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Dossier : 2000-5089(GST)G

ENTRE :

VINCENZO POLSINELLI,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu avec l'appel d'Enzo Polsinelli (2000-5087(GST)G) les 15, 16 et 17 octobre 2003 à Toronto (Ontario)

Devant : L'honorable juge Georgette Sheridan

Comparutions :

Avocat de l'appelant :

Me Dominic Marciano

Avocat de l'intimée :

Me Arnold H. Bornstein

____________________________________________________________________

JUGEMENT

          Le présent appel interjeté à l'encontre de la cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d'accise, dont l'avis est daté du 18 novembre 1999, et porte le numéro 04163, est accueilli et la cotisation est annulée conformément aux motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 8e jour d'avril 2004.

« Georgette Sheridan »

Juge Sheridan

Traduction certifiée conforme

ce 18e jour d'août 2004.

Ingrid B. Miranda, traductrice


Dossier : 2000-5087(GST)G

ENTRE :

ENZO POLSINELLI,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu avec l'appel de Vincenzo Polsinelli (2000-5089(GST)G) les 15, 16 et 17 octobre 2003 à Toronto (Ontario)

Devant : L'honorable juge Georgette Sheridan

Comparutions :

Avocat de l'appelant :

Me Dominic Marciano

Avocat de l'intimée :

Me Arnold H. Bornstein

____________________________________________________________________

JUGEMENT

          Le présent appel interjeté à l'encontre de la cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d'accise, dont l'avis est daté du 18 novembre 1999, et porte le numéro 04162, est accueilli et la cotisation est annulée conformément aux motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 8e jour d'avril 2004.

« Georgette Sheridan »

Juge Sheridan

Traduction certifiée conforme

ce 18e jour d'août 2004.

Ingrid B. Miranda, traductrice


Référence : 2004CCI186

Date : 20040408

Dossier : 2000-5089(GST)G

ENTRE :

VINCENZO POLSINELLI,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

Dossier : 2000-5087(GST)G

ET ENTRE :

ENZO POLSINELLI

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

La juge Sheridan

[1]      M. Vincenzo Polsinelli et M. Enzo Polsinelli sont père et fils respectivement. Ils administraient ensemble une société familiale de construction connue sous le nom de Visa Construction Co. Ltd. Ils interjettent appel à l'encontre des cotisations émises par le ministre à leur encontre en qualité d'administrateurs de Visa relativement à un montant de TPS que la société aurait omis de payer dans le cadre des années 1992 à 1995. Leurs appels ont été entendus sur preuve commune. Pour des raisons de clarté nous appellerons le père Polsinelli : Vincenzo, et son fils : Enzo.

[2]      Les parties ont déposé un exposé conjoint des questions en litige qui contient quatre questions à trancher. Je crois qu'il est possible d'adjuger la présente cause en statuant sur une seule de ces questions : notamment la question de savoir si Vincenzo et Enzo, en leur qualité d'administrateurs de Visa, ont fait preuve de diligence raisonnable pour prévenir que Visa ne soit en défaut de remettre les montants perçus et les montants exigibles de TPS que Visa devait payer trimestriellement pour la période allant de l'année 1992 à l'année 1995. Ayant statué que Vincenzo et Enzo ont effectivement fait preuve de toute la diligence raisonnable nécessaire et qu'ils peuvent se prévaloir de la défense énoncée au paragraphe 323(3) de la Loi, il n'est pas nécessaire que j'examine les trois autres questions qui ont été soulevées.

FAITS

[3]      Visa était une société familiale, consacrée principalement à la construction de routes ainsi qu'à l'installation d'égouts et de canalisations principales d'eau dans des municipalités et dans des réserves indiennes de l'Ontario tout entier.

[4]      Vincenzo est arrivé au Canada en 1958 à l'âge de 21 ans. Il a travaillé dans le secteur de la construction et, bien qu'il n'ait eu que trois années d'instruction officielle, il a développé au fil des années sa propre société de construction. À mesure que sa famille grandissait, les membres de la famille s'y sont joints et l'entreprise s'est scindée en trois sociétés familiales séparées. En 1992, les enfants de Vincenzo avaient pris en charge les responsabilités régulières de leur père, cependant sa présence continuait de se faire sentir informellement au bureau de l'entreprise et dans les chantiers de construction. Comme le dit Enzo : « [traduction] Mon père était toujours dans le coin » . En 1994, Vincenzo a remplacé son fils Tony en tant qu'administrateur de Visa.

[5]      Enzo n'a pas terminé l'école secondaire. Tout comme ses frères et soeurs, il a participé aux activités des entreprises familiales depuis un très jeune âge. Il a commencé à travailler dans l'entreprise de construction en 1976. En 1980, Enzo et son frère Tony ont acheté Visa d'un ami de la famille. En qualité de contremaître chez Visa, Enzo travaillait de longues heures et restait souvent dans des endroits éloignés pendants des semaines ou des mois. En raison des exigences quotidiennes de son poste, il allait rarement au bureau de Visa. Sa présence était nécessaire dans les chantiers de construction pour diriger les équipes de travail, surveiller la livraison de l'équipement et des matériaux utilisés dans la construction et pour en autoriser le paiement, ce qu'il faisait en signant les certificats de paiement et en les télécopiant à partir du chantier de construction au bureau de l'entreprise Visa qui effectuait les paiements.

[6]      Le paiement des factures relevait du domaine de compétence des soeurs d'Enzo. En 1992, pendant la première année de la période en litige, sa soeur Linda était responsable de l'administration quotidienne et de la tenue des livres. Elle a quitté Visa par surprise au printemps 1994, mais sa famille a réagi rapidement en mettant sa soeur Maria à sa place pour prendre ses responsabilités. Maria travaillait dans le même bureau comme directrice de la commercialisation pour une des autres sociétés familiales. Elle a repris les tâches de sa soeur Linda au point où celle-ci les avait laissées et entamé la recherche d'un nouvel employé. Finalement, on a engagé une employée qui n'était pas membre de la famille et après l'avoir formée Maria reprit son ancien poste.

[7]      Les aspects plus complexes de l'administration financière de Visa étaient confiés à M. Joe Lanno, un comptable agréé au service des entreprises de la famille Polsinelli depuis plus de 20 ans. Il était responsable de la préparation des états financiers annuels de Visa, des déclarations de revenus de la société et de chaque membre de la famille Polsinelli, ainsi que des tâches financières spécialisées dont le besoin se faisait sentir.

[8]      De 1992 à 1995, les revenus de Visa ont diminué régulièrement, mais l'entreprise continuait d'être rentable. En 1996, l'Agence des douanes et du revenu du Canada a effectué une vérification de ses livres de compte. Le vérificateur a trouvé des erreurs ayant causé l'omission de Visa de remettre la taxe nette prescrite, durant la période allant du 1er octobre 1992 au 31 décembre 1995. Le 7 novembre 1996, le ministre a établi une cotisation à l'égard de Visa pour ce montant.

[9]      Environ trois années plus tard, le 18 novembre 1999, Vincenzo et Enzo ont fait l'objet de cotisations, en vertu de l'article 323 de la Loi sur la taxe d'accise, pour les montants de TPS que Visa avait omis de verser, ainsi que les intérêts et les pénalités correspondants à la cotisation établie à l'égard de la société. À ce moment, Visa avait déjà cessé ses opérations. Vincenzo et Enzo ont fait l'objet de cotisations en tant qu'administrateurs de la société : Enzo l'a été pour la période entière de vérification, du 1er octobre 1992 au 31 décembre 1995; Vincenzo ne l'été que pour la période allant du 27 octobre 1994 au 31 décembre 1995.

ANALYSE

[10]     La position du ministre est qu'Enzo et Vincenzo, en leur qualité d'administrateurs de Visa pendant la période en cause, sont responsables du montant de TPS qui n'a pas été versé, en vertu du paragraphe 323(1) de la Loi sur la taxe d'accise[1]. Le ministre fait valoir que le père et le fils n'ont pas fait preuve de diligence raisonnable pour empêcher Visa de manquer à ses obligations de remettre la TPS prescrite par loi. La Cour rejette la prétention du ministre. De nombreux éléments de preuve démontrent que Vincenzo et Enzo ont pris toutes les mesures nécessaires pour s'assurer que Visa se conformait à la Loi sur la taxe d'accise.

[11]     Tant le ministre que les Polsinelli ont fait référence à l'arrêt Soper c. Canada (C.A.F.)[2],appliqué dans l'arrêt Drover[3], pour appuyer leurs arguments respectifs pour ou contre la responsabilité des administrateurs. Le ministre a invité la Cour à se pencher sur l'interprétation et l'application des principes établis par Soper dans un arrêt plus récent de la Cour d'appel fédérale intitulé McKinnon et al c. R., (C.A.), [2001] C.F. 203. Dans cet arrêt, l'honorable juge d'appel Evans a défini six principes directeurs pour aider la Cour « parmi cette multitude de cas d'espèce » [4] à déterminer si les administrateurs ont fait preuve de diligence raisonnable pour empêcher une société de défaillir quant au versement de la TPS.

[12]     La première étape proposée par l'arrêt McKinnon consiste à déterminer si la conduite des administrateurs constitue [traduction] l' « abus et la mauvaise gestion manifestes » et d'une ampleur qui les font relever du domaine d'application de l'article 323. Dans l'arrêt McKinnon les administrateurs ont choisi consciemment de reporter le paiement de la TPS jusqu'à ce que la situation fiscale de la compagnie soit stabilisée. Rien n'indique que Vincenzo et Enzo aient décidé que Visa ne remette pas la TPS qu'elle devait. Rien ne démontre non plus que Visa subissait des problèmes financiers si graves que les administrateurs aient été tentés de détourner les fonds de la TPS à d'autres fins. Au contraire, la preuve non contestée indique que leur principe directeur en affaires était de s'assurer que [traduction] « tout [y compris la TPS] était payé » . Tout au long de la période pertinente, Visa a déclaré la taxe nette tel que prescrit; le problème gît dans les erreurs de calcul de cette taxe. Par conséquent, les actions des administrateurs Vincenzo et Enzo ne répondent pas à la définition d' « abus et de mauvaise gestion manifestes » .

[13]     Le deuxième principe prévoit que la Cour se penche sur le critère de « diligence raisonnable » énoncé dans l'arrêt Soper. Ce critère possède un élément à la fois objectif et subjectif et demande à la Cour de tenir compte des caractéristiques des administrateurs en cause, notamment de leur niveau de compétence, d'expérience et de connaissances. Les administrateurs qui participent à la gestion quotidienne de l'entreprise, connus aussi sous le nom d' « administrateurs internes » , doivent satisfaire des normes supérieures. Le ministre fait valoir que Vincenzo et Enzo étaient des administrateurs internes. Il est vrai que les deux hommes constituaient la force motrice du travail de construction accompli par la société familiale, cependant ils ne participaient pas directement aux activités administratives de l'entreprise. Ils étaient conscients qu'ils n'avaient ni le temps ni la formation nécessaires pour s'occuper des livres de comptes de Visa (Enzo a bien dit qu'il [traduction] « n'avait pas la tête pour le faire » ), alors ils déléguaient ces tâches à des personnes qualifiées. Les filles Polsinelli, Linda et Maria, possédaient des compétences en matière de tenue de livres et d'administration, compétences qui découlaient à la fois d'une instruction formelle et d'une expérience de travail. M. Joe Lanno, un comptable agréé chevronné qui était au courant des affaires des Polsinelli, s'est mis à la disposition de la famille pour s'occuper des tâches plus complexes. Par exemple, lors de l'imposition initiale de la TPS, on a engagé M. Lanno pour former le personnel aux arcanes de la législation alors nouvelle et toujours compliquée.

[14]     Vincenzo et Enzo prenaient très au sérieux leur responsabilité de veiller à ce que toutes les obligations financières de Visa soient satisfaites. Tous deux ont déposé quant à la très grande importance qu'ils attachaient au fait de pouvoir compter sur des assistants administratifs qui accomplissent bien leur travail. Ils avaient toutes les raisons de faire confiance à la capacité de Linda, de Maria et de Joe Lanno de bien faire le travail. L'avocat des Polsinelli a fait référence à l'arrêt Smith c. Canada, [2001] A.C.F. no 448 :

En évaluant objectivement l'aspect raisonnable de la conduite d'un administrateur, il y a lieu de tenir compte de facteurs comme le volume, la nature et la complexité des affaires de la société, ainsi que de ses coutumes et pratiques. Plus une entreprise est importante et complexe, plus il sera raisonnable que les administrateurs se partagent les responsabilités, ou qu'ils délèguent le règlement de certaines questions au personnel de la société et à des conseillers extérieurs auxquels ils accordent leur confiance.

[15]     Les difficultés inhérentes au calcul et à l'administration de la TPS ont été démontrées de manière très convaincante par les témoins du ministre. Ce sont tous des agents de la TPS chevronnés et dévoués à leur travail et possédant une formation considérable. De plus, ils ont à leur disposition un éventail de moyens techniques et du personnel de soutien pour les aider. Malgré toutes ces ressources, entre le moment où la société a fait l'objet d'une cotisation pour la première fois et la présente audience, les agents de la TPS ont commis des graves erreurs non seulement dans le calcul des montants que Vincenzo et Enzo devaient selon eux, mais aussi au sujet de laméthode de calcul qu'il faut utiliser. Il est clair que le ministre n'est pas responsable des erreurs de ses subordonnés. Cependant, le fait que des agents de la TPS chevronnés aient commis de telles erreurs soulève la question du caractère raisonnable d'une présomption obligeant Vincenzo et Enzo à faire des calculs parfaits. La Cour conclut qu'il serait déraisonnable de leur demander de vérifier deux fois les livres de comptes de la société pour y trouver des erreurs dont ils ne soupçonnaient même pas l'existence, spécialement si l'on tient compte du caractère limité de leur instruction; de leur manque de connaissances et d'expérience à l'égard de la procédure de la TPS, de la délégation qu'ils ont faite de ces tâches à des personnes qualifiées, et des longues heures de travail intense de construction dans des sites éloignés. Il est de l'avis de la Cour que les appelants ont reconnu les limites de leurs capacités au sujet de la procédure de la TPS, qu'ils ont donc délégué ces tâches à des administrateurs compétents et à un comptable agréé et que, par conséquent, il est tout à fait raisonnable que Vincenzo et Enzo aient fait confiance à leurs délégués et qu'ils aient cru que la TPS exigible était versée régulièrement.

[16]     Les principes no 3 et no 4 énoncés dans l'arrêt McKinnon portent sur les mesures que les administrateurs ont prises pour prévenir le défaut de la compagnie de remettre les montants exigibles lorsqu'ils ont pris connaissance, ou lorsqu'ils auraient dû prendre connaissance, de cet état de faits. Il s'agit de mesures de prévention et non pas de mesures de redressement. Vincenzo et Enzo n'ont eu conscience de la défaillance de Visa que longtemps après les faits. Dans le cas de Vincenzo, il n'en a pris connaissance qu'au moment de la vérification en 1996. Même si ceci n'est pas lié aux mesures préventives qu'il aurait pu prendre, en apprenant ces nouvelles, Vincenzo a fait preuve du degré de responsabilité dont il a toujours fait preuve dans la gestion de Visa : au moment où il a été informé que le vérificateur avait besoin de données supplémentaires au sujet de la TPS non remise, il a immédiatement donné instruction à Maria de faire appel à M. Lanno pour répondre, et cela a été fait. Quant à Enzo, il n'a été au courant du problème qu'en 2000, année où l'ADRC a retenu son remboursement au titre de l'impôt des particuliers afin de le verser au compte de la TPS que Visa n'avait pas remise.

[17]     Le ministre fait valoir qu'il ne faut pas tenir compte du moment où Vincenzo et Enzo ont pris connaissance des faits, mais du moment où ils auraient dû prendre connaissance des faits et où ils auraient dû prendre les mesures nécessaires pour prévenir la défaillance. Selon le ministre, la baisse de revenus de Visa entre 1992 et 1995 aurait dû leur mettre la puce à l'oreille. La Cour ne peut pas retenir cette prétention. Contrairement à beaucoup de sociétés dont les administrateurs ont contrevenu à l'article 323, Visa n'avait pas de problèmes financiers. Bien que les ventes aient baissé de 1992 à 1995, Visa a toujours été rentable durant cette période. Les états financiers de toutes les années en question montraient des réserves considérables de bénéfices non répartis. Chaque année, les revenus de la société dépassaient le coût des ventes, c'est-à-dire les chiffres qu'Enzo surveillait, selon son témoignage, pour avoir une idée de la situation financière de la société. Contrairement à la société impliquée dans l'affaire McKinnon, dont les administrateurs ont sciemment choisi de reporter les versements de la TPS jusqu'à ce que les problèmes fiscaux de la société soient résolus, Visa a déclaré et versé la TPS à tout moment pendant la période pertinente. Ce sont des erreurs de calcul, et non pas la baisse de revenus, qui sont la cause de la défaillance de la société. Il faut noter que la plus grande partie des erreurs ont été commises en 1994, l'année où la teneuse de livres, Linda, est soudainement partie en provoquant des changements de personnel.

[18]     Selon quel principe Vincenzo et Enzo avaient-ils l'obligation d'être au courant de l'omission de Visa de remettre la totalité des montants versés et exigibles? L'avocat des Polsinelli a cité l'avertissement du juge en chef adjoint Bowman dans l'arrêt Agatha Kit Chun Lau et al c. S.M.R.[5] :

[...] L'article 323 de la Loi sur la taxe d'accise et l'article 227.1 de la Loi de l'impôt sur le revenu n'exigent pas l'impossible. On n'y exige pas la perfection. Les administrateurs ne sont pas des assureurs pour les autorités fiscales. On demande seulement aux administrateurs d'agir « avec le degré de soin, de diligence et d'habileté pour prévenir le manquement qu'une personne raisonnablement prudente aurait exercé dans des circonstances comparables » .

[19]     Vincenzo et Enzo se sont trouvés dans la même situation que les administrateurs de Lau. Patrick Lau, un des administrateurs du restaurant appartenant à la famille, n'avait ni le temps ni la compétence nécessaires pour s'occuper lui-même des versements de TPS. Après s'être assuré que sa femme Agathe avait reçu toute la formation nécessaire de la part d'un « [traduction] conseiller de l'extérieur » , le cabinet comptable KPMG, sur la manière de déclarer et de remettre la TPS, M. Lau s'est fié à sa femme pour accomplir ces tâches à sa place. Le juge en chef adjoint Bowman a statué qu'il ne serait pas raisonnable d'exiger que Patrick soit obligé de vérifier le travail d'Agathe, « [traduction] particulièrement si on considère que ni lui ni Agathe n'avaient reçu d'indications que les choses allaient mal » . En l'espèce, on peut tirer la même conclusion.

[20]     Le quatrième principe énoncé dans l'affaire McKinnon prévoit que les administrateurs, s'ils veulent éviter d'être tenus responsables, doivent démontrer qu'ils ont fait preuve de la diligence raisonnable pour prévenir la défaillance de la société de remettre, et non pas pour la redresser. De nouveau, la Cour est convaincue que les administrateurs ont fait tout ce qui était raisonnablement nécessaire pour prévenir la défaillance de la société : ils ont mis les procédures administratives de la société entre les mains d'aide-comptables compétents et ils ont fourni toute l'expertise exigée en mettant à leur disposition les services d'un comptable agréé d'expérience et de confiance.

[21]     Les principes no 5 et no 6 de l'affaire McKinnon ne sont pas applicables en l'espèce.

[22]     Sur le fondement de l'ensemble de la preuve, la Cour statue que M. Vincenzo Polsinelli et M. Enzo Polsinelli ont agi avec le degré de soin, de diligence et d'habileté pour prévenir le manquement qu'une personne raisonnablement prudente aurait exercé dans des circonstances comparables. Les appels sont accueillis, avec dépens, et les cotisations établies en vertu de l'article 323 de la Loi sur la taxe d'accise sont annulées.

Signé à Ottawa, Canada, ce 8e jour d'avril 2004.

« Georgette Sheridan »

Juge Sheridan

Traduction certifiée conforme

ce 18e jour d'août 2004.

Ingrid B. Miranda, traductrice



[1]      Responsabilité des administrateurs - Les administrateurs de la personne morale au moment où elle était tenue de verser une taxe nette comme l'exigent les paragraphes 228(2) ou (2.3), sont, en cas de défaut par la personne morale, solidairement tenus, avec cette dernière, de payer cette taxe ainsi que les intérêts et pénalités y afférents.

[2] [1998] 1 C.F. 124 (C.A.F.).

[3] [1998] A.C.F. no 647.

[4] McKinnon [2001] 2 C.F. 203.

[5] C.C.I. nos 2000-1594(GST)G, 2000-1596(GST)G, 25 novembre 2002 (2002 DTC 2212).

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