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Dossier : 2002-4576(IT)I

ENTRE :

SUCCESSION GUSTAVE MERCURE,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

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Appel entendu le 22 juillet 2003 à Montréal (Québec)

Devant : L'honorable juge Louise Lamarre Proulx

Comparutions :

Représentant de l'appelante :

Louis Mercure

Avocat de l'intimée :

Me Mounes Ayadi

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JUGEMENT

          L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1997 est rejeté, selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 11e jour de septembre 2003.

« Louise Lamarre Proulx »

Juge Lamarre Proulx


Référence : 2003CCI655

Date : 20030911

Dossier : 2002-4576(IT)I

ENTRE :

SUCCESSION GUSTAVE MERCURE,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

La juge Lamarre Proulx

[1]      Il s'agit d'un appel par voie de la procédure informelle concernant l'année d'imposition 1997, année au cours de laquelle monsieur Gustave Mercure est décédé.

[2]      La question en litige est de savoir si la récupération de l'amortissement provenant de la disposition présumée d'un immeuble locatif selon le paragraphe 70(5) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ), peut faire l'objet d'une déclaration de revenu distincte conformément au paragraphe 70(2) de la Loi.

[3]      Les faits sur lesquels s'appuie le ministre du Revenu national (le « Ministre » ) sont décrits aux paragraphes 2 à 4 de la Réponse à l'avis d'appel (la « Réponse » ) :

2.          Par nouvelle cotisation, à l'égard de l'année d'imposition 1997, dont avis fut expédié au liquidateur monsieur André Mercure le 17 avril 2001, à propos de la succession de feu Gustave Mercure, le ministre a révisé le revenu de location provenant de la propriété sise rue Duvernay, dans la ville de Saint-Hyacinthe, à une somme de 30 316 $.

3.          Par nouvelle cotisation, à l'égard de l'année d'imposition 1997, dont avis fut expédié au liquidateur monsieur André Mercure le 17 avril 2001, à propos de la succession de feu Gustave Mercure, le ministre annula la déclaration de revenus distincte produite en vertu du paragraphe 70(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu (ci-après la « Loi » ), au sujet de la récupération touchant la propriété sise rue Duvernay, dans la ville de Saint-Hyacinthe.

4.          Pour établir ces nouvelles cotisations datées du 17 avril 2001, à l'égard de l'année d'imposition 1997, le ministre a tenu notamment pour acquis les hypothèses de faits suivantes :

a)          monsieur Gustave Mercure est décédé le 8 avril 1997;

b)          monsieur Gustave Mercure, lors de son décès, était propriétaire d'un immeuble locatif sis au 1700, rue Duvernay, dans la ville de Saint-Hyacinthe;

c)          en vertu du paragraphe 70(5) de la « Loi » , monsieur Gustave Mercure est réputé avoir disposé, immédiatement avant son décès, de son immeuble locatif;

d)          à la suite de la disposition présumée de l'immeuble locatif de la rue Duvernay, dans la ville de Saint-Hyacinthe, il en a résulté d'une récupération de la dépense pour amortissement totalisant une somme de 32 088 $;

e)          le liquidateur de la succession de monsieur Gustave Mercure a déclaré la dite somme de 32 088 $ en produisant une déclaration de revenus distincte, en vertu du paragraphe 70(2) de la « Loi » ;

f)           le ministre est d'avis, selon le libellé même du paragraphe 70(2) de la « Loi » , que toute somme dérivant de la réalisation ou de la disposition d'une immobilisation ne peut faire l'objet d'un choix en vertu dudit paragraphe de la « Loi » .

[4]      Monsieur Louis Mercure a agi pour le représentant légal du contribuable décédé. Il a admis les alinéas 4 a) à 4 e) de la Réponse.

[5]      Le représentant s'appuie sur une décision de la Cour du Québec qui a tranché en faveur de la succession et sur une opinion fiscale non signée. Il a déposé les deux documents au cours de l'audience. Le représentant a mentionné que le gain en capital a été inclus dans la déclaration principale mais que le montant de la récupération a fait l'objet d'une déclaration distincte.

[6]      De la décision fiscale, je cite quelques parties :

Le revenu provenant de la récupération de l'allocation du coût en capital est prévu par les dispositions de l'alinéa 94 et ss. LI. Au sens de ces dispositions ce revenu est réputé un revenu provenant d'une entreprise ou d'un bien et non un revenu provenant de la disposition d'un bien. La récupération est la conséquence accessoire de la disposition réelle ou réputée d'un bien amortissable. L'allocation du coût en capital n'est pas, et ne peut être assimilée, au produit de la réalisation ou aliénation d'une immobilisation.

...

La récupération n'est pas une somme de loyer à recevoir pour la période au sens de l'alinéa 428 LI car il ne s'agit nullement d'un montant payable périodiquement. Cette récupération est imposée d'une manière similaire à un loyer mais résulte simplement de l'application de la loi lorsqu'un montant négatif apparaît dans une catégorie fiscale de biens.

De plus la récupération n'est pas le produit de la disposition d'un bien mais une conséquence purement fiscale et éventuelle de la disposition de biens.

[7]      Le représentant s'est référé aux paragraphes 16 et 17 du jugement de la Cour du Québec ci-dessus mentionné :

[16]       Dans la Loi du Praticien, Loi de l'impôt sur le revenu, Rédacteur en chef David M. Sherman, en parlant de l'article 70(2) relativement aux règles relatives au calcul du revenu, page 663, Notes de David Sherman :

Les « droits et biens » d'un contribuable au moment de son décès doivent être inclus dans le calcul de son revenu, cette inclusion pouvant toutefois être faite dans une déclaration de revenu distincte afin de se prévaloir de crédits d'impôt personnels.

[17]       Me Pierre-André Côté, dans l'Interprétation des lois, mentionne à la page 432, ce qui suit :

Les lois fiscales ont traditionnellement été interprétées de manière restrictive en ce sens que, dans le doute, la tendance a été de limiter les effets de la loi et donc de favoriser le contribuable. Les tribunaux ont énoncé la règles sous deux formes principales : 1) une loi fiscale doit exprimer avec une clarté raisonnable l'intention de créer l'impôt; 2) ... le contribuable (a) droit, en cas de doute raisonnable, à l'interprétation qui lui est favorable.

Analyse et conclusion

[8]      Les parties pertinentes des paragraphes 70(1), 70(2) et 70(5) de la Loi se lisent comme suit :

70(1)     Dans le calcul du revenu d'un contribuable pour l'année d'imposition au cours de laquelle il est décédé, les règles suivantes s'appliquent :

a)          une somme représentant des intérêts, loyers, redevances, rentes, rémunérations d'une charge ou d'un emploi, ou toute autre somme payable périodiquement (autre qu'un montant à l'égard d'un intérêt dans un contrat de rente auquel l'alinéa 148(2)b) s'applique), qui n'a pas été payée avant son décès, est réputée s'être accumulée en sommes quotidiennes égales pendant la période à l'égard de laquelle la somme était payable, et la valeur de la partie de ces sommes ainsi réputées s'être accumulées jusqu'au jour du décès doit être incluse dans le calcul du revenu du contribuable pour l'année au cours de laquelle il est décédé;

b)          ...

70(2)     Lorsqu'un contribuable décédé avait, lors de son décès, des droits ou biens (à l'exclusion des immobilisations et des sommes incluses dans le calcul de son revenu en vertu du paragraphe (1)) dont le montant à la réalisation ou disposition aurait été inclus dans le calcul de son revenu, la valeur de ces droits ou biens lors du décès doit être incluse dans le calcul de son revenu pour l'année disposition de son décès, sauf si son représentant légal choisit, au plus tard le jour qui tombe un an après la date du décès du contribuable ou le 90e jour suivant la mise à la poste d'un avis de cotisation concernant l'impôt du contribuable pour l'année de son décès, si ce jour est postérieur, de produire une déclaration de revenu distincte pour l'année en vertu de la présente partie et de payer l'impôt pour l'année en vertu de la présente partie comme si, à la fois :

a)          le contribuable était une autre personne;

b)          le seul revenu de cette autre personne pour l'année correspondait à la valeur de ces droits ou biens;

c)          ...

70(5)     En cas de décès d'un contribuable au cours d'une année d'imposition, les présomptions suivantes s'appliquent :

a)          le contribuable est réputé avoir disposé, immédiatement avant son décès, de chacune de ses immobilisations et avoir reçu de leur disposition un produit égal à leur juste valeur marchande immédiatement avant son décès;

b)          ...

[9]      Le paragraphe 70(2) de la Loi prévoit que le représentant légal d'une personne décédée peut choisir de produire une déclaration de revenu distincte à l'égard de certains montants à recevoir concernant des droits ou des biens.

[10]     Ces montants sont des montants qui auraient été inclus dans le calcul du revenu du contribuable lors de la réalisation ou de la disposition de droits ou biens appartenant au contribuable décédé.

[11]     Ces droits ou biens ne comprennent pas les immobilisations. En effet, le paragraphe 70(2) de la Loi exclut clairement les immobilisations du jeu de cet alinéa.

[12]     Le représentant prétend que seul le gain ou la perte en capital sont exclus par l'usage du mot immobilisations. Il prétend aussi que la récupération n'a pas à être incluse dans le calcul selon le paragraphe 70(1) de la Loi parce qu'il ne s'agit pas d'une somme payable périodiquement. Il affirme que conformément aux bulletins d'interprétation, le doute doit être interprété dans le sens de l'application du paragraphe 70(2) de la Loi.

[13]     En effet, le paragraphe 3 du Bulletin d'interprétation IT-212R3, intitulé : « Revenu de personnes décédées - Droits ou biens » , se lit comme suit :

3.          Lorsqu'il est vraiment difficile de déterminer si le revenu gagné par un contribuable avant son décès constitue un paiement périodique ou un droit ou un bien, le cas est normalement résolu en faveur du contribuable. En conséquence, le représentant légal peut déclarer le revenu en question en vertu du paragraphe 70(1) ou du paragraphe 70(2). ...

[14]     Toutefois le paragraphe 70(2) de la Loi exclut clairement les immobilisations.

[15]     Pour inclure le montant de la récupération de l'amortissement dans l'application du paragraphe 70(2) de la Loi, il faudrait rattacher ce montant à un droit ou à un bien autre qu'une immobilisation. Même l'opinion fiscale ci-dessus mentionnée n'a réussi à le faire. Il n'y a pas de doute, à mon sens, que la récupération de l'amortissement est une conséquence de la disposition présumée de l'immeuble locatif en vertu du paragraphe 70(5) de la Loi.

[16]     Les immobilisations étant exclues du sens de droits ou biens au paragraphe 70(2) de la Loi, ce paragraphe ne peut donc pas s'appliquer.

[17]     La récupération de l'amortissement peut ne pas être une somme payable périodiquement au sens du paragraphe 70(1) de la Loi, mais elle n'en demeure pas moins une somme qui doit être incluse dans le calcul du revenu en vertu de l'article 13 de la Loi. Cet article concerne la récupération de l'amortissement et fait partie des articles concernant les éléments à inclure dans le calcul du revenu ou perte provenant d'une entreprise ou d'un bien. L'article 70 de la Loi n'empêche pas l'application des autres dispositions de la Loi s'appliquant au calcul du revenu du contribuable décédé ainsi qu'à la déclaration de ce revenu sauf dans la mesure où ledit article 70 les modifie spécifiquement.

[18]     En conclusion, la récupération de l'amortissement provient de la disposition présumée d'une immobilisation. Comme une immobilisation est exclue de l'application du paragraphe 70(2) de la Loi, le montant de la récupération ne peut faire l'objet d'une déclaration distincte.

[19]     L'appel est en conséquence rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 11e jour de septembre 2003.

« Louise Lamarre Proulx »

Juge Lamarre Proulx


RÉFÉRENCE :

2003CCI655

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2002-4576(IT)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Succession Gustave Mercure et

Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :

Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :

le 22 juillet 2003

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :

l'hon. juge Louise Lamarre Proulx

DATE DU JUGEMENT :

le 11 septembre 2003

COMPARUTIONS :

Pour l'appelante :

Louis Mercure (représentant)

Pour l'intimée :

Me Mounes Ayadi

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER:

Pour l'appelante :

Nom :

Étude :

Pour l'intimé(e) :

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

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