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Dossier : 2001-880(GST)G

ENTRE :

KEY PROPERTY MANAGEMENT CORPORATION,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 24 avril 2003 à Toronto (Ontario)

Devant : L'honorable E.A. Bowie

Comparutions :

Avocats de l'appelante :

Me David C. Nathanson, c.r. et

Me Adrienne K. Woodyard

Avocats de l'intimée :

Me Peter M. Kremer, c.r. et

Me Rosemary Fincham

____________________________________________________________________

JUGEMENT

          L'appel formé à l'égard de la cotisation de taxe sur les produits et services établie en vertu de la Loi sur la taxe d'accise, dont l'avis est daté du 7 décembre 2000 et porte le numéro 08BP-115823411, visant la période du 1er octobre 1991 au 30 septembre 1996, est admis, et la cotisation est renvoyée au ministre du Revenu national pour qu'il la réexamine et qu'il en établisse une nouvelle en tenant compte de ce qui suit :

(i)       M. Robert Morrison est un employé de la société Ayerswood Development Corporation;

(ii)       les concierges sont tous des employés des sociétés propriétaires;

(iii)      les employés d'entretien sont tous des employés de l'appelante;

(iv)      l'appelante a droit à des crédits de taxe sur les intrants supplémentaires s'élevant à 1 906,09 $;

(v)      l'appelante n'est pas assujettie à une pénalité en vertu de l'article 280 de la Loi.

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour de mars 2004.

« E.A. Bowie »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 18e jour de juillet 2005.

Joanne Robert, traductrice


Référence : 2004CCI210

Date : 20040312

Dossier : 2001-880(GST)G

ENTRE :

KEY PROPERTY MANAGEMENT CORPORATION,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Bowie

[1]      Il s'agit d'un appel formé à l'égard d'une cotisation de taxe sur les produits et services (TPS) établie en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d'accise (la Loi)[1] visant la période du 1er octobre 1991 au 30 septembre 1996. L'appelante (la société Key) est une société créée pour fournir des services de gestion à 30 autres sociétés ou plus (les sociétés propriétaires), dont chacune est le propriétaire et l'exploitant d'un bien productif. Toutes les actions de la société Key, et de chacune des sociétés propriétaires, appartiennent à M. Anthony Graat; il est l'âme dirigeante de chacune d'entre elles. La principale question de l'appel concerne certains concierges et employés d'entretien qui sont engagés pour fournir des services aux immeubles. Le ministre du Revenu national (le ministre) a établi une cotisation à l'égard de l'appelante en tenant pour acquis que la société Key est l'employeur de ces particuliers, et qu'elle fournit leurs services aux sociétés propriétaires, et est donc tenue de percevoir la TPS auprès d'elles relativement à ces services et de la verser au receveur général. La position de l'appelante est que les sociétés propriétaires emploient ces personnes en vertu de contrats de louage de services, et que la TPS n'est donc pas exigible. L'appelante soutient également, de façon subsidiaire, que si elle est l'employeur des concierges, la cotisation surestime la valeur des services qu'elle a fournis aux sociétés propriétaires parce qu'elle comprend la valeur de l'hébergement gratuit que les sociétés propriétaires leur ont fourni. Il y avait également une question semblable relativement à l'emploi de Robert Morrison, qui fournissait des services pour une autre société de M. Graat appelée Ayerswood Development Corporation (la société Ayerswood). Au début de l'instruction, j'ai été informé par les avocats que les parties avaient convenu que M. Morrison était un employé de la société Ayerswood, et que l'appel devrait donc être admis au moins jusqu'à concurrence de la taxe établie sur ses services, en plus des intérêts et pénalités s'y rapportant. Les autres questions concernent certaines demandes mineures visant des crédits de taxe sur les intrants que le ministre a rejetées, et les pénalités imposées en vertu du paragraphe 280(1) de la Loi relativement au montant de taxe en litige.

la question de l'emploi

[2]      La plupart des immeubles auxquels les appels se rapportent sont des immeubles résidentiels; quelques-uns sont des immeubles commerciaux. La preuve ne permet pas d'établir le nombre précis d'immeubles, mais il y en a au moins trente. La société Key a été créée pour centraliser les fonctions de gestion et de comptabilité pour tous les immeubles, et également pour la société Ayerswood, qui est l'entreprise de construction appartenant à M. Graat. M. Trent Krauel est le vice-président aux finances et à l'administration de la société Key, et il détient aussi le même poste relativement aux sociétés propriétaires. Il était le seul témoin. D'après son témoignage, il est clair que toutes les décisions majeures concernant la gestion de toutes ces sociétés, ainsi que bon nombre des décisions mineures également, sont prises par M. Graat, qu'il a décrit comme étant un cadre de type interventionniste. M. Krauel a la responsabilité de voir à ce que les politiques de M. Graat, de même que ses décisions, soient respectées. Il a décrit la société Key comme étant une société bancaire pour le groupe. Elle perçoit les loyers, paie les factures, y compris les impôts et taxes et les hypothèques pour chacune des sociétés propriétaires. Elle administre les livres de paie pour toutes les sociétés. Les fonctions de comptabilité sont exécutées sur l'ordinateur de la société Key, des livres et registres distincts y étant tenus pour chaque société. En plus de M. Krauel, la société Key emploie un gestionnaire immobilier principal, trois autres gestionnaires immobiliers et un personnel administratif et de bureau d'environ huit personnes.

[3]      Chaque immeuble d'appartements du groupe a un concierge, ou plus couramment un couple qui se partage les tâches de concierge. Ils reçoivent un salaire et obtiennent sans frais un appartement dans l'immeuble. Ces appartements ont été inclus dans la conception des immeubles expressément pour servir de résidence aux concierges. Les tâches des concierges comprennent le nettoyage et le petit entretien, la perception des loyers et la recherche de locataires pour les appartements vacants. Si ces personnes sont employées par la société Key, les services qu'elles exécutent sont des services que la société Key fournit aux différentes sociétés propriétaires dans le cadre d'opérations commerciales, et ils sont donc assujettis à la TPS, que la société Key est tenue de percevoir et de verser. Par contre, si ces personnes sont des employées des sociétés propriétaires, leurs services ne sont pas assujettis à la TPS. Aucun de ces points n'est contesté. La position de l'appelante est qu'elle a agi seulement à titre de mandataire des sociétés propriétaires lorsqu'elle a recruté, engagé et supervisé ces particuliers. Ceci est contesté par l'intimée, qui soutient que la société Key a conclu des contrats de travail à titre de mandant et non de mandataire. Chacune des parties adopte exactement la même position relativement à l'emploi d'un petit groupe d'employés d'entretien qui s'occupent des réparations plus difficiles ou spécialisées touchant les immeubles et leurs installations techniques. Aux fins du présent appel, la seule différence importante entre les deux groupes de travailleurs est que les concierges effectuent l'ensemble de leur travail à l'intérieur et autour du seul immeuble dont ils ont la responsabilité, tandis que les employés d'entretien vont d'un immeuble à l'autre, suivant les directives des gestionnaires immobiliers de la société Key, selon l'endroit où leurs services sont requis à un moment ou à un autre.

[4]      La cotisation du ministre est fondée sur l'hypothèse que l'appelante agissait à titre de mandant lorsqu'elle a conclu les contrats de travail avec les concierges des immeubles et les employés d'entretien. Il revient à l'appelante de démonter cette hypothèse et de démontrer que les sociétés propriétaires étaient les vrais employeurs. La preuve sur laquelle l'appelante se fonde est la convention de mandat de gestion qui a été conclue entre chacune des sociétés propriétaires et la société Key, les registres comptables tenus par la société Key pour elle-même et pour les sociétés propriétaires et le témoignage de M. Krauel concernant ces registres. En ce qui concerne tout d'abord les registres comptables, n'est pas contesté le fait que la société Key a payé les salaires de tous les membres des deux groupes d'employés, et versé les retenues et cotisations requises aux fins de l'impôt sur le revenu, de l'assurance-emploi et du Régime de pensions du Canada pour chacun d'entre eux, dans le premier cas. Les pièces déposées en preuve et le témoignage de M. Krauel me convainquent que la société Key a récupéré auprès de chacune des sociétés propriétaires l'ensemble des salaires et coûts salariaux connexes se rattachant à leurs concierges. Il est également clair que les coûts des appartements occupés par les concierges des immeubles ont été assumés entièrement par les sociétés propriétaires. La comptabilité était toutefois plus complexe relativement aux employés d'entretien, puisqu'ils travaillaient chaque jour à plusieurs immeubles différents, et donc pour le bénéfice de plusieurs sociétés propriétaires différentes. Néanmoins, ils tenaient des registres de leur temps et, selon les écritures de journal faites par la société Key d'après ces registres, leur masse salariale et les dépenses connexes étaient répartis chaque mois parmi les différentes sociétés propriétaires pour lesquelles ils avaient fait des travaux, selon la proportion du temps consacré à travailler pour chacune d'entre elles.

[5]      L'appelante a présenté comme preuve un document daté du 1er octobre 1990 qui est décrit comme une convention de mandat de gestion (la convention) entre la société Wrenlon Developments Limited, une des sociétés propriétaires, et la société Key Property Management Corporation. La convention a été exécutée au nom de la société Key de même qu'au nom de la société Wrenlon par M. Graat. Les parties ont convenu qu'il y avait des conventions écrites comportant des conditions identiques entre l'appelante et chacune des autres sociétés propriétaires, et il s'agit évidemment de la convention qui régissait la relation entre l'appelante et chacune des sociétés propriétaires au cours de la période visée par la cotisation contestée. En vertu de ces conventions, l'appelante, à titre de mandataire des sociétés propriétaires, s'engageait à faire essentiellement tout ce que le propriétaire d'un immeuble locatif doit faire, y compris louer les logements, percevoir les loyers, payer toutes les factures, y compris les hypothèques, les impôts et taxes, les services publics et services de tout genre, et conclure des contrats au nom des sociétés propriétaires pour des services comme le déneigement, l'entretien paysager, l'entretien des immeubles et les réparations. La société Key assumait aussi toutes les fonctions de comptabilité et de tenue de livres et les transactions bancaires requises pour l'exploitation d'une entreprise. Les sociétés propriétaires versaient des honoraires à la société Key pour ces services, soit l'équivalent de 2,5 p. 100 du montant mensuel brut exigé des locataires, ainsi qu'un montant supplémentaire relatif à l'espace commercial. M. Krauel a dit dans son témoignage qu'avant 1990, les sociétés utilisaient une forme très simple de convention de gestion, et que c'était l'avènement de la TPS, entre autres choses, qui avait incité l'organisation à revoir la forme de convention qu'elle utilisait. Voici ce qu'il a dit :

[TRADUCTION]

A.         Lorsque la TPS est arrivée, nous avons eu de nombreuses discussions avec nos comptables et la question de conventions de mandat a été soulevée, tout comme la possibilité que, si nous ne faisions pas un effort pour documenter nos relations de mandataire, Revenu Canada présente effectivement les prétentions que nous avons ici aujourd'hui, soit que la société Key Property était en fait l'employeur et fournissait un service à ces autres sociétés, plutôt que n'agissant que pour la commodité et comme mandataire des propriétaires.

Q.         Et c'est la raison pour laquelle la convention a été conclue?

A.         C'est la raison pour laquelle le document que nous avions d'abord a été refait.

            Et donc je dirais aujourd'hui que c'est - - que c'est un effort pour documenter la relation de mandataire ainsi que pour répondre aux préoccupations d'un assureur lorsque nous avons un glissement.                                                                     (transcription, page 16)

[6]      La convention est plutôt longue, et une grande partie de celle-ci n'est pas pertinente pour ce qui est des questions que j'ai à trancher. Voici les parties qui pourraient jeter de la lumière sur la question de savoir « qui employait les concierges et les employés d'entretien » .

[TRADUCTION]

LA PRÉSENTE CONVENTION DE MANDAT DE GESTION établie ce 1er jour d'octobre 1990,

E N T R E :

WRENLON DEVELOMENTS LIMITED

une société constituée en vertu d'une loi de la province d'Ontario et ayant son siège social dans la ville de London, dans le comté de Middlesex,

ci-après appelée « le Propriétaire »

D'UNE PART

- et -

KEY PROPERTY MANAGEMENT CORPORATION,

une société constituée en vertu d'une loi de la province d'Ontario et ayant son siège social dans la ville de London, dans le comté de Middlesex,

ci-après appelée « le Mandataire »

D'AUTRE PART.

ATTENDU QUE le Mandataire a fait valoir au Propriétaire qu'il exploite une entreprise consistant à gérer des biens immobiliers et a acquis une connaissance approfondie dans ce domaine;

ET ATTENDU QUE le propriétaire, agissant selon les prétentions susmentionnées et accordant une foi et une confiance spéciales à la capacité et à l'expertise du mandataire relativement à l'entreprise consistant à gérer des biens immobiliers, souhaite remettre la gestion des locaux ayant la désignation civique du 955, chemin Wonderland, à London, en Ontario (ci-après appelés « les Locaux » ) aux soins du mandataire conformément aux dispositions de la présente;

POUR CES MOTIFS LA PRÉSENTE CONVENTION ATTESTE QUE, en contrepartie des honoraires prévus par la présente et des engagements réciproques contenus dans la présente, LES PARTIES À LA PRÉSENTE CONVIENNENT DE CE QUI SUIT :

PARTIE 1 : DÉFINITIONS

1.01      Dans la présente Convention, les termes commençant par une majuscule sont des termes définis et ont les sens suivants :

[...]

c)          « Propriétaire bailleur » désigne le Propriétaire, ou le Mandataire agissant selon les directives du Propriétaire pour ce qui est de conclure des baux avec des locataires;

PARTIE 2 : NOMINATION DU MANDATAIRE

2.01      Le Propriétaire nomme par la présente le Mandataire à titre de mandataire exclusif, et le Mandataire accepte par la présente cette nomination de mandataire, pour gérer et administrer les Locaux au nom du Propriétaire conformément aux dispositions de la présente.

PARTIE 4 : HONORAIRES

4.01      En plus d'autres montants prévus à la partie 5 de la présente Convention, qui doivent être payés ou remboursés au Mandataire par le Propriétaire, pour les services de mandat de gestion professionnelle fournis par le Mandataire en vertu de la présente Convention, le Propriétaire verse au Mandataire, en guise de rémunération, des honoraires mensuels nets équivalant à deux et demi pour cent (2½ %) du montant mensuel brut exigé des locataires, y compris, notamment, les loyers minimums, les loyers additionnels, les sommes redébitées, les rajustements et les frais de services publics et de services (et toute taxe applicable) relativement aux Locaux. Le Propriétaire verse les honoraires mensuels au Mandataire le dernier jour ouvrable de chaque mois de la durée de la présente Convention.

4.02      Pour tous les services de location de locaux commerciaux rendus par le Mandataire en vertu de la présente Convention, et sauf entente mutuelle contraire, le Propriétaire verse au Mandataire une commission de location équivalant au plus élevé de 15 p. 100 du loyer net d'une année moyenne et de 2,00 $ le pied carré de superficie louée par le Mandataire au nom du Propriétaire. Le Propriétaire verse au Mandataire la commission de location indiquée dans la présente le premier en date du jour où la superficie louée par le Mandataire est occupée par le Locataire et du jour où le bail est exécuté tant par le Propriétaire bailleur que par le Locataire ou du premier jour du bail prévu par le contrat à fin de bail.

PARTIE 5 : FONCTIONS DU MANDATAIRE

5.20      Le Mandataire remplit les fonctions suivantes, sur demande :

a)          lorsqu'il y a lieu, administrer le livre de paie (selon les échelles salariales et structures de rémunération dictées ou approuvées par le Propriétaire) pour tous les employés du Propriétaire ou du Propriétaire bailleur prévus dans la présente ou dans les budgets approuvés par le Propriétaire y compris, notamment, la préparation de tous les documents du livre de paie, l'inscription des comptes de paie dans les livres appropriés, le débours des fonds pour les paies, les retenues nécessaires pour les impôts sur le revenu, l'assurance-emploi, l'assurance-hospitalisation, les régimes de pension et les autres retenues autorisées ou devant être effectuées en vertu de tout règlement du gouvernement ou autrement relativement au paiement de ces employés (et le versement de ces montants) et préparer ou faire préparer et présenter ou faire présenter toutes les déclarations nécessaires au gouvernement concernant les retenues susmentionnées, étant convenu et entendu que le Mandataire a le droit exclusif d'embaucher et de remercier des employés comme il juge bon;

b)          établir et tenir des registres et systèmes adéquats de toutes les sommes exigées des Locataires, et s'occuper de toutes ces sommes, y compris, notamment, pour l'entretien des parties communes et les redébitées et rajustements liés aux frais d'exploitation, les frais de chauffage et de climatisation et autres services publics, la supervision, les impôts fonciers et d'autres paiements qui, selon les conditions du bail d'un Locataire ou d'un autre contrat exécutoire, doivent être perçus comme faisant partie des loyers ou s'ajoutant à ceux-ci ou autrement de façon périodique ou intermittente;

c)          conformément aux dispositions de la présente, s'occuper de toutes les transactions bancaires nécessaires ou souhaitables pour la bonne exécution des fonctions comptables et administratives prévues dans la présente et pour la réception et le décaissement de toutes les sommes du Propriétaire ou du Propriétaire bailleur dont doit s'occuper le Mandataire aux termes de la présente Convention.

5.21       Le Mandataire a la responsabilité des soldes de caisse détenus par le Mandataire pour le compte du Propriétaire ou du Propriétaire bailleur, de temps à autre au cours de chaque mois et d'un mois à l'autre pour la durée de la présente Convention.

5.22       Le Mandataire reconnaît que toutes les sommes reçues par lui à la suite de quelque obligation prévue dans la présente ou autrement pour le compte du Propriétaire ou du Propriétaire bailleur seront reçues par le Mandataire et détenues par le Mandataire pour le bénéfice du Propriétaire. Il sera rendu compte de toutes ces sommes, et celles-ci seront déboursées conformément aux dispositions de la présente ou autrement suivant les directives du Propriétaire et pour son bénéfice ou versées au Propriétaire ou selon ses directives conformément à la présente.

5.35      a)          Sous réserve de l'approbation du Propriétaire, le Mandataire doit conclure des contrats, faire des achats ou prendre d'autres dispositions pour obtenir tout le personnel et la main-d'oeuvre nécessaires à l'exploitation et à l'entretien des Locaux, et le Mandataire doit faire son possible pour s'assurer que les parties communes et l'équipement sont exploités, entretenus et réparés conformément aux obligations du Propriétaire bailleur envers les Locataires des Locaux.

b)          Le Mandataire doit conclure des contrats, faire des achats ou prendre d'autres dispositions pour faire faire toutes les réparations aux Locaux dont le Propriétaire bailleur a la responsabilité et pour les travaux de rénovation et de décoration à neuf qui peuvent devenir nécessaires ou souhaitables conformément aux politiques établies de temps à autre par le Propriétaire ou le Propriétaire bailleur, et faire son possible pour veiller à ce que toutes les choses soient faites relativement aux Locaux et que le Mandataire juge nécessaires pour se conformer à tous les règlements de toute autorité gouvernementale ayant compétence relativement aux Locaux.

c)          Le Mandataire doit conclure des contrats, faire des achats ou prendre d'autres dispositions pour que les parties communes des Locaux soient gardées propres et raisonnablement libres de neige et de glace et pour l'entretien, la réparation et le remplacement, selon les besoins, de tout aménagement paysager ou autres commodités des Locaux.

d)          Le Mandataire doit de façon générale conclure des contrats, faire des achats ou prendre d'autres dispositions pour toutes les choses nécessaires à la gestion, à l'exploitation, à l'entretien et à la réparation des Locaux, de manière appropriée et efficace, et pour l'exécution de tout autre acte dans les Locaux ou autour d'eux pour donner suite à l'objet de la présente Convention. Les dépenses majeures doivent être renvoyées au Propriétaire pour approbation préalable.

5.36      Aux frais du Propriétaire, le Mandataire doit recommander les mesures de sécurité adéquates pour assurer la sécurité matérielle des Locaux.

5.37      Le Mandataire doit conclure des contrats, faire des achats ou prendre d'autres dispositions pour obtenir tous les services, matériaux et fournitures requis dans l'exécution de ses fonctions et responsabilités aux termes de la présente, y compris, notamment, tous les articles de papeterie, factures, livres comptables, fournitures et équipements généraux de bureau ainsi que tout le matériel, l'équipement et les fournitures de nettoyage et d'entretien intérieur et extérieur. Tous les coûts de ces services, de ce matériel et de ces équipements et fournitures doivent être payés ou remboursés au Mandataire par le Propriétaire conformément au budget établi par le Mandataire et approuvé par le Propriétaire.

5.38      Tout contrat majeur visant des services, des matériaux, de l'équipement, du matériel ou des fournitures doit être approuvé par le Propriétaire.

5.39      Nonobstant le fait que les dépenses majeures doivent être renvoyées au Propriétaire pour approbation préalable, dans le cas où tout travail est de nature urgente ou dans les cas où des mesures sont requises de façon urgente à un moment où les représentants autorisés du Propriétaire ne peuvent, de façon raisonnable, être joints pour donner leur approbation ou dans le cas où le défaut de faire un travail ou de prendre des mesures pourrait exposer le Propriétaire ou le Propriétaire bailleur ou le Mandataire en sa capacité de gestionnaire à des pénalités ou d'autres obligations, le Mandataire est par la présente dûment autorisé et mandaté pour entreprendre toute mesure raisonnable jugée instamment nécessaire à la protection et à la préservation des Locaux ou à la protection du Propriétaire, du Propriétaire bailleur ou du Mandataire contre toute pénalité ou obligation quelle qu'elle soit.

5.40      L'intention étant que les honoraires mensuels prévus à la Partie 4 de la présente Convention soient entièrement nets au Mandataire, le Propriétaire doit a) rembourser au Mandataire, chaque mois conformément à la présente, tous les coûts et dépenses de quelque nature, subis ou engagés de quelque façon que ce soit et à quelque moment que ce soit par le Mandataire en vertu de la présente, ou b) lorsque le Mandataire agit en tant que Propriétaire bailleur, autoriser le Mandataire à facturer aux Locataires (et faire son possible pour percevoir) proportionnellement autant de ces coûts et dépenses autrement remboursables que le permettent les dispositions des baux respectifs.

[7]      Une lecture attentive de ces dispositions m'amène à conclure qu'elles ne sont pas nécessairement incompatibles avec la position de l'appelante ou celle de l'intimée. La société Key aurait pu s'acquitter de ses obligations envers les sociétés propriétaires relativement à la prestation de l'éventail des services fournis par les concierges, et par les employés d'entretien, en embauchant ses propres employés et en fournissant les services, ou en embauchant et en supervisant des employés des sociétés propriétaires en agissant comme leur mandataire. Si elle avait choisi la première façon de faire, elle aurait eu le droit de recouvrer du propriétaire le plein montant des coûts salariaux et autres liés à ces employés, en vertu du paragraphe 5.40 de la convention. Si elle avait choisi la deuxième façon de faire, elle aurait été tenue, conformément au paragraphe 5.20, de payer les salaires au moyen des fonds de la société propriétaire qu'elle détenait en vertu de la convention, et d'administrer le livre de paie et de faire les versements de retenues à la source à titre de mandataire du propriétaire. Dans leur plaidoirie, les avocats de l'intimée ont fait valoir que s'il avait été prévu que la société Key ait le pouvoir, en vertu de la convention, d'embaucher des employés pour les sociétés propriétaires en agissant comme leur mandataire, le paragraphe 5.38 aurait inclus des contrats de travail parmi les contrats majeurs exigeant l'approbation expresse du propriétaire. Cependant, il serait tout aussi logique de prétendre que s'il n'avait pas été prévu que la société Key ait le pouvoir d'embaucher des concierges comme employés des propriétaires, il n'y aurait aucune raison de prévoir qu'elle administre un livre de paie pour les sociétés propriétaires. Rien dans les preuves présentées n'indique que les sociétés propriétaires avaient des employés autres que les concierges. Bref, le contrat écrit ne règle pas la question.

[8]      L'autre preuve sur laquelle se fonde l'intimée consiste en trois lettres écrites sur le papier à en-tête de la société Key et signées au nom de la société Key par trois gestionnaires immobiliers différents à son service. Les trois lettres confirment des conditions d'emploi dont il avait auparavant été convenu oralement. Les pièces jointes aux lettres comprennent une entente relative au salaire dans un cas et un avis d'augmentation de loyer dans le cas d'un concierge qui a changé d'immeuble. Aucun de ces documents ne révèle au lecteur que le contrat de travail en question n'était pas avec la société Key, mais plutôt avec une autre société dont le nom n'apparaît nulle part ailleurs dans la lettre ou la pièce jointe. Comme la convention, ces documents ne sont pas incompatibles avec l'une ou l'autre des bases juridiques invoquées. Un mandataire peut conclure un contrat pour le compte d'un mandant dont l'existence n'est pas révélée à l'autre partie[2]. On ne m'a renvoyé à aucune source excluant les contrats de travail de ce principe général, et je n'ai pu en trouver aucune non plus.

         

[10]     Les extraits des registres comptables de l'appelante qui ont été déposés comme preuve ne m'ont pas été utiles non plus. Dans son témoignage, M. Krauel a expliqué que l'appelante s'occupait des livres de paie pour toutes les sociétés de M. Graat parce que cela était beaucoup plus rentable que si chaque société l'avait fait séparément. Les coûts salariaux de chaque société lui étaient ensuite imputés au moyen d'une écriture de journal. Je ne considère pas que cette preuve élimine la possibilité que les employés soient des employés des sociétés propriétaires. Que l'appelante paie les concierges à titre de mandataire des propriétaires au moyen des fonds qu'elle détenait en leur nom, ou qu'elle les paie en étant leur employeur et qu'elle recouvre ensuite le coût à partir des fonds des sociétés propriétaires qu'elle détenait en leur nom en vertu de la convention, c'est exactement le même résultat financier qui est obtenu.

[11]     La façon dont le loyer fictif des appartements occupés par les concierges est inscrit dans les livres appuie en quelque sorte la position de l'appelante. Pour chaque immeuble, un loyer fictif a été établi pour l'appartement devant être occupé par le concierge. Les concierges ne payaient pas de loyer, mais leur droit d'occupation faisait partie de leur rémunération. Ceci était inscrit chaque mois dans les livres comptables de chaque société propriétaire au moyen d'un crédit porté au compte des recettes de location et d'un débit porté au compte de dépenses du concierge. Comme Mme Woodyard l'a correctement fait remarquer dans sa plaidoirie, le droit d'occupation de ces appartements était un droit des propriétaires des immeubles, non de l'appelante, et il était transmis directement des sociétés propriétaires à leurs concierges. La cotisation établie par le ministre était fondée sur la théorie selon laquelle ce droit d'occupation était donné à l'appelante en échange d'une partie de la contrepartie offerte par l'appelante pour les services des concierges leur fournissait, et ensuite aux concierges par l'appelante. Je ne trouve toutefois rien dans la preuve qui appuie cette théorie.

[12]     La preuve restante sur cette question est le témoignage de M. Krauel. Il a dit qu'à l'automne 1990, alors qu'il se préparait à l'instauration de la TPS, une des préoccupations du groupe d'entreprises de M. Graat était de veiller à ce que les concierges soient employés par les sociétés propriétaires et non par l'appelante, de sorte qu'il n'y ait pas d'opération taxable entre l'appelante et les sociétés propriétaires pour les services des concierges, et que la convention a été rédigée en tenant compte de cette préoccupation. D'après ce que j'ai compris de son témoignage, lui et les comptables du groupe ont rédigé le document, ce qui pourrait expliquer pourquoi il comporte autant d'incertitudes à ce sujet. Néanmoins, M. Krauel est le vice-président directeur de chacune des sociétés. Il est en mesure de savoir quelles étaient leurs intentions, son témoignage sur ce point était clair, et il n'a pas été ébranlé lors du contre-interrogatoire. Je conclus que les concierges étaient employés par les sociétés propriétaires, et que le ministre a eu tort d'établir une cotisation de TPS en supposant que l'appelante fournissait leurs services aux sociétés propriétaires. Par conséquent, la question du troc du droit d'occupation des appartements des concierges ne se pose pas.

[13]     Je me tourne maintenant vers la question de l'emploi des employés d'entretien. Je considère que leur situation n'est aucunement semblable à celle des concierges. Les concierges ont chacun un travail défini auprès d'une société propriétaire. Il n'y a pas d'incertitude quant à l'endroit où ils travailleront et à ce qu'ils feront au cours de quelque période que ce soit; leurs emplois ont de la continuité. Je ne suis pas disposé à reconnaître que l'appelante, à titre de mandataire, a engagé chacun des employés d'entretien autrement qu'à titre d'employé à temps plein de chacune des trente sociétés propriétaires ou plus, dans des circonstances où ni le mandataire ni les mandants ne pouvaient dire avec certitude au début de quelque semaine que ce soit quelle société emploierait le travailleur pendant cette semaine, ou quand, ou pour combien de temps. Il y a tout simplement trop d'incertitude entourant toutes ces questions pour que l'on puisse caractériser la relation entre les travailleurs et les différents propriétaires comme consistant en trente contrats de travail distincts ou plus. Le ministre a eu raison d'établir une cotisation à l'égard de l'appelante relativement à la prestation des services des employés d'entretien aux sociétés propriétaires.

la question des crédits de taxe sur les intrants

[14]     Les conditions préalables aux demandes de CTI sont énoncées à l'alinéa 169(4)a) de la Loi :

169(4) L'inscrit peut demander un crédit de taxe sur les intrants pour une période de déclaration si, avant de produire la déclaration à cette fin :

a)          il obtient les renseignements suffisants pour établir le montant du crédit, y compris les renseignements visés par règlement;

Les renseignements visés par règlement sont énoncés dans le Règlement sur les renseignements nécessaires à une demande de crédit de taxe sur les intrants (TPS/TVH)[3] (le Règlement). Aux termes du Règlement, la quantité de renseignements qu'un inscrit doit obtenir à l'appui d'une demande de CTI augmente à mesure que la contrepartie de la fourniture augmente, et les exigences à chaque niveau sont assez précises. Les avocats de l'appelante semblaient être d'avis que le témoignage oral de M. Krauel devrait être considéré comme satisfaisant adéquatement aux exigences particulières de la Loi et du Règlement. Je rejette une telle position. Nous savons bien que tout régime fiscal fondé sur la valeur ajoutée peut être vulnérable aux abus, et que l'un des aspects comportant le plus de risques concerne les demandes de crédits de taxe sur les intrants. Le but même de l'alinéa 169(4)a) et du Règlement est de protéger le Trésor contre les violations tant frauduleuses qu'innocentes. Ce but ne peut être atteint que si les exigences sont considérées comme étant obligatoires et sont rigoureusement appliquées. Le fait de les envisager simplement comme une indication ne serait pas seulement malencontreux, mais serait une grave violation de l'intégrité du texte législatif[4].

[15]     En établissant la cotisation, le vérificateur a apporté dix redressements aux crédits de taxe sur les intrants demandés par l'appelante. Un de ces redressements était en faveur du contribuable, et n'est donc pas contesté. Deux autres n'ont été soulevés ni dans les témoignages, ni à l'instruction. Les sept autres redressements se répartissent en quatre catégories.

[16]     Il y a d'abord trois montants demandés à titre de CTI qui se rapportent à trois paiements faits par l'appelante au cabinet d'avocats Gardner, Roberts de Toronto. Ce cabinet d'avocats représentait les demandeurs dans un recours collectif relativement à une question à l'égard de laquelle le groupe de sociétés de M. Graat avait un intérêt bienveillant. M. Graat a accepté de contribuer au coût du recours collectif, et trois chèques ont été émis par l'appelante à l'ordre de « Gardner, Roberts in trust » à cette fin. Je ne dispose d'aucune preuve indiquant qu'un compte rendu a été fait à M. Graat personnellement ou à l'appelante. Le CTI a été inscrit dans les registres de l'appelante simplement au moyen d'une pièce justificative visant 7/107e du montant de chaque chèque. Les chèques ont vraisemblablement été versés à titre d'acomptes. Sans compte rendu du cabinet, aucune preuve qu'une opération commerciale a eu lieu n'existe et rien n'indique que le cabinet d'avocats Gardner, Roberts a versé la TPS de 7/107e du montant de chaque chèque au receveur général du Canada. Comme il n'y a aucune preuve des opérations liées à ces trois paiements, il s'ensuit que les renseignements requis au sujet des opérations n'ont pas été obtenus. La demande de CTI de l'appelante relativement à ces montants est donc mal fondée.

[17]     Deux demandes concernent la TPS payée pour des services juridiques fournis à M. Graat par la société Cassels, Brock and Blackwood. Les comptes semblent avoir été payés par l'appelante à titre de mandataire de M. Graat ou de mandataire d'une ou de plusieurs de ses sociétés. Le vérificateur a rejeté les demandes en signalant qu'elles ne se rapportaient pas à une activité commerciale. Les comptes de la société ont été déposés comme preuve, et il est assez évident que les demandes se rattachent à une activité commerciale. Dans leur plaidoirie, les avocats n'ont soulevé aucune autre raison pour refuser les CTI. L'appelante a droit aux CTI demandés.

[18]     La demande de CTI suivante qui a été rejetée se rapportait à un montant de TPS de 472,50 $ payé relativement à des services comptables fournis par Mme Mary Krauel, CA, services pour lesquels elle a envoyé une facture de 6 750 $ à la société Ayerswood. La note du vérificateur indique simplement qu'il ne s'agit pas de l'acquéreur de la fourniture. Dans son témoignage, M. Krauel a indiqué que le travail que sa femme a fait relativement à cette facture a en réalité été fait pour l'appelante et a été facturé à l'appelante à titre de dépense. Il s'agissait d'un travail relatif à une action intentée par la société à l'endroit d'un fournisseur, et ce travail devait être fait par l'appelante pour la société Ayersworth conformément à sa convention de gestion. Il s'agissait simplement d'une erreur de la part de Mme Krauel, qui a adressé le compte à la société Ayersworth plutôt qu'à la société Key. L'erreur a simplement été d'adresser le compte au mandant avec qui la société Key avait conclu un marché pour faire le travail qui lui avait été donné en sous-traitance. L'appelante a droit à ce CTI.

[19]     La dernière demande de CTI contestée vise un montant de 1 225 $ qui se rapporte au règlement d'un différend entre l'appelante et la société I.S.C. Realty Ltd. concernant des frais de courtage. L'appelante a payé 18 725 $ à la société I.S.C. pour régler ce différend et obtenir une quittance d'elle à l'égard de la réclamation. La note du vérificateur concernant cet article indiquait que la documentation était insuffisante. La quittance et la demande de chèque semblent contenir tous les renseignements exigés par le Règlement. Aucun renseignement manquant n'a été mentionné dans la plaidoirie. L'appelante à droit à ce CTI.

[20]     En résumé, donc, l'appelante a droit aux CTI supplémentaires suivants :

Compte du 21 octobre 1991 de Cassels Brock

203,00 $

Compte du 25 mai 1992 de Cassels Brock

15,59 $

Compte du 18 janvier 1993 de Mary Krauel, CA

472,50 $

I.C.S. Realty Ltd. - 18 novembre 1993

1 225,00 $

1 906,09 $

les pénalités

[21]     Le ministre a établi une cotisation comportant des pénalités en vertu du paragraphe 280(1) de la Loi relativement à l'ensemble de la taxe supplémentaire établie. Même si ce paragraphe est rédigé en termes absolus, il est maintenant bien établi que le contribuable peut se prévaloir de la défense basée sur la diligence raisonnable. Les montants supplémentaires de taxe qui demeureront payables par suite de ce jugement sont ceux qui concernent les services des employés d'entretien qui, selon moi, sont des employés de l'appelante, et environ 700 $ ayant trait à des CTI nets refusés.

[22]     Dans Heart Drop 2000 Distributors Inc. v. The Queen,[5] le juge Miller a examiné la possibilité de recourir à la défense basée sur la diligence raisonnable dans des circonstances où l'appelante n'a pas perçu et versé la taxe sur certaines opérations parce qu'elle croyait que les fournitures en question étaient détaxées. Il a conclu qu'en ce qui concerne les pénalités, la question pertinente est celle de savoir si l'appelante a fait une erreur honnête. Il s'est posé la question de pure forme : « Comment la loi peut-elle insister pour que le contribuable procède d'une certaine manière si celui-ci croit en toute bonne foi qu'il n'est pas obligé de procéder de la manière prévue? » . J'accepte ce point de vue en ce qui concerne le paragraphe 280(1). Si elle est raisonnable, une croyance sincère qu'une opération n'est pas assujettie à la taxe équivaut à diligence raisonnable.

[23]     M. Krauel a indiqué dans son témoignage que l'intention des sociétés était de créer une relation employeur-employé entre les employés d'entretien et les différents membres du groupe de sociétés pour lequel ils faisaient du travail. Ils ont rédigé le contrat avec cet objectif en tête. Je ne doute pas qu'il croyait que le contrat avait réalisé ce qui avait été prévu. Cette croyance était-elle raisonnable? Je pense qu'elle l'était. La question de savoir si l'appelante ou les sociétés propriétaires employaient ces particuliers est une question de droit. Selon ce que je peux comprendre d'après les preuves dont je dispose, le ministre a soulevé cette question pour la première fois auprès de l'appelante dans une lettre datée du 19 novembre 1993 de M. Turgeon, le vérificateur, à M. Krauel. Les paragraphes pertinents à ce sujet sont les suivants :

[TRADUCTION]

De plus, nous avons constaté que la société Key Property Management Corporation facturait des personnes liées pour différents services de main-d'oeuvre ayant trait à l'exploitation de leurs immeubles résidentiels et commerciaux de location. Les services fournis comprenaient la supervision des immeubles, le marketing et l'entretien. Aucune taxe n'a été facturée sur ces services, ce qui est une erreur.

Vous devez percevoir la TPS au taux de 7 p. 100, calculée sur le montant facturé pour la fourniture des services de main-d'oeuvre rendus exclusivement dans le cadre de l'exploitation des immeubles commerciaux. L'inscrit qui acquiert ces services a droit à un crédit de taxe sur les intrants à l'égard de la TPS ainsi facturée.

En ce qui concerne les services de main-d'oeuvre fournis dans le cadre de l'exploitation des immeubles résidentiels, vous devez percevoir la taxe au taux de 7 p. 100, calculée sur la juste valeur marchande de ces services. L'inscrit qui acquiert ces services N'a PAS droit à un crédit de taxe sur les intrants à l'égard de la TPS ainsi facturée.

[...]

Les questions et préoccupations décrites ci-dessus constituent seulement les principales constatations découlant de nos récentes vérifications. D'autres constatations sont décrites en détail dans le relevé des redressements consécutifs à la vérification et les documents de travail qui vous ont été remis au moment de la vérification. De plus, veuillez noter que les commentaires qui précèdent sont fondés sur une interprétation des dispositions législatives et procédures administratives actuelles ayant trait à la TPS, et que tout changement à ces dispositions ou procédures peut influer sur la validité des renseignements fournis ou des commentaires faits.

Veuillez également prendre note qu'une interprétation ne constitue pas une décision. Par conséquent, les commentaires qui précèdent ne doivent pas être considérés comme exécutoires pour le ministère du Revenu national relativement à toute situation donnée.

Si vous avez des questions sur ce qui précède ou sur la TPS comme telle, veuillez communiquer avec le présent bureau.

Veuillez agréer, Monsieur, mes sentiments distingués.

D. Turgeon

CMA, vérificateur de l'accise

[24]     Il est évident que les parties étaient en désaccord quant à l'exigibilité de la taxe sur le coût des employés d'entretien. On a laissé entendre que, au minimum, l'appelante était tenue à ce stade d'obtenir un avis juridique. Je ne suis pas d'accord. Le désaccord n'en était pas un qui était susceptible d'être réglé simplement par un avis. Selon une affaire enregistrée auprès de la cour, en novembre 1993, le ministre a établi une cotisation de TPS à l'égard de l'appelante pour la période allant du 1er janvier 1991 au 30 septembre 1991, la cotisation a fait l'objet d'un appel, et l'appel a été réglé par les parties en mars 2000[6]. Le présent appel représente la première occasion depuis cette date pour obtenir une résolution judiciaire de ce qui est clairement un véritable litige concernant l'application de la Loi à ces faits. Même si l'appelant n'a eu gain de cause qu'en partie sur la question de la main-d'oeuvre, rien dans la preuve ne me permet de conclure qu'il n'était pas raisonnable que l'appelante croie en la justesse de sa position relativement aux employés d'entretien et aux concierges. L'appelante a sans délai porté l'affaire devant la Cour pour qu'elle la règle. Cela satisfait aux exigences de diligence raisonnable.

[25]     Évidemment, l'appelante a présenté certaines demandes de CTI auxquelles elle n'avait pas droit. Dans le contexte du volume d'affaires de l'appelante, et compte tenu de la mesure dans laquelle l'appelante a eu gain de cause ici relativement aux CTI que le ministre avait refusés, ces demandes sont loin d'être flagrantes du point de vue de leur nature ou de leur quantité. La preuve démontre que l'appelante a pris les mesures appropriées pour former son personnel et lui fournir un manuel pour le guider dans l'inscription et la déclaration appropriées des transactions aux fins de la Loi. Les quelques erreurs ont été faites malgré la diligence raisonnable de l'appelante, non en raison d'un manque de diligence raisonnable.

[26]     L'appel est admis. La cotisation est renvoyée au ministre du Revenu national pour qu'il la réexamine et qu'il en établisse une nouvelle en tenant compte de ce qui suit :

(i)       M. Robert Morrison est un employé de la société Ayerswood Development Corporation;

(ii)       les concierges sont tous des employés des sociétés propriétaires;

(iii)      les employés d'entretien sont tous des employés de l'appelante;

(iv)      l'appelante a droit des crédits de taxe sur les intrants supplémentaires s'élevant à 1 906,09 $;

(v)      l'appelante n'est pas assujettie à une pénalité en vertu de l'article 280 de la Loi.

Si les parties ne parviennent pas à s'entendre sur les dépens, j'entendrai les observations à une date devant être fixée par le greffier.

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour de mars 2004.

« E.A. Bowie »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 18e jour de juillet 2005.

Joanne Robert, traduction



[1]           L.R.C. 1985, ch. E-15 modifié

[2]           Siu Yin Kwan v. Eastern Insurance Co. Ltd., [1994] 2 A.C. 199 (P.C.)

[3]           C.P. 1990-2755 modifié, (auparavant Règlement sur les renseignements nécessaires à une demande de crédit de taxe sur les intrants)

[4]           Voir Colombie-Britannique (Procureur général) c. Canada (Procureur général) [1994] 2 R.C.S. 41 aux p. 121-124

[5]           [2003] G.S.T.C. 72.

[6]           Key Property Management Corporation c. La Reine, dossier de la cour no 97-1619(GST)G

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