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Dossier : 2001-4222(GST)G

ENTRE :

CLAUDE PAQUIN,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

____________________________________________________________________

Appel entendu le 18 mai 2004 à Nicolet (Québec).

Devant : L'honorable Alban Garon, juge en chef

Comparutions :

Avocat de l'appelant :

Me Jacques Renaud

Avocat de l'intimée :

Me Robert Poupart

____________________________________________________________________

JUGEMENT

          L'appel de la cotisation émise en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d'accise relative à la taxe sur les produits et services, dont l'avis est daté du 30 août 2001 et portant le numéro 02305980, est accueilli et la cotisation est renvoyée au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation sur la base suivante :

          L'appelant a droit au crédit de taxe sur les intrants à l'égard de la caravane qu'il a acquise en 1997 et il devra être tenu compte de l'utilisation personnelle de ce bien qui est établie à 20% par rapport à l'utilisation totale.

          L'appelant a droit au crédit de taxe sur les intrants pour tenir compte du rajustement de 3 000,00 $ concernant un compte payable à l'appelant par Construction D.M. Turcotte inc.

          À tous autres égards, la cotisation du ministre est maintenue.

          L'adjudication des dépens sera réglée plus tard, comme il est expliqué dans les motifs de jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 2e jour de septembre 2004.

« Alban Garon »

Juge en chef Garon


Référence : 2004CCI597

Date : 20040902

Dossier : 2001-4222(GST)G

ENTRE :

CLAUDE PAQUIN,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge en chef Garon

[1]      Il s'agit d'un appel d'une cotisation en date du 30 août 2001 pour la période du 1er juillet 1994 au 31 décembre 1999. Cette cotisation a été émise en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d'accise relative à la taxe sur les produits et services.

[2]      Les quatre questions en jeu dans cet appel sont les suivantes :

1.        Les intérêts et pénalités relatifs à la vente réputée des immeubles locatifs situés aux 6385 et 6275, rue Marion à Trois-Rivières, ont-ils été bien calculés ?

2.        Est-ce que le ministre du Revenu national avait raison de refuser le crédit de taxe sur les intrants concernant une créance que l'appelant a considéré comme irrécouvrable?

3.        Est-ce que le ministre du Revenu national a droit de refuser le crédit de taxe sur les intrants relativement à une caravane acquise par l'appelant?

4.        Est-ce que le ministre du Revenu national avait droit de ne pas tenir compte d'un crédit de 3 000,00 $ accordé par l'appelant à la firme Construction D.M. Turcotte inc.?

[3]      L'appelant exploitait une entreprise de construction et de rénovation de maisons et était aussi propriétaire d'immeubles locatifs. Il faisait affaires sous la raison sociale Les entreprises Claude Paquin enr.

Première question - calcul des intérêts et pénalités

[4]      Au sujet de la première question, il n'a pas été contesté que l'appelant a parachevé en juillet 1994 la construction d'un premier immeuble de quatre logements situé au 6385, rue Marion à Trois-Rivières et en mai 1995 celle du deuxième immeuble de quatre logements situé au 6275, rue Marion à Trois-Rivières.

[5]      Dans le cas du premier immeuble, le 6385, rue Marion, l'appelant aurait dû mentionner la taxe relative à cet immeuble dans sa déclaration trimestrielle pour la période se terminant le 30 septembre 1994. Il l'a fait dans sa déclaration pour la période se terminant le 31 décembre 1994.

[6]      Dans le cas du deuxième immeuble, le 6275, rue Marion, l'appelant aurait dû faire état de la taxe dans sa déclaration trimestrielle pour la période se terminant le 30 juin 1995. La mention de la taxe concernant cet immeuble n'a été faite par l'appelant que deux ans plus tard, soit dans la déclaration pour la période se terminant le 30 juin 1997.

[7]      L'appelant aurait dû, en effet, calculer la taxe nette à l'égard de chacun de ces immeubles dans la déclaration pour la période qui inclut la date où la construction de chaque immeuble a été achevée, conformément au paragraphe 228(1) de la Loi sur la taxe d'accise. Selon le paragraphe 238(1), sauf dans les cas prévus à l'alinéa a) de ce paragraphe, qui ne s'appliquent pas dans le cas présent, l'inscrit doit présenter au ministre une déclaration dans un délai d'un mois suivant la fin de la période de déclaration.

[8]      Les obligations de l'appelant quant au contenu de la déclaration exigée par l'article 228 et quant à la présentation au ministre de cette déclaration dont il est question dans l'article 238 découlent de l'application du paragraphe 191(3) de la Loi sur la taxe d'accise qui établit en substance que le contribuable doit s'autocotiser lors de la vente réputée à lui-même d'un immeuble d'habitation à logements multiples.

[9]      L'appelant prétend essentiellement que l'intimée doit tenir compte des crédits de taxe sur les intrants auxquels il a droit dans le calcul des intérêts et pénalités dès le moment où la taxe sur les produits et services est devenue payable à l'égard de chacun de ces immeubles.

[10]     Le ministre en établissant la cotisation dont appel a pour sa part calculé les intérêts et les pénalités sur le montant de la taxe en question qu'à compter du moment où la remise à l'égard de chacun des immeubles de la taxe nette a été faite par l'appelant. Cette prise de position du ministre ressort clairement du témoignage de madame Lyne Lauzon et de la pièce I-1, onglet 5, intitulé « Calcul détaillé des intérêts et des pénalités TPS - Pour la période de vérification du 1994.07.01 au 1999.12.31 » .

[11]     La position du ministre peut être exprimée en termes plus concrets. Ainsi, le ministre est d'avis que les intérêts et les pénalités relatifs à la taxe sur les produits et services doivent être calculés sur le montant de cette taxe sans tenir compte du crédit de taxe sur les intrants pour la période qui précède le moment de la remise de la taxe nette par l'appelant à l'égard de chaque immeuble. Selon le ministre, le point de départ du calcul des intérêts et pénalités sur le montant de la taxe sur les produits et services de 7% se situe dans le cas de l'immeuble 6385, rue Marion, dans un délai d'un mois suivant la fin de la période de déclaration alors que le point de départ du calcul des intérêts et pénalités sur le montant de la taxe nette ne tient compte du crédit de taxe sur les intrants qu'au moment où la remise de la taxe nette a été effectuée par l'appelant à l'égard de cet immeuble. Dans le cas de l'immeuble 6275, rue Marion, les intérêts et pénalités imposés à l'appelant ne tiennent compte du crédit de taxe sur les intrants qu'à compter de la remise de taxe faite par l'appelant deux ans plus tard.

[12]     Il y a donc lieu d'examiner les dispositions pertinentes de la Loi applicables à la taxe sur les produits et services pour déterminer l'intention du législateur dans le cas où un contribuable présente en retard au ministre la déclaration qui fait état notamment de sa demande de crédit de taxe sur les intrants et fait également en retard sa remise de la taxe nette à l'égard d'une transaction donnée.

[13]     Le paragraphe 165(1) impose à l'acquéreur d'une fourniture taxable une taxe au taux de 7% sur la valeur de la contrepartie de la fourniture. Le paragraphe 221(1) impose à la personne qui effectue la fourniture taxable l'obligation de percevoir la taxe payable par l'acquéreur. Comme je l'ai déjà indiqué, le paragraphe 228(1) établit que la personne tenue de produire une déclaration doit calculer sa taxe nette pour la période de déclaration qui est visée. Le paragraphe 228(2) énonce que la personne en question est tenue de verser au Receveur général le montant positif de sa taxe nette. Ce calcul de la taxe nette doit être établi selon l'article 225.

[14]     L'article 225 établit que la taxe nette pour une période de déclaration donnée d'une personne est composée des montants devenus percevables et des montants perçus au cours d'une période donnée conformément à l'alinéa a) de l'élément A de la formule mentionnée dans le paragraphe 225(1) et certains autres montants décrits dans l'alinéa b) de cet élément A de la même formule moins les montants représentant les crédits de taxe sur les intrants que la personne a demandés dans la déclaration produite pour cette période, selon ce qui est précisé à l'alinéa a) de l'élément B de la formule mentionnée au même paragraphe et certains autres montants qui sont visés par l'alinéa b) de cette même formule.

[15]     Il est donc nécessaire d'analyser la portée de l'alinéa a) de l'élément B de la formule en question qui traite spécifiquement des crédits de taxe sur les intrants. Cet alinéa se lit ainsi :

225(1) Sous réserve des autres dispositions de la présente sous-section, la taxe nette pour une période de déclaration donnée d'une personne correspond au montant, positif ou négatif, obtenu par la formule suivante :

A - B

où :

A ...

a) ...

b) ...

B le total des montants suivants :

a) l'ensemble des montants dont chacun représente un crédit de taxe sur les intrants pour la période donnée ou une période de déclaration antérieure de la personne, que celle-ci a demandé dans la déclaration produite en application de la présente section pour la période donnée.

b) ...

[16]     L'alinéa a) de l'élément B prévoit expressément le cas où un montant représentant un crédit de taxe sur les intrants et se rapportant à une période antérieure peut être demandé dans une période donnée qui est ultérieure. La juxtaposition de la mention de la période donnée et de la période antérieure dans l'alinéa a) de l'élément B de la formule susmentionnée ne semble pas faire de doute que l'intention du législateur était de permettre à un contribuable de réclamer des crédits de taxe sur les intrants dans une déclaration postérieure à la période à l'égard de laquelle ces crédits auraient pu en premier lieu être réclamés. C'est la conclusion à laquelle est venu le juge Archambault de cette Cour dans l'affaire Metro Exteriors Ltd. v. Canada, (T.C.C.) [1995] G.S.T.C. 62. Cette disposition de l'alinéa a) de l'élément B est complétée par le paragraphe 225(4) qui établit des délais de quatre ans et de deux ans, selon les circonstances, pour réclamer des crédits de taxe sur les intrants.

[17]     De ce qui précède, il ressort que ce droit au crédit de taxe sur les intrants n'existe pas avant qu'il soit demandé. On ne prévoit pas dans la législation que ce droit rétroagit à la période où il aurait pu être réclamé validement par le contribuable dans sa déclaration pour une période antérieure. De plus, il n'est pas prévu dans la législation que dans le calcul des intérêts et pénalités sur la taxe nette qui est payable il faut prendre en compte les montants représentant les crédits sur les intrants dès le moment où ce crédit aurait pu être validement demandé. À ce sujet, je me réfère notamment à l'article 280 de la Loi sur la taxe d'accise.

[18]     Il s'ensuit donc que le ministre a à bon droit calculé les intérêts et pénalités sur le montant de la taxe au taux de 7% dès le moment où cette dernière est devenue percevable en application des articles 191, 228 et 238. De plus, dans le calcul des intérêts et pénalités sur le montant de taxe nette, le ministre ne pouvait tenir compte des montants représentant les crédits de taxe sur les intrants qu'à compter du moment où est né le droit au crédit de taxe sur les intrants. Ce moment se situe eu égard aux faits de la présente cause au moment de la présentation de la déclaration réclamant le crédit de taxe sur les intrants et de la remise de la taxe nette.

[19]     Quant à la première question, je conclus donc que la cotisation du ministre est bien fondée en ce qui a trait au calcul des intérêts et pénalités.

Deuxième question - créance irrécouvrable

[20]     J'aborde maintenant la question relative à l'existence ou non d'une créance irrécouvrable de 10 716,39 $.

[21]     Il a été établi que l'appelant a fait des travaux pour Construction D.M.B. s.e.n.c.[1] en 1994, 1995 et 1996 consistant dans la pose d'agrégats, une espèce de revêtement. Durant la même période, l'appelant s'approvisionnait en matériaux de la firme Centre de briques de la Mauricie inc., firme possédée au moins en partie[2], par l'épouse de monsieur Milette, madame Dorice Bouchard Milette. La pratique avait été adoptée par les parties concernées d'effectuer des compensations des comptes à recevoir de la firme de l'appelant avec les comptes à payer par l'appelant au Centre de briques de la Mauricie inc.

[22]     Selon la pièce A-11, il appert que Construction D.M.B. s.e.n.c. devait à l'appelant 14 716,39 $ le 28 février 1995 et que pour sa part, l'appelant ne devait rien à ce moment-là au Centre de briques de la Mauricie inc. L'appelant témoigne qu'il a reçu postérieurement au 28 février 1995 de Construction D.M.B. s.e.n.c. le montant de 4 000 $, à un moment qui n'a pas été précisé. La créance de l'appelant était alors réduite à 10 716,39 $.

[23]     L'appelant soutient que cette créance est irrécouvrable parce que monsieur Denis Milette a fait faillite. Cette affirmation est appuyée par un document (pièce A-8) en date du 15 octobre 1998, émanant du syndic de faillite qui montre que monsieur Denis Milette avait fait affaires sous la raison sociale de « Construction D.M.B. s.e.n.c. » et qu'il était alors en faillite.

[24]     L'appelant affirme qu'il n'a fait aucune démarche pour recouvrer sa créance parce que monsieur Milette n'avait aucun bien. Pour lui c'était inutile. Toutefois, lors de l'interrogatoire préalable, l'appelant a reconnu que madame Dorice Bouchard Milette était durant une certaine période une associée de la firme Construction D.M.B. s.e.n.c. Selon la documentation produite sous la cote I-6, madame Dorice Bouchard Milette était à l'origine, en 1994, l'un des deux associés de la société de personnes Construction D.M.B. s.e.n.c. Elle était également associée de cette dernière firme en 1995 et 1996 selon les déclarations annuelles pour ces années datées respectivement du 18 avril 1995 et du 13 septembre 1996[3]. Toutefois, un « Formulaire De Correction » en date du 19 août 1996 fait voir qu'elle aurait cessé d'être associée de cette firme. La créance de l'appelant remonte toutefois au 28 février 1995, selon la pièce A-11, dont il a été question au paragraphe 22 de ces motifs.

[25]     L'appelant n'a pas non plus tenté de recouvrer le montant en question de madame Dorice Bouchard Milette. Il ne savait pas si madame Dorice Bouchard Milette était solvable à l'époque pertinente. Il a aussi expliqué qu'il n'avait pas contracté avec madame Dorice Bouchard Milette et qu'il ne croyait pas qu'il pouvait tenter de recouvrer ce montant de cette dernière.

[26]     De l'ensemble de la preuve, il n'a pas été établi que l'appelant a pris des mesures raisonnables pour tenter de recouvrer cette créance s'élevant à 10 716,39 $. Pour la firme de l'appelant, cette créance était d'un montant substantiel. Il n'a pris aucune disposition à l'époque contre monsieur Milette. Il n'a pas non plus fait aucune démarche en vue de recouvrer cette créance contre madame Dorice Bouchard Milette. Sa simple affirmation que la créance en question était irrécouvrable ne suffit pas eu égard aux dispositions de l'article 231 de la Loi sur la taxe d'accise. De fait, l'appelant n'a fait strictement rien pour récupérer la somme qui lui était due.

[27]     À l'appui de cette conclusion qu'il n'a pas été établi que la créance de l'appelant était irrécouvrable, j'aimerais me référer à l'affaire Davies c. Canada, [1998] A.C.I. no. 432 (Q.L.), para. 18, où le juge Hamlyn de cette Cour a refusé d'accorder un crédit de taxe sur les intrants à l'égard d'une créance irrécouvrable, notamment parce que l'appelant n'avait pas pris les mesures appropriées pour recouvrer le montant de cette créance. Par mesures appropriées, la Cour entend des mesures de réparation en justice, et non pas de simples lettres ou appels électroniques. La Cour s'est exprimée ainsi :

18         En particulier, l'appelant n'a guère pris de mesures pour essayer de recouvrer le montant des créances. Il a fait quelques appels téléphoniques et a écrit des lettres; en même temps, il exploitait sa franchise et a inscrit dans les livres de son entreprise les sommes (redevances) qu'il devait au franchiseur, et ce, au fur et à mesure. Il n'a pas tenté d'obtenir réparation en justice et n'a pas tenté non plus d'obtenir un règlement établissant une compensation entre les sommes que lui devait le franchiseur et les sommes que lui-même devait au franchiseur. Je trouve que la preuve est faible, que l'appelant n'a pas pris de mesures raisonnables pour déterminer si les créances étaient impossibles à recouvrer et qu'il ne s'est donc pas acquitté de la charge qui lui incombait de prouver que les créances étaient irrécouvrables.

[28]     Dans l'affaire Ciriello c. Canada, [2000] A.C.I. no. 829 (Q.L.), para. 3, le juge Rip de cette Cour n'a pas accordé de crédit de taxe sur les intrants pour créances irrécouvrables. Le juge Rip explique que le fardeau de la preuve repose sur l'appelant, qui doit convaincre la Cour de la nature irrécouvrable de la créance. Il s'explique ainsi :

3           M. Ciriello soutient également que le ministre n'a pas accordé de crédit à R & V pour les créances irrécouvrables. Aucune preuve n'a été présentée par l'appelant à l'égard des créances irrécouvrables. Pour que R & V reçoive un remboursement ou se voie accorder un redressement de la taxe, le paragraphe 231(1) de la Loi exige non seulement que le contribuable ait effectué une fourniture taxable dans le cadre d'une activité commerciale et pour une contrepartie, mais également qu'il ait produit une déclaration justifiant la taxe et par laquelle il la verse aux termes de la section II relativement à cette fourniture. Enfin, la contrepartie et la taxe doivent être devenues une créance irrécouvrable. Aucun élément de preuve n'a satisfait aux conditions de la loi en vue de justifier un redressement de la taxe.

[29]     J'en viens donc à la conclusion que l'appelant n'a pas démontré que la créance de 10 716,39 $ était une créance irrécouvrable.

Troisième question - crédit de taxe sur les intrants concernant la caravane

[30]     J'en arrive à la troisième question qui a trait au crédit de taxe sur les intrants concernant une caravane acquise par l'appelant en 1997.

[31]     La preuve établit que l'appelant avait acquis en juillet 1994 une première caravane de 34 pieds, modèle de l'année 1992 au prix de 23 360,70 $ et l'utilisait de temps à autre sur les chantiers de construction. Cette caravane a été échangée contre une caravane de 39 pieds, le 18 mars 1997. Dans le cadre de cet échange, la valeur de la deuxième caravane a été établie à 56 101,57 $, alors que la valeur de la première caravane était fixée à 21 000,00 $. C'est à l'égard de cette deuxième caravane que le ministre a refusé d'accorder à l'appelant le crédit de taxe sur les intrants d'un montant de 2 457,11 $.

[32]     Le refus de l'intimée s'appuie sur le paragraphe 170(2) de la Loi sur la taxe d'accise et, plus particulièrement, sur le fait que l'utilisation du bien, compte tenu de sa qualité, de sa nature ou de son coût est déraisonnable dans les circonstances, eu égard à la nature des activités commerciales de l'appelant.

[33]     La preuve établit les faits suivants :

a) l'appelant avait un chiffre d'affaires pour l'exercice financier terminé le 31 décembre 1995 de 119 137,00 $, selon la pièce A-2;

b) il n'est pas contesté que cette caravane avait des planchers de bois franc, un climatiseur, une laveuse, une sécheuse, un téléviseur, un vidéo, un micro-ondes et une chambre à coucher;

c) l'appelant se servait de la caravane durant la belle saison, pendant quatre ou cinq mois par année, pour les contrats exécutés à Trois-Rivières ou dans les environs immédiats. Cette caravane fut utilisée à l'extérieur de la région comme à La Tuque, de six à huit semaines par année durant une période de trois ans.
L'appelant l'utilisait l'hiver s'il procédait à des travaux de construction d'immeubles locatifs sauf qu'il n'y a pas de preuve qu'il en a construits après 1997. Les employés étaient logés à l'occasion dans cette caravane et ils pouvaient y prendre le repas du midi;

d) l'appelant a affirmé qu'il ne se servait de la caravane pour fins personnelles durant la période en cause que de façon limitée. Il a établi à 20% le pourcentage d'utilisation personnelle par rapport à l'utilisation totale de cette caravane, lors de son interrogatoire préalable, interrogatoire qui fut versé au dossier de la preuve dans cette affaire, à la suite du consentement des parties;

e) l'appelant a pris sa retraite en l'an 2002 et depuis ce temps il se sert de la caravane pour ses fins personnelles.

[34]     Eu égard à l'ensemble de la preuve, j'en viens à la conclusion que la caravane était utilisée principalement pour les fins de l'entreprise de l'appelant durant les années en cause. Je ne vois pas de raison pour laquelle je n'accepterais pas le témoignage de l'appelant quant au pourcentage de 20% d'utilisation personnelle de ce bien par rapport à son utilisation totale. Quant à la question de savoir s'il y a lieu à l'application du paragraphe 170(2) de la Loi sur la taxe d'accise, compte tenu de la qualité, nature et coût des activités commerciales de l'appelant et eu égard à la nature de ses activités commerciales, je suis d'avis que l'utilisation d'une caravane acquise au prix susmentionné ne dépassait pas les limites raisonnables, même si son chiffre d'affaires était plutôt modeste pour l'exercice financier se terminant le 31 décembre 1995. Il n'y a pas de preuve du chiffre d'affaires de l'entreprise de l'appelant pour les années postérieures à 1995 mais durant la période en cause. L'appelant a fourni des explications détaillées quant à l'utilisation de la caravane durant les années en litige et ces explications sont plausibles.

[35]     J'en viens donc à la conclusion que l'appelant a droit au crédit de taxe sur les intrants à l'égard de cette deuxième caravane mais eu égard aux dispositions des articles 169 et 170 de la Loi sur la taxe d'accise, il doit être tenu compte de l'utilisation personnelle de ce bien que j'établis à 20% par rapport à l'utilisation totale.

Quatrième question - crédit accordé par l'appelant à Construction D.M. Turcotte inc.

[36]     Il me reste à traiter de la quatrième question qui a trait au refus du ministre de considérer un rajustement portant sur un montant de 3 000,00 $ concernant un compte payable à l'appelant par Construction D.M. Turcotte inc., pour des agrégats posés sur des maisons bâties par cette dernière. La contrepartie exigée par l'appelant pour la fourniture de ses services et produits était de 9 534,67 $, y compris la TPS et la TVQ, comme en fait foi la facture du 21 mai 1996 adressée à Construction D.M. Turcotte inc.

[37]     Selon l'appelant, Construction D.M. Turcotte inc. a exigé de lui qu'il apporte un rajustement de 3 000,00 $ à la facture en raison notamment d'une erreur de calcul quant au nombre de pieds linéaires de façade dont il était tenu compte dans ce document. L'acceptation de cette réduction par l'appelant semble aussi avoir été dictée par des raisons d'affaires de nature promotionnelle.

[38]     L'appelant a ainsi convenu dans ces circonstances de réduire sa facture de 3 000,00 $. Cette réduction est constatée dans la pièce I-1, onglet 7 en date du 21 mai 1996. Il a été admis que les inscriptions figurant à la dernière partie de cette pièce ont été faites non pas par l'appelant mais par un représentant de la firme Construction D.M. Turcotte inc. Le tout est corroboré par le bordereau daté du même jour, soit le 21 mai 1996, faisant foi du dépôt d'un chèque d'un montant de 6 275,43 $ de Construction D.M. Turcotte inc. au compte de l'appelant à la Caisse populaire de St-Philippe des Trois-Rivières. Cette documentation me paraît satisfaire en substance aux dispositions de l'article 232 de la Loi sur la taxe d'accise.

[39]     La version de l'appelant au sujet du crédit accordé à Construction D.M. Turcotte inc. est vraisemblable, et dans les circonstances je l'accepte.

[40]     Quant à cette question, je conclus donc que l'appelant a droit au crédit de taxe sur les intrants.

[41]     Pour ces motifs, l'appel est accueilli et la cotisation est renvoyée au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation selon les indications données dans ces motifs.

[42]     La question de l'adjudication des dépens dans ce dossier sera discutée avec les avocats des parties lors d'une conférence téléphonique qui aura lieu avant la fin de septembre 2004 à un moment qui conviendra à tous les intéressés. Un préposé de la Cour communiquera avec les parties à ce sujet dans un avenir rapproché.

Signé à Ottawa, Canada, ce 2e jour de septembre 2004.

« Alban Garon »

Juge en chef Garon


No DE RÉFÉRENCE :                         2004CCI597

No DU DOSSIER DE LA COUR :       2001-4222(GST)G

INTITULÉ DE LA CAUSE :               Claude Paquin et

                                                          Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                    Nicolet (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                  18 mai 2004

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :        L'honorable juge en chef Alban Garon

DATE DU JUGEMENT :                    Le 2 septembre 2004

COMPARUTIONS :

Pour l'appelant :                        Me Jacques Renaud

Pour l'intimée :                          Me Robert Poupart

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

Pour l'appelant :

                   Nom :           Me Jacques Renaud

                   Étude :                   Renaud Brodeur

                                                Montréal (Québec)

Pour l'intimée :                          Morris Rosenberg

                                                Sous-procureur général du Canada

                                                Ottawa, Canada



[1] Dans la preuve, on fait mention de Construction Milette inc.; il s'agit de la même firme que Construction D.M.B. s.e.n.c. et je me référerai dans ces motifs à Construction D.M.B. s.e.n.c. La firme Construction Bouchard, parfois aussi désignée sous le nom Construction Daniel Bouchard inc. est aussi l'objet d'une mention. Le renvoi à cette dernière firme est sans intérêt pour les fins de la présente question.

[2] La preuve n'est pas claire à cet égard.

[3] Cette date figure en travers de la première page de la déclaration annuelle de 1996.

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