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Dossier : 2002-1790(IT)G

ENTRE :

WILLIAM P. KARDA,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appels entendus les 23, 24 et 27 juin 2005 à Toronto (Ontario), par

l'honorable juge Campbell J. Miller

Comparutions

Avocat de l'appelant :

Me Richard G. Fitzsimmons

Avocate de l'intimée :

Me Suzanne M. Bruce

____________________________________________________________________

JUGEMENT

          Les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1996, 1997 et 1998 sont admis et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation au motif que l'appelant a le droit de déduire des frais d'intérêt et des frais financiers de 13 939 $, de 10 221$ et de 10 939 $ respectivement.

          L'intimée a droit à ses frais.


Signé à Ottawa, Canada, ce 6e jour de septembre 2005.

« Campbell J. Miller »

Juge Miller

Traduction certifiée conforme

ce 4e jour de novembre 2005.

Mario Lagacé, réviseur


Référence : 2005CCI564

Date : 20050906

Dossier : 2002-1790(IT)G

ENTRE :

WILLIAM P. KARDA,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Miller

[1]      Durant les années 1990, M. William Karda était un homme occupé. Il exerçait les fonctions de gestionnaire régional de courtage pour le compte de State Farm Insurance Company (State Farm); il essayait de s'extirper de nombreux investissements immobiliers; il siégeait au Comité des rajustements de la ville de Mississauga et au Comité sur l'utilisation du sol du comté; il était membre de plusieurs organismes bénévoles et prenait part à des activités qui, espérait-il, lui permettraient de lancer une entreprise de consultation sur l'utilisation du sol à sa retraite. Les appels interjetés pour les années 1996, 1997 et 1998 se rapportent aux frais engagés par M. Karda relativement à son travail chez State Farm, aux intérêts payés sur ses investissements immobiliers, ainsi qu'aux activités relatives à son entreprise de consultation. Plus particulièrement, les questions en litige sont les suivantes :

(i)        La nouvelle cotisation établie à l'égard de M. Karda, le 2 juin 2000, pour l'année d'imposition 1996, est-elle valide? Elle l'est.

(ii)        En ce qui concerne les fonctions exercées pour le compte de State Farm Insurance, M. Karda était-il un employé ou un entrepreneur indépendant? M. Karda était un employé pendant la période en cause.

(iii)       M. Karda a-t-il le droit de déduire des frais relatifs à un emploi de 43 106 $, de 24 292$ et de 2 460 $ en 1996, 1997 et 1998 respectivement? Non, ces frais ne sont pas déductibles en vertu de l'article 8 de la Loi de l'impôt sur le revenu.

(iv)       L'intimée peut-elle affirmer que M. Karda n'exploitait pas une entreprise en 1996, 1997 et 1998? Elle peut faire valoir un tel argument.

(v)       M. Karda exploitait-il une entreprise de consultation sur l'utilisation du sol en 1996, 1997 et 1998? Non, il n'exploitait pas d'entreprise de ce genre durant cette période. Si je fais erreur en concluant que M. Karda n'exploitait pas une entreprise, a-t-il le droit de déduire les dépenses d'entreprise excédant le revenu déclaré tiré de l'entreprise? Non.

(vi)       M. Karda a-t-il le droit de déduire les frais d'intérêt de 24 645 $, de 24 653 $ et de 21 109 $ dont il a demandé la déduction en 1996, 1997 et 1998? Non, M. Karda a le droit de déduire des frais d'intérêt et des frais financiers de 13 939 $, de 10 221 $ et de 10 939 $ en 1996, 1997 et 1998 respectivement.

Faits

[2]      Les appels en instance comportent trois éléments; j'examinerai tour à tour les faits qui se rapportent à chacun.

(i)       Frais de State Farm

          M. Karda travaille pour State Farm depuis 1968. Jusqu'en 1996, il était un entrepreneur indépendant; son rôle consistait à former et à recruter des agents pour State Farm et à en assurer le perfectionnement professionnel. Les agents étaient aussi des entrepreneurs indépendants. M. Karda ne travaillait pas lui-même comme agent d'assurances pour State Farm. Jusqu'en 1996, il payait ses propres dépenses, y compris ses frais de bureau, de secrétariat (il employait une secrétaire à temps plein), de publicité, d'automobile, etc., au point où il avait acheté un petit immeuble de bureaux dont il partageait les locaux avec un des agents de State Farm. Il était rétribué par State Farm en fonction du volume des ventes effectuées par les agents dont il assurait la supervision. M. Karda offrait des primes d'encouragement à ses agents, car, plus le volume des ventes était élevé, plus ses revenus augmentaient.

[3]      En avril 1995, State Farm a convaincu M. Karda d'accepter une nouvelle formule proposée aussi aux autres gestionnaires, soit de devenir des gestionnaires régionaux de courtage salariés au plus tard le 31 décembre 1995. State Farm fournissait les bureaux, les voitures et le personnel. La rétribution fondée sur les commissions était remplacée par un salaire, auquel pouvaient s'ajouter des primes de leadership en courtage. State Farm offrait aussi un paiement transitoire sur une période de trois ans. La lettre d'entente datée du 28 avril 1995 était accompagnée d'un document qui expliquait cette transition. Dans les faits, M. Karda recevrait 90 %, 65 % et 25 % de la différence entre sa rémunération de l'année précédente selon l'ancienne formule et le salaire auquel il avait droit en vertu de la nouvelle formule.

[4]      Une fois assujetti à la nouvelle formule de travail, M. Karda a vendu son immeuble de bureaux et emménagé dans les locaux de State Farm. Il a eu droit au remboursement de ses frais d'automobile jusqu'à ce qu'il accepte, quelque mois plus tard, d'utiliser la voiture de la compagnie. Sa secrétaire, qui continuait de travailler pour lui, était désormais une employée de State Farm. Selon M. Karda, State Farm fournissait tout. Comme des primes s'ajoutaient à sa rémunération, il a continué d'offrir des primes d'encouragement à ses agents; il prévoyait rentrer dans ses frais, a-t-il déclaré, grâce à l'augmentation projetée de la productivité. Dans les trois années en cause, M. Karda a demandé la déduction de frais relatifs à un emploi, en l'occurrence des frais comptables et juridiques, ainsi que de frais d'automobile, de repas, de représentation et de déplacement. Il a aussi demandé la déduction d'un montant de 30 000 $ versé en salaire à son épouse en 1996 et de frais de fournitures en 1998.

[5]      La seule copie d'un T2200 signé par un représentant de State Farm dans les années en cause se rapportait à l'année 1997. Le représentant de State Farm répond par la négative aux questions suivantes[1] :

6a)        Avez-vous exigé que cet employé engage d'autres frais pour lesquels il n'a reçu ni allocation ni remboursement?

7a)        Cet employé a-t-il été rémunéré, en totalité ou en partie, sous forme de commissions ou d'autres sommes semblables fixées selon le volume de ventes effectuées ou de contrats négociés?

(ii)       Entreprise de consultation sur l'utilisation du sol

[6]      M. Karda a déclaré que, durant les années 1996, 1997 et 1998, il s'employait à se constituer une clientèle dans le but de lancer une entreprise de consultation sur l'utilisation du sol dont il espérait tirer un revenu supplémentaire à la retraite - M. Karda a pris sa retraite en 2002-2003. À cette fin, il misait principalement sur deux activités. En premier lieu, il siégeait depuis 1977 au Comité des rajustements de la ville, qui se réunissait toutes les semaines, et au Comité de l'utilisation du sol du comté, qui se réunissait toutes les deux semaines. Le premier faisait l'inspection occasionnelle d'emplacements et le second s'occupait principalement de demandes de morcellement.

[7]      En second lieu, M. Karda prenait part à de nombreuses activités (Shriners, Club de PC, Scouts, etc.) qui lui permettaient d'élargir son réseau de clients possibles. M. Karda a indiqué qu'il n'avait pas de clients en 1996, 1997 et 1998, car il ne cherchait pas à tirer sa subsistance de cette entreprise à ce moment-là. Or, il a déclaré un revenu de 3 200 $ en 1996 et 1997 et de 7 200 $ en 1998 relativement à cette entreprise. Il a cependant été incapable de fournir de précisions sur la provenance de ce revenu; il s'agissait probablement, a-t-il dit, de montants que lui avaient versés des gens satisfaits des avis reçus concernant l'utilisation du sol. En 1996 et 1997, M. Karda a également déclaré à titre de revenu d'entreprise l'allocation reçue pour siéger aux deux comités (6 523$ en 1996 et 7 084 $ en 1997). Il a affirmé que le travail accompli pour le compte de ces comités était étroitement lié à son entreprise étant donné que ceux qui se présentaient devant ces comités étaient susceptibles de devenir de futurs clients.

[8]      M. Karda avait un bureau à domicile, mais il a admis qu'il y recevait peu de clients. Il a reconnu qu'il était obligé de lire des rapports pour s'acquitter de ses tâches aux comités, ce qu'il faisait à son bureau chez lui. M. Karda a demandé la déduction de dépenses d'entreprise s'établissant à 42 129 $ en 1996, à 44 655 $ en 1997 et à 23 444 $ en 1998. Il s'agissait de frais de publicité, d'honoraires, de droits d'immatriculation et de frais de gestion annuels de 12 000 $ payés à son épouse ou à la société de portefeuille de cette dernière, ainsi que de frais de repas, de représentation, d'automobile, de bureau, de fournitures, de services publics, de déplacement pour se rendre aux lieux des inspections et aux réunions et d'un loyer théorique mensuel de 300 $ pour son bureau à domicile. M. Karda n'a fourni aucun détail sur ses frais de représentation. Les cotisations et dépenses dont il se souvenait avaient été engagées relativement au Comité des rajustements. Les frais de gestion payés à son épouse se rapportaient à des services tels que répondre au téléphone, planifier les itinéraires des inspections et consigner les notes d'inspection et avaient été engagés, encore une fois, relativement aux deux comités. Les frais de repas et de représentation avaient été engagés pour divertir des relations, mais aucun nom de client éventuel n'a été mentionné.

[9]      Les pièces comptables et les reçus se trouvaient dans l'une des pièces justificatives fournies par M. Karda, mais rien ne distinguait les dépenses relatives à State Farm de celles relatives à l'entreprise de consultation. Une partie des frais de représentation se rapportait à des billets de théâtre pour M. Karda et son épouse, qu'il a justifiés par le fait que Mme Karda travaillait dans son entreprise. Les pièces comptables faisaient état de frais de repas totalisant quelque 7 000 $ en 1996; les frais de repas et de représentation dont M. Karda a demandé la déduction relativement à State Farm et à l'entreprise de consultation s'établissaient à 6 515 $ et représentaient la moitié de la déduction de 13 030 $ demandée dans les faits. M. Karda a admis que les frais d'automobile étaient surestimés, car la distance parcourue aux fins de l'entreprise avait été mal calculée.

(iii)      Frais d'intérêt

[10]     M. Karda serait le premier à admettre que ses incursions dans le domaine de l'investissement immobilier à la fin des années 1980 et dans les années 1990 n'ont guère été couronnées de succès. Aucun des neufs investissements immobiliers au sujet desquels il a témoigné à l'audience ne lui a rapporté quoi que ce soit. Je décris ci-après chacun de ces investissements ainsi que les accords financiers ayant été conclus dans chaque cas.


(i)       Bac Bay

[11]     Il s'agissait d'un projet de condominiums construits en Floride à la fin des années 1980. M. Karda y voyait l'occasion de réaliser un profit substantiel grâce à la revente rapide du bien, car la mise de fonds requise n'était que de 50 000 $ par unité alors que chaque unité était évaluée à 96 000 $. Plusieurs documents ont été fournis relativement à ce projet, à partir de 1985 :

(i)       le 3 juin 1985, convention d'achat et de vente d'une unité vendue 96 000 $ à l'appelant[2];

(ii)       le 7 avril 1986, convention d'achat et de vente d'une unité vendue 77 500 $ à l'appelant[3];

(iii)      le 13 novembre 1987, convention d'achat et de vente d'une unité vendue 65 000 $ à l'appelant[4];

(iv)      le 5 février 1987, convention d'achat et de vente d'une unité vendue 50 000 $ à l'appelant et à son épouse[5];

(v)      le 10 mai 1988, convention d'achat de six unités (dont trois des unités mentionnées ci-dessus) vendues 325 000 $ à l'appelant et à cinq autres personnes[6];

Ce que je retiens des documents et des témoignages de MM. Karda et David F. Quick (comptable de M. Karda), c'est que M. Karda a consenti une hypothèque sur sa résidence à So-Use (Toronto) Credit Union Limited (So-Use) afin d'obtenir les fonds nécessaires pour investir dans le projet de condominiums. M. Quick a fourni un tableau[7] montrant des acomptes de 324 323 $ US versés par M. Karda relativement au projet Bac Bay pour la période du 15 janvier 1987 au 11 juillet 1990. Ces données se comparent difficilement aux documents fournis, si ce n'est qu'elles confirment que M. Karda a investi beaucoup d'argent dans le projet Bac Bay pour son compte et, semble-t-il, pour celui d'autres personnes. M. Quick a confirmé que les fonds investis dans le projet Bac Bay provenaient du prêt consenti par So-Use Credit Union, mais il a été incapable de préciser quelle portion de ce prêt se rapportait à ce projet particulier.

[12]     En juillet 1992, M. Karda a renégocié le prêt hypothécaire consenti par So-Use afin de regrouper plusieurs emprunts dans une nouvelle hypothèque de 281 000 $ grevant sa résidence. Il soutient que les fonds requis pour le projet Bac Bay étaient inclus dans ce nouveau prêt. N'empêche qu'aucun document ne permet de le confirmer. Une chose est sûre, cependant, c'est que les frais d'intérêt payables sur le prêt hypothécaire en 1996, 1997 et 1998 s'établissaient à 17 843 $, à 15 952 $ et à 15 400 $ respectivement. M. Karda a également déclaré que ce projet particulier avait probablement fait faillite avant 1995 ou 1996, bien que le comptable situe plutôt cet événement aux alentours de 1990.

(ii)       Kitimat

[13]     Kitimat était un projet de condominiums industriels de luxe dont M. Karda espérait tirer le double de son investissement initial. Pour financer ce projet, il a obtenu un prêt de 100 000 $ de 452366 Ontario Inc. en 1988. En juillet 1992, une partie de ce prêt, soit un montant de 91 039 $, a été inclus dans la nouvelle hypothèque de 281 000 $ que M. Karda a consenti à So-Use sur sa résidence.

(iii)      Lincoln Park

[14]     Il s'agissait d'un investissement dans un projet de condominiums à St. Catharines réalisé par le truchement d'une société en commandite. M. Karda a obtenu un prêt de 67 800 $ de la Banque Royale en 1987 pour financer cette acquisition. Mme Karda a cosigné le billet annexé au prêt. En octobre 1996, les Karda ont réglé cette dette ainsi que le solde du montant dû relativement au projet Down en versant un montant de 67 600 $. L'engagement de ne pas faire signé par les Karda et la Banque Royale indique ce qui suit[8] :

         

          [traduction]

            En contrepartie de la somme de soixante-sept mille six cents dollars (67 600 $) et d'une autre contrepartie de valeur, dont les soussignés confirment par les présentes la réception et la suffisance, et en considération des conditions énoncées dans le procès-verbal de transaction signé par les parties, la Banque Royale du Canada pour son compte, ses successeurs et ses ayants droit s'engage à ne pas entamer ni poursuivre quelque demande d'indemnisation, action ou autre procédure, hormis les demandes d'indemnisation et causes d'action découlant du procès-verbal précité, contre William P. Karda et(ou) Claire E. Karda relativement aux deux billets à ordre de 101 700 $ et de 62 270 $ signés par eux en faveur de la Banque en date du 29 juin 1987 et du 27 mars 1991 respectivement.

[15]     M. Karda a déclaré que ce montant n'avait pas été payé intégralement en octobre 1996, mais par versements sur une période de quatre ou cinq ans. Il a été incapable de produire des relevés ou des documents bancaires pour confirmer qu'il y avait eu étalement des paiements ou, s'il y avait eu de tels paiements, quel montant, le cas échéant, se rapportait aux frais d'intérêt. Les déclarations de revenus de M. Karda n'indiquent pas séparément les frais d'intérêt payés à la Banque Royale; M. Quick n'a pas non plus été capable de pointer du doigt une demande de déduction particulière se rapportant à la Banque Royale. M. Quick a déclaré qu'il demandait chaque année à M. Karda de lui remettre la correspondance et les états financiers relatifs aux divers projets immobiliers de manière à pouvoir préparer les déclarations de revenu. Il dit avoir essayé de suivre la continuité des prêts d'une année à l'autre.

(iv)      Cedar Downs

[16]     Il s'agissait d'une tour d'unités condominiales en hauteur à Woodstock, dans laquelle M. Karda a acquis deux unités conjointement avec son épouse en décembre 1987. Les promoteurs lui ont obtenu un prêt par l'entremise de la Banque Royale. Ce prêt était inclus dans le montant du règlement mentionné plus tôt eu égard au projet Lincoln Park.

(v)      Falconer

[17]     En février 1987, M. Karda a acquis une participation dans ce condominium industriel à Mississauga. Il a indiqué qu'il avait obtenu un prêt de 20 000 $ environ, mais il ne se souvenait pas auprès de qui. Le projet a fait faillite en 1989; M. Karda a été obligé de rembourser le montant investi. Il a déclaré avoir contracté un emprunt à cette fin. Aucune pièce justificative n'a été fournie pour étayer ce prêt.

(vi)      Deanlee

[18]     Il s'agissait d'une maison située à Mississauga qui devait être regroupée avec d'autres biens en vue de leur mise en valeur future. M. Karda a investi un montant de 12 000 $, grâce à un emprunt contracté auprès de la Banque Toronto-Dominion à l'été de 1987. La seule demande de déduction de frais d'intérêt relativement à cette banque se rapportait à un montant de 1 450 $ en 1996. Aucune preuve documentaire n'a été produite pour lier le projet à ces frais d'intérêt.

(vii)     Galaxy

[19]     En mars 1990, M. Karda a contracté un emprunt de 30 000 $ auprès de la Banque Nationale pour investir dans ce projet industriel près de l'aéroport Pearson. Une lettre de la Banque Nationale en date du 26 mars 1998 adressée à M. Karda indique que le montant du principal exigible s'établit à 27 708 $ et celui des intérêts accumulés à 25 097 $. L'intimée admet que, compte tenu d'un taux d'intérêt cumulatif annuel de 15,5 %, les frais d'intérêt payés en 1996, 1997 et 1998 s'établissaient à 4 294 $, 4 960 $ et 5 729 $ respectivement.

(viii)    Renfrew Drive

[20]     En juillet 1989, M. Karda a obtenu un prêt de 31 893 $ de la Banque CIBC pour acquérir une unité dans un immeuble de bureaux prestigieux selon la description qu'il en a faite. Il a indiqué qu'il avait conservé ce bien jusqu'en 2000 après avoir essayé pendant des années de s'extirper du projet, qui n'avait jamais affiché de rentrées nettes de fonds. Le dernier document étayant ce prêt est une demande de remboursement de la Banque CIBC adressée à M. Karda. En février 1994, l'Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC) a informé M. Karda qu'elle acceptait la déduction d'une partie des frais d'intérêt payés sur ce prêt pour l'année d'imposition. M. Quick a mentionné que le projet Renfrew n'avait guère été un investissement rentable pour M. Karda durant les années en cause.

(ix)      Emerald Point

[21]     En octobre 1989, M. Karda a acheté une unité « B » , qu'il a payée 169 990 $, dans ce projet de condominiums à Whitby. Il a remis un billet à ordre de 49 497 $ à Reemark Emerald Point Inc. M. Karda a admis que l'obligation qu'il avait envers Reemark s'était éteinte avant 1996.

[22]     M. Karda a fourni des copies de notes de frais juridiques totalisant 3 934,96 $, 93 $ et 303,67 $ respectivement pour les années 1996, 1997 et 1998 relativement aux projets Renfrew, Lincoln Park et Cedar Downs. M. Quick a indiqué que les déductions demandées pour les années 1996, 1997 et 1998 sous les rubriques « frais juridiques et comptables - investissement » et « frais de gestion ou droits de garde » englobaient ces frais juridiques. En 1996, 1997 et 1998, les frais dont M. Karda a demandé la déduction à ce titre s'établissaient à 3 864$, 3 399 $ et 211 $ respectivement.

Cotisation pour 1996

[23]     Le ministre du Revenu national (le ministre) a initialement établi une cotisation à l'égard de M. Karda pour l'année d'imposition 1996 au moyen d'un avis daté du 2 juin 1997. La première nouvelle cotisation a été établie le 10 novembre 1997 et M. Karda s'y est opposé au moyen d'un avis d'opposition. Le 21 septembre 1998, le ministre a établi une deuxième nouvelle cotisation, à laquelle M. Karda s'est à nouveau opposé au moyen d'un avis d'opposition. La nouvelle cotisation établie le 21 septembre 1998 a été ratifiée par le ministre le 31 mars 2000. Le 5 mai 2000, l'ADRC a informé M. Karda par écrit que ses déclarations de revenus pour les années 1996, 1997 et 1998 faisaient l'objet d'une vérification et qu'il devait fournir des reçus et pièces comptables à l'appui des dépenses d'entreprise, des frais financiers et des frais relatifs à un emploi. Dans son rapport T20 en date du 24 mai 2000, le vérificateur, M. Y. Mohammed, indique ce qui suit[9] :

          [traduction]

L'année d'imposition 1996 a fait l'objet d'un examen restreint. Le contribuable a été prié de signer une renonciation et de nous la retourner au plus tard le 19 mai 2000 car la déclaration devenait frappée de prescription le 2 juin 2000. Notre demande étant restée sans réponse, nous avons entrepris d'établir la nouvelle cotisation. Le contribuable en a été informé dans notre lettre finale en date du 25 mai 2000.

[24]     M. Quick a confirmé qu'il avait conseillé à M. Karda de ne pas signer de renonciation. Il a indiqué avoir eu un entretien téléphonique avec le vérificateur entre les mois de mars et de juin 2000. Le 2 juin 2000, la veille de l'expiration du délai de prescription de trois ans prévu pour établir la cotisation, le ministre a établi la troisième nouvelle cotisation.

Analyse

(i)       La nouvelle cotisation établie à l'égard de M. Karda, le 2 juin 2000, pour l'année d'imposition 1996, est-elle valide?

[25]     L'appelant soutient que la cotisation en date du 2 juin 2000 s'explique uniquement par le refus de M. Karda de signer une renonciation; on lui signifiait ainsi que le gouvernement entendait le priver du bénéfice du délai de prescription de trois ans. L'appelant considère qu'il ne s'agit pas d'une nouvelle cotisation étant donné que le processus ne s'achève qu'avec l'établissement de l'avis de nouvelle cotisation. Il n'y a pas de processus de nouvelle cotisation quand le ministre ne relève même pas d'erreur dans la cotisation précédente. Une nouvelle cotisation qui rejette toutes les déductions demandées par l'appelant à la seule fin de respecter le délai de prescription ne peut pas être considérée comme valide. Avec tout le respect que je dois à l'appelant, je ne partage pas son point de vue.

[26]     Le paragraphe 152(4) de la Loi de l'impôt sur le revenu (Loi) est libellé comme suit :

152(4) Le ministre peut établir une cotisation, une nouvelle cotisation ou une cotisation supplémentaire concernant l'impôt pour une année d'imposition, ainsi que les intérêts ou les pénalités, qui sont payables par un contribuable en vertu de la présente partie ou donner avis par écrit qu'aucun impôt n'est payable pour l'année à toute personne qui a produit une déclaration de revenu pour une année d'imposition. Pareille cotisation ne peut être établie après l'expiration de la période normale de nouvelle cotisation applicable au contribuable pour l'année que dans les cas suivants :

            a)          le contribuable ou la personne produisant la déclaration :

                        (i)          soit a fait une présentation erronée des faits, par négligence, inattention ou omission volontaire, ou a commis quelque fraude en produisant la déclaration ou en fournissant quelque renseignement sous le régime de la présente loi,

                        (ii)         soit a présenté au ministre une renonciation, selon le formulaire prescrit, au cours de la période normale de nouvelle cotisation applicable au contribuable pour l'année;

          

           b)           la cotisation est établie avant le jour qui suit de trois ans la fin de la période normale de nouvelle cotisation applicable au contribuable pour l'année et, selon le cas :

                        (i)          est à établir en conformité au paragraphe (6) ou le serait si le contribuable avait déduit un montant en présentant le formulaire prescrit visé à ce paragraphe au plus tard le jour qui y est mentionné,

                        (ii)         est établie par suite de l'établissement, en application du présent paragraphe ou du paragraphe (6), d'une cotisation ou d'une nouvelle cotisation concernant l'impôt payable par un autre contribuable,

                        (iii)        est établie par suite de la conclusion d'une opération entre le contribuable et une personne non résidente avec laquelle il avait un lien de dépendance,

                        (iv)        est établie par suite d'un paiement supplémentaire ou d'un remboursement d'impôt sur le revenu ou sur les bénéfices effectué au gouvernement d'un pays étranger, ou d'un état, d'une province ou autre subdivision politique d'un tel pays, ou par ce gouvernement,

                        (v)         est établie par suite d'une réduction, opérée en application du paragraphe 66(12.73), d'un montant auquel il a été censément renoncé en vertu de l'article 66,

                        (vi)        est établie en vue de l'application des paragraphes 118.1(15) ou (16).

[27]     Dans l'arrêt Provincial Paper Limited v. M.N.R.[10], le président Thorson a déclaré ce qui suit :

          [traduction]

[...] Il est donc futile d'essayer de définir ce que le ministre doit faire pour établir une cotisation régulière. Il lui appartient exclusivement de décider de quelle manière, dans une affaire donnée, l'obligation du contribuable doit être déterminée et établie. Il lui appartient de surcroît de déterminer les paramètres de la recherche des faits nécessaire, le cas échéant, lesquels paramètres différeront nécessairement d'une affaire à l'autre.

[Pouvoir du ministre]

            Il reste que la principale faiblesse de l'affirmation réside dans l'hypothèse voulant que le ministre n'a pas le droit de déterminer et d'établir l'obligation d'un contribuable en tenant pour acquis l'exactitude présumée de sa déclaration de revenus et qu'il doit faire quelque chose d'autre et que, s'il s'en s'abstient, il n'a donc pas établi de cotisation. Certes, le ministre n'est pas lié par la déclaration de revenus du contribuable, ainsi qu'il est indiqué dans l'arrêt Dezura (précité), mais rien dans la Loi ne l'empêche de la considérer comme exacte et d'établir l'obligation du contribuable en conséquence. Dans l'arrêt Davidson v. The King, (1945) Ex. C.R. 160, à la page 170, j'ai déclaré que, même si la déclaration de revenus du contribuable ne lie pas le ministre, elle peut néanmoins constituer le fondement de la cotisation établie par lui et j'ai indiqué qu'il s'agissait d'une procédure valable étant donné que le contribuable savait mieux que quiconque quel était son revenu.

[Cotisation établie régulièrement]

Le ministre peut donc décider à bon droit de considérer que la déclaration de revenus d'un contribuable indique le montant exact de son revenu imposable et ne procéder ensuite qu'à une vérification des calculs pour établir son obligation fiscale en conséquence, sans autre examen ni enquête. S'il procède ainsi, on ne peut pas dire qu'il n'a pas établi de cotisation.

Bien que ces observations aient été formulées relativement à une cotisation plutôt qu'à une nouvelle cotisation, j'estime qu'elles s'appliquent aussi à la nouvelle cotisation, c'est-à-dire que le ministre doit faire quelque chose même si ce quelque chose est minime. Me Fitzsimmons, pour le compte de l'appelant, prétend qu'au stade d'une nouvelle cotisation, le ministre doit relever une erreur, sinon le processus ne peut pas être considéré comme valide.

[28]     Qu'a fait le ministre entre les mois de mars et de juin 2000? Il a examiné le dossier, déterminé que des renseignements supplémentaires étaient requis, prié le contribuable de fournir ces renseignements et, faute de réponse, demandé une renonciation, qui lui a été refusée. Le ministre a alors établi l'avis de nouvelle cotisation. Les efforts déployés par l'ADRC débordent largement le cadre d'un examen sommaire. Annuler une nouvelle cotisation au motif que le ministre n'a pas relevé d'erreur dans une nouvelle cotisation précédente dans ces conditions, alors que le contribuable n'a pas fourni les renseignements supplémentaires demandés limiterait considérablement les pouvoirs du ministre.

[29]     Le ministre dispose d'un délai de trois ans pour établir une cotisation à l'égard d'un contribuable (la période est plus longue si les conditions prévues par l'alinéa 152(4)a) sont réunies). Dans la plupart des cas, ce délai devrait être suffisant pour établir une cotisation ou une nouvelle cotisation valide. Le contribuable devrait en outre avoir la certitude qu'une fois ce délai écoulé, à moins qu'il y ait eu présentation erronée des faits de sa part, le gouvernement ne peut réexaminer sa situation fiscale. Il se présentera bien entendu des cas qui prendront plus de temps -, ce que le contribuable et le gouvernement reconnaîtront, et le contribuable acceptera alors avec obligeance de renoncer à l'application du délai de prescription. Dans les cas où, comme en l'espèce, le contribuable refuse de signer une renonciation, deux possibilités s'offrent au gouvernement. Il peut soit établir ce que Me Fitzsimmons appelle une « nouvelle cotisation protectrice » , soit miser sur le fait qu'il est capable de prouver que le contribuable a fait une présentation erronée des faits et établir une nouvelle cotisation après l'expiration du délai de prescription. En établissant la nouvelle cotisation le 2 juin 2000, après de nombreuses tractations avec M. Karda, l'ADRC lui signifiait qu'elle croyait que la cotisation précédente était erronée; cette cotisation contient bel et bien des erreurs, mais faute d'avoir obtenu des renseignements supplémentaires de M. Karda, le ministre est incapable d'être plus précis sur les motifs du rejet des demandes de déduction. Je ne vois rien d'irrégulier dans cette façon de faire qui rendrait la nouvelle cotisation invalide. Il y a eu un examen, des discussions et, compte tenu de l'information reçue, un avis de nouvelle cotisation a été établi avant l'expiration du délai de trois ans. Il s'agit bien d'une nouvelle cotisation valide.


(ii)       En ce qui concerne State Farm, M. Karda était-il un employé ou un entrepreneur indépendant?

[30]     Dans sa plaidoirie, Me Fitzsimmons a admis que, compte tenu des éléments de preuve, M. Karda était devenu un employé en date du 1er janvier 1996. Me Fitzsimmons a été bien avisé d'admettre ce fait, car, si on applique les principes énoncés par le juge Major dans l'arrêt 671122 Ontario Ltd. c. Sagaz Industries Canada Inc.[11], la prépondérance de la preuve pointe incontestablement en direction de l'existence d'une relation employeur-employé entre State Farm et M. Karda en 1996, 1997 et 1998.

(iii)      M. Karda a-t-il le droit de demander la déduction de frais relatifs à un emploi?

[31]     En ce qui concerne la question de savoir si M. Karda a le droit de demander la déduction de frais relatifs à un emploi, les parties conviennent qu'il faut se reporter au paragraphe 8(1) de la Loi, plus particulièrement à l'alinéa 8(1)f), qui est libellé comme suit :

8(1)       Sont déductibles dans le calcul du revenu d'un contribuable tiré, pour une année d'imposition, d'une charge ou d'un emploi ceux des éléments suivants qui se rapportent entièrement à cette source de revenus, ou la partie des éléments suivants qu'il est raisonnable de considérer comme s'y rapportant :

            [...]

           f)            lorsque le contribuable a été, au cours de l'année, employé pour remplir des fonctions liées à la vente de biens ou à la négociation de contrats pour son employeur, et lorsque, à la fois :

                        (i)          il était tenu, en vertu de son contrat, d'acquitter ses propres dépenses,

                        (ii)         il était habituellement tenu d'exercer les fonctions de son emploi ailleurs qu'au lieu d'affaires de son employeur,

                        (iii)        sa rémunération consistait en tout ou en partie en commissions ou autres rétributions semblables fixées par rapport au volume des ventes effectuées ou aux contrats négociés,

                        (iv)        il ne recevait pas, relativement à l'année d'imposition, une allocation pour frais de déplacement qui, en vertu du sous-alinéa 6(1)b)(v), n'était pas incluse dans le calcul de son revenu, [...]

[32]     La première condition à remplir en vertu de cette disposition est que M. Karda soit employé pour remplir des fonctions liées à la « vente de biens ou à la négociation de contrats » pour le compte de State Farm. La pièce A jointe à la lettre d'entente avec State Farm datée du 28 avril et signée le 26 mai 1995 est la description de travail de M. Karda. On y lit ce qui suit[12] :

          [traduction]

PIÈCE A

GESTIONNAIRE RÉGIONAL DE COURTAGE

·         Superviser la formation des agents et de leur personnel.

·         Rédiger des articles et d'autres communiqués pour les publications régionales.

·         Planifier et animer des réunions dans les régions.

·         Visiter les agents et déterminer leurs besoins en formation ainsi que ceux de leur personnel.

·         Tenir des réunions hebdomadaires pour discuter des projets, des progrès et des priorités avec les membres de l'équipe.

·         Aider les experts-conseils à régler les questions et problèmes épineux dans les bureaux des agents.

·         Participer à des réunions d'information et des séances de formation pour obtenir de l'information sur les tendances en matière de gestion et de marketing.

·         Encourager les experts-conseils à tenir leurs connaissances à jour afin que le modèle de fonctionnement donne les résultats escomptés dans le bureau.

·         Effectuer des visites dans les bureaux des agents pour déterminer les besoins additionnels en matière de formation.

·         Consulter les agents au besoin.

·         Rencontrer, au besoin, le VPA et(ou) le RVP pour discuter des projets, des progrès et des objectifs.

·         Coordonner les activités de perfectionnement personnel des experts-conseils.

·         Consulter les TA et encadrer leurs activités.

·         Surveiller les progrès dans les secteurs de responsabilité attitrés pour atteindre les objectifs de la région et de la compagnie.

[33]     Il n'est fait aucune mention de la vente de biens ou de la négociation de contrats. Je considère que M. Karda était une personne-ressource pour les agents d'assurances de la région, car il ne participait pas directement à la vente de biens. En outre, bien que la « négociation de contrats » soit un concept général, je suis d'avis que cela ne décrit pas le travail que M. Karda accomplissait pour le compte de State Farm en 1996, 1997 et 1998. M. Karda ne satisfait tout simplement pas à la condition requise.

[34]     En revanche, si mon interprétation de « la vente de biens ou [...] la négociation de contrats » est trop restrictive, il s'agit alors de déterminer si M. Karda était tenu de payer ses propres dépenses en vertu de son contrat de travail avec State Farm. Au dire de Me Fitzsimmons, étant donné que M. Karda a engagé des frais en sus de ceux pris en charge par State Farm, pour verser notamment des primes d'encouragement aux agents, la conclusion logique qui s'impose est qu'il s'agissait de dépenses requises par State Farm, puisque la compagnie ne payait pas ces frais excédentaires. Ce raisonnement pour le moins tortueux ne concorde pas avec mon interprétation de la condition prévue à l'alinéa 8(1)f). À mon sens, cette disposition signifie que le contrat de travail doit stipuler que l'employé paie ses propres dépenses, non pas qu'il engage les frais de sa propre initiative. M. Karda a lui-même indiqué que les frais relatifs à un emploi avaient été engagés « à son propre péril » en sus des dépenses requises, dans le but d'accroître son revenu. Les frais d'automobile sont attribuables au fait, a-t-il dit, qu'il avait pris des initiatives débordant le cadre des exigences minimales du poste afin de toucher une prime plus élevée. De toute évidence, M. Karda n'était pas tenu d'engager les frais en cause et il le savait. Il a agi de sa propre initiative. Peut-être s'agissait-il d'une décision économique sensée, mais j'estime que, selon le sens ordinaire du sous-alinéa 8(1)f)(i), rien n'obligeait M. Karda à engager ces frais. Je rejette donc la demande de déduction des frais relatifs à un emploi engagés en vertu de l'alinéa 8(1)f).

(iv)      L'intimée peut-elle affirmer que M. Karda n'exploitait pas une entreprise de consultation sur l'utilisation du sol en 1996, 1997 et 1998?

[35]     Dans un affidavit visant à clarifier les renseignements fournis dans le cadre de l'interrogatoire préalable, un agent de l'ADRC, M. Yacoob Mohammed, a déclaré ce qui suit[13] :

          [traduction]

c)          Dans le cadre de la vérification des années d'imposition 1996, 1997 et 1998 de l'appelant, le ministre n'a pas cherché à déterminer la provenance du revenu d'entreprise déclaré, mais non étayé par un état T4. Le ministre a donc tenu pour acquis que l'appelant avait gagné un revenu brut d'entreprise de 3 200 $, de 3 200 $ et de 7 200 $ dans les années d'imposition 1996, 1997 et 1998 respectivement.

d)          Le ministre a également tenu pour acquis que l'appelant n'avait pas engagé de dépenses d'entreprise en sus du supposé revenu brut d'entreprise déclaré dans les années d'imposition 1996, 1997 et 1998. Quoi qu'il en soit, l'appelant n'a fourni aucune pièce justificative à l'appui des dépenses d'entreprise dont il a demandé la déduction dans les années d'imposition 1996, 1997 et 1998.

e)          Le ministre a donc tenu pour acquis que l'appelant exploitait effectivement une entreprise de consultation sur l'utilisation du sol, sous la raison sociale « William Karda Consultants » . Cependant, l'effet net des hypothèses formulées aux paragraphes 1c) à 1e) est que le revenu d'entreprise imposable de l'appelant pour les années d'imposition 1996, 1997 et 1998 s'établit à ZÉRO (c'est moi qui souligne).

Dans la réponse modifiée de l'intimée à l'avis d'appel modifié, le ministre formule les hypothèses suivantes :

          [traduction]

20         En établissant la nouvelle cotisation à l'égard de l'appelant, le ministre a formulé, notamment, les hypothèses suivantes :

            [...]

           l)            à toutes les périodes pertinentes, l'appelant n'exploitait pas une entreprise de consultation sur l'utilisation du sol sous la raison sociale « William Karda Consultants » (l'entreprise);

           m)          à toutes les périodes pertinentes, l'appelant n'a ni gagné un revenu brut d'entreprise, ni engagé des dépenses d'entreprise, ni gagné(subi) un revenu (perte) net(te) d'entreprise pour les années d'imposition 1996, 1997 et 1998, dont les montants s'établissent comme suit :

1996

1997

1998

Revenu net d'entreprise

     9 723 $

70 284 $

7 200 $

Dépenses d'entreprise dont la déduction est demandée

42 129 $

44 655 $

23 444 $

Revenu (perte) net(te) d'entreprise

(32 406 $)

25 629 $

(16 244 $)

[36]     L'appelant soutient que les réponses de M. Mohammed empêchent l'intimée de prétendre qu'il n'existait pas d'entreprise de consultation sur l'utilisation du sol. Le ministre n'a effectivement d'autre choix que de défendre la thèse de l'existence d'un revenu d'entreprise; il s'agit donc de déterminer si les frais engagés se rapportaient à l'entreprise ou s'ils constituaient des frais personnels ou de subsistance. L'intimée affirme que la question de l'existence d'une entreprise doit être tranchée en tenant compte des faits et que je ne peux faire abstraction de la preuve si celle-ci appuie la thèse de l'absence d'entreprise. Je conviens qu'il m'appartient de statuer sur les faits en m'appuyant sur les éléments de preuve présentés à l'audience; je suis dès lors justifié de déterminer si M. Karda exploitait une entreprise. N'empêche que la question que je dois trancher en l'espèce n'est pas tant de savoir s'il existait une entreprise, mais plutôt de savoir si la cotisation a été établie en tenant pour acquis qu'il n'en existait pas. Si la réponse est juste, c'est-à-dire que l'intimée a tenu pour acquis qu'il n'existait pas d'entreprise, il m'est certainement loisible de déterminer si la cotisation est valide après avoir tiré une conclusion relativement à la question de savoir s'il existait une entreprise. S'il ressort des faits que le ministre a établi la cotisation en tenant pour acquis que l'appelant exploitait une entreprise, mais que les dépenses dont il a demandé la déduction constituaient des frais personnels ou de subsistance, est-il désormais trop tard pour avancer l'argument de l'absence d'entreprise? Je ne le crois pas.

[37]     Le paragraphe 152(9) de la Loi permet d'avancer un nouvel argument en tout temps, pour autant que les conditions suivantes soient remplies :

152(9) Le ministre peut avancer un nouvel argument à l'appui d'une cotisation après l'expiration de la période normale de nouvelle cotisation, sauf si, sur appel interjeté en vertu de la présente loi :

           a)           d'une part, il existe des éléments de preuve que le contribuable n'est plus en mesure de produire sans l'autorisation du tribunal;

           b)           d'autre part, il ne convient pas que le tribunal ordonne la production des éléments de preuve dans les circonstances.

Il est quelque peu inhabituel d'invoquer le paragraphe 152(9) pour avancer l'argument de l'absence d'entreprise en tant que nouvel argument lorsque l'intimée s'appuie incontestablement sur cet argument dans sa réponse. N'empêche que la réfutation de cette thèse par la représentante du ministre laisse planer un doute suffisant sur la réponse pour justifier le recours au paragraphe 152(9). Je suis convaincu qu'il n'existe aucun élément de preuve que M. Karda était incapable de produire et qui empêcherait l'application du paragraphe 152(9).

[38]     Bref, en retenant les hypothèses formulées dans la réponse, j'ai certainement la latitude voulue pour me pencher sur la question de savoir si M. Karda exploitait une entreprise. Par ailleurs, en privilégiant la thèse contraire exposée dans l'affidavit de M. Mohammed, rien ne m'empêche de statuer aussi sur cette question. Ainsi donc, d'une manière comme de l'autre, je ne suis nullement limité dans mon appréciation des éléments de preuve pour trancher la question de savoir si M. Karda exploitait une entreprise de consultation sur l'utilisation du sol dans les années 1996, 1997 et 1998.

(v)      M. Karda exploitait-il une entreprise de consultation sur l'utilisation du sol en 1996, 1997 et 1998?

[39]     L'entreprise que M. Karda prétend exploiter est une entreprise de consultation sur l'utilisation du sol. En fait, il a déclaré les montants de 3 200 $ en 1996 et 1997 et de 7 200 $ en 1998 à titre de revenu tiré d'une entreprise de consultation. Or, il a admis qu'il n'avait aucun client dans les années en cause; il a en outre été incapable de dire d'où provenait ce prétendu revenu. J'estime que M. Karda ne tirait pas de revenu d'une entreprise de consultation sur l'utilisation du sol en 1996, 1997 et 1998. Les activités qu'il a présentées comme celles de l'entreprise étaient au mieux des activités préliminaires de constitution d'une clientèle. Il s'agissait d'une « entreprise » que M. Karda avait l'intention de cultiver afin d'en tirer un revenu quand il prendrait sa retraite dans quelques années. Dans les années 1996, 1997 et 1998, il s'employait à en jeter les bases. Comment procédait-il? En participant activement à des activités communautaires, mais, surtout, en faisant partie de deux comités dont les travaux étaient liés à l'utilisation du sol.

[40]     En ce qui concerne ses nombreuses activités communautaires, M. Karda a admis que State Farm encourageait le bénévolat qu'elle jugeait bon pour les affaires. Il faut beaucoup d'imagination pour affirmer que des activités de nature communautaire devraient être considérées comme des activités professionnelles aux fins d'une entreprise de consultation qui ne devait commencer à offrir de services de consultation que dans plusieurs années seulement. Beaucoup de gens donnent bénévolement de leur temps aux Scouts, aux Shriners ou à d'autres organismes dignes d'intérêt. On peut espérer que leur première motivation est le souci de venir en aide à ces organismes. Il se peut ensuite qu'un employeur comme State Farm encourage un de ses employés à s'investir dans la collectivité afin d'élargir son réseau. Il est toutefois inacceptable de prétendre que ce bénévolat constitue l'activité commerciale d'une entreprise projetée à la retraite afin d'en justifier l'existence actuelle.

[41]     M. Karda a observé que sa participation aux comités de la ville et du comté était étroitement liée à son entreprise étant donné que les personnes qu'il y rencontrait étaient susceptibles de devenir de futurs clients. Le revenu que M. Karda tirait de sa participation aux comités ne constituait pas un revenu d'entreprise. Il s'agissait d'un revenu tiré d'une charge ou d'un emploi. Ses activités ne constituaient pas celles d'une entreprise de consultation sur l'utilisation du sol mais le travail du comité. Le seul élément qui pourrait se rapporter à une entreprise possible de consultation sur l'utilisation du sol est la constitution d'une clientèle, c'est-à-dire rencontrer des gens susceptibles de solliciter les services de M. Karda dans quelques années. Cet élément ne nécessite aucun déboursé; les frais engagés dans le cadre des travaux courants des comités ne constituaient pas des frais de constitution d'une clientèle possible.

[42]     J'estime que les activités de M. Karda n'étaient pas celles d'une entreprise en démarrage; il s'agissait d'activités spécifiquement liées à d'autres responsabilités totalement distinctes et indépendantes de celles d'une prétendue entreprise de consultation. La constitution d'une clientèle possible était tout juste une ramification de ces responsabilités; cette activité n'étaye d'aucune manière l'existence d'une entreprise.

[43]     En ce qui concerne la nature des frais eux-mêmes que M. Karda aurait engagés relativement à une entreprise, il est clair qu'ils se rapportent pour la plupart au travail accompli pour le compte des comités ainsi qu'à ses activités communautaires bénévoles plutôt qu'à une entreprise de consultation. En 1996 et 1997, M. Karda a demandé la déduction de montants de 2 791 $ et de 2 879 $ respectivement, mais il a été incapable d'indiquer à quoi ils se rapportaient si ce n'est à faire sa propre publicité. M. Karda n'a présenté aucun élément de preuve à l'appui de frais engagés relativement à une entreprise de consultation sur l'utilisation du sol. J'estime que les frais de repas, de déplacement, de gestion, etc. se rapportaient soit à son emploi chez State Farm, soit au travail accompli pour le compte des comités, ou encore qu'il s'agissait de frais personnels ou de subsistance. M. Karda n'a tout simplement pas prouvé qu'il se livrait à une activité susceptible de constituer une entreprise de consultation sur l'utilisation du sol. Puisque M. Karda n'exploitait pas d'entreprise, il ne peut avoir subi une perte ou tiré un revenu de quelque source que ce soit.

[44]     Si je fais erreur sur la question de savoir si M. Karda exploitait une entreprise de consultation sur l'utilisation du sol en 1996, 1997 et 1998 et que je suis contraint de conclure qu'il exploitait une entreprise, j'estime alors que celle-ci consistait seulement en la constitution d'une clientèle possible et que les dépenses dont M. Karda demande la déduction en sus du revenu gagné ne se rapportaient pas à cette entreprise, mais à l'emploi qu'il exerçait chez State Farm ou à ses activités comme membre des comités de la ville et du comté, lesquelles ne constituaient nullement son entreprise de consultation, ou qu'il s'agissait de dépenses personnelles ou de subsistance.

(vi)      M. Karda a-t-il le droit de déduire des frais d'intérêt?

[45]     La demande de déduction des frais d'intérêt la plus importante se rapporte au nouveau prêt consenti par So-Use Credit Union en juillet 1992 (15 480 $, 15 952 $, 14 367 $ en 1996, 1997 et 1998 respectivement). L'intimée admet qu'une partie du nouveau prêt hypothécaire de 281 000 $, soit un montant de 91 039 $, se rapportait au projet Kitimat. Cela représenterait des frais d'intérêt de 5 781 $, de 5 168 $ et de 4 999 $ respectivement en 1996, 1997 et 1998. L'intimée n'accepte que la moitié de ces montants au motif que Mme Karda possédait la moitié du bien grevé de la nouvelle hypothèque. Aucun élément de preuve n'indique que les montants investis dans Kitimat constituaient un investissement conjoint. C'était l'investissement de M. Karda, qui a offert le domicile conjugal en garantie. Mme Karda ne devient pas un investisseur dans le projet Kitimat du simple fait qu'elle possède une participation conjointe dans le bien grevé d'une hypothèque. M. Karda a le droit de déduire la totalité des frais d'intérêt de 5 781 $, de 5 168 $ et de 4 999 $ dans les années d'imposition 1996, 1997 et 1998 respectivement.

[46]     En ce qui concerne le solde du prêt hypothécaire consenti par So-Use en juillet 1992, M. Karda prétend qu'il se rapporte à d'autres investissements, mais plus particulièrement au projet Bac Bay. Même en tenant compte du fait qu'il y avait d'autres investisseurs dans ce projet, je suis convaincu qu'avant l'obtention du nouveau prêt hypothécaire en juillet 1992, M. Karda a investi dans Bac Bay un montant supérieur au solde de 189 961 $ inclus dans le nouveau prêt. N'empêche que M. Karda a été incapable de lier directement ce solde à des investissements immobiliers particuliers. La justification des investissements et des emprunts correspondants n'était certes pas l'un des points forts de M. Karda. Il a admis que les fonds investis dans Bac Bay provenaient « probablement » de So-Use, car hormis un prêt hypothécaire résidentiel minime, il avait utilisé le montant prêté par So-Use pour ses investissements immobiliers.

[47]     M. Karda a fourni un relevé informatique de So-Use Credit Union[14] pour la période de janvier 1989 à décembre 2002. Ce relevé confirme les frais d'intérêt payés en 1996, 1997 et 1998 ainsi que le nouveau prêt consenti en juillet 1992, qui semble être la consolidation du solde du prêt courant, qui s'établissait alors à 189 961 $, et de la dette de 91 039 $ relative au projet Kitimat. Malheureusement, le relevé ne fournit pas de données pour les années 1986 à 1988 pendant lesquelles la plupart des fonds ont été investis dans le projet Bac Bay. Fait intéressant à noter, le résumé[15] des prêts fourni par M. Quick fait état d'un montant de 20 000 $ US environ versé au projet Bac Bay en juillet 1990; or, aucun montant de ce genre n'est consigné dans le relevé de So-Use pour cette période. Probablement que les fonds provenaient d'une autre source.

[48]     L'appelant a établi qu'il avait engagé des frais de 15 480 $, de 15 952 $ et de 15 367 $ relativement au compte de So-Use en 1996, 1997 et 1998. Il a également établi qu'il avait investi au moins 190 000 $ dans le projet Bac Bay à la fin des années 1980. Il a déclaré que les fonds provenaient probablement du prêt consenti par So-Use, sans toutefois fournir de pièce justificative pour étayer ses propos. En fait, dans le relevé informatique de So-Use, qui se rapporte aux années 1989 à 2002, aucun montant ne peut être lié au projet Bac Bay. M. Karda a juste fourni le témoignage de son comptable selon lequel le prêt consenti par So-Use avait servi à financer le projet Bac Bay. De même, M. Quick n'a fourni rien d'autre que les détails dont il se souvenait à ce sujet. Peut-être est-ce tout ce à quoi on doit s'attendre quand les événements remontent à plus de 15 ans. N'empêche que cela ne suffit pas à me convaincre que la totalité du prêt de 189 961 $ consenti par So-Use se rapportait au projet Bac Bay en 1996, 1997 et 1998. Ce n'est pas le rôle de l'intimée de démontrer que ce montant se rapportait à quelque chose d'autre; l'appelant a la charge d'établir qu'il se rapportait aux investissements immobiliers. Les éléments de preuve présentés établissent à ma satisfaction que, selon la prépondérance des probabilités, une partie du montant de 189 961 $ se rapportait probablement aux investissements immobiliers de M. Karda. Rien ne me permet toutefois de déterminer combien exactement. La Loi exige que le contribuable tienne des livres et pièces comptables pour une raison, soit éviter le dilemme même auquel je fais face en l'espèce. Je n'ai rien sur quoi m'appuyer pour en arriver ne serait-ce qu'à la meilleure estimation possible du montant du prêt qui se rapporte aux investissements immobiliers de M. Karda. L'appelant n'a pas démontré que des frais d'intérêt étaient déductibles relativement au solde de 189 961 $ du prêt consenti par So-Use.

[49]     Comme je l'ai mentionné précédemment, l'intimée admet que les frais d'intérêt de 4 294 $, de 4 960 $ et de 5 729 $ payés en 1996, 1997 et 1998 sur le prêt consenti par la Banque Nationale relativement au projet Galaxy sont déductibles.

[50]     M. Karda a demandé la déduction de frais d'intérêt de 1 450 $ sur le prêt consenti par la Banque TD en 1996. Il a indiqué que ce prêt se rapportait peut-être au projet Deanlee, quoique son témoignage à cet égard n'ait pas été particulièrement convaincant. M. Quick n'a pas été capable de confirmer à quoi se rapportait le prêt de la Banque TD en 1996. Aucun autre élément de preuve n'a été présenté pour lier ces frais d'intérêt à un projet immobilier particulier; j'estime donc que M. Karda n'a pas démontré que ces frais étaient déductibles.

[51]     Le solde des frais d'intérêt dont M. Karda a demandé la déduction dans ses déclarations de revenus pour les années d'imposition 1996, 1997 et 1998 est simplement décrit comme des « frais d'intérêt engagés pour gagner un revenu de placement » ; les montants en cause s'établissent à 3 850 $, à 2 602 $ et à 2 880 $ respectivement. M. Karda a indiqué qu'une partie de ces frais se rapportait à des prêts consentis par la Banque Royale pour les projets Lincoln Park et Cedar Downs. Ces prêts ont été réglés en octobre 1996 pour la somme de 67 600 $ selon le texte du règlement intervenu[16]. Bien que le document indique le contraire, M. Karda a déclaré que le montant de 67 600 $ avait été payé par versements sur une période de quatre ou cinq ans, avec les intérêts. Aucuns frais d'intérêt ni aucun montant particulier n'ont été attribués au règlement de 67 600 $. Aucun document n'a été produit pour confirmer que des paiements avaient été effectués à la Banque Royale sur une période de quatre ans. Je suis incapable de conclure qu'une partie des frais de 3 850 $, de 2 602 $ et de 2 880 $ dont M. Karda demande la déduction en 1996, 1997 et 1998 respectivement se rapporte à des paiements effectués à la Banque Royale.

[52]     M. Karda a également prétendu que ces frais d'intérêt se rapportaient en partie à un prêt consenti par la Banque CIBC relativement au projet Renfrew. Les éléments de preuve indiquent que la Banque CIBC a effectivement consenti un prêt de 31 893 $ en 1989 et qu'en date de novembre 1991, le solde impayé s'établissait à 28 009 $. Rien n'indique que des paiements ont été effectués et, en fait, qu'il y a eu des négociations avec la Banque CIBC par la suite. M. Karda n'a pas démontré qu'une partie des frais d'intérêt de 3 850 $, de 2 602 $ et de 2 880 $ dont il demande la déduction se rapporte au prêt de la Banque CIBC.

[53]     Les seuls autres projets auxquels des frais d'intérêt peuvent être attribués sont les projets Falconer Court, Deanlee et Emerald Point. M. Karda a admis que son obligation envers le projet Emerald Point était déjà éteinte en 1996. En ce qui concerne le projet Falconer, il ne se rappelait pas qui lui avait prêté les fonds et encore moins à quel taux ou encore à quel moment les paiements avaient été effectués. De même, concernant le projet Deanlee, il a laissé entendre que les fonds avaient été avancés par la Banque TD. Or, rien ne permet de lier des frais d'intérêt à ce projet ou à la Banque TD. M. Karda a tout simplement été incapable de justifier les frais d'intérêt dont il demande la déduction, hormis les montants de 4 294$, de 4 960 $ et de 5 729 $ payés à So-Use et ceux de 5 781 $, de 5 168 $ et de 4 999 $ respectivement payés à la Banque Nationale, pour les années 1996, 1997 et 1998.

[54]     En ce qui concerne les divers frais financiers, M. Karda a fourni des notes d'honoraires de ses conseillers juridiques pour les années 1996, 1997 et 1998 témoignant du travail accompli relativement à certains projets immobiliers (3 934,96 $, 93 $ et 303 $). Compte tenu des témoignages de MM. Karda et Quick, je conclus que les frais juridiques en question se rapportaient à des demandes visant soit à empêcher un projet de sombrer, soit à extirper M. Karda d'un projet. Je suis également convaincu que M. Quick a inclus des frais juridiques dans les déclarations de revenus de M. Karda sous les rubriques « frais juridiques et comptables - investissements » ou « frais de gestion et droits de garde » . Peut-on dire que les frais juridiques de cette nature sont engagés dans le but de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien pour l'application de l'alinéa 18(1)a)? Aucune des parties n'a débattu de cette question en profondeur. J'estime qu'à la fin des années 1980 et au début des années 1990, M. Karda s'investissait à ce point dans ses projets immobiliers que ceux-ci constituaient une entreprise. Les frais juridiques engagés aux fins de démanteler cette entreprise constituent des frais déductibles légitimes; j'admets donc la déduction des montants de 3 864 $ en 1996 et de 211 $ en 1998. J'admets également la déduction du montant de 93$ en 1997 relativement aux frais juridiques étayés par une pièce justificative cette année-là.

[55]     Les frais d'intérêts et les frais financiers dont la déduction est admise sont donc les suivants :

1996

1997

1998

So-Use

5 781 $

5 168 $

4 999 $

Banque Nationale

4 294 $

4 960 $

5 729 $

Frais juridiques

3 864 $

      93 $

    211 $

Total

13 939 $

10 221 $

10 939 $

[56]     En conclusion, les appels sont admis et l'affaire est déférée au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation au motif que M. Karda a le droit de déduire des frais d'intérêt et les frais financiers de 13 939 $, de 10 221 $ et de 10 939 $ respectivement en 1996, en 1997 et en 1998. L'intimée a droit à ses frais.

Signé à Ottawa, Canada, ce 6e jour de septembre 2005.

« Campbell J. Miller »

Juge Miller

Traduction certifiée conforme

ce 4e jour de novembre 2005.

Mario Lagacé, réviseur



[1]           Pièce R-1, onglet 1.

[2]           Pièce A-2, onglet 5.

[3]           Pièce A-2, onglet 6.

[4]           Pièce A-2, onglet 9.

[5]           Pièce A-2, onglet 10.

[6]           Pièce A-2, onglet 12.

[7]           Pièce A-2, onglet 14.

[8]           Pièce A-1, onglet 26.

[9]           Pièce A-5, onglet C2.

[10]          54 DTC 1199 (C. de l'Échiquier), à la page 1201.

[11]          [2001] 2 R.C.S. 983 (C.S.C.)

[12]          Pièce R-2, onglet 2, « pièce A » .

[13]          Pièce A-5, onglet E.

[14]          Pièce A-2, onglet 20.

[15]          Pièce A-2, onglet 14.

[16]          Pièce A-2, onglet 26.

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