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Dossiers : 2002-2743(EI), 2002-2744(EI)

2002-2745(EI), 2002-2746(EI) et 2002-3730(EI)

ENTRE :

COMMISSION DE LA

CONSTRUCTION DU QUÉBEC,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

____________________________________________________________________

Appels entendus sur preuve commune avec les appels de Luigi Pace (2002-1724(EI)), Robert Benoit (2002-2271(EI)), Pierre Gagnon (2002-2687(EI)) et Serge Lefebvre (2002-3221(EI))

les 14 et 15 septembre, 2004 à Montréal (Québec)

Devant : L'honorable juge Louise Lamarre Proulx

Comparutions :

Avocat de l'appelante :

Me André Lareau

Avocate de l'intimé :

Me Natalie Goulard

____________________________________________________________________

JUGEMENT

          Les appels en vertu du paragraphe 103(1) de la Loi sur l'assurance-emploi concernant les décisions du ministre du Revenu national sont rejetés et les décisions du Ministre sont confirmées, selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 17e jour de décembre, 2004.

« Louise Lamarre Proulx »

Juge Lamarre Proulx


Dossier : 2002-1724(EI)

ENTRE :

LUIGI PACE,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

COMMISSION DE LA CONSTRUCTION DU QUÉBEC,

intervenante.

____________________________________________________________________

Appel entendu sur preuve commune avec les appels de Commission de la Construction du Québec (2002-2743(EI), 2002-2744(EI), 2002-2745(EI), 2002-2746(EI) et 2002-3730(EI)), Robert Benoit (2002-2271(EI)),

Pierre Gagnon(2002-2687(EI)) et Serge Lefebvre (2002-3221(EI))

les 14 et 15 septembre, 2004 à Montréal (Québec)

Devant : L'honorable juge Louise Lamarre Proulx

Comparutions :

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

Avocate de l'intimé :

Me Natalie Goulard

Avocat de l'intervenante :

Me André Lareau

____________________________________________________________________

JUGEMENT

          L'appel en vertu du paragraphe 103(1) de la Loi sur l'assurance-emploi concernant la décision du ministre du Revenu national est rejeté et la décision du Ministre est confirmée, selon les motifs du jugement ci-joints dans la cause de Commission de la Construction du Québec.

Signé à Ottawa, Canada, ce 17e jour de décembre, 2004.

« Louise Lamarre Proulx »

Juge Lamarre Proulx


Dossier : 2002-2271(EI)

ENTRE :

ROBERT BENOIT,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

____________________________________________________________________

Appel entendu sur preuve commune avec les appels de Commission de la Construction du Québec (2002-2743(EI), 2002-2744(EI), 2002-2745(EI), 2002-2746(EI) et 2002-3730(EI)), Luigi Pace (2002-1724(EI)),

Pierre Gagnon(2002-2687(EI)) et Serge Lefebvre (2002-3221(EI))

les 14 et 15 septembre, 2004 à Montréal (Québec)

Devant : L'honorable juge Louise Lamarre Proulx

Comparutions :

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

Avocate de l'intimé :

Me Natalie Goulard

____________________________________________________________________

JUGEMENT

          L'appel en vertu du paragraphe 103(1) de la Loi sur l'assurance-emploi concernant la décision du ministre du Revenu national est rejeté et la décision du Ministre est confirmée, selon les motifs du jugement ci-joints dans la cause de Commission de la Construction du Québec.

Signé à Ottawa, Canada, ce 17e jour de décembre, 2004.

« Louise Lamarre Proulx »

Juge Lamarre Proulx


Dossier : 2002-2687(EI)

ENTRE :

PIERRE GAGNON,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

____________________________________________________________________

Appel entendu sur preuve commune avec les appels de Commission de la Construction du Québec (2002-2743(EI), 2002-2744(EI), 2002-2745(EI), 2002-2746(EI) et 2002-3730(EI)), Luigi Pace (2002-1724(EI)),

Robert Benoit(2002-2271(EI)) et Serge Lefebvre (2002-3221(EI))

les 14 et 15 septembre, 2004 à Montréal (Québec)

Devant : L'honorable juge Louise Lamarre Proulx

Comparutions :

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

Avocate de l'intimé :

Me Natalie Goulard

____________________________________________________________________

JUGEMENT

          L'appel en vertu du paragraphe 103(1) de la Loi sur l'assurance-emploi concernant la décision du ministre du Revenu national est rejeté et la décision du Ministre est confirmée, selon les motifs du jugement ci-joints dans la cause de Commission de la Construction du Québec.

Signé à Ottawa, Canada, ce 17e jour de décembre, 2004.

« Louise Lamarre Proulx »

Juge Lamarre Proulx


Dossier : 2002-3221(EI)

ENTRE :

SERGE LEFEBVRE,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

____________________________________________________________________

Appel entendu sur preuve commune avec les appels de Commission de la Construction du Québec (2002-2743(EI), 2002-2744(EI), 2002-2745(EI), 2002-2746(EI) et 2002-3730(EI)), Luigi Pace (2002-1724(EI)),

Robert Benoit(2002-2271(EI)) et Pierre Gagnon (2002-2687(EI))

les 14 et 15 septembre, 2004 à Montréal (Québec)

Devant : L'honorable juge Louise Lamarre Proulx

Comparutions :

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

Avocate de l'intimé :

Me Natalie Goulard

____________________________________________________________________

JUGEMENT

          L'appel en vertu du paragraphe 103(1) de la Loi sur l'assurance-emploi concernant la décision du ministre du Revenu national est rejeté et la décision du Ministre est confirmée, selon les motifs du jugement ci-joints dans la cause de Commission de la Construction du Québec.

Signé à Ottawa, Canada, ce 17e jour de décembre, 2004.

« Louise Lamarre Proulx »

Juge Lamarre Proulx


Référence : 2004CCI826

Date : 20041217

Dossiers : 2002-2743(EI), 2002-2744(EI),

2002-2745(EI), 2002-2746(EI) et 2002-3730(EI)

ENTRE :

COMMISSION DE LA CONSTRUCTION DU QUÉBEC,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

MOTIFS DU JUGEMENT

La juge Lamarre Proulx

[1]      Ces appels ont été entendus sur preuve commune. L'appelante en appelle des décisions du ministre du Revenu national (le « Ministre » ), en date du 15 avril 2002, du 15 mai 2002 et du 13 septembre 2002 confirmant des évaluations pour les années 1997 à 2001, établies en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi (la « Loi » ).

[2]      L'appelante est une personne morale instituée par la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction, L.R.Q. chap. R-20 ( « Loi R-20 » ).

[3]      Les évaluations visées par les présents appels concernent les sommes versées aux travailleurs par l'appelante pour des services rendus auprès d'employeurs à la suite de poursuites faites contre ces derniers par l'appelante pour les différents motifs exprimés à l'article 81 de la Loi R-20 qui se lit comme suit :

Pouvoirs de la Commission.

81.        En vue d'assurer la mise à exécution d'une convention collective, la Commission peut :

a)          exercer les recours qui naissent de la présente loi ou d'une convention collective en faveur des salariés qui n'ont pas fait signifier de poursuite dans un délai de 15 jours de l'échéance, et ce, nonobstant toute loi à ce contraire, toute opposition ou     de la présente loi ou d'une convention collective en faveur des salariés et qu'ils peuvent exercer envers eux;

b)          aux mêmes conditions, reprendre l'instance au lieu et place de tout salarié qui, ayant fait signifier une telle poursuite, a négligé de procéder pendant 15 jours;

c)          recouvrer tant de l'employeur que du salarié qui violent les clauses d'une convention collective relatives à la rémunération en monnaie courante et aux indemnités ou avantages ayant une valeur pécuniaire, et de chacun d'eux, une somme égale à 20 % de la différence entre le montant obligatoire et celui effectivement payé;

c.1)       recouvrer tant du salarié visé au paragraphe c qui exécute des travaux de construction sans être titulaire du certificat de compétence ou bénéficiaire d'une exemption requis pour les travaux qu'il exécute que de son employeur, une somme supplémentaire égale à 20 % de la différence entre le montant obligatoire et celui effectivement payé;

c.2)       recouvrer de l'employeur qui omet de lui transmettre le rapport mensuel visé au paragraphe b du premier alinéa de l'article 82 les sommes correspondant aux indemnités, contributions, cotisations et prélèvements qui auraient dû être transmises avec ce rapport, et un montant supplémentaire égal à 20 % de ces sommes; le montant ainsi réclamé peut être établi au moyen d'une expertise basée sur l'étendue des travaux faisant l'objet du contrat exécuté par l'employeur ou par tout autre moyen de preuve permettant d'établir les heures de travail nécessaires à la réalisation de ces travaux;

d)          effectuer tout règlement, compromis ou transaction jugé convenable dans les cas prévus aux paragraphes a à c.2;

e)          à toute heure raisonnable, examiner le système d'enregistrement, le registre obligatoire et la liste de paie de tout employeur, en prendre des copies ou extraits, vérifier auprès de tout employeur et de tout salarié le taux du salaire, la durée du travail et l'observance des autres clauses d'une convention collective;

f)           à toute heure raisonnable et même au lieu du travail, requérir de tout employeur ou de tout salarié les renseignements jugés nécessaires ou exiger de ces personnes qu'elles fournissent ces renseignements par écrit à la Commission dans un délai de 10 jours francs suivant la remise d'une demande écrite à cet effet ou suivant le jour où cette demande leur est laissée par tout moyen approprié;

g)          par demande écrite adressée à tout employeur, exiger qu'une copie qu'elle lui transmet de l'échelle des salaires rendus obligatoires, ou de toute décision ou règlement, soit affichée et maintenue affichée à un endroit convenable et de la façon prescrite dans la demande;

h)          par résolution, accorder à tout salarié d'après la preuve jugée suffisante d'aptitudes physiques ou mentales restreintes un certificat l'autorisant à travailler à des conditions déterminées et différentes de celles prévues par une convention collective.

[4]      Le paragraphe 1(2) et l'article 10 du Règlement sur la rémunération assurable et la perception des cotisations (le « Règlement » ) se lisent comme suit :

[. . . ]

1.(2) Pour l'application de la partie IV de la Loi et pour l'application du présent règlement, « employeur » s'entend notamment d'une personne qui verse ou a versé la rémunération d'un assuré pour des services rendus dans l'exercice d'un emploi assurable.

[. . . ]

10.(1) Lorsque, dans un cas non prévu par le présent règlement, un assuré travaille :

a)      soit sous la direction générale ou la surveillance directe d'une personne qui n'est pas son véritable employeur, ou est payé par une telle personne,

b)     soit avec l'assentiment d'une personne qui n'est pas son véritable employeur dans un lieu ou un local sur lequel cette personne a certains droits ou privilèges aux termes d'une licence, d'un permis ou d'une convention,

cette personne est réputée, aux fins de la tenue des registres, du calcul de la rémunération assurable de l'assuré ainsi que du paiement, de la retenue et du versement des cotisations exigibles à cet égard aux termes de la Loi et du présent règlement, être l'employeur de l'assuré conjointement avec le véritable employeur.

(2) Le montant de la cotisation patronale payée par la personne réputée être l'employeur en vertu du paragraphe (1) est recouvrable par celle-ci auprès du véritable employeur.

(3) Lorsque la personne qui est réputée être l'employeur d'un assuré en vertu du présent règlement ne paie pas, ne retient pas ou ne verse pas les cotisations qu'un employeur est tenu de payer, de retenir ou de verser aux termes de la Loi ou du présent règlement, les dispositions des parties IV et VI de la Loi s'appliquent à elle comme s'il s'agissait du véritable employeur.

[5]      Le texte anglais est le suivant :

1.(2) For the purposes of Part IV of the Act and for the purposes of these Regulations, "employer" includes a person who pays or has paid earnings of an insured person for services performed in insurable employment.

[. . . ]

10(1) Where, in any case not coming within any other provision of these Regulations, an insured person works

(a)         under the general control or direct supervision of, or is paid by, a person other than the insured person's actual employer, or

(b)         with the concurrence of a person other than the insured person's actual employer, on premises or property with respect to which that other person has any rights or privileges under a licence, permit or agreement,

that other person shall, for the purposes of maintaining records, calculating the insurable earnings of the insured person and paying, deducting and remitting the premiums payable on those insurable earnings under the Act and these Regulations, be deemed to be the employer of the insured person in addition to the actual employer.

10(2)     The amount of any employer's premium paid by the person who is deemed to be the employer under subsection (1) is recoverable by that person from the actual employer.

10(3)     Where a person who is deemed under these Regulations to be an employer of an insured person fails to pay, deduct or remit the premiums that an employer is required to pay, deduct or remit under the Act or these Regulations, the provisions of Parts IV et VI of the Act shall apply to the person as if the person were the actual employer.

[6]      Au début de l'audience, l'avocate de l'intimé a apporté les corrections suivantes à quelques Réponses à l'avis d'appel :

1) Dans le dossier 2002-2743(EI), à l'alinéa 24 f), le nombre « 27 » doit être remplacé par le nombre « 29 » et à l'alinéa 24 g), les mots " l'appelante n'a retenu aucun montant" doivent être remplacés par "l'appelante n'a pas retenu les montants suffisants"

2) Dans le dossier 2002-3730(EI), l'alinéa 25 g) est remplacé par Selon les feuillets T4 préparés par l'appelante, il y a eu une retenue d'assurance-emploi pour l'année en litige, mais celle-ci était insuffisante.

3) Dans le même dossier, l'alinéa 25 h) est remplacé par Il existe un écart de 47 324,90 $ entre les cotisations d'assurance-emploi qui ont été remises et celles qui sont dues.

[7]      Les parties ont fait mention d'un fonds d'indemnisation créé pour les fins de certaines dispositions de l'article 122 de la Loi R-20. On trouverait une mention de ce fonds spécial d'indemnisation à l'article 13 du Règlement sur le registre, le rapport mensuel, les avis des employeurs et la désignation d'un représentant. Dans la présente affaire, les cotisations ne sont pas censées avoir été établies sur des sommes qui auraient été versées à même ce fonds. Les parties sont d'accord que les sommes versées aux travailleurs à même ce fonds ne sont pas nécessairement sujettes aux cotisations établies en vertu de la Loi. L'intimé ne croit pas avoir établi ses cotisations sur de telles sommes et selon ce dernier, c'est à l'appelante à faire la preuve que certains de ces montants proviennent de ce fonds.

[8]      Au cours de l'audience, le financement du fonds d'indemnisation pour les fins de l'article 122 de la Loi R-20 a été expliqué. Il est prévu dans les conventions collectives que les employeurs doivent verser une somme équivalant à 0,02 $ de l'heure travaillée par chacun de leurs employés. Cet argent est versé dans le fonds pour indemniser les travailleurs dans le cas de faillite de l'employeur.

[9]      Selon les énoncés des Réponses à l'avis d'appel, il y a eu des retenues et des versements effectués par l'appelante en conformité avec la Loi, mais le montant retenu n'était pas suffisant. Ces versements ont été faits sous réserve du présent appel, selon monsieur Jean Ménard, directeur des services juridiques de l'appelante, un témoin dans cette affaire.

[10]     Monsieur Ménard explique qu'une des fonctions importantes de l'appelante est d'administrer les conventions collectives conclues dans l'industrie de la construction. Depuis 1994, cette industrie a été divisée en quatre secteurs : le secteur résidentiel, le secteur génie civil et voirie, le secteur industriel et le secteur institutionnel et commercial. Pour chacun de ces secteurs, il y a une convention collective.

[11]     En vertu de l'article 81 de la Loi R-20, la Commission exerce les recours des salariés qui ont comme origine ces conventions collectives. Elle perçoit auprès des employeurs les sommes impayées aux travailleurs soit parce que la rémunération sur laquelle les travailleurs et les employeurs s'étaient entendus était moindre que celle prévue aux conventions collectives, soit que les registres ne faisaient pas état d'une rémunération ou encore que les salaires n'avaient pas été versés. La Commission intente des poursuites et ne fait un paiement à un salarié qu'à partir du moment où elle a réussi à récupérer de l'employeur les sommes dues, soit après un jugement ou après un paiement volontaire de l'employeur.

[12]     Quand la Commission remet l'argent au salarié, elle procède aux déductions fiscales. La Commission émet des T4. Il y a également les déductions syndicales. La Commission a le pouvoir de réclamer les différentes cotisations prévues par les conventions collectives et la Commission remet aux associations syndicales les cotisations perçues.

[13]     Un cahier de documents a été déposé comme pièce A-1. Il contient quatre onglets.

[14]     À l'onglet 2 se trouve une lettre en date du 7 décembre 1977, envoyée par Revenu Canada à ce qui était avant la Commission, l'Office de la construction du Québec. Cette lettre informait l'Office de la construction du Québec qu'elle devait retenir et remettre les montants déduits à la source pour les fins de l'impôt. Le témoin a lu le paragraphe 3 de cette lettre :

Comme il incombe à votre organisme, à partir de l'année 1977, de produire les feuillets T-4 relatifs aux renseignements ci-haut mentionnés, nous vous demandons de bien vouloir compléter les formules T-4 supplémentaires de la façon suivante : Inscrire à la case « C » le ou les bénéfices payés par votre organisme à chacun de vos membres. Les gains rapportés à la « C » n'étant pas des bénéfices assurables, le mot « nil » devra apparaître dans les cases « E » et « H » et la lettre « X » devra aussi apparaître à la case « J » à l'item assurance-chômage (A.C.).

[15]     Selon le témoin, cela voulait dire qu'il n'y avait pas de remises à faire à l'égard de l'assurance-chômage.

[16]     Le 24 novembre 2000 (pièce A-2), l'appelante a écrit à l'Agence des douanes et du revenu du Canada ( « ADRC » ) pour accepter de retenir dorénavant les cotisations et de les verser à l'ADRC, mais que ceci était sous réserve de leur recours au contraire. La lettre mentionne que, bien qu'elle conteste la validité des sommes réclamées, la Commission effectuera dorénavant, et ce jusqu'au règlement complet du présent litige, les retenues à la source en matière d'assurance-emploi sur les sommes que remet la Commission aux employés à qui des sommes sont dues par les employeurs. La Commission réclamera aussi des employeurs en défaut les cotisations patronales à l'assurance-emploi sur les sommes dues par ces employeurs à leurs employés.

[17]     Il y a tout de même des cotisations pour l'année 2001. L'explication est que la Commission a changé ses façons de faire et a commencé à percevoir des employeurs et à retenir à la source les sommes relatives aux cotisations d'assurance-emploi, mais ce processus s'est fait de façon graduelle et les sommes payées en 2001 aux travailleurs n'avaient pas toujours été sujettes à ces déductions.

[18]     La Commission a été reconnue comme un organisme provincial de main-d'oeuvre au sens du paragraphe 2(2) du Règlement sur la rémunération assurable et la perception des cotisations. La lettre le confirmant a été envoyée le 28 décembre 2001 (onglet 3 de la pièce A-1). Le témoin a lu le premier et le dernier paragraphe de cette lettre.

La présente fait suite à la demande de la Commission de la construction du Québec ainsi qu'à votre lettre du 20 septembre 2001. Vous cherchez à obtenir une confirmation à l'effet que la Commission de la construction du Québec (CCQ) constitue un organisme provincial de main-d'oeuvre au sens du paragraphe 2(2) du Règlement sur la rémunération assurable et la perception des cotisations.

. . .

Nous vous soulignons également qu'une note de service a été émise à tous nos bureaux des services fiscaux et centres fiscaux les avisant que la CCQ constitue un organisme provincial de main-d'oeuvre au sens du paragraphe 2(2) du Règlement sur la rémunération assurable et la perception des cotisations.

[19]     Le paragraphe 2(2) du Règlement se lit comme suit :

2(2) Pour l'application de la présente partie, le total de la rémunération d'un assuré provenant d'un emploi assurable comprend la partie impayée de cette rémunération qui n'a pas été versée à cause de la faillite de l'employeur, de sa mise sous séquestre effective ou imminente ou d'un non-paiement de rétribution à l'égard duquel l'assuré a déposé une plainte auprès de l'organisme fédéral ou provincial de main-d'oeuvre. Est exclu du total de la rémunération tout montant impayé qui se rapporte au temps supplémentaire ou qui aurait été versé en raison de la cessation de l'emploi.

[20]     J'ai rapporté l'événement ci-dessus parce qu'il faisait partie de la preuve mais il n'a aucune conséquence sur le sort de ces appels qui portent sur le sens à donner au terme « employeur » tel que défini par le Règlement.

[21]     L'intimé a déposé un cahier de pièces contenant 17 onglets comme pièce I-1.

[22]     En contre-interrogatoire, le témoin a admis connaître la lettre en date du 19 juin 1998, pièce I-1, onglet 9. Cette lettre se lit comme suit :

Juin 19 1998

Commission de la construction du Québec

3530, rue Jean-Talon Ouest

Montréal, (Québec) H3R 2G3

à l'attention de M. Gérard Lawless, ca

Monsieur,

La présente fait suite à notre rencontre du 13 décembre 1994, à savoir si oui ou non la CCQ doit retenir des cotisations d'assurance-emploi sur les montants qu'elle récupère des employeurs et qu'elle verse à leurs employés.

Suite à notre rencontre, nous avons demandé un avis juridique à nos conseilles. Ceux-ci sont d'avis que la CCQ est l'employeur présumé pour les fins du Règlement sur la rémunération assurable et la perception des cotisations. Cette décision est également appuyée par la décision de la Cour canadienne de l'Impôt numéro 92-108(UI) Commission de la construction du Québec contre le Ministre du revenu national en date du 1er juin 1993.

Par conséquent, nous sommes d'avis que la CCQ est un employeur réputé et qu'elle doit retenir les cotisations d'assurance-emploi requises sur les montants qu'elle récupère des employeurs et verse aux travailleurs. Toutefois, la CCQ n'est pas un nouvel employeur et elle ne doit retenir et verser que les cotisations que l'employeur aurait retenues et versées s'il avait payé ce/ces montant(s) directement à l'employé.

Les montants émanant du fond d'indemnisation, versés par la CCQ aux travailleurs, ne sont pas assujettis aux cotisations d'assurance-emploi.

Comme il incombe à votre organisme de produire les feuillets T4 relatifs aux renseignements ci-haut mentionnés, nous vous demandons de bien vouloir compléter les formules T4 supplémentaires de la façon suivante :

Case « 14 » indiquer le montant des sommes versé par votre organisme au travailleur.

Case « 18 » indiquer le montant des cotisations d'assurance-emploi (par employé) déduites sur le paiement fait au travailleur. Dans le cas d'un montant provenant du fond d'indemnisation et considérant que ces sommes ne sont pas assujetties inscrire « NIL » .

Case « 24 » indiquer le montant de la rémunération assurable sur lequel vous avez calculé les cotisations d'assurance-emploi. Tel qu'à la case « 18 » pour les sommes provenant du fond d'indemnisation inscrire « NIL » .

Case « 28 » inscrire la lettre « X » à l'item AE Exemption, lorsque les sommes proviennent du fond d'indemnisation.

Les employeurs qui font l'objet d'une cotisation de la Commission de la construction du Québec devront être avisés de ne pas produire de feuillet T4 supplémentaire, pour les sommes remises à votre organisme, lors de la visite de vos vérificateurs.

...

[23]     En date du 27 mars 2000, il y a une autre lettre confirmant la lettre ci-dessus.

Arguments

[24]     L'avocat de l'appelante fait valoir que la personne autre que le véritable employeur, mentionnée à l'article 10 du Règlement, devrait être selon le contexte du Règlement un employeur exerçant des activités à peu près semblables à celles de l'employeur. Cet argument se fonde sur l'usage du terme véritable dans un texte parlé ou écrit. Ainsi, une personne qui demande un objet en cuir véritable dans un magasin le demande par opposition aux objets en similicuir.

[25]     En ce qui concerne le concept juridique de paiement, l'avocat de l'appelante fait valoir que le paiement est fait dans le but d'éteindre une obligation. Or, il n'y a pas d'obligation de rémunération pour services rendus à la Commission.

[26]     L'avocate de l'intimé fait valoir que le terme véritable dans le contexte du Règlement est en opposition à "présumé en vertu de la Loi". Il s'agit d'un Règlement qui a pour objet de constituer en employeur une personne qui n'est pas l'employeur, mais le payeur. Le payeur n'est pas le véritable employeur mais il est l'employeur présumé.

[27]     L'avocate de l'intimé se réfère à la décision Insurance Corp. of British Columbia c. Canada, [2002] A.C.F. no 380 (Q.L.), et fait valoir qu'il ne faut pas interpréter le terme « payer » dans un sens juridique contractuel trop restreint. Il faut lui donner le sens de verser la rémunération dans un but d'éteindre les obligations nées entre l'employeur et le travailleur ou qui auraient dû naître si l'employeur s'était conformé aux conventions collectives en application.

[28]     Elle se réfère aux paragraphes 4 à 9 de cette décision :

[4]         ICBC a interjeté appel de cette décision devant la Cour canadienne de l'impôt. Le juge de la Cour canadienne de l'impôt a accueilli l'appel. Il a rejeté l'argument de la ICBC selon lequel, en tant que représentante de la Couronne provinciale, elle échappait aux dispositions du règlement fédéral. Cependant, il a conclu que la ICBC n'était pas visée par l'article 10, parce qu'on ne pouvait pas dire qu'elle avait « payé » Mme Harvey. Il en est venu à cette conclusion parce qu'à son avis, le terme « payé » , employé à l'article 10, ne peut s'appliquer lorsque l'argent qui est transféré est légalement dû par l'auteur du transfert au destinataire du transfert.

[5]         Je suis d'avis que le juge de première instance a inutilement donné une interprétation stricte au mot « payé » dans l'article 10 du Règlement. De ce fait, il a erronément conclu que, lorsque la ICBC a transféré à Mme Harvey le montant de salaire, tel que convenu entre M. Lake et Mme Harvey, elle ne « payait » pas un assuré, tel que cela est défini dans la Loi sur l'assurance-emploi. En arrivant à cette conclusion, il a invoqué des définitions du verbe « payer » provenant d'un traité et du dictionnaire, de même qu'un arrêt de notre Cour, Canada (Procureur général) c. Théorêt ((1988), 61 D.L.R. (4th) 289) (C.A.F.). Il a interprété le mot comme signifiant que quelqu'un ne « paye » que lorsqu'il a une obligation juridique de le faire à l'égard précisément du bénéficiaire.

[6]         Je ferai d'abord remarquer que l'arrêt Théorêt, bien qu'il porte précisément sur une version antérieure de l'article 10 du Règlement, s'est concentré sur des questions différentes. La Cour était alors divisée en ce qui concerne la question de savoir si la personne visée par la cotisation comme payeuse était une « mandataire » de la personne fournissant les fonds et si ce fait était déterminant quant à savoir si l'on pouvait dire que cette personne visée avait « payé » dans le sens du règlement d'alors. Cela impliquait des questions d'interprétation de l'article 1715 du Code civil du Bas-Canada. Je ne crois pas que cette cause soit utile, parce que premièrement, il n'y a pas eu de décision majoritaire concernant la question cruciale, deuxièmement, elle n'était pas centrée sur le sens du règlement comme tel et, troisièmement, elle impliquait un prétendu agent payant, non au nom de l'employeur réel, mais au nom d'un prêteur à cet employeur, tous des faits que l'on ne retrouve pas en l'espèce.

[7]         Les définitions générales de « payer » ou de « payé » provenant d'un traité et du dictionnaire ne sont pas plus utiles pour l'interprétation de « payé » comme il est employé dans le contexte de l'article 10 du Règlement.

[8]         Le but du Règlement et de la loi qui l'autorise consiste, en partie, à faciliter la perception des cotisations d'assurance-emploi, une activité qui est essentielle au système tel qu'il existe actuellement. La Loi autorise clairement le genre de dispositions qui ont été adoptées par le gouverneur en conseil dans l'article 10 du Règlement. En examinant l'article 10, on voit qu'il est censé s'appliquer, entre autres choses, lorsqu'un employé qui est assuré est [TRADUCTION] « payé par une personne qui n'est pas son véritable employeur » . Dans un tel cas, cette « autre personne » doit conserver des relevés d'emploi et calculer, déduire et verser les cotisations appropriées. La proposition est assez simple et son but est clair : les cotisations doivent être retenues à la source lorsque le traitement ou le salaire est calculé et administré et lorsque les paies ou les chèques sont émis. Le terme « payé » doit être interprété dans son contexte et il n'est pas nécessaire d'examiner les sources techniques dans le but de lui attribuer un sens qui irait à l'encontre du but clairement recherché par l'article. Il serait également possible, si quelqu'un devait s'attarder sur des concepts juridiques abstraits, de décider qu'une personne ne pourra être un « véritable employeur » que si la personne paie l' « employé » avec ses propres ressources et non aux frais d'une autre. Mais, cela irait aussi à l'encontre du but recherché par l'article en empêchant son application à toute situation où, dans les faits, un tiers fournirait ou administrerait le traitement ou le salaire.

9           J'en suis d'autant plus convaincu que plusieurs décisions de la Cour canadienne de l'impôt sont compatibles avec la conclusion que l' « autre personne » peut être considérée avoir « payé » l'employé de quelqu'un d'autre sans avoir d'obligation juridique à cet effet envers ledit employé. (Voir Kern Hill Co-op Ltd. c. Canada, [1989] A.C.I. no 702, Gateway Building and Supply Ltd. c. Canada, [1991] A.C.I. no 521, Commission de la Construction du Québec c. Canada (Ministre du Revenu national -- M.R.N.), [1993] A.C.I. no 650, Danks (RDI Implementation) c. Canada (Ministre du Revenu national -- M.R.N.), [1995] A.C.I. no 948 et Ferme Riomil Inc. c. Canada (Ministre du Revenu national -- M.R.N.), [1998] A.C.I. no 203.)

Analyse et conclusion

[29]     Je suis d'avis que si on lit la totalité du Règlement qui est fort court, la proposition de l'avocate de l'intimé est celle qui semble le plus en accord avec l'objet du Règlement. La définition même du mot employeur au tout début ne réfère pas à celui qui donne les instructions et à qui les services sont rendus mais stipule explicitement que pour l'application de la partie IV de la Loi et pour l'application du présent Règlement, le terme employeur s'entend notamment d'une personne qui verse ou a versé la rémunération d'un travailleur pour des services rendus dans le cadre d'un emploi assurable. Il s'agit d'une disposition déterminative de la nature d'une fiction juridique.

[30]     Le titre de l'article 10 du Règlement s'intitule « Autres employeurs présumés » . L'article 7 du Règlement concerne les agences de placement. Leurs activités n'ont pas de similitude avec celles de leurs clients.

[31]     La fiction juridique est un procédé législatif qui est bien connu du droit civil. Elle est également fréquemment utilisée dans le droit statutaire fédéral. La Cour doit alors donner à la disposition déterminative le sens qu'elle décrète à un terme ou à une expression. Je me réfère à la décision de la Cour suprême du Canada dans La Reine c. Verrette, [1978] 2 R.C.S. 838 et plus particulièrement à la page 845 et à la décision de la Cour d'appel fédérale dans Canada c. Scarola, [2003] A.C.F. no 482 (Q.L.), aux paragraphes 19 et 20.

[32]     La décision de la Cour d'appel fédérale dans Insurance Corp. of British Columbia (supra), veut que lorsqu'une personne, autre que le véritable employeur, verse la rémunération due à un assuré, cette autre personne est un employeur en vertu du Règlement. Cette décision avait en bout de ligne exempté la ICBC parce qu'elle était mandataire de Sa Majesté et que le Règlement ne liait pas Sa Majesté. L'appelante n'a pas réclamé ce statut, avec raison me semble-t-il, à la lecture de la décision récente de la Cour suprême du Canada dans Nova Scotia Power Inc. c. Canada, [2004] A.S.C. no 36 (Q.L.) qui a analysé la notion de mandataire de l'État. Toutefois, comme il n'y a pas eu de débat judiciaire au sujet de la qualité de mandataire de l'État de l'appelante, je m'abstiens de trancher.

[33]     Il est à noter que la Cour d'appel fédérale dans Insurance Corp. of British Columbia, ci-dessus, au paragraphe 9, s'est appuyée, entre autres, sur la décision du juge Allard de cette Cour dans Commission de la Construction du Québec c. Canada (ministre du Revenu national - M.R.N.), [1993] A.C.I. no 650 (Q.L.). La décision du juge Allard avait confirmé que l'appelante était un employeur réputé. Il est aussi à noter que la Cour d'appel fédérale s'est distancée de la décision Théoret (supra), sur laquelle l'appelante s'appuie en partie.

[34]     Il me faut conclure que l'appelante n'échappe pas aux dispositions déterminatives du Règlement. Le paragraphe 1(2) du Règlement stipule clairement qu'un employeur s'entend d'une personne qui verse ou a versé la rémunération d'un assuré pour des services rendus dans l'exercice d'un emploi assurable. Le paragraphe 10(1) du Règlement stipule aussi clairement que lorsqu'un assuré est payé par une personne autre que son véritable employeur, cette autre personne est réputée, aux fins de la tenue des registres, du calcul de la rémunération assurable de l'assuré ainsi que du paiement, de la retenue et du versement des cotisations exigées aux termes de la Loi et du Règlement, être l'employeur de l'assuré conjointement avec le véritable employeur.

[35]     En conséquence, les appels sont rejetés.

Signé à Ottawa, Canada, ce 17e jour de décembre 2004.

« Louise Lamarre Proulx »

Juge Lamarre Proulx


RÉFÉRENCE :

2004CCI826

Nos DES DOSSIERS

DE LA COUR :

2002-2743(EI), 2002-2744(EI), 2002-2745(EI), 2002-2746(EI), 2002-3730(EI)

INTITULÉS DES CAUSES :

Commission de la Construction du Québec et M.R.N.,

LIEU DE L'AUDIENCE :

Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :

les 14 et 15 septembre 2004

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :

l'hon. juge Louise Lamarre Proulx

DATE DU JUGEMENT :

le 17 décembre 2004

COMPARUTIONS :

Pour l'appelante :

Me André Lareau

Pour l'intimé :

Me Natalie Goulard

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER:

Pour l'appelante :

Nom :

Me André Lareau

Étude :

Joli-Coeur, Lacasse et ass.

Pour l'intimé :

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

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