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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Dossier : 2005-354(EI)

ENTRE :

SAHEDA JAHANGIRY,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

 

1371358 ONTARIO LIMITED (MAC’S MILK),

intervenante.

 

 

Appel entendu le 6 octobre 2005 à Toronto (Ontario)

par le juge suppléant W.E. MacLatchy

 

Comparutions :

 

Représentant de l’appelante :

Sayed S. Alam

 

Avocat de l’intimé :

Me P. Michael Appavoo

 

Représentant de l’intervenante :

Sayed S. Alam

 

JUGEMENT

 

          L’appel est rejeté et la décision du ministre est confirmée conformément aux motifs du jugement ci-joints.

 

Signé à Toronto (Ontario), ce 27e jour d’octobre 2005.

 

« W.E. MacLatchy »

Le juge suppléant MacLatchy


 

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Référence : 2005CCI691

Date : 20051027

Dossier : 2005-354(EI)

ENTRE :

SAHEDA JAHANGIRY,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

 

intimé,

 

et

 

1371358 ONTARIO LIMITED (MAC’S MILK),

 

intervenante.

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

Le juge suppléant MacLatchy

 

[1]     Le présent appel a été entendu le 6 octobre 2005 à Toronto (Ontario).

 

[2]     Par suite d’une demande du 25 mai 2004 de Développement des ressources humaines Canada (DRHC), Nancy Wilcox, agente de participation au RPC/A‑E au bureau des services fiscaux de Hamilton, a conclu que l’appelante n’exerçait pas un emploi assurable au titre de l’alinéa 5(2)i) de la Loi sur l’assurance-emploi (la Loi) au cours de la période allant du 4 novembre 2002 au 16 mai 2003, lorsqu’elle a travaillé pour le payeur, 1371358 Ontario Limited (Mac’s Milk). L’appelante et le payeur ont été avisés de la décision au moyen d’une lettre du 16 juin 2004.

 

[3]     S’opposant à la décision de DRHC, l’appelante a déposé un appel le 14 septembre 2004.

 

[4]     L’appelante a interjeté appel devant le ministre du Revenu national (le ministre) relativement à une décision portant sur la question de savoir si elle exerçait ou non un emploi assurable au sens de la Loi lorsqu’elle a travaillé pour le payeur au cours de la période en cause.

 

[5]     Dans une lettre du 30 novembre 2004, le ministre a fait savoir à l’appelante et au payeur qu’il avait été décidé que l’appelante n’exerçait pas un emploi assurable au cours de la période en cause, parce qu’ils avaient entre eux un lien de dépendance au sens de l’alinéa 5(2)i) de la Loi.

 

[6]     S’opposant à la décision du ministre, l’appelante a interjeté appel de celle‑ci devant la Cour le 4 février 2005.

 

[7]     Pour en arriver à sa décision, le ministre s’est fondé sur les hypothèses suivantes :

 

          [TRADUCTION]

 

a)         l’entreprise du payeur réside dans la gestion d’une franchise Mac’s Milk;

 

b)         les actionnaires du payeur sont Mohammed Farid Jahangiry (60 p. 100) et le frère de celui-ci, Mohammed Qais Jahangiry (40 p. 100);

 

c)         l’appelante est liée aux actionnaires du payeur, parce qu’elle est l’épouse de l’actionnaire majoritaire ainsi que la belle-soeur de l’autre actionnaire;

 

d)         les actionnaires du payeur contrôlaient les activités quotidiennes de l’entreprise et prenaient les principales décisions commerciales;

 

e)         l’appelante a été engagée conformément à une entente verbale;

 

f)          les fonctions de l’appelante comprenaient ce qui suit :

 

-           le service d’aide au comptoir

-           la réception des livraisons

-           le nettoyage du magasin

-           l’apposition des prix sur les produits et la mise en place des marchandises sur les étagères

-           le traitement de la monnaie

-           le service à la clientèle

 

g)         l’appelante exerçait ses fonctions à l’établissement du payeur;

 

h)         l’appelante touchait un montant de 10,80 $ l’heure (y compris les vacances) au comptant toutes les deux semaines, à raison d’une moyenne de 40 heures par semaine;

 

i)          le taux de salaire de l’appelante a été fixé par le payeur;

 

j)          aucune preuve de paiement n’a été fournie par l’appelante ou par le payeur;

 

k)         le payeur n’a fourni aucun avantage lié aux soins dentaires, médicaux ou autres à l’appelante;

 

l)          l’établissement du payeur était ouvert 24 heures par jour, 7 jours par semaine;

 

m)        l’appelante travaillait habituellement de 8 h à 14 h, puis de 16 h à 20 h les lundis et mardis ainsi que de 8 h à 16 h les mercredis, jeudis et vendredis;

 

n)         le payeur déterminait les heures de travail de l’appelante;

 

o)         les heures de travail de l’appelante étaient consignées dans un registre hebdomadaire du payeur;

 

p)         l’appelante était surveillée par les actionnaires du payeur;

 

q)         l’appelante a reçu une formation du gérant du magasin;

 

r)          l’appelante n’a pas été payée pendant sa période de formation;

 

s)         le payeur ou le franchiseur a fourni à l’appelante, sans frais pour celle‑ci, tous les outils et l’équipement dont elle avait besoin pour exercer ses fonctions;

 

t)          l’appelante a quitté son emploi pour se prévaloir de son congé de maternité;

 

u)         le payeur n’a pas remplacé l’appelante;

 

v)         avant que l’appelante commence à travailler pour le payeur, ses fonctions étaient exercées par les actionnaires de celui-ci;

 

w)        l’appelante est liée aux actionnaires du payeur au sens de la Loi de l’impôt sur le revenu;

 

x)         l’appelante a un lien de dépendance avec le payeur.

 

[8]     L’appelante et son époux, qui était son employeur au cours de la période en cause, ont témoigné devant la Cour. Le payeur gérait une franchise Mac’s Milk. Les actionnaires du payeur sont l’époux susmentionné et le frère de celui-ci, qui détiennent respectivement 60 p. 100 et 40 p. 100 des actions. L’appelante est mariée à l’actionnaire majoritaire et est la belle-soeur de l’actionnaire minoritaire; elle est donc liée au payeur et serait réputée avoir un lien de dépendance avec celui-ci au sens de la Loi de l’impôt sur le revenu. Comme cette présomption peut parfois être inéquitable, la Loi sur l’assurance-emploi accorde au ministre le pouvoir discrétionnaire suivant au paragraphe 5(3) :

 

3) Pour l’application de l’alinéa (2)i) :

a) la question de savoir si des personnes ont entre elles un lien de dépendance est déterminée conformément à la Loi de l’impôt sur le revenu;

b) l’employeur et l’employé, lorsqu’ils sont des personnes liées au sens de cette loi, sont réputés ne pas avoir de lien de dépendance si le ministre du Revenu national est convaincu qu’il est raisonnable de conclure, compte tenu de toutes les circonstances, notamment la rétribution versée, les modalités d’emploi ainsi que la durée, la nature et l’importance du travail accompli, qu’ils auraient conclu entre eux un contrat de travail à peu près semblable s’ils n’avaient pas eu de lien de dépendance.

 

[9]     L’appelante était enceinte lorsqu’elle a été engagée par le payeur; elle avait également une fille et était incapable de se trouver un emploi ailleurs. Elle a reçu une formation d’une durée d’une semaine de son époux et n’a pas été rémunérée pendant cette période. Lorsqu’elle a commencé à travailler à temps plein, elle a été rétribuée à un taux horaire supérieur au taux habituel pour ce type d’emploi. Elle était payée au comptant pour ses heures travaillées et amenait sa fillette au magasin, où elle pouvait s’en occuper avec son époux. L’appelante n’a pas remplacé qui que ce soit lorsqu’elle a été engagée et personne ne l’a remplacée lorsqu’elle est partie à son tour pour donner naissance à des jumeaux.

 

[10]    L’avocat de l’intimé a demandé en vain à l’appelante de produire une preuve de paiement de son salaire. Lorsqu’il a été expliqué à l’appelante que la possibilité d’amener un enfant au magasin était inhabituelle, elle a précisé qu’une de ses belles-soeurs gardait également la fillette à l’occasion. Des factures relatives à ses heures de travail et des reçus correspondant à des montants versés en espèces ont été produits après le dépôt de l’appel, alors qu’ils avaient été demandés pendant l’enquête préliminaire.

 

[11]    Le ministre a exercé son pouvoir discrétionnaire en vertu du paragraphe 5(3) de la Loi et a décidé que le contrat d’emploi ne serait pas considéré comme un contrat sans lien de dépendance. Le ministre n’était pas convaincu qu’il était raisonnable de conclure, compte tenu de toutes les circonstances, notamment la rétribution versée, les modalités d’emploi ainsi que la durée, la nature et l’importance du travail accompli, que les parties auraient conclu entre elles un contrat de travail à peu près semblable si elles n’avaient pas eu de lien de dépendance. La Cour ne peut ignorer le pouvoir discrétionnaire accordé au ministre à ce sujet. Compte tenu des renseignements que l’appelante et le payeur ont fournis lors de l’enquête, il est évident que des motifs très sérieux sous‑tendent cette décision. Le fait que personne n’accomplissait les tâches de l’appelante avant qu’elle soit engagée et que personne n’a été embauché après son départ ainsi que le fait qu’elle touchait un taux horaire supérieur à celui d’autres personnes occupant un poste comparable ont exercé une influence sur cette décision, même si l’appelante et le payeur ont soutenu que cette mesure a permis à l’époux de celle-ci de vaquer à d’autres occupations au sein de l’entreprise. La possibilité d’amener l’enfant au magasin pendant les heures de travail était une condition de travail inhabituelle. Le fait que la belle-soeur de l’appelante gardait la fillette à l’occasion a été mentionné une fois l’enquête terminée et il a été présumé que l’enfant venait régulièrement au magasin. La décision est également influencée par l’absence de reçus fournis à l’égard des sommes versées au comptant à l’appelante ainsi que par la communication tardive, soit bien après la fin de l’enquête, de factures correspondant aux feuilles de temps. Le fait que l’appelante n’a pas été rémunérée pendant sa formation était également inhabituel.

 

[12]    L’appelante et son époux ont tous deux affirmé au cours de leur témoignage qu’ils n’avaient aucune expérience dans le milieu des affaires et que, lorsque l’agent des services fiscaux les a interrogés, ils n’ont pas compris ce qu’il leur demandait; pourtant, l’un comme l’autre sont en mesure de gérer et d’exploiter avec succès un dépanneur assez grand. Leur témoignage n’était pas franc et crédible dans les circonstances.

 

[13]    Il appartient à l’appelante de convaincre la Cour que le ministre a exercé son pouvoir discrétionnaire de manière inappropriée ou en se fondant sur des faits inexacts. L’appelante ne l’a pas fait.

 

[14]    L’appel est rejeté et la décision du ministre est confirmée.

 

Signé à Toronto, Ontario, ce 27e jour d’octobre 2005.

 

 

« W.E. MacLatchy »

Le juge suppléant MacLatchy

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 8e jour de février 2006.

 

 

 

 

Louise Guilpeault-Poulin, traductrice

 

 

 

 


RÉFÉRENCE:

2005CCI691

 

N° DU DOSSIER DE LA COUR :

2005-354(EI)

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Saheda Jahangiry c. M.R.N et

1371358 Ontario Limited (Mac’s Milk)

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 6 octobre 2005

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :

Le juge suppléant W.E. MacLatchy

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 27 octobre 2005

 

COMPARUTIONS :

 

Représentant de l’appelante :

Sayed S. Alam

 

Avocat de l’intimé :

Me P. Michael Appavoo

 

Représentant de l’intervenante :

 

Sayed S. Alam

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Pour l’appelante :

 

Nom :

 

Étude :

 

 

Pour l’intimé :

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

Pour l’intervenante :

 

 

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