l'objet d'une opposition et elles ont été ratifiées le 22 mai 2002.

Questions en litige

[11]     La contestation de l'appelant porte sur les quatre questions suivantes, à savoir:

·         Les cotisations pour les années 1996 et 1997 ont-elles été établies après la période normale de nouvelle cotisation?

·         L'imposition d'une pénalité pour production tardive de la déclaration de revenu à l'égard de chacune des années d'imposition 1996 à 1999 est-elle justifiée?

·         L'inclusion des revenus non déclarés tels qu'établis par les nouvelles cotisations est-elle justifiée?

·         L'imposition de la pénalité prévue au paragraphe 163(2) de la Loi pour chacune des années 1996 à 1999 est-elle justifiée dans les circonstances?

1)        Les nouvelles cotisations concernant les années 1996 et 1997

[12]     Concernant cette première question en litige, il appert que les cotisations initiales pour les années 1996, 1997 et 1998 ont été établies le 8 novembre 1999 après la production des déclarations de revenu pour ces années à la suite des demandes de l'ADRC à cet effet. La première demande est en date du 27 mai 1999 et la deuxième est en date du 3 septembre 1999 (transcription du témoignage de madame Louise Laroche, le 23 octobre 2003, page 145). Dans les circonstances, il est clair que la période normale de nouvelle cotisation n'expirait que le 9 novembre 2002 par l'application du paragraphe 152(3.1) de la Loi. Ainsi, les cotisations établies le 31 mai 2001, se situent à l'intérieur de cette période. Il revient donc à l'appelant de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que les cotisations pour les années 1996 et 1997 sont erronées, tout comme il doit le faire d'ailleurs à l'égard des cotisations établies pour les années 1998 et 1999.

2)        L'application du paragraphe 162(1) de la Loi

[13]     La deuxième question en litige ne soulève quant à elle aucune difficulté dans les circonstances. Il a été clairement établi que la déclaration pour chacune des années en litige n'a pas été produite avant ou le 30 avril de l'année suivante tel que requis par l'alinéa 150(1)d) de la Loi. Elles ont été produites le 5 octobre 1999 pour les années 1996, 1997 et 1998 et en juillet 2000 seulement pour l'année 1999. Toutes les déclarations n'ont été produites que suite à des demandes péremptoires et ce, malgré les dates différentes dactylographiées et indiquées sous la signature de l'appelant sur les déclarations elles-mêmes, laissant par-là supposer qu'elles auraient été produites dans le délai prescrit, ce qui n'est évidemment pas le cas. L'application de la pénalité prévue au paragraphe 162(1) de la Loi est donc justifiée dans les circonstances. Pour le reste, il s'agit simplement d'en établir le quantum en fonction de l'impôt payable pour chaque année à la date de production normale et de l'impôt impayé à cette date jusqu'à la date effective de production de la déclaration.

3)        Les revenus non déclarés et l'utilisation de la méthode de l'avoir net

[14]     Lors de son témoignage, l'appelant a affirmé catégoriquement qu'il n'avait gagné strictement aucun revenu au cours des quatre années en litige, même pas la somme de 9 000 $ que son représentant, monsieur Mario Leporé a indiqué dans l'état de l'avoir net soumis aux autorités comme étant, en 1998, un revenu provenant de la société 9055-4460 Québec Inc. faisant affaires sous le nom de D.L. Contact. Selon l'appelant, cette société créée en août 1997 et dont il est le seul actionnaire et administrateur, aurait exploité une entreprise de transport par camion à compter de décembre 1997 sous contrat avec la société Les Transports Yvon Turcotte Ltée ( « Transports Turcotte » ). L'appelant a indiqué qu'il considérait cette somme de 9 000 $ plutôt comme un prêt, mais qu'il fallait en définitive s'en reporter à son comptable pour en connaître la nature véritable. Or, tel que mentionné, ce dernier a considéré la somme en question comme un revenu.

[15]     Sans aucun revenu durant les années en litige, l'appelant prétend essentiellement que lui-même et sa conjointe, madame Edith Blais ont vécu ou plutôt survécu grâce au salaire de celle-ci provenant de la société Disque Améric Inc. et à deux prêts, l'un de 20 000 $, consenti par la société Transports Turcotte le 29 mai 1998, et le deuxième de 22 000 $ consenti par un ami, monsieur Stéphane Gauthier, le 3 juin 1999. Je signale immédiatement ici que l'existence du premier prêt a été reconnue par l'ADRC, mais que son utilisation à des fins de dépenses personnelles a été refusée de sorte que le montant d'abord indiqué au passif, a par la suite été ajouté à celui des dépenses personnelles dans l'état de l'avoir net préparé par madame Laroche de l'ADRC pour l'année 1998 (pièce I-8, volume 1, onglets 1 et 2). L'existence du deuxième prêt, celui de 22 000 $ consenti par monsieur Stéphane Gauthier en 1999, n'a jamais été reconnue par l'ADRC.

[16]     La contestation de l'appelant porte donc au départ sur la reconnaissance de ces deux prêts. Ensuite, l'appelant conteste le montant des dépenses personnelles établi pour les années en litige par madame Laroche notamment à l'aide de statistiques compilées par Statistique Canada concernant les dépenses personnelles des individus ou des familles selon différentes régions du pays. Selon l'appelant et son comptable monsieur Leporé, l'utilisation de telles statistiques est totalement inappropriée et absolument abusive dans le cas présent puisque toutes les dépenses personnelles réelles de l'appelant et de sa conjointe ont été dévoilées à l'ADRC comme partie de l'état de l'avoir net soumis par monsieur Leporé avec tous les documents à l'appui. Lors de son témoignage, monsieur Leporé a, en effet, affirmé qu'il avait lui-même confectionné l'état de l'avoir net soumis aux autorités et plus particulièrement l'état des dépenses personnelles dans une proportion de 90 % à 95 % et ce, après avoir obtenu toutes les informations pertinentes des institutions financières, des fournisseurs de biens ou de services et des sociétés émettrices de cartes de crédit. Ainsi, selon lui, la presque totalité des dépenses indiquées à cet état correspondent à des dépenses réelles appuyées par des pièces justificatives. Seuls quelques postes de dépenses, pour la nourriture par exemple, ont fait l'objet d'une estimation puisqu'il n'existe pas de pièces justificatives à l'appui. Monsieur Leporé a mentionné que le premier document produit a, par la suite, été modifié pour tenir compte d'informations obtenues subséquemment. Cependant, aucun état modifié n'a été soumis en preuve.

[17]     Dans son témoignage, monsieur Leporé a aussi fait remarquer qu'il est impossible de produire un état de l'avoir net d'un contribuable qui soit totalement cohérent puisque l'appariement parfait des entrées et des sorties de fonds n'est ni réaliste ni réalisable par un contribuable qui n'est pas tenu de conserver toutes les pièces justificatives de ses dépenses dont une bonne partie peut d'ailleurs avoir été payée comptant.

[18]     Si la question des deux prêts et l'utilisation de statistiques par l'ADRC constituent les principaux éléments de la contestation de l'appelant, un élément additionnel spécifique de l'état de l'avoir net établi par madame Laroche a été contesté lors de l'audition.

[19]     Cette question concerne l'unité familiale de référence utilisée par madame Laroche de l'ADRC pour déterminer les dépenses personnelles selon les moyennes établies par Statistique Canada. Il appert, en effet, que madame Laroche a utilisé pour 1996, 1997 et 1998 les données compilées par Statistique Canada pour une famille comptant deux adultes et un enfant. Pour 1999, elle a utilisé les statistiques pour deux adultes seulement étant donné que monsieur Patrick Lacasse, le fils de l'appelant et de sa conjointe, avait quitté la résidence familiale à l'automne 1998. Or, il appert que Patrick Lacasse a atteint l'âge de 18 ans le 13 octobre 1996, qu'il gagnait déjà un revenu et qu'il subvenait à ses besoins. Ses déclarations de revenu pour les années 1996 à 2001 ont d'ailleurs été soumises en preuve (pièce A-3). L'avocat de l'appelant soutient que la vérificatrice aurait dû tenir compte de ce revenu.

[20]     Bien que j'ai refusé à l'avocat de l'appelant de modifier à nouveau de façon aussi tardive son avis d'appel dans le but d'y ajouter ce motif spécifique de contestation de l'état de l'avoir net préparé par madame Laroche, il ne me paraît pas approprié d'ignorer cette question et la preuve présentée à cet égard. J'y reviendrai un peu plus loin.

a)        La question des prêts

[21]     Lors de son témoignage, l'appelant a affirmé avoir obtenu le prêt de 20 000 $ consenti par Transports Turcotte sous forme de chèque en date du 29 mai 1998 (pièces A-2 et I-8, volume 3, onglet 15). Ce chèque aurait tout simplement été changé à la banque pour de l'argent comptant. L'appelant a d'abord affirmé avoir conservé cet argent liquide caché dans un tiroir de bureau de sa résidence, puis l'avoir utilisé pour payer ses dépenses courantes (transcription du témoignage de l'appelant, le 29 janvier 2003, page 31). Par la suite, l'appelant a mentionné que plusieurs personnes, membres de sa famille, lui avaient prêté de l'argent et qu'il aurait utilisé l'argent obtenu de Transports Turcotte pour rembourser des sommes de 1 500 $, de 1 800 $ ou de 2 000 $ qu'il devait de telle sorte que la somme de 20 000 $ avait été entièrement dépensée à la fin de l'année 1998 (transcription du témoignage de l'appelant, le 29 janvier 2003, pages 74 et 75). Plus loin, il a mentionné que les emprunts qu'il avait faits étaient de 1 500 $ et de 2 000 $, mais aussi de 3 000 $, de 4 000 $ et de 5 000 $. Sans toutefois apporter plus de précisions, il a estimé qu'environ la moitié de la somme de 20 000 $ aurait pu avoir été utilisée à rembourser de tels emprunts personnels (transcription du témoignage de l'appelant, le 29 janvier 2003, pages 131 et 132). Il est clair que le témoignage de l'appelant est imprécis, confus et incomplet sinon contradictoire concernant l'utilisation véritable du 20 000 $ obtenu de la société Transports Turcotte. Toutefois, l'existence de ce prêt a bel et bien été reconnue par l'ADRC et le montant a été porté au passif de l'état de l'avoir net de 1998 préparé par madame Laroche. Toutefois, estimant que l'utilisation exacte du montant du prêt n'était pas connue, celle-ci a, par la suite, ajouté le montant de 20 000 $ comme rajustement positif à l'état de l'avoir net de 1998 (pièce I-8, volume 1, onglet 1). J'estime que ce rajustement n'est pas justifié dans les circonstances.

[22]     Je reconnais d'emblée qu'aucune dette envers des particuliers n'apparaît à l'état de l'avoir net préparé par monsieur Leporé, le comptable de l'appelant. Aucune telle dette n'apparaît non plus à l'état de l'avoir net préparé par madame Laroche. Par ailleurs, celle-ci tout comme monsieur Leporé, ont retracé tous les actifs de l'appelant et de sa conjointe et il n'a jamais été allégué qu'ils puissent être propriétaires d'autres biens. Il est également à noter que l'état de l'avoir net établi par madame Laroche, et plus particulièrement l'utilisation des statistiques à l'égard de plusieurs types de dépenses, aboutit à la conclusion incontestable qu'une proportion importante des dépenses totales a été payée comptant (transcription du témoignage de madame Laroche, le 23 octobre 2003, pages 138 à 141 et pièce I-8, volume 2, onglet 1). Que la somme de 20 000 $ obtenue par l'appelant de la société Transports Turcotte ait été utilisée pour rembourser des emprunts qui n'apparaissent même pas au passif ou pour défrayer le coût de dépenses personnelles n'a, à mon avis, aucune importance et son ajout aux fins d'établir l'écart de l'avoir net de l'appelant pour l'année 1998, ne m'apparaît pas justifié une fois que l'existence du prêt a effectivement été reconnue par l'ADRC.

[23]     Qu'en est-il maintenant du deuxième prêt? Ce deuxième prêt au montant de 22 000 $ aurait été consenti à l'appelant par monsieur Stéphane Gauthier en date du 3 juin 1999. Un document intitulé « Contrat prêt d'argent sous seing privé » mais qui s'avère plutôt être une reconnaissance de dette a été soumis en preuve (pièce A-1). Ce document qui aurait été signé par les deux parties le 3 juin 1999 fait état que le prêt de 22 000 $ ne porte aucun intérêt et est remboursable le ou avant le 3 juin 2004.

[24]     L'authenticité de ce prêt n'a pas été reconnue par l'ADRC au motif que l'on doutait même de l'existence de monsieur Gauthier. Or, monsieur Gauthier existe bel et bien. Il a témoigné sur le prêt consenti à l'appelant qu'il a décrit comme une connaissance et un ami depuis une dizaine d'années. Selon monsieur Gauthier, l'appelant lui aurait indiqué à quelques reprises qu'il avait des problèmes financiers à cause notamment du fait qu'il avait débuté une entreprise de transport par camion et il lui aurait alors demandé s'il pouvait lui prêter de l'argent.

[25]     Monsieur Gauthier a affirmé que son père lui aurait donné, tout comme à ses trois frères, une somme de 50 000 $ suite à la vente de sa terre agricole en mars 1999 et que c'est une partie de cette somme qu'il aurait prêtée à l'appelant (transcription du témoignage de Stéphane Gauthier, le 24 octobre 2003, pages 7 et 13). Le prêt à l'appelant aurait été fait en argent liquide que monsieur Gauthier aurait retiré de la banque quelques jours plus tôt. L'appelant a affirmé qu'il avait conservé la somme en argent liquide cachée chez lui et qu'il l'avait utilisée pour ses dépenses et pour rembourser des prêts.

[26]     Lors de son témoignage l'appelant a affirmé pour sa part qu'il connaissait monsieur Gauthier depuis environ sept ans à l'époque, que celui-ci était devenu un ami et qu'il le voyait pratiquement à tous les deux jours (transcription du témoignage de l'appelant, le 29 janvier 2003, pages 75 et 76). Or, selon l'appelant, c'est parce que monsieur Gauthier avait hérité de son père décédé qu'il avait l'argent nécessaire pour faire un prêt (transcription du témoignage de l'appelant, le 29 janvier 2003, pages 26 et 27). Cette affirmation concernant l'héritage de monsieur Gauthier, suite au décès de son père, est fort différente de la version donnée par monsieur Gauthier qui a simplement mentionné que son père avait vendu sa terre en mars 1999 et qu'il avait fait un don à chacun de ses quatre fils. Si l'appelant et monsieur Gauthier se voyaient à tous les deux jours comme l'appelant l'a affirmé, il aurait dû être au courant que le père de monsieur Gauthier n'était pas décédé.

[27]     Par ailleurs, il a été mis en preuve que le revenu de monsieur Gauthier a été de 8 700 $, de 19 000 $ et de 18 000 $ pour chacune des années 1996 à 1998 respectivement. Bien que monsieur Gauthier ait expliqué que ses revenus étaient peu élevés parce qu'il avait aussi travaillé sur la ferme de son père pour une période d'environ un an avant la vente et qu'il était alors logé et nourri, il est difficile de croire qu'une personne avec des revenus aussi modestes ait accepté de prêter une somme supérieure à son revenu annuel, et ce, pour une période de cinq ans sans intérêt (transcription du témoignage de monsieur Gauthier, le 24 octobre 2003, pages 10 et suivantes).

[28]     Ayant également à l'esprit le peu de crédibilité du témoignage de l'appelant et le fait qu'il n'a aucunement hésité à mentir et même à faire usage d'un faux feuillet de renseignement fiscal pour obtenir un prêt d'une banque en février 1998 comme je l'expliquerai plus loin, j'ai aussi des doutes très sérieux quant à l'authenticité de ce prêt de monsieur Gauthier, de sorte que je ne suis pas disposé à lui reconnaître l'existence. Je suis donc d'avis que c'est à bon droit que l'ADRC a refusé de reconnaître ce prêt.

b)       L'état de l'avoir net préparé par l'ADRC et l'utilisation de statistiques

[29]     On sait, d'une part, que l'appelant n'a indiqué aucun revenu dans les déclarations produites à l'ADRC le 5 octobre 1999, pour les années 1996, 1997 et 1998 et, d'autre part que l'état de l'avoir net préparé par monsieur Leporé, signé par l'appelant et sa conjointe et soumis aux autorités le 8 décembre 1999 indique non seulement un écart positif pour les années 1996 et 1997, mais également un revenu de 9 000 $ pour l'année 1998.

[30]     Les informations obtenues par madame Laroche de l'ADRC lors de sa vérification lui ont aussi permis de constater que lors d'une demande de prêt à la Banque nationale du Canada en date du 20 février 1998, l'appelant avait indiqué que son revenu annuel était de plus ou moins 50 000 $ en 1997, soit un revenu mensuel brut de 4 166 $ et que ce revenu provenait de la société Transports Turcotte (pièce I-2).

[31]     Madame Laroche a aussi obtenu de la banque une copie d'un relevé 1 pour 1997, soit un feuillet de renseignements faisant état des revenus d'emploi et des revenus divers aux fins de l'impôt sur le revenu du Québec, remis à la banque par l'appelant pour attester de ses revenus (pièce I-3). Ce relevé en apparence émis par la société Transports Turcotte fait état d'un revenu d'emploi de 35 906,14 $ pour 1997 et de différentes déductions à la source.

[32]     Les contradictions flagrantes relevées par madame Laroche tant dans les documents produits par l'appelant que dans ceux obtenus de la banque étaient à mon avis suffisantes pour jeter un doute sérieux sur la véracité de toute information en provenance de l'appelant et notamment sur l'importance de ses dépenses personnelles telles que celles-ci ont été établies dans l'état de l'avoir net préparé par monsieur Leporé.

[33]     Mais, il y a beaucoup plus et c'est le témoignage de l'appelant lui-même qui permet de conclure que la situation financière présentée et plus particulièrement son niveau de vie ont peu à voir avec ses prétentions.

[34]     D'abord, je signalerai que dans son témoignage l'appelant a catégoriquement nié la véracité de l'information fournie à la banque dans le but d'obtenir le prêt dont il vient d'être question. Selon lui, il s'agissait carrément d'un mensonge fait précisément dans le but d'obtenir un prêt. Quant au relevé 1 remis à la banque, l'appelant a affirmé qu'il s'agissait d'un faux qu'il aurait lui-même rempli et remis à la banque au soutien de sa demande de prêt (transcription du témoignage de l'appelant, le 29 janvier 2003, pages 116 à 118).

[35]     Il est extrêmement difficile de concilier les dépenses personnelles de l'appelant telles qu'indiquées dans l'état de l'avoir net préparé par son comptable monsieur Leporé et celles établies par madame Laroche de l'ADRC notamment par l'utilisation de statistiques. Le fait que des rubriques différentes aient été utilisées rend l'exercice périlleux voire totalement futile à l'égard d'un certain nombre d'éléments. Néanmoins, il a clairement été démontré que l'état des dépenses personnelles préparé par monsieur Leporé et attesté par l'appelant et sa conjointe était loin de représenter les déboursés réels à l'égard de certaines dépenses plus facilement vérifiables.

[36]     Ainsi, sous la rubrique « assurances diverses » l'état présenté par l'appelant indique un montant de 500 $ pour chacune des années 1996, 1997 et 1998 (pièce I-1, onglet 8, page 4). Or, madame Laroche de l'ADRC a retracé au titre des seules primes d'assurance reliées au transport les sommes de 1 398 $, de 1 738,10 $ et de 1 218,70 $ pour chacune des années 1996 à 1998 respectivement (pièce I-8, volume 2, onglet 11, 1996 page 2, 1997 page 2, 1998 page 2).

[37]     Un autre exemple concerne la location de véhicules. Pour l'année 1997, l'état présenté par l'appelant indique que ses frais d'essence et ses frais de déplacement se sont élevés à 2 600 $ pour chacune des années 1996 à 1998 et que ses frais reliés à l'entretien et à la réparation de véhicules auraient été de 569 $, de 409 $ et de 443 $ pour chacune des années 1996 à 1998 respectivement (pièce I-1, onglet 8, page 4). Or, madame Laroche de l'ADRC a découvert que l'appelant avait loué des véhicules à plusieurs reprises en 1997 et que le coût total de ces locations se serait élevé à 9 383,43 $ pour l'année (pièce I-8, volume 2, onglet 11, 1997 page 2). Dans son témoignage, l'appelant a nié avoir loué des véhicules pour ce montant et, évidemment la somme de 9 383,43 $ n'apparaît nulle part dans l'état des dépenses soumis aux autorités.

[38]     Dans la mesure où la vérification pouvait démontrer que l'état soumis par l'appelant était incomplet en ce que certaines dépenses étaient, soit sous-estimées, soit tout simplement ignorées et ne présentait donc aucune ou très peu de garantie de fiabilité, le recours aux statistiques est apparu comme la seule option réaliste pour compléter cette vérification et tenter d'établir, de façon approximative certes, mais tout de même avec un certain réalisme, le niveau de vie de l'appelant et de sa conjointe au cours des années en litige. À mon avis, le recours aux statistiques est tout à fait justifié lorsque les informations fournies par un contribuable s'avèrent fausses ou incomplètes sous un aspect ou un autre.

[39]     Il m'apparaît également important de signaler que monsieur Robert Larochelle, agent des appels, a affirmé que lors d'une rencontre tenue le 7 janvier 2002 avec monsieur Leporé, celui-ci avait tenté de justifier le coût de vie peu élevé de l'appelant en disant que celui-ci était un aspirant motard qui se déplaçait un peu partout au Canada et qu'il vivait dans des clubs de motards. De son côté, lors de son témoignage, monsieur Leporé a nié avoir tenu de tels propos et il a affirmé avoir simplement mentionné que l'appelant était camionneur et qu'il se déplaçait au Canada. Toutefois, je ne crois pas que monsieur Larochelle ait inventé les propos rapportés. Quant à l'appelant lui-même, il a admis qu'il fréquentait un club de motards au cours des années en litige.

[40]     Si je m'en tiens au témoignage de l'appelant, j'estime qu'il n'a fait que renforcer le constat de la vérificatrice selon lequel l'état des dépenses soumis ne représentait pas totalement la réalité. Ainsi, tout au long de son témoignage, l'appelant a constamment tenté d'établir que ses dépenses personnelles étaient réduites, mais vraiment réduites au strict minimum vital. Un exemple concerne les dépenses de nourriture évaluées pour 1996, 1997 et 1998 à 3 900 $ par année ou 75 $ par semaine dans l'état des dépenses soumis (pièce I-1, onglet 8, page 4). Toutefois, selon l'appelant ce montant comprenait non seulement l'épicerie, mais également les frais de restaurant, le coût des produits de soins personnels et des produits d'entretien ménager (transcription du témoignage de l'appelant, le 29 janvier 2003, pages 36 et suivantes). Évidemment, ce montant global de 3 900 $ par année est bien en deçà de la moyenne des dépenses qu'une famille consacre à ces différents types de dépenses et qui s'élève à environ 8 000 $ par année.

[41]     Toutefois l'aspect le plus étonnant et le plus frappant du témoignage de l'appelant qui tentait ainsi, de façon constante, de minimiser son coût de vie a été de ne pas se souvenir ou de nier catégoriquement certaines dépenses qui pourtant sont facilement retraçables puisqu'elles ont été payées par chèque ou par carte de crédit. On peut à cet égard donner l'exemple des frais de téléphone. Ainsi, dans son témoignage l'appelant n'a mentionné que des frais de 26 $ par mois pour le téléphone, frais, qui selon lui, étaient inclus dans le coût du logement. De plus, il a affirmé ne pas se souvenir s'il possédait à l'époque un téléphone cellulaire ou une « pagette » . Toutefois, on peut constater que les frais payés à Cantel ont été de 3 369,71 $ et de 2 135,79 $ en 1996 et 1997 respectivement et que l'état de l'avoir net préparé par monsieur Leporé et soumis aux autorités indique de façon spécifique ces frais sous la rubrique « communications » (transcription du témoignage de l'appelant, le 29 janvier 2003, pages 41 et suivantes et 138 et suivantes; pièce I-1, onglet 8, page 4; pièce I-8, volume 2, onglet 11, 1996 page 2, 1997 page 2).

[42]     Un autre exemple du témoignage vague, confus et incomplet ou même contradictoire de l'appelant concerne les dons. En effet, l'appelant a affirmé n'avoir jamais fait de dons ou de cadeaux à qui que ce soit et avoir tout au plus acheté des fleurs à une seule occasion au cours des années en litige alors que la vérificatrice a retracé plusieurs achats chez des fleuristes et des bijoutiers (transcription du témoignage de l'appelant, le 29 janvier 2003, pages 149 et 150 et le 23 octobre 2003, pages 27 et 28; transcription du témoignage de madame Louise Laroche, le 23 octobre 2003, pages 121 et 122 et pièce I-8, volume 2, onglet 11).

[43]     Le témoignage de l'appelant n'est pas plus crédible en ce qui concerne ses séjours à l'hôtel. Alors qu'il a d'abord indiqué qu'il avait pu séjourner à l'hôtel une fois lors de l'anniversaire de sa conjointe en 1996 et, par la suite, qu'il était possible qu'il ait séjourné à l'hôtel et que sa conjointe avait aussi pu le faire, on peut retracer des frais d'hôtel sur ses cartes de crédits et celles de sa conjointe à près de 30 occasions différentes au cours des années en litige. (transcription du témoignage de l'appelant, le 29 janvier 2003, page 60 et le 23 octobre 2003 pages 18 et 19; transcription du témoignage de madame Louise Laroche, le 23 octobre 2003, pages 106 et suivantes et pièce I-8, volume 2, onglet 11). Sur ce point, l'appelant a, par la suite, renchéri en affirmant qu'il avait pu aussi prêter sa carte de crédit à un chauffeur de camion engagé par sa société pour des voyages aux États-Unis alors que lui-même y était interdit de séjour (transcription du témoignage de l'appelant, le 23 octobre 2003, page 30).

[44]     Lors de son témoignage, l'appelant a aussi affirmé à plusieurs reprises qu'il fallait s'en référer à son comptable pour des explications concernant certaines dépenses. À plusieurs occasions également, il a admis qu'il avait payé plusieurs dépenses en argent comptant. Interrogé à l'égard de dépenses spécifiques, il a souvent répondu que c'était une possibilité ou qu'il ne pouvait tout simplement pas confirmer si oui ou non il avait engagé telle ou telle dépense. À mon avis, c'est la personne qui a engagé une dépense et non le comptable qui peut, au premier titre, en témoigner.

[45]     Ainsi, comme je l'ai mentionné, l'impression générale qui se dégage est que l'appelant tentait constamment tout au long de son témoignage de minimiser l'importance de ses dépenses personnelles, soit en niant purement et simplement l'existence de celles-ci, soit en se retranchant derrière des réponses vagues ou mêmes contradictoires de façon à créer délibérément un état de confusion ou d'ambiguïté dont on ne peut tirer de conclusions certaines. D'un côté, l'appelant a fait état d'un style de vie réellement spartiate : les dépenses étaient réduites au minimum, il ne sortait pas, allait peu au restaurant si ce n'est au McDonald une fois par mois, il ne faisait aucun sport, il n'avait pas de loisir, il ne faisait de cadeau à personne, il ne fumait pas, si ce n'est à l'occasion des cigarettes offertes par d'autres et il allait parfois dans des bars mais ne buvait pas.

[46]     D'un autre côté, on constate des frais de communications de plus de 3 300 $ pour l'année 1996 et de plus de 2 100 $ pour l'année 1997, plusieurs achats chez des fleuristes et des bijoutiers, des locations de véhicules pour plus de 9 000 $ en 1997, une trentaine de séjour à l'hôtel aux cours des années en litige et ce, sans compter un voyage d'une semaine à Ixtapa au Mexique, cadeau d'amis pour services rendus... ou pour avoir été en quelque sorte leur confident... En somme, des éléments qui cadrent mal avec le niveau de vie minimal et austère décrit.

[47]     En réalité, comme le témoignage de l'appelant est truffé de faux-semblants et qu'il est parsemé de contrevérités, il devient pratiquement impossible d'en extraire le vrai du faux. Le moins que je puisse dire, est qu'il ne m'a certainement pas convaincu de façon prépondérante que les hypothèses de fait du Ministre à la base des cotisations et plus particulièrement l'utilisation de statistiques aux fins d'établir ses dépenses personnelles n'étaient pas justifiées ou fondées dans les circonstances. Ceci sous réserve d'un élément particulier se rapportant à l'hypothèse utilisée par la vérificatrice, madame Laroche, quant à l'unité familiale de référence comme comprenant deux adultes et un enfant pour les années 1996, 1997 et 1998. Je traiterai de cette question plus loin.

[48]     Quant au témoignage de monsieur Leporé, il ne m'a aucunement convaincu que l'état de l'avoir net préparé par madame Laroche était erroné de quelque manière que ce soit, sauf en ce qui concerne la question de l'unité familiale de référence que je viens de mentionner.

[49]     Ainsi, par exemple, monsieur Leporé a contesté un rajustement positif à l'égard d'une perte en capital non déductible de 7 150 $, suite à la vente d'une motocyclette Harley Davidson par l'appelant à sa conjointe en 1997. La motocyclette acquise par l'appelant au prix de 16 500 $ en 1995 a été transférée à sa conjointe au prix de 9 350 $. Or, dans l'état de l'avoir net préparé par madame Laroche, l'ajout de cette perte est compensé par la diminution de l'actif de l'appelant à la fin de l'année 1997 et le coût pour la conjointe de l'appelant, plus les frais encourus, est inscrit à l'actif de celle-ci à la fin de la même année. Il est par la suite reporté à son actif au début de l'année 1998 (pièce I-8, volume 1, onglets 1 et 7, volume 2, onglet 14). L'ajout de la perte non déductible n'a donc aucun impact en 1997 ou dans les années subséquentes, puisque cet ajout est compensé par la diminution du coût. En fait, le résultat est le même que si la perte résultant de la transaction avait été totalement ignorée.

[50]     En réalité, puisqu'il s'agit d'une transaction entre conjoints portant sur une immobilisation, le paragraphe 73(1) de la Loi établit que la transaction est réputée avoir été réalisée pour un montant égal au prix de base rajusté du bien de sorte qu'il n'en résulte aucune perte pour l'appelant et que le coût du bien pour sa conjointe est égal au coût initial du bien pour l'appelant. La transaction n'entraîne donc aucune perte et le résultat est le même que celui auquel en est arrivé madame Laroche.

c)        L'unité familiale de référence

[51]     Dans son témoignage, la vérificatrice madame Laroche, a affirmé qu'elle avait utilisé les statistiques se rapportant à une famille de deux adultes et d'un enfant comme hypothèse de base aux fins d'établir les dépenses personnelles de l'appelant et de sa conjointe pour les années 1996, 1997 et 1998. Toutefois, pour l'année 1999, l'hypothèse utilisée a été celle d'une famille comprenant deux adultes seulement puisqu'on l'avait informée que l'enfant de l'appelant avait quitté le domicile familial à l'automne 1998 (transcription du témoignage de madame Laroche, le 23 octobre 2003, pages 147 et suivantes).

[52]     Pour des raisons diverses, l'audition des présents appels qui avait débutée le 29 janvier 2003 n'a pu être continuée que le 23 octobre 2003. Dès le début de l'audition le 29 janvier 2003, l'avocat de l'appelant a soumis un avis d'appel modifié et l'avocat de l'intimée a produit une réponse modifiée à cet avis d'appel modifié. Lors de la reprise de l'audition, le 23 octobre 2003, l'avocat de l'appelant a voulu modifier à nouveau son avis d'appel de façon à y inclure un motif spécifique de contestation en rapport avec l'utilisation de statistiques pour établir les dépenses personnelles de l'appelant et de sa conjointe, motif fondé sur la participation financière du fils de l'appelant, Patrick Lacasse, aux dépenses de la famille. Si j'ai bien compris la position de l'avocat de l'appelant, il voulait en réalité que le revenu de Patrick Lacasse soit pris en compte dans l'état de l'avoir net établi par les autorités pour les années 1996, 1997 et 1998. J'ai alors refusé la modification réclamée par l'avocat de l'appelant, modification qui m'apparaissait tardive et susceptible d'entraîner de nouveaux délais pour l'audition de ces appels d'autant plus qu'ils étaient instruits en vertu de la procédure informelle. Toutefois, à la réflexion et compte tenu du fait que l'utilisation de statistiques est contestée de façon globale dans l'avis d'appel modifié, j'estime que je ne peux ignorer la preuve présentée selon laquelle, monsieur Patrick Lacasse a atteint l'âge de 18 ans le 13 octobre 1996, qu'il travaillait, qu'il avait un revenu, que ce revenu a été déclaré (pièce A-3) et, selon l'appelant, que son fils subvenait à ses propres besoins bien que sa participation aux dépenses de la famille puisse paraître assez marginale (transcription du témoignage de l'appelant, le 29 janvier 2003, page 120 et le 23 octobre 2003, pages 7 et 8).

[53]     Estimant quand même fort possible que monsieur Patrick Lacasse ait pu subvenir à ses propres besoins au cours des années 1996, 1997 et 1998, compte tenu du fait qu'il travaillait et gagnait quand même un revenu, même si celui-ci était modeste, j'estime qu'on devrait apporter des modifications aux calculs effectués par madame Laroche et résultant de l'utilisation des statistiques en ordonnant que les rajustements nécessaires soient faits pour tenir compte des dépenses de deux adultes seulement, et ce pour chacune des années 1996, 1997 et 1998. Comme le revenu de monsieur Patrick Lacasse n'a pas été pris en compte et que son utilisation n'a pas été analysée par madame Laroche, je crois que ces rajustements constituent une solution raisonnable dans les circonstances.

4)        Les pénalités en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi

[54]     Dans les déclarations de revenu pour les quatre années en litige, toutes produites uniquement après que des demandes péremptoires lui eurent été adressées, l'appelant n'a déclaré strictement aucun revenu bien que l'état d'avoir net préparé par son comptable et signé par lui-même et sa conjointe indique des écarts importants pour 1996 et 1997 et même un montant de 9 000 $ de revenu provenant de la société 9055-4460 Québec Inc., faisant affaire sous le nom de D.L. Contact, en 1998.

[55]     La preuve présentée par l'intimée établit également de façon probante que l'état de l'avoir net soumis aux autorités présente des lacunes importantes et que les dépenses personnelles y ont été sous-estimées de façon non-négligeable à plusieurs égards. De plus, le témoignage de l'appelant m'a convaincu qu'il a cherché de façon délibérée à mentir à plusieurs reprises de façon à minimiser l'importance de son train de vie qui s'avère par ailleurs loin d'être modeste pour quelqu'un qui a prétendu n'avoir gagné strictement aucun revenu au cours des quatre années en litige.

[56]     Ma conclusion est tout simplement que l'appelant n'a pu agir qu'en toute connaissance de cause en faisant de faux énoncés ainsi que des omissions importantes dans ses déclarations de revenu pour les quatre années en litige et que les pénalités cotisées en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi doivent être maintenues.

[57]     En conséquence de ce qui précède :

·         les appels des cotisations établies pour les années d'imposition 1996, 1997 et 1998 sont admis et les cotisations sont déférées au Ministre pour nouvel examen et nouvelles cotisations en tenant pour acquis :

             -      que tous les calculs de l'état de l'avoir net pour les trois années doivent être rajustés en utilisant comme hypothèse de base les dépenses d'une famille comptant deux adultes seulement;

             -      que l'ajout du prêt de 20 000 $ dans les rajustements de l'année 1998 doit être éliminé;

             -      que les pénalités en vertu des paragraphes 162(1) et 163(2) de la Loi ainsi que les intérêts doivent être rajustés en conséquence.

·         L'appel de la cotisation établie pour l'année d'imposition 1999 est rejeté.

·         Le tout sans frais.

Signé à Ottawa, Canada ce 16e jour de septembre 2004.

« Pierre R. Dussault »

Juge Dussault


RÉFÉRENCE :

2004CCI611

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2002-2667(IT)I

INTITULÉS DES CAUSES :

Daniel Lacasse et Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :

Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :

le 29 janvier 2003 et

les 23 et 24 octobre 2003

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :

l'honorable juge P. R. Dussault

DATE DU JUGEMENT :

le 16 septembre 2004

COMPARUTIONS :

Avocat de l'appelant :

Me Éric Morin

Avocat de l'intimée :

Me Yanick Houle

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER:

Pour l'appelant :

Nom :

Ville :

Me Éric Morin

Laval (Québec)

Pour l'intimée :

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

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